Texte intégral
ANTOINE COMTE
Sophie PRIMAS, bonjour.
SOPHIE PRIMAS
Bonjour.
ANTOINE COMTE
Merci d'être avec nous ce matin sur France Info TV. Première question, évidemment, concernant Donald TRUMP, qui est devenu hier le 47e président des États-Unis. Il a fait toute une série d'annonces au président américain, notamment sur l'immigration, avec son souhait d'expulser des millions et des millions d'étrangers, dit-il, de déclarer l'urgence nationale à la frontière avec le Mexique, d'y envoyer des troupes militaires, et même il a remis en cause le droit du sol. Est-ce que ça vous inquiète ?
SOPHIE PRIMAS
Nous ne sommes pas surpris par les déclarations de Donald TRUMP, qui avait beaucoup promis pendant sa campagne, dont on connaît la détermination, parfois les outrances. Tout est dans son discours, tous les pans de son programme sont dans son discours, il a balayé tout. Donald TRUMP, aujourd'hui, veut montrer la force des États-Unis, la force retrouvée grâce à lui par les États-Unis, dit-il. Donc, nous serons très attentifs à ce que ces paroles deviennent ou pas des actes. Nous devons, nous, opposer aussi une détermination et une force.
ANTOINE COMTE
Est-ce qu'il n'y a pas des mesures un petit peu délirantes quand même, désolé de l'expression, mais renommer le golfe du Mexique en golfe de l'Amérique, reprendre le canal du Panama, retirer les États-Unis de l'accord de Paris sur le climat, ou encore ne plus reconnaître les transgenres américains ? Qu'est-ce que vous en pensez ?
SOPHIE PRIMAS
Retirer les États-Unis de l'accord de Paris, il l'a déjà fait, donc c'est quelque chose qui n'est pas dans le champ de l'outrance, et il l'avait annoncé. Pour le reste, je vous ai parlé d'outrances, je maintiens ce nom, ce mot. Ça me paraît effectivement assez fort et assez délirant, en tout cas, assez symptomatique de la détermination du Président TRUMP.
ANTOINE COMTE
Alors justement, comment doit réagir à présent la France face aux États-Unis ? Comment Emmanuel MACRON peut garder ce lien privilégié, que la France reste un partenaire privilégié des États-Unis ?
SOPHIE PRIMAS
Je crois que la France fait partie de l'Europe, enfin, j'en suis certaine, et c'est de l'Europe qui doit répondre aujourd'hui à Donald TRUMP.
ANTOINE COMTE
Une Europe qui s'affaiblit.
SOPHIE PRIMAS
Une Europe qui doit d'abord être certaine de sa puissance personnelle, une Europe qui doit être unitaire, qui doit répondre à la force par la détermination et par une assurance en elle-même. Nous sommes un grand continent, nous sommes un grand bloc. C'était l'objectif de faire cela.
ANTOINE COMTE
Mais comment concrètement l'Europe peut résister à la puissance de TRUMP ?
SOPHIE PRIMAS
Madame von der LEYEN a une grande responsabilité dans la puissance qu'elle va démontrer, dans sa détermination, appuyée par les États forts de l'Union européenne. C'est ainsi que nous montrerons au Président TRUMP que nous sommes dans une relation désormais transactionnelle avec les États-Unis, qui fait réponse, en fait, à ce nouveau monde, le nouveau monde des blocs avec la Chine, les États-Unis, mais aussi d'autres formations mondiales et géopolitiques qui sont en train de se mettre en place. Nous devons être unis et nous devons être sûrs et certains de nos forces et faire les bons investissements aux beaux endroits.
ANTOINE COMTE
Alors, Sophie PRIMAS, je voudrais qu'on revienne en France, qu'on parle de cette loi d'urgence pour Mayotte. Elle est actuellement en cours d'examen, elle est débattue à l'Assemblée nationale et elle ne fait pas l'unanimité de toute la classe politique. Je veux parler notamment des Insoumis, qui ont présenté, hier après-midi, un contre-texte d'urgence pour Mayotte. Ils reprochent au Gouvernement de proposer une reconstruction de l'archipel au rabais, ce sont leurs termes, et ils disent que ce texte va permettre, je les cite encore, au Gouvernement de s'en prendre de façon obsessionnelle aux migrants. Qu'est-ce que vous leur répondez ?
