Interview de Mme Sophie Primas, ministre déléguée, porte-parole du Gouvernement, à LCP le 26 mars 2025, sur la justice des mineurs, l'antisémitisme, le racisme, le budget 2026 et le calendrier parlementaire.

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Média : LCP Assemblée nationale - La Dépêche

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Bonjour Sophie PRIMAS.

SOPHIE PRIMAS
Bonjour Oriane.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir accepté notre invitation, porte-parole du Gouvernement. On est ensemble pendant vingt minutes pour une interview en partenariat avec la presse régionale représentée par Christelle BERTRAND du groupe LA DÉPÊCHE. Bonjour Christelle.

CHRISTELLE BERTRAND
Bonjour Oriane. Bonjour Sophie PRIMAS.

SOPHIE PRIMAS
Bonjour Christelle.

ORIANE MANCINI
On a évidemment beaucoup de sujets à aborder avec vous Sophie PRIMAS et d'abord le Sénat qui a commencé hier soir l'examen du texte de Gabriel ATTAL pour durcir la justice des mineurs dans un contexte un peu particulier. L'agresseur du rabbin d'Orléans, ou le suspect en tout cas de cette agression, a seize ans. Il y a une nouvelle rixe en ESSONNE où un jeune de 17 ans a été tué et pourtant ce texte a été détricoté en commission par un rapporteur LR, alors qu'il contient des mesures qui semblent sur votre ligne. Est-ce que vous le regrettez ?

SOPHIE PRIMAS
On est dans la discussion parlementaire, donc vous l'avez dit, le texte, après avoir passé en commission, arrive en séance. La volonté du Gouvernement, c'est effectivement d'aller plutôt dans le sens de l'état d'esprit de la proposition de loi de Gabriel ATTAL. Pourquoi ? Parce que simplement aujourd'hui, vous savez, 40 % par exemple des vols avec violences sont commis par des jeunes qui ont entre 16 et 18 ans. Et donc la violence a changé, elle est de plus en plus l'acte de très jeunes et en réalité notre arsenal juridique ne correspond plus à la réalité des faits et à la réalité de l'âge aujourd'hui de ces délinquants. Il faut donc prendre des dispositions qui soient plus sévères. Il y aura une discussion en séance.

ORIANE MANCINI
Mais vous souhaitez que le Sénat revienne à la version Gabriel ATTAL ?

SOPHIE PRIMAS
Oui, le Gouvernement souhaite qu'effectivement on soit dans la ligne qui avait été tracée par Gabriel ATTAL.

ORIANE MANCINI
Et vous avez compris la position de Francis SPINER qui avait…

SOPHIE PRIMAS
Je pense que Francis SPINER, qui lui-même est avocat, a voulu améliorer en fait la rédaction de ce texte. C'est sa liberté, c'est la liberté de la commission de l'avoir voté comme tel.

ORIANE MANCINI
Ce n'est pas une loi faite dans la précipitation, comme il le laisse entendre ?

SOPHIE PRIMAS
Non, je ne pense pas. Il y a de véritables dispositifs qui s'adaptent effectivement au public le plus jeune, aux délinquants les plus jeunes. Je pense que l'équilibre sera trouvé entre la discussion en séance et puis la CMP qui aura lieu au mois d'avril.

ORIANE MANCINI
Et vous souhaitez la version Gabriel ATTAL ou vous souhaitez que le Sénat aille encore plus loin et durcisse encore plus ce texte ? C'était notamment le souhait de Gérald DARMANIN.

SOPHIE PRIMAS
Alors, GÉRALD DARMANIN a mis des amendements, notamment sur un certain nombre de dispositions, la technique aussi. Nous évidemment, nous souhaitons que ces dispositions soient adoptées. Mais encore une fois, c'est la liberté du Parlement et singulièrement, aujourd'hui, du Sénat.

ORIANE MANCINI
Christelle.

CHRISTELLE BERTRAND
Oui, Oriane parlait de l'agression du rabbin d'Orléans, un mot sur la lutte contre l'antisémitisme. D'autant que Jordan BARDELLA et Marion MARÉCHAL sont aujourd'hui en Israël. C'est clairement une main tendue envers la communauté juive en France. Est-ce que depuis la marche du 7 octobre, le Gouvernement a été assez présent sur cette lutte contre l'antisémitisme ? Depuis, il n'y a pas eu vraiment de paroles très fortes, de grands discours. Est-ce que ce serait le moment d'être à nouveau présent sur ce domaine-là ?

SOPHIE PRIMAS
Je pense qu'il ne faut jamais lâcher sur l'antisémitisme. Évidemment, la marche après le 7 octobre a été un grand succès. Aurore BERGÉ, aujourd'hui, dans sa mission de lutte contre les discriminations, est très active, en particulier sur ce sujet-là, mais sur tous les autres sujets. Elle est à l'offensive, elle est même quelquefois…

CHRISTELLE BERTRAND
Mais clairement, est-ce que le Premier ministre devrait prendre la parole sur un sujet aussi grave aujourd'hui ?

SOPHIE PRIMAS
Mais vous savez, ça fait partie de notre ADN, cette lutte contre l'antisémitisme. Donc peut-être que le Premier ministre pourra de nouveau s'exprimer. Mais il n'y a aucun doute dans l'esprit du Gouvernement que charnellement nous sommes opposés à toute forme.

CHRISTELLE BERTRAND
Mais certains chez vous disent qu'on est mauvais sur ce sujet, on devrait parler, on devrait s'exprimer plus fortement.

SOPHIE PRIMAS
Je pense qu'à chaque fois on condamne en réactif, on condamne évidemment chaque acte. Vous savez, il y a trois actes de violence par jour contre la population juive, ne soit pas des violences, les violences c'est un acte tous les trois jours, mais il y a trois actes par jour aujourd'hui, donc c'est un fléau. Dans la semaine de lutte contre la discrimination, Aurore BERGÉ a montré ce plan qui est le nôtre pour lutter contre toute forme de discrimination, et en particulier l'antisémitisme. Donc nous sommes à l'action, est-ce qu'il faut être plus vocal ? Peut-être.

ORIANE MANCINI
Est-ce qu'il faut que François BAYROU s'exprime ? Est-ce qu'il a prévu de s'exprimer là-dessus dans les prochains jours ?

SOPHIE PRIMAS
Je n'ai pas d'informations sur sa volonté de s'exprimer, mais je n'ai pas de doute sur le combat qui est le sien.

CHRISTELLE BERTRAND
Manuel VALLS, lui, s'est exprimé. Il a dit que la haine des Juifs venait essentiellement du monde arabo-musulman en France comme ailleurs. Est-ce qu'il a eu raison de dire ça ? Il est attaqué aujourd'hui par deux députés RFI.

SOPHIE PRIMAS
On ne peut faire qu'un seul constat, c'est qu'aujourd'hui, malheureusement, il n'y a pas d'exclusivité dans l'antisémitisme, et l'antisémitisme, il vient de partout, historiquement, il a des origines différentes, bien sûr, dans notre histoire de France. Nous savons aujourd'hui que les conflits au Moyen-Orient, qu'un certain nombre d'actes au niveau international et national sont plutôt le fait, effectivement, de cette population. Donc, Manuel VALLS, dit aujourd'hui, décrit une réalité, mais encore une fois, sans exclusivité, malheureusement.

ORIANE MANCINI
Christelle, autre sujet ?

CHRISTELLE BERTRAND
Oui, enfin, dernier mot sur un sujet qui est connexe. Vous avez déclaré qu'il existe aussi un racisme anti-blanc. Ça fait beaucoup réagir…

SOPHIE PRIMAS
Dans tous les sens, d'ailleurs.

CHRISTELLE BERTRAND
C'est-à-dire ?

SOPHIE PRIMAS
C'est-à-dire que moi, je suis extrêmement surprise d'abord du buzz autour de cette phrase, parce qu'en fait, je n'ai décrit que ce que beaucoup de gens voient. Alors, vous savez, comme on lutte contre l'antisémitisme, on lutte contre toute forme de racisme, et ces formes de racisme, elles s'exercent à l'encontre de plein de populations. Est-ce qu'elles s'exercent majoritairement contre les Blancs ? Non, bien évidemment, parce qu'après, le racisme vient la discrimination, et évidemment, sur notre territoire, la majorité de la discrimination et du racisme ne s'exercent pas.

CHRISTELLE BERTRAND
On a l'impression que vous mettez sur un pied d'égalité toute forme de racisme.

SOPHIE PRIMAS
Mais bien sûr, toute forme de racisme est insupportable. Le racisme, c'est dire qu'il y a une hiérarchie entre les groupes de population, entre les… c'est horrible, c'est faire une partition de la population.

CHRISTELLE BERTRAND
Par exemple, la discrimination à l'embauche touche moins la population blanche.

SOPHIE PRIMAS
Mais ça, c'est une discrimination. Le racisme, c'est penser qu'il y a une hiérarchie entre les groupes de personnes.

ORIANE MANCINI
Et pourquoi ça vous a surpris, les réactions, du coup ?

SOPHIE PRIMAS
Ça m'a surpris, parce qu'en réalité, je pense que c'est un lieu commun de dire ça. En fait, il y a du racisme qui s'exerce envers toute population. Notre société est tellement fragmentée et tellement éruptive aujourd'hui, et on la pousse dans cette violence des communautés les unes contre les autres, ce qui est contraire à tous les principes de la République, qu'il faut reconnaître que ça s'exerce vers tous les types de population, y compris ceux qui sont discriminés, ou en tout cas qui sont attaqués par des actes de racisme, sur le simple fait de la couleur de leur peau, quelle que soit cette couleur.

ORIANE MANCINI
Ça fait cent jours que le Gouvernement est en place. Hier, lors des questions d'actualité au Gouvernement, le RN a dénoncé l'immobilisme, l'inertie. Ce Gouvernement, est-ce qu'il ne vise pas juste ?

SOPHIE PRIMAS
Pas du tout. Évidemment, je voudrais dire que ça fait cent jours, 102 peut-être maintenant, aujourd'hui, que nous sommes ici. Je veux rappeler qu'il y a trois semaines, nous n'avions pas de budget. La France n'avait pas de budget. Et donc, il y a trois semaines, nous avons réussi à faire voter un budget, qui est un budget imparfait. Évidemment, tout le monde le sait compte tenu des contraintes, à la fois de temps et des contraintes budgétaires énormes qui sont devant nous. Mais la France a un budget aujourd'hui, elle peut fonctionner et repartir. Nous avons fait voter un budget pour la sécurité sociale, et donc le principal est acquis. Depuis, nous sommes sur des chantiers que le Premier ministre a décrits dans sa lettre au Président de groupe des Assemblées, et au Président des Assemblées, des chantiers qui sont des chantiers structurants, la réforme de l'État, la simplification, l'éducation, la santé.

CHRISTELLE BERTRAND
Excusez-moi, mais c'était des chantiers qui étaient déjà inscrits à l'ordre du jour de l'Assemblée et du Sénat.

SOPHIE PRIMAS
Faut-il les abandonner ? Pour autant, ces thématiques sont des thématiques qui sont profondément ancrées dans le quotidien.

CHRISTELLE BERTRAND
Mais ce qu'on recherche aujourd'hui au Gouvernement de François BAYROU, c'est de ne pas avoir de nouveaux projets depuis le vote du budget.

SOPHIE PRIMAS
Mais il ne faut pas de nouveaux projets, il faut aller au bout des problématiques qui sont des problématiques qui répondent au quotidien des Français. Quand on parle de la santé, vous le dites, par exemple, les déserts médicaux, ce n'est pas nouveau, il y avait déjà des… vous avez raison ?

CHRISTELLE BERTRAND
La proposition de loi de Guillaume GARRAUD était déjà prévue.

SOPHIE PRIMAS
Elle était déjà prévue, mais par contre, le plan que vont annoncer Yannick NODERRE et Catherine VAUTRIN avec le Premier ministre dans les jours qui viennent, sont de nouvelles mesures qu'il faut additionner aux efforts qui ont été faits avant. Travailler sur les déserts médicaux, travailler sur l'accès aux soins des Français, c'est une nécessité absolue, ça se fait bien sûr dans la continuité de ce qui a été fait, c'est une thématique qui n'est pas nouvelle, mais je peux vous dire que nous sommes vraiment au travail. Sur l'éducation, à la fin de la semaine, le Premier ministre avec la ministre d'État va aussi annoncer des mesures très structurantes sur ce qui est, à mon avis, la source des difficultés aujourd'hui de l'éducation nationale, une des sources, mais une source puissante, qui est l'attractivité du métier d'enseignant. Donc, nous sommes au travail.

ORIANE MANCINI
Ça veut dire travailler sur la rémunération des enseignants ?

SOPHIE PRIMAS
Travailler surtout sur la formation, sur le recrutement, et sur la rémunération, ça a déjà été revalorisé, on a ouvert des portes de revalorisation, sur tout ce qui nous…

CHRISTELLE BERTRAND
Mais cette réforme sur le recrutement, c'est pareil, elle était déjà en cours, elle a été suspendue par les différentes censures.

SOPHIE PRIMAS
Ce n'est pas ce que j'appelle de l'immobilisme, de faire bouger des thématiques qui sont des thématiques profondes, importantes, et à part ça, sur des thématiques qui sont des thématiques du quotidien, nous avons entamé, et ça, c'est vraiment assez puissant, c'est invisible, parce que ça nécessitait un travail de fond, mais c'est très puissant, une réforme de l'État, une revue des missions de l'État, qui va déboucher sur un document qui sera partagé avec l'ensemble des parlementaires, qui travaillent sur les finances publiques, il va y avoir une grande conférence sur les finances publiques en avril, qui va associer tout le monde, car le Premier ministre veut absolument, aujourd'hui, que ce budget 2026, qui va être un cauchemar, tant les difficultés financières sont importantes, soit partagé, soit travaillé avec l'ensemble des parlementaires et des forces vives qui, d'habitude, ne sont pas toujours écoutées.

ORIANE MANCINI
Un cauchemar, ça veut dire que ça va être un budget dur, le budget 2026 ?

SOPHIE PRIMAS
C'est un budget très difficile, vous savez, répondre à la baisse du déficit de l'État, passer de 5,4 à 4,7, plus faire face aujourd'hui aux nouveaux challenges, qui sont des challenges de réarmement et d'investissement dans notre industrie de la défense, ce sont des difficultés qui s'additionnent et qui sont difficiles et qui nécessitent…

ORIANE MANCINI
Et qui se traduiront comment ? Des économies qui toucheront les Français ?

SOPHIE PRIMAS
Ça ne peut pas être… et c'est justement là-dessus qu'on va travailler, c'est-à-dire que ça va être des choix, regarder comment aujourd'hui on exerce les missions de l'État, regarder si l'État doit exercer toutes ses missions ou doit en confier certaines à d'autres opérateurs, ça va être se demander comment on est organisé, si on peut être mieux organisé et plus efficient, ça va être se poser la question de la décentralisation pour l'efficacité de l'action, c'est la question de la simplification que nous sommes en train d'aborder, c'est tous ces domaines-là…

ORIANE MANCINI
C'est la question du modèle social aussi ?

SOPHIE PRIMAS
Non, vous savez, le Premier ministre a dit que notre modèle social ne pouvait pas être changé, il a raison, maintenant il faut qu'il soit modernisé et adapté, on ne peut pas être sur le même modèle social, on peut être sur le même modèle social et sur les mêmes idées, mais dans des modalités différentes, depuis 1945 les choses ont évolué, la démographie a été…

ORIANE MANCINI
Modèle et adapté, ça veut dire quoi ? Est-ce que par exemple la question du déremboursement des médicaments, qui a été une piste lors du précédent budget, peut être mise sur la table ?

SOPHIE PRIMAS
La question par exemple de l'allocation sociale unique, aujourd'hui quinze allocations sociales, quinze opérateurs qui distribuent les allocations, voilà on peut se dire…

CHRISTELLE BERTRAND
C'est une promesse de 2022 qui n'est toujours pas aboutie.

SOPHIE PRIMAS
Pardonnez-nous, on est là depuis cinq jours.

ORIANE MANCINI
Mais est-ce que ça veut dire, parce que c'est un débat aussi, est-ce que les retraités doivent être mis à contribution ?

SOPHIE PRIMAS
Mais je pense que chacun sera mis à contribution, donc ce qui est important…

ORIANE MANCINI
Y compris les retraités.

SOPHIE PRIMAS
Ce qui est important c'est que chacun se rende bien compte de la situation difficile budgétaire, difficile dans laquelle nous sommes aujourd'hui, devant une impasse qui dit qu'on ne peut pas faire des coups de rabot, et donc, il va falloir travailler tous ensemble pour rendre encore une fois de l'efficacité et surtout de la souveraineté budgétaire à la France, c'est la première souveraineté.

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire quoi ? Pas forcément de revalorisation de leur pension au niveau de l'inflation ?

SOPHIE PRIMAS
Tout ça c'est le travail qui est devant nous, et donc tout est ouvert, rien n'est fermé, tout est fermé, et donc le travail est devant nous.

ORIANE MANCINI
Sur les retraites justement Christelle, puisque vous aviez une question là-dessus.

CHRISTELLE BERTRAND
Oui, certains s'inquiètent quand même, je reparle du Parlement, qu'il n'y ait plus de grands textes à étudier, que le Gouvernement tente de contourner le Parlement. Sur les retraites, François BAYROU a promis qu'un texte serait étudié à l'Assemblée nationale, puis au Sénat, est-ce que ce sera le cas ?

SOPHIE PRIMAS
Tout va dépendre, vous savez, les règles du jeu, malgré toute l'effervescence qu'on entend autour de la fameuse réunion des partenaires sociaux, tout le monde dit : "Ah c'est fini, ça ne sert à rien, etc". Ce n'est pas vrai, ils sont au travail, certains ont choisi de partir, moi je leur dis, revenez si vous le souhaitez, parce que je pense que c'est très important ce dialogue paritaire, sur la question des retraites, il a toujours été question, et dans la lettre de cadrage du Premier ministre, qui leur a été envoyée au début du conclave, en tout cas de la réunion paritaire, la règle du jeu, c'est qu'il faut gommer les déficits à l'horizon de 2030, et maintenant tout est ouvert, et notamment sur les questions de modalité des retraites, sur les cas particuliers, des femmes, des carrières coupées, des carrières longues, etc. Tout est ouvert, c'est à eux de construire...

CHRISTELLE BERTRAND
Ça veut dire que s'ils ne trouvent ne serait-ce qu'un point d'accord, il y aura un texte discuté au Parlement ?

SOPHIE PRIMAS
C'est le contrat qu'a redit le Premier ministre plusieurs fois, c'est qu'effectivement s'il y a des points d'accord, et ces points d'accord peuvent être soit généreux, c'est-à-dire une architecture des retraites différentes globales, soit des points de modalité, mais là où il y aura des accords, nous prendrons…

CHRISTELLE BERTRAND
Et ce point d'accord ça pourrait être un retour du départ à la retraite à 62 ans, le Gouvernement accepterait de rediscuter de ça au Parlement ?

SOPHIE PRIMAS
Dans la mesure où, effectivement, on trouve un moyen de financement qui soit un moyen de financement partagé par l'ensemble des partenaires sociaux, et qu'au bout du compte, le déficit soit résorbé de façon pérenne. Je le dis bien de façon pérenne parce que ce dont il est question ici, c'est de trouver un système, de trouver un mode de financement qui fasse face à la fois aux défis démographiques, mais aussi aux défis financiers dans la…

ORIANE MANCINI
Est-ce que de l'avenir de la suite, de l'issue de ce conclave ne dépend pas l'avenir du Gouvernement BAYROU ?

SOPHIE PRIMAS
Mais c'est une question de responsabilité pour nous, vous voyez, véritablement, je pense qu'on a cette conviction que cette réforme des retraites doit être améliorée, qu'elle doit être modifiée pour la rendre pérenne, pour nos enfants, pour nos petits-enfants, parce qu'aujourd'hui on fait peser nos retraites, en tout cas, moi, je fais peser ma retraite dans quelques années, à ma petite-fille et à mes petits-enfants et à mes petits-garçons, donc ça, moi ça m'est insupportable, donc, il faut trouver ce système-là. Après, si on trouve un accord avec les partenaires sociaux, que l'Assemblée nationale décide de nous censurer sur un accord avec les partenaires sociaux, moi, je trouverai ça insupportable.

CHRISTELLE BERTRAND
Mais aujourd'hui, le débat n'est pas celui-là, Olivier FAURE dit, s'il n'y a pas de texte, nous censurons, il trouve en écho les propos de Marine Le PEN qui dit : "Je peux me fâcher alors sur d'autres sujets", il s'agit de la loi de programmation sur l'énergie, vous qui avez fait partie du Gouvernement BARNIER, est-ce que ces indices vous inquiètent ? Et ces paroles sur le retour du débat sur la censure.

SOPHIE PRIMAS
En fait, je pense qu'on est absolument conscients, tous, de la situation politique à laquelle nous devons faire face. Cette situation politique, c'est une situation qui nous a été donnée par les Français, qui ont élu à une Assemblée nationale sur laquelle il n'y a pas de majorité, il y a une majorité relative. Et donc, la question de la censure, elle se pose, j'allais dire, quasiment sur chaque texte. Donc nous savons que les équilibres de l'Assemblée nationale sont très difficiles.

CHRISTELLE BERTRAND
Vous considérez comme étant en sursis aujourd'hui ?

SOPHIE PRIMAS
Mais en permanence, en réalité, c'est la situation politique constante.

ORIANE MANCINI
Christelle, justement, sur la programmation pluriannuelle de l'énergie.

CHRISTELLE BERTRAND
Oui, Marine Le PEN s'est fâchée en disant que le texte ne serait pas soumis à débat au Parlement. Habituellement, il l'est. Là, vous avez visiblement décidé plutôt de passer par décret, pourquoi ?

SOPHIE PRIMAS
Alors, effectivement, d'abord, la loi dit qu'il faut passer ce texte et avoir ce débat au Parlement. Vous savez qu'il y a un texte de loi ici, une proposition de loi de Daniel GRÉMILLET, qui est vraiment le spécialiste, sénateur des Vosges, le spécialiste de l'énergie, avec d'autres, ici au Sénat qui travaillent sur ces questions depuis longtemps, qui avait fait un travail, un texte de loi qui a été adopté assez largement, ici, au Sénat, qui pourrait servir, effectivement, de réflexion pour une démarche parlementaire. Aujourd'hui, effectivement, on est plutôt sur une question, parce qu'il y a urgence, d'abord, il y a une urgence assez forte à passer ce décret et à réfléchir sur notre avenir énergétique, maintenant, de façon forte, parce qu'on est en retard, parce qu'on a pris beaucoup de retard là-dessus.

ORIANE MANCINI
Il n'y a pas que Marine Le PEN qui s'est fâchée. Il y a 165 sénateurs aussi qui ont écrit une lettre en disant : "On veut que ça passe au Parlement, on ne veut pas un décret", qu'est-ce que vous leur dites ?

SOPHIE PRIMAS
Ce décret est prévu dans les semaines qui suivent, effectivement, au Conseil des ministres. Je sais que le Premier ministre réfléchit à comment il peut encore mieux associer. Ce que je voudrais dire, c'est qu'il y a eu quand même des associations extrêmement fortes pour l'écriture de ce décret. Les parlementaires ont été associés, les Français ont été associés.

ORIANE MANCINI
Donc vous confirmez qu'il y aura un décret ?

SOPHIE PRIMAS
Je confirme que, pour l'instant, l'idée du décret est plutôt sur la table. Je vous confirme aussi que le Premier ministre réfléchit à la façon dont on peut répondre aux objections qui sont soulevées par les uns et les autres.

CHRISTELLE BERTRAND
Il hésite encore en train d'écrire un texte qui pourrait être discuté à l'Assemblée.

SOPHIE PRIMAS
Il n'y a pas d'hésitation, il réfléchit sur la meilleure façon de faire avancer ce sujet.

CHRISTELLE BERTRAND
Mais donc ça veut dire qu'un texte étudié par l'Assemblée est encore en… enfin la porte n'est pas fermée.

SOPHIE PRIMