Interview de M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'intérieur, à LCP le 16 janvier 2025, sur une motion de censure contre le gouvernement, la réforme des retraites, les questions de sécurité, la politique de l'immigration, les Outre-mer, les polices municipales et Les Républicains.

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Média : LCP Assemblée nationale

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Bonjour François-Noël BUFFET.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation ministre auprès du ministre de l'Intérieur. On est ensemble pendant vingt minutes pour une interview en partenariat avec la presse régionale représentée par Julien LECUYER de la Voix du Nord. Bonjour Julien.

JULIEN LECUYER
Bonjour Oriane, bonjour Monsieur le Ministre.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Et François-Noël BUFFET, une nouvelle motion de censure, la première du Gouvernement BAYROU, est examinée cet après-midi à 15 h à l'Assemblée. Pensez-vous toujours être ministre ce soir ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Ouh là là, la prudence est de mise. Je crois que la particularité du moment politique, c'est que l'heure suivante, on ne sait jamais ce qu'il va se passer le jour suivant. Donc, il faut prendre ça avec sérénité. Je pense que s'il y avait un minimum de conscience politique et d'intelligence collective, le Gouvernement devrait rester, mais je n'ai aucune certitude sur ce point.

ORIANE MANCINI
Vous en doutez ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non, je n'en doute pas. Mais je crois que c'est un point quand même extrêmement important que les téléspectateurs doivent comprendre, c'est-à-dire que je trouve que par moment, l'intérêt du pays est bien considéré comme étant subalterne par rapport aux intérêts politiciens, personnels ou les ambitions pour 2027 et que c'est en train de mettre le pays dans une difficulté extraordinaire et au-delà du pays, les Français.

ORIANE MANCINI
Vous pensez à qui en disant ça ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je pense un peu à beaucoup de monde. Je suis un peu en colère, pour tout dire. À un moment où nous traversons des difficultés considérables, où nous avons besoin plutôt de serrer les rangs plutôt que de se disperser, on joue avec nos institutions et on joue avec les Français en réalité. C'est ça, la réalité.

JULIEN LECUYER
C'est ce qui se passerait, si les socialistes votaient la censure, vous pensez que c'est lié à des intérêts politiciens pour 2027 ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, ça ne trompe personne que chacun a des intérêts, des calculs pour 2027, la volonté d'exister, la volonté de se départir de le LFI éventuellement sans oser le faire parce qu'on a peur de se faire battre aux prochaines élections législatives, si toutefois, il y avait une solution. Tous ces calculs-là sont fait…

ORIANE MANCINI
Mais même les socialistes, vous n'avez pas l'impression que vous étiez dans une discussion sincère, les socialistes ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Ah si, sans doute, dans une discussion sincère, mais il faut aller au bout dans ces cas-là.

ORIANE MANCINI
Non mais eux, ils disent : « Nous, nous, on a fait un pas. Il faut que le Gouvernement fasse un pas. »

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je crois que le Premier ministre a fait un pas, a ouvert.

JULIEN LECUYER
Suffisant, selon vous ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je pense qu'en l'état, compte tenu des circonstances, oui.

JULIEN LECUYER
Donc, il ne faut pas aller au-delà ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Il a accepté quand même de rendre des arbitrages qui reviennent sur ce qui avait été décidé à l'époque par le Gouvernement de Michel BARNIER. Je pense en particulier sur le niveau de déficit où il y a une forme de tolérance qui a été acceptée pour essayer de faire passer les choses. Et il a eu raison de le faire parce que l'enjeu, c'est moins le taux exact qui va s'appliquer l'année 2025 que la trajectoire que l'on se fixe sur les prochaines années en prévision de 2029 et donc, de ce que l'on veut comme objectif en 2029. C'est ça qui est très important, c'est cette trajectoire-là. Après, on peut toujours dire : « Moi, je veux plus » et se considérer comme étant une sorte de forme d'irresponsabilité qui consiste à dire : " Je demande, je demande, puis ça passe, ça ne passe pas, ce n'est pas très grave. Après tout, j'aurais fait marquer l'opinion comme quoi j'ai eu… "

ORIANE MANCINI
Vous avez l'impression qu'ils sont dans la surenchère, les socialistes ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non, mais ce n'est pas que les socialistes. Moi, j'ai été ici, mais je vous l'ai déjà dit, sur ce plateau, en débat avec des collègues socialistes du Sénat qui m'avaient dit " Notre accord avec LFI est purement électorale, ça n durera pas ", mais ce n'est pas vrai. Ils sont sous le joug de Monsieur MELENCHON, qui fait la pluie et le beau temps à gauche. Et qui, comme tout le monde sait ici, est un homme qui ne cherche qu'une seule chose : c'est la fin de la Cinquième République, le chaos institutionnel absolu et la démission du président de la République. C'est son seul objectif. Je ne suis pas sur que ce soit l'intérêt de la France.

JULIEN LECUYER
Mais justement, est-ce qu'il ne faudrait pas, dans l'idée de les détacher de la France insoumise, il s'agirait pour le Gouvernement de s'allier avec les socialistes ? En tout cas, si ce n'est s'allier, mais en tout cas, avoir une sorte de modus vivandi.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je ne dis pas le contraire. Je fais partie de ceux qui pensent que nous avons un certain nombre de collègues socialistes, même si on ne partage pas toutes leurs options, ce sont des gens responsables, c'est un parti de Gouvernement, sont des gens sérieux avec qui on peut discuter, avec qui on peut même avoir des points de convergence. C'est à ceci qu'il faut faire appel. En disant : « Prenez la responsabilité de vous départir du joug de Monsieur MELENCHON et de LFI, pour pouvoir donner à la France une forme de stabilité que les Français attendent. Quand vous allez sur le terrain, j'ai écouté Jean-François HUSSON il y a quelques instants sur votre plateau, et il a parfaitement raison. Quand on est sur le terrain, qu'est-ce qu'on nous dit ? On nous dit : " Que tout cela cesse. On a besoin de stabilité. Trouver un accord, à la limite, quel qu'il soit - J'exagère un peu, mais presque - Trouvez un accord, stabilisant la situation, nos entreprises en ont besoin, nos compatriotes en ont besoin, tout le monde en a besoin.

JULIEN LECUYER
Est-ce qu'il n'y a pas un impératif à quand même trouver un accord, encore une fois, avec les socialistes ? Parce que s'ils votent la censure, on va se retrouver avec le Rassemblement national qui s'abstient et qui permettra peut-être au Gouvernement de ne pas chuter. Mais n'empêche qu'on sera dans la même situation exactement que le Gouvernement BARNIER avant François BAYROU.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Vous avez raison. Le risque potentiel, c'est que de deux mois en deux mois, on se trouve à reconstituer les Gouvernements, à repartir à chaque fois à zéro, en espérant, parce que j'espère que le calcul n'est pas celui-ci, de dire : " Arrivons jusqu'au mois de juillet pour espérer une éventuelle nouvelle dissolution, de nouvelles élections ou d'autres débats ". Il faut faire attention aussi à ce calcul-là.

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire juste qu'il ne faut pas dire : " La réforme des retraites reviendra au Parlement qui est accord ou non avec les partenaires sociaux ". Vous n'êtes pas prêt à aller jusque-là.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Moi, je suis prêt... Le Premier ministre a dit les choses très clairement hier. Je crois que c'était d'une netteté absolue en disant : « Le texte qui a été voté s'applique et s'appliquera. Néanmoins, j'ouvre un débat entre les partenaires sociaux qu'ils discutent entre eux ". Après tout, c'est leur rôle, qu'ils discutent entre eux, qu'ils essayent de trouver un accord. Si accord il y a et qu'il convient à tout le monde, y compris d'ailleurs à l'État, à ce moment-là, on évoluera. S'il n'y a pas d'accord, dans ces conditions-là, on restera sur le texte actuel. Je pense que c'est une position raisonnable. C'est à la fois une position – j'allais dire – de responsabilité et à la fois une position d'ouverture qui permet de ne pas rester totalement figé.

JULIEN LECUYER
Mais vous entendez les socialistes qui disent que si pas d'accord, on revient au texte de la réforme de 2023, c'est une forme de droit de veto pour le patronat.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Mais plutôt que de faire de la prospective – j'allais dire – pas tout à fait utile, il ferait mieux de soutenir le débat qui aura lieu entre les partenaires sociaux, qu'ils se mettent dans cette démarche. Il sera toujours temps de voir ce qu'il en est. Je veux dire, on n'est pas dans une situation où on est capable de pouvoir dire dans trois mois, dans quatre mois, dans cinq mois, dans six mois, dans un an, ce sera comme ça. Ce n'est pas vrai.

ORIANE MANCINI
Est-ce que les Républicains soutiendront l'accord conclu entre les partenaires sociaux, quoi qu'il contienne ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, j'imagine que s'il y a un accord entre les partenaires sociaux, c'est quand même assez fondamental. Donc, je ne vois pas contester un accord qui interviendrait entre l'ensemble des parties prenantes qui auraient discuté entre eux. Bien sûr qu'il y a des conditions financières à observer, mais l'État est présent dans cette discussion.

ORIANE MANCINI
Mais même si ça revient sur les 64 ans que vous avez défendus ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je préfère un accord qui soit partagé, qui ramène de la stabilité et qui s'inscrive dans une logique constructive, plutôt qu'un débat qui se fige et qui crée de l'instabilité où on est en difficulté. Pourtant, le texte qui a été voté, je le rappelle, c'est quand même celui qu'on avait voté au Sénat à plusieurs reprises, et en responsabilité, pour le coup.

JULIEN LECUYER
Monsieur BUFFET, vous n'avez pas quand même l'impression, que sur ce dossier des retraites, qu'on a quand même perdu deux ans, cette conférence conclave entre les partenaires sociaux ? Est-ce que ce n'est pas ce qui aurait dû avoir lieu déjà en 2023 ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Vous savez, les plus belles plaidoiries sont celles qui se font après l'audience.

JULIEN LECUYER
La réunion des partenaires sociaux, ça avait déjà été réclamée à l'époque.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je pense que, il y a eu le travail de Monsieur DELEVOYE, si on veut encore remonter plus loin.

JULIEN LECUYER
Qui n'a pas été retenu.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Qui n'a pas été retenu. Moi, je suis plutôt partisan de donner du temps à la préparation d'un dossier, si possible la concertation la plus large et l'accord le plus large, avant de décider quelque chose. Bon, c'est plutôt mon caractère. Alors après, on peut regretter, mais il est peut-être temps de rattraper ce temps-là, si vous voulez, ou de le retrouver. Le texte qui a été voté est un bon texte, c'est le plan de l'équilibre économique et de l'utilité pour le pays. Il ne faut pas revenir sur ce principe-là. On a une question fondamentale que tout le monde doit bien appréhender, qui est le fait que nos actifs ne financent plus nos retraités. Ça, ce n'est plus possible. Ça marche dans notre système à part répartition, qui est un système précieux, qui est un système vraiment précieux, qu'il faut savoir conserver.

JULIEN LECUYER
Donc pas de capitalisation pour vous ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Comment ?

JULIEN LECUYER
Pas de capitalisation ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
En tous les cas, pas en totalité. S'il devait y avoir une évolution sur une petite partie de la capitalisation, pourquoi pas ? Je ne suis pas prêt à cela. Mais la répartition, c'est quand même quelque chose d'assez juste, c'est une solidarité nationale forte. Ça fait Nation. Alors on a besoin de faire Nation en ce moment. Plus que jamais, d'ailleurs.

ORIANE MANCINI
Un mot sur un autre sujet qui a été évoqué dans le discours de politique générale, c'est la proportionnelle. On sait que François BAYROU est un défenseur de la proportionnelle. Ça ne plaît pas du tout à Laurent WAUQUIEZ. Est-ce qu'il faut la mettre en oeuvre ou pas, cette proportionnelle ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Vous savez que c'est un débat qui est ancien. Moi, je suis partisan, à titre personnel, d'un système qui donne des majorités claires. Vous allez me dire que ce n'est pas l'exemple actuel de l'Assemblée nationale, mais je ne trouve rien de meilleur que la responsabilité de l'élu devant ses électeurs. Un élu parfaitement identifié, responsable de ce qu'il fait ou de ce qu'il dit et les électeurs tranchent. Je trouve que c'est le système le plus démocratique.

ORIANE MANCINI
Pour vous, on ne pas mettre le dossier sur la table ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Si le dossier est mis sur la table, je rappelle que le Sénat a pris des positions par l'intermédiaire du président LARCHER, il y a déjà plusieurs mois, pour fixer une petite partie de proportionnelle, tout en garantissant le fait qu'à un moment, le fait majoritaire puisse être acté, parce qu'on a besoin d'avoir un fait majoritaire, quel qu'il soit à la limite, mais on a besoin de ce fait majoritaire.

JULIEN LECUYER
On a parlé beaucoup aussi des finances. Amélie de MONTCHALIN, chargée du Budget, a évoqué des économies portées à 32 milliards, je pense. Est-ce que votre portefeuille, je rappelle qu'il comprend la police municipale, les sapeurs-pompiers, la sécurité privée, la prévention de la délinquance, l'intégration et l'asile, je crois que j'ai fait le tour, vous me direz si je me trompe.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Il en manque un peu.

ORIANE MANCINI
Il y en a beaucoup trop.

JULIEN LECUYER
Il y en a un peu plus, mais quand même. Est-ce que votre portefeuille va être impacté par ces économies ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, les premières observations que l'on a faites, indépendamment de la LOPMI qui est préservée, puisque c'était quelque chose auquel…

ORIANE MANCINI
C'était la loi d'orientation du ministère de l'Intérieur.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
La loi d'orientation, oui, donc là, ça fonctionne. Il y a eu un effort important sur la fin du budget 2024. On devrait, en réalité, être un peu impacté, mais pas suffisamment pour remettre en cause les actions que doit mener le ministère de l'Intérieur. Donc, on est quand même dans un domaine extrêmement régalien par nature.

ORIANE MANCINI
Mais ça devrait impacter quel point du coup ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Mais pour l'instant, la répartition. Vous savez que le principe qui a été fixé par le Premier ministre, c'est une baisse annoncée de façon générale et chacun se débrouille dans son propre budget pour la répartir. Donc on n'a pas encore entamé…

ORIANE MANCINI
Est-ce que ça veut dire moins de forces de l'ordre ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non, je crois qu'à l'inverse, le maintien des forces de l'ordre, leur nombre, leur efficacité sur le terrain, leur présence, les moyens qui leur sont donnés, ne sont pas remis en cause.

JULIEN LECUYER
Et donc, les économies à contrario pourraient se porter sur l'intégration et l'asile ? On sait qu'il y a un gros dossier qui reste, c'est l'Aide médicale d'État…

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Qui n'est pas chez nous.

JULIEN LECUYER
Qui n'est pas chez vous, je sais bien, mais malgré tout, ça concerne l'intégration et l'asile d'une certaine manière et il y a toujours ce débat qui est en cours. Est-ce que ça pourrait porter là-dessus ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
L'Aide médicale d'État, ça concerne l'immigration illégale. Ça, c'est un premier principe. La deuxième chose, c'est que nous avons voté, au Sénat a été voté l'évolution de l'Aide médicale d'État en aide médicale d'urgence. Qu'est-ce que cela veut dire ? Ça veut dire que le panier de soins est moins important, qu'on se concentre uniquement sur les soins les plus fondamentaux. Évidemment qu'on ne laisse pas mourir les gens, c'est une évidence. Donc, les choses sont très claires là-dessus et que ça occasionne effectivement une économie substantielle. Moi, je pense que c'est au-delà des aspects polémiques. Il y a un moment où le principe de soigner, évidemment, n'est pas discutable, il faut le faire, mais qu'on peut aussi le faire sur des pathologies vitales extrêmement importantes et qu'à partir du moment où le soin existe dans le pays d'origine, il n'y a aucune raison pour que la personne en situation illégale ne puisse pas se faire soigner dans son pays d'origine. La règle, c'est celle-ci en réalité. Il faut l'appliquer.

ORIANE MANCINI
Donc, il faut revoir le panier de soin ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Oui, oui, je suis partisan de revoir le panier de soins, tout en réaffirmant le principe qu'on soigne les gens qui sont dans une situation de santé majeure, quoi. Ça, c'est évident.

JULIEN LECUYER
Autre sujet qui a été évoqué sur votre portefeuille, c'est la réactivation du comité interministériel de contrôle de l'immigration, qui était en sommeil depuis plusieurs années. Certains se demandent quand même si on ne ressuscite pas là à un énième comité Théodule au moment même où on demande à l'État de faire des économies justement sur ces nombreux comités.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je crois que ce qui est important en matière d'immigration et singulièrement en matière d'immigration irrégulière, mais pas seulement, c'est le fait qu'on a une vision interministérielle. Le ministère de l'Intérieur mène le combat contre l'immigration illégale à juste raison et avec beaucoup de fermeté et je crois que ça, ça ne peut pas être mis en cause. En revanche, nous avons besoin, en particulier dans l'exécution des OQTF, puisque ça reste une problématique, de l'aide absolue du ministère des Affaires étrangères, parce qu'il faut aller négocier avec les pays sources l'obtention de visa consul... De laissez-passer consulaire, pardon, et qu'il faut arriver à mettre en place des politiques…

JULIEN LECUYER
Ça, c'est déjà le cas.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Oui, mais il faut essayer d'être coordonné. Il faut y aller plus fortement. Moi, je pense qu'il faut y aller plus fortement. Alors les choses ont débuté. Il faut continuer. À un moment ou à un autre, vous avez nécessairement, avec certains pays sources, des rapports de force à établir, mais ces rapports de force, ils ne peuvent pas être simplement monothématiques. On a des discussions larges avec l'ensemble des pays du monde et y compris ces pays en particulier pour lesquels des migrants arrivent sur le territoire. Il faut pouvoir négocier globalement, y compris d'ailleurs avec les mesures d'accompagnement au développement. Il y a une vraie contractualisation à mener, ça, je suis intimement convaincu de ça. Et puis par exemple, on parlait de santé. Évidemment que dans une politique migratoire qui concerne l'immigration légale, mais aussi l'immigration légale, on a des sujets sur la santé à traiter. De façon... Ce n'est pas le ministère de l'Intérieur qui peut le faire, c'est partagé. Donc ce comité interministériel que vous évoquez, moi, j'y vois l'avantage de pouvoir faire de l'interministériel. Et ça, c'est un très, très essentiel.

JULIEN LECUYER
Il se tiendra quand ? Il y a déjà une date qui…

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Il n'y a pas de date encore.

JULIEN LECUYER
Et un secrétariat général ? Un secrétaire général ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, ça a été annoncé hier, bon, pour l'instant, pour être très franc, on n'en sait pas plus sur sa mise en oeuvre. Je pense qu'elle devrait être rapide. De toute façon, nous en avons besoin rapidement.

ORIANE MANCINI
Julien, sur la loi immigration ?

JULIEN LECUYER
Oui, c'est tout simplement pour savoir si cette loi immigration qui était voulue par Bruno RETAILLEAU, notamment, aura bien lieu ou, finalement, on va s'en passer, on va passer directement par décret ou un coup de pression vis-à-vis des préfets ou des autres autorités.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non, je crois que sur la politique migratoire, il y a plusieurs possibilités. En fait, il y a plusieurs outils. Il y a l'outil réglementaire, donc via, effectivement, le décret, les circulaires données à un certain nombre de préfets. Et puis il y a l'outil législatif. L'outil législatif, il peut être soit, j'allais dire, avec un texte avec 23, 24, 25 articles à déterminer ou, au contraire, ça peut être des textes plus ponctuels sur un ou deux articles avec des points spécifiques. C'est le choix que fait, semble-t-il, ce que va faire le Gouvernement, qui est d'avancer, pas à pas, sur un certain nombre de sujets, sur des points qui font parfois consensus ou d'autres qui ne le font pas. L'exemple le plus marquant, à mon avis, au moment où l'on se parle, c'est le fait qui concerne Mayotte, c'est le fait, qu'éventuellement…

JULIEN LECUYER
Sur le droit du sol ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Sur le droit du sol, de prolonger les conditions d'obtention de la nationalité française qui, aujourd'hui, sont déterminées dans des conditions, finalement, qui ne sont pas défavorables, qui ne sont pas, comment dire, très favorables, mais qui doivent être renforcées, notamment à la durée d'un an de présence régulière sur le territoire national avant de pouvoir…

ORIANE MANCINI
Donc il y aura une nouvelle réforme du droit du sol dans le cadre du texte Mayotte ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Bien sûr, mais je pense qu'il le faut. C'est absolument nécessaire. Ça n'est pas suffisant pour régler tout le problème mahorais, mais c'est, dans tous les cas, un des moyens utiles, dans la boîte à outils, j'allais dire, qu'il nous faut pour Mayotte, d'avoir…

ORIANE MANCINI
Mais il faut aller jusqu'où ? Est-ce qu'il faut supprimer le droit du sol ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Alors, parlons clairement. S'il s'agit de dire : " Vous supprimez le droit du sol, vous revenez au droit du sang ", je ne suis pas certain qu'il y ait une majorité pour voter cette réforme de caractère constitutionnel, au Congrès. Donc, la règle politique, c'est de dire : " Non, il faut, je pense, parce que ça, c'est possible, renforcer les conditions dans lesquelles on obtient la nationalité française quand on arrive à Mayotte.

ORIANE MANCINI
Ça sera dans le prochain texte, mais qui sera présenté dans deux mois ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Bien sûr, en tous les cas, bien sûr.

JULIEN LECUYER
Mais on doit aller jusqu'au référendum, comme le demandent…

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Dans l'immigration ?

JULIEN LECUYER
Laurent WAUQUIEZ, Bruno RETAILLEAU.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, vous connaissez mes positions sur l'aspect migratoire, c'est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît, il faut beaucoup de fermeté et il faut faire des choix. Le choix de l'immigration régulière, qui est une immigration qui soit contenue à dominante économique, de travail qualifié, c'est l'enjeu. Et avec les conditions d'apprentissage de la langue et de l'intégration, c'est absolument fondamental, on n'intègre pas, on intègre mal, on n'a pas les moyens suffisants.

JULIEN LECUYER
Ce qui a rappelé François BAYROU.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Donc ça, il faut vraiment faire ce choix-là, l'affirmer et le défendre, c'est une immigration régulière, il faut être très très ferme. On a les outils pour ça. Faut-il un référendum pour confirmer cela ? Je crois que si on a la volonté de le faire, on y arrivera. Mais s'il y avait un point de blocage majeur, à ce moment-là, sans doute, il faudrait consulter les Français. Mais je me méfie, parce que, pour tout vous dire, ma méfiance n'est pas sur le résultat. Je pense qu'au contraire, il peut être extrêmement favorable, mais c'est tellement multifactoriel, l'immigration, qu'il faut faire attention à ne pas… Ce n'est qu'une question, la question migratoire. La question de référendum, une ou deux maximums, mais ça ne suffit pas à régler le problème de l'immigration.

ORIANE MANCINI
Mais juste sur l'immigration, pour qu'on soit bien clair, on a bien compris ce qu'on a bien compris sur Mayotte, mais est-ce qu'il y aura, oui ou non, une loi immigration dans les prochaines semaines ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je pense qu'il y aura plusieurs textes migratoires, qui concernent l'immigration.

ORIANE MANCINI
Mais qui concerneront quoi ? Ça sera uniquement de la transposition de dispositifs européens ou il y aura autre chose ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je ne pense pas, à ce stade, que nous ayons un texte unique, extrêmement large. Je pense qu'on aura un texte qui s'adaptera à chaque point particulier que l'on fait évoluer.

ORIANE MANCINI
Julien.

JULIEN LECUYER
Autre question, peut-être dossier peut-être sur les Outre-mer. Vous évitiez les Outre-mer, vous évitiez en responsabilité de ce dossier, il y a encore quelques mois. Est-ce que vous souhaitez que le Sénat dépose une proposition de loi sur les Outre-mer Que le dossier soit remis sur la table ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Alors, sur une question large concernant l'ensemble de nos Outre-mer, il est incontestable que nous avons besoin, d'abord, il faut rappeler que c'est trois millions de compatriotes qui vivent sur les territoires ultramarins et moins d'un million qui vit dans l'Hexagone. Que chacun de ces territoires porte en lui une pépite économique ou une pépite de développement, c'est fondamental. Il faut donner à chacun de nos Outre-mer une perspective de moyen et long-terme, c'est-à-dire une stratégie. Levez ce que disait Michel BARNIER, regardez plus loin simplement que le budget annuel et donner de la perspective, c'est fondamental, d'ailleurs les élus d'Outre-mer le demandent et certains ont même des projets absolument fondamentaux, très importants. Ensuite, il faut avoir des grands plans et notamment ce qui me paraît essentiel, c'est le plan logement. Il y a une carence de logements, c'est-à-dire de logements sociaux, mais pas seulement dans nos territoires ultramarins et il faut des mesures absolument d'urgence pour construire, il y a besoin. Et il y a une deuxième mesure importante, c'est la définition du développement économique de chacun de ces territoires, tous ont un rôle fondamental. Je rappelle quand même que nous sommes sur trois océans du monde. Je rappelle quand même que nous avons, aujourd'hui, le domaine maritime le plus important au monde, probablement le premier, que nous aurons au mois de juin prochain le sommet des océans, sur lequel la France a des choses à dire, que nous avons sur le plan géopolitique ou géostratégique, des implantations absolument fondamentales. Je pense à la Nouvelle-Calédonie, mais pas seulement, Mayotte dans l'océan Indien avec la Réunion, mais aussi, bien sûr, la Polynésie dans le Pacifique, sans parler des Antilles. Donc nous avons des intérêts qui sont extrêmement importants pour le pays, mais il faut aussi donner à nos territoires ultramarins la capacité de commercer économiquement dans leur région, ce qui est très compliqué aujourd'hui avec les normes européennes, c'est très difficile. Donc, il faut assouplir le dispositif pour qu'ils puissent commercer dans les régions dans lesquelles ils sont, qu'ils puissent parler avec les partenaires et qu'ils puissent continuer d'avoir un développement économique qui soit fondamental. Le niveau de chômage est trop important, donc, il faut créer de la richesse. Et en fait, ce qu'on devrait vraiment admettre collectivement, c'est que nos territoires ultramarins et nos compatriotes sont un potentiel de développement du pays extraordinaire et qu'on a besoin d'un texte, en tout cas d'une vision. Je pense que mon successeur au ministère, mais je crois que le Premier ministre a cette idée-là, comme l'avait d'ailleurs Michel BARNIER, l'idée d'avoir un grand projet pour nos Outre-mer, qui reprenne les points que je viens de vous développer. Et oui, c'est nécessaire.

ORIANE MANCINI
Juste un mot sur les polices municipales, parce que ça fait partie de votre portefeuille. Le Beauvau des polices municipales a été relancé au Congrès des maires, c'était en novembre dernier. On en est où depuis ? Est-ce qu'il y aura une suite ? Est-ce qu'il faut revoir les pouvoirs des polices municipales ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Oui, il y a une suite, puisque je continue le travail qui a été engagé par mes prédécesseurs sur ce point-là, avec différentes réunions qui seront organisées en province. Bien évidemment, il y a déjà beaucoup de choses qui sont remontées en termes d'évolution et de continuum de sécurité. Donc nous allons procéder à des arbitrages, après consultation notamment des associations d'élus locaux, tout particulièrement et on aura probablement un texte d'ici au plus tôt le printemps, je pense. On arrivera à sortir un texte à ce moment-là.

ORIANE MANCINI
Donc il y aura une nouvelle loi ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Oui, parce qu'on est dans une logique où il faut vraiment qu'on joue absolument la complémentarité entre tous ces dispositifs. La police nationale a un rôle spécifique. Les polices municipales évoluent, et tout le monde le sait, mais elles évoluent de façon inégale selon que vous êtes dans une grande commune ou une petite commune, selon la volonté ou non du maire, selon le fait que vous êtes équipé d'armes à feu ou pas. Donc tout ça, c'est assez finalement divers. Donc, il faut y mettre un peu d'unité et y mettre surtout ou conforter le principe du continuum de sécurité. La question, par exemple, une des questions qui consiste à dire est-ce qu'un policier municipal peut rentrer dans une opération de police judiciaire sur des constats ? C'est un vrai sujet. Je rappelle que le Conseil constitutionnel, on avait essayé, au Sénat, de faire avancer ce point, nous avait validé, au motif que quand bien même il soit sous l'autorité du procureur de la République, ça ne suffisait pas. Donc, il y a quelques sujets quand même à regarder, et c'est important, oui, il y aura donc un texte d'ici le printemps.

ORIANE MANCINI
Un dernier mot sur les Républicains, votre parti, vous allez rester combien de temps sans président ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Écoutez, je pense qu'il est important maintenant qu'on engage des procédures, des élections, qu'il y ait un président, un exécutif, et que le mouvement, si je puis me permettre, se remette en marche.

ORIANE MANCINI
Parce que là, il est à l'arrêt.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Ce n'est pas qu'il est à l'arrêt, et que le mouvement, si je puis me permettre, se remette en marche.

ORIANE MANCINI
Parce que là, il est à l'arrêt.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Ce n'est pas qu'il est à l'arrêt, c'est que nous sommes... On a vécu quand même un moment dramatique avec le comportement, disons-le très clairement, d'Éric CIOTTI, qui a trahi tout le monde. Il faut dire les choses telles qu'elles sont, c'est la réalité. On n'est pas sans ressources pour pouvoir se reconstruire. Je crois que la participation au Gouvernement de LR au sens large du terme députés et sénateurs montre qu'on est utile, qu'on sait faire avancer les choses, qu'on est en capacité de porter des projets, des idées. Donc, il faut vite remettre le mouvement en marche, et puis qu'on avance.

ORIANE MANCINI
Avec qui ? Ce sera qui le meilleur président ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Ça sera celui qui va gagner.

ORIANE MANCINI
Laurent WAUQUIEZ ou Bruno RETAILLEAU ?

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Le meilleur président... Il ne faut pas qu'on soit... Je crois que là, il faut qu'on sorte de ça. L'important pour le mouvement, mais comme pour la France, c'est de définir un projet, une vision, une ambition. Et puis après, celui qui sera le meilleur, ou celle qui sera la meilleure pour servir ce projet-là sera le meilleur candidat.

ORIANE MANCINI
Merci, François-Noël BUFFET. Merci beaucoup d'avoir été notre invité.

FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Julien, la Une de La Voix du Nord, c'est des conseils pour affronter la pollution de l'air.

JULIEN LECUYER
Oui, toujours très présente dans notre métropole lilloise, notamment.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup, Julien. A la semaine prochaine, on passe tout de suite au Club des Territoires


source : Service d'information du Gouvernement, le 17 janvier 2025