SOPHIE PRIMAS
Je réponds d'abord que je pense aux Mahorais, qui sont dans une situation épouvantable depuis plusieurs semaines maintenant. Vous savez, tous les services de secours qui vont prêter main forte sur le territoire de Mayotte reviennent très choqués par la situation. Donc, moi ma première pensée, c'est pour les Mahorais. La deuxième pensée, c'est pour dire qu'on ne peut pas résoudre tous les problèmes actuels de Mayotte en un tour de magie. Ceux qui vous vendent ça, vendent du rêve et ne sont pas responsables.
ANTOINE COMTE
Les Insoumis vendent du rêve ? C'est ce que vous dites ? Ils vendent du rêve aux Français ?
SOPHIE PRIMAS
Écoutez, nous avons, aujourd'hui, une stratégie qui est en trois points. Le premier point, c'est l'aide d'urgence que nous avons apportée et que nous continuons à apporter : des vivres, de l'eau, tout ce qui est nécessaire pour que la vie commence à reprendre. Ça, c'est ce qui est en cours. La deuxième étape, c'est ce projet de loi qui va donner des outils pour reconstruire le plus vite possible en termes d'urbanisme, de déroger aux règles des marchés publics, d'avoir des autorisations de construire plus rapidement. C'est très important, ce projet de loi d'urgence.
ANTOINE COMTE
Il devrait faire l'unanimité…
SOPHIE PRIMAS
Il devrait faire l'unanimité et je ne comprends pas du tout une opposition peut-être un peu de principe à tout ce qui est fait par le Gouvernement. Je crois que notre attention doit être portée sur les Mahorais. Et dernière réponse que nous devons apporter, une réponse beaucoup plus structurelle qui viendra d'ici trois mois par un projet de loi qui sera construit par Manuel VALLS et par les Mahorais, les élus Mahorais, avec des éléments structurels plus importants.
ANTOINE COMTE
Ce qui n'est pas le cas-là, c'est-à-dire que la loi d'urgence pour Mayotte actuellement, elle n'est pas construite avec les Mahorais ?
SOPHIE PRIMAS
Elle a été très rapide, elle a été construite…
ANTOINE COMTE
Trop rapide, certains vous…
SOPHIE PRIMAS
Non, elle a été très rapide, elle reprend, en fait, des mesures dérogatoires que l'on a prises déjà sur d'autres chantiers qui méritaient de la rapidité et notamment Notre-Dame de Paris, par exemple, ou la préparation des Jeux olympiques.
ANTOINE COMTE
Alors, je voudrais qu'on parle de cette conférence sociale lancée par François BAYROU sur les retraites. C'est surtout aussi pour que le PS ne censure pas à terme le Gouvernement qu'elle est mis en place. Pour que les socialistes continuent de négocier avec vous au Gouvernement, il va falloir aussi leur donner d'autres gages, notamment sur le budget. On a vu Olivier FAURE, le Premier secrétaire du PS, dire qu'il n'y avait pas d'accord, pour l'instant en tout cas, sur le budget. Quelle concession vous êtes prêts à faire en tant que membre du Gouvernement pour le budget ?
SOPHIE PRIMAS
Nous sommes dans une situation politique tout à fait inédite, ça n'a échappé à personne. Et donc, plus que des concessions, je pense que le Premier ministre souhaite faire des ouvertures. Des ouvertures à l'ensemble des groupes politiques qui dialoguent.
ANTOINE COMTE
Y compris sur le budget ?
SOPHIE PRIMAS
Y compris sur le budget. Mais il y a déjà des annonces qui ont été faites dans la déclaration de politique générale, dans la réponse que nous avons apportée lors de la censure et que le Premier ministre a exprimée. Il y a des négociations. Ces négociations entendent répondre aux demandes des Français et ce sont des ouvertures vers le Parti Socialiste, mais aussi tous les groupes politiques qui constituent le socle politique. Donc, nous sommes dans une position politique inédite qui mérite que chaque groupe politique soit entendu et soit écouté. C'est le sens des dialogues que nous avons, en particulier avec le Parti Socialiste.
ANTOINE COMTE
Un mot sur cette sortie du ministre de l'Intérieur, Bruno RETAILLEAU, dont vous connaissez bien en tant qu'ancienne sénatrice. Il souhaite revoir l'Aide Médicale d'État, l'AME, car selon lui, je le cite : "C'est un encouragement à la clandestinité". C'est la position du Gouvernement, ça aussi ?
SOPHIE PRIMAS
La position du Gouvernement, c'est de lutter contre tous les abus, les abus sociaux, quels qu'ils soient, et pour quelque population que ce soit.
ANTOINE COMTE
L'AME, c'est un abus ? Le fait que des…
SOPHIE PRIMAS
Je vais finir ma phrase, je n'ai pas dit ça. L'AME est un dispositif qui permet de régler des problèmes sanitaires qui sont souvent très importants. Il y a, comme malheureusement dans beaucoup de dispositifs sociaux, des abus. C'est contre cela que nous allons lutter. Il y a un excellent rapport, le rapport ÉVIN-STEPHANINI, qui a été réalisé et qui met en avant…
ANTOINE COMTE
Qui dit qu'il ne faut pas revenir sur l'AME.
SOPHIE PRIMAS
Qui dit qu'il ne faut pas revenir sur l'AME, et en revanche qu'il faut lutter contre un certain nombre d'abus.
ANTOINE COMTE
Donc vous suivez ce rapport, mais pas Bruno RETAILLEAU ?
SOPHIE PRIMAS
C'est ce rapport que le Gouvernement suivra.
ANTOINE COMTE
Vous ne répondez pas vraiment à ma question. Vous suivez la position de Bruno RETAILLEAU ?
SOPHIE PRIMAS
J'ai répondu à votre question, le Gouvernement va regarder ce dispositif, en particulier à la lumière des conclusions du rapport ÉVIN-STEPHANINI, qui porte en lui, d'ailleurs, un certain nombre de dispositions pour lutter contre les abus.
ANTOINE COMTE
Un mot sur ces personnalités politiques, notamment à gauche chez les écologistes qui quittent le réseau social X, ex-Twitter. Vous, vous avez décidé d'y rester. Quelle est la consigne, finalement, pour les membres du Gouvernement ? Est-ce qu'un membre du Gouvernement qui voudrait quitter X a le droit de le faire aujourd'hui ?
SOPHIE PRIMAS
Alors, la position du Gouvernement, c'est de rester sur Twitter pour l'instant. Vous savez que nous avons des réglementations européennes, et nous pensons que, quels que soient les réseaux, d'ailleurs X ou un autre, ce sont les réseaux qui doivent répondre aux obligations, notamment européennes. Il y a aujourd'hui des enquêtes qui sont ouvertes au niveau européen, qui peuvent mener à des sanctions très importantes, parce que les sanctions peuvent aller jusqu'à 6 % du chiffre d'affaires mondial, ce qui est considérable. Donc, le risque pour les réseaux sociaux de ne pas répondre à ces lois est très très important. Nous considérons que quitter X est une responsabilité individuelle. Pour le coup, X et d'autres réseaux sociaux sont aussi des moyens de communication qu'il ne faut pas quitter. Il faut simplement que ces réseaux appliquent la loi.
ANTOINE COMTE
Sophie PRIMAS, un dernier mot très rapide sur Elon MUSK, qui est le patron de X et qui a rejoint le Gouvernement de Donald TRUMP. Il est au cœur d'une polémique, avec un salut, hier, adressé lors d'un meeting, lors de cette investiture de Donald TRUMP. La classe politique a réagi ici en France, et notamment à gauche. Certains évoquent un salut nazi. Est-ce que vous condamnez ce geste ? Quelle est votre réaction par rapport à ça ?
SOPHIE PRIMAS
Je ne vais pas commenter ce geste, je l'ai vu ce matin en me réveillant. Effectivement, l'image fixe est troublante. Je ne sais pas quelles étaient ses intentions, mais nous qui sommes européens et qui avons une histoire forte avec le nazisme, évidemment ça fait appel à des souvenirs terribles. Mais je ne veux pas condamner, car je ne sais pas quelles étaient son intention. Je n'ai pas vu le film en réalité. J'ai vu aussi sur X, d'ailleurs, qu'il y avait des juxtapositions de photos qui étaient assez équivalentes, notamment avec Kamala HARRIS ou Madame CLINTON. Donc je ne condamne pas quelque chose dont je ne connais pas l'origine.
ANTOINE COMTE
Merci Sophie PRIMAS.
SOPHIE PRIMAS
Merci.
ANTOINE COMTE
Merci d'avoir répondu à nos questions.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 22 janvier 2025