Interview de M. Philippe Tabarot, ministre chargé des transports, à BFM TV le 19 février 2025, sur le scandale des airbags défectueux, des actes de harcèlement et des agressions sexuelles à Air France et la sécurité routière.

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Média : BFM TV

Texte intégral

LORENE DE SUSBIELLE
Nous sommes en plateau avec Philippe TABAROT, ministre des Transports, on va évidemment vous interroger sur le scandale des airbags défectueux. Vous étiez au Maroc, hier, pour une conférence sur la sécurité routière. Vous en avez profité pour demander qu'une régulation mondiale soit mise en place pour les airbags. C'est quoi une régulation mondiale ?

PHILIPPE TABAROT
Écoutez, on est déjà sur un gros scandale, sur une affaire qui est très grave. C'est une affaire dont on commence à parler au niveau national, mais j'ai souhaité porter le débat au niveau européen et au niveau mondial. À travers la conférence, il y avait plus de 100 ministres des Transports ou de l'Intérieur qui étaient réunis, hier, sur les questions de sécurité routière. On se dit que quelque part, il y a beaucoup de réglementations sur les véhicules d'homologation et comment on a pu laisser circuler des millions de voitures au niveau mondial avec des airbags qui sont particulièrement dangereux. Les airbags sont faits pour sauver des vies, pas pour en prendre.

CHRISTOPHE DELAY
Mais vous dites en substance quoi ? Que les constructeurs, d'une façon générale, et par exemple, STELLANTIS, ont mis trop de temps à réagir ?

PHILIPPE TABAROT
Il y a une responsabilité probablement des constructeurs, en tout cas sur la fabrication, d'avoir fait affaire à l'époque avec la société TAKATA, de n'avoir pas probablement eu une homologation qui aurait pu être mise en place au niveau européen ou au niveau mondial pour savoir si ces airbags ne mettaient pas en danger la vie d'un certain nombre de personnes.

CHRISTOPHE DELAY
Est-ce qu'ils auraient dû réagir plus vite les constructeurs ?

PHILIPPE TABAROT
Avec un petit peu de recul, les choses se diront. Depuis que je suis en fonction, j'ai souhaité accentuer à la fois l'information, les demandes de rappel, sans savoir également les pouvoirs de coercition que j'avais vis-à-vis…

LORENE DE SUSBIELLE
On a l'impression que vous leur avez forcée la main presque.

PHILIPPE TABAROT
Écoutez, oui, et j'ai demandé aussi jusqu'où je pouvais aller et quelle était la possibilité pour l'État d'obliger les constructeurs à pouvoir aller encore plus loin dans les rappels ? En tout cas, je me réjouis que ça puisse enfin se faire. On a perdu beaucoup de temps. Vous avez beaucoup parlé de STELLANTIS. Je rappelle que c'est une trentaine, également, de constructeurs qui sont concernés, même si le rappel massif a été fait pour STELLANTIS, hier.

CHRISTOPHE DELAY
Pour ceux qui sont concernés, quand les gens concernés, les conducteurs concernés circuleront de nouveau dans des voitures sûres ?

PHILIPPE TABAROT
Écoutez, déjà, cet airbag n'est plus fabriqué depuis 2019. Certains constructeurs ont arrêté de travailler avec la société en question depuis 2016. Pour autant, il y a encore beaucoup de véhicules qui circulent qu'il faut identifier. Et je crois qu'ils sont pratiquement tous identifiés sur les sites des constructeurs. Il y a cette transparence maintenant qui est de mise et qui a été très fortement demandée, qui a mis du temps. Et pour moi, c'est une vraie priorité. Et puis ensuite, on verra comment les choses vont évoluer. Et c'est la raison pour laquelle je souhaite, que je ne dirai plus jamais ça à travers les échanges que j'ai pu avoir au niveau européen et mondial sur cette question.

LORENE DE SUSBIELLE
Vous avez demandé la création d'une mission d'inspection. À quoi ça va servir ?

PHILIPPE TABAROT
C'est justement de savoir jusqu'où l'État peut aller pour contraindre les constructeurs sur ces sujets. Aujourd'hui, on parle de possibilités. S'il refuse de mettre en place ces rappels d'astreinte, les choses ne sont pas suffisamment claires. Je veux savoir jusqu'où on peut aller. Et je souhaite aller au maximum de ce que l'État doit demander aux constructeurs, puisque je rappelle que c'est de leur responsabilité première.

CHRISTOPHE DELAY
Philippe TABAROT, il y a un autre dossier qui vous concerne, c'est AIR FRANCE. Ce soir, vous recevez les dirigeants d'AIR FRANCE après la publication récente de témoignages dénonçant des actes de harcèlement et des agressions sexuelles. De quoi parle-t-on exactement ?

PHILIPPE TABAROT
Je ne le sais pas à l'heure où je vous parle. J'ai lu avec attention les témoignages à travers les articles de vos confrères.

CHRISTOPHE DELAY
18 enquêtes à suite d'une enquête de RADIO FRANCE relative à des signalements de harcèlement sexuel ou agissement sexiste, et 11 sanctions disciplinaires.

PHILIPPE TABAROT
Tout à fait. Je recevrai un certain nombre de personnels dans la journée également. Et puis en fin de journée, je recevrai la direction d'AIR FRANCE pour savoir ce qu'il en est, à la fois de la réalité des faits, s'ils ont des éléments, et de savoir également qu'est-ce qu'ils ont mis en place pour contrôler un certain nombre de comportements et, le cas échéant, prendre les sanctions nécessaires au sein de l'entreprise. Les faits qui sont relatés chez vos confrères semblent des faits particulièrement graves s'ils sont avérés. Donc, c'est la raison pour laquelle je prends là aussi l'affaire très au sérieux et que je recevrai quelques salariés sur ce sujet.

CHRISTOPHE DELAY
Il y a eu du laxisme à AIR FRANCE ?

PHILIPPE TABAROT
Je ne sais pas. Honnêtement, au moment où je vous parle, je n'ai pas un avis définitif sur la question. Je n'ai que les témoignages et la lecture des articles de vos confrères. Je ne veux pas déjà accuser AIR FRANCE de quoi que ce soit, ni sans les avoir écoutés. Et d'un autre côté, je veux entendre également l'effet d'un certain nombre de personnels qui sont relayés par différents syndicats dans la boîte.

LORENE DE SUSBIELLE
On voulait aussi vous interroger sur cette proposition de loi d'une sénatrice du Nord qui propose d'interdire les bolides, ces voitures surpuissantes, à des jeunes conducteurs inexpérimentés. Est-ce que vous soutenez cette proposition ?

PHILIPPE TABAROT
Écoutez, je viens d'un congrès sur la sécurité routière. Tout ce qu'on pourra faire pour éviter... On parle d'encore de millions de morts chaque année dans le monde entier. On était avec Jean TODT également qui a envoyé des Nations unies sur ces questions. Tous les pays du monde ont envie de s'unir pour éviter ça. En France, on a des chiffres qui ont beaucoup baissé ces 20 dernières années mais qui stagnent depuis 2-3 ans à plus de 3 000 morts par an. Il faudra prendre un certain nombre de décisions. Moi, je ne me satisfais pas que 3 000 personnes ou 3 100 personnes meurent encore sur nos routes quotidiennement.

CHRISTOPHE DELAY
Encore une fois, pour répondre à la question posée, interdire le volant aux jeunes conducteurs au but de louer, d'utiliser, de conduire des bolides surpuissants, ça vous paraît possible ?

PHILIPPE TABAROT
La question se pose pour deux publics qui sont les principaux concernés par les accidents. C'est les publics beaucoup plus jeunes, c'est les jeunes qui sont très frappés par les accidents, et des personnes beaucoup plus âgées également qui ont encore des véhicules et qui, quelquefois, peuvent mettre en difficulté la vie d'autrui. Et sujets particulièrement sensibles, mais les deux publics les plus sensibles sur la sécurité routière, les personnes les plus jeunes et les plus âgées.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 février 2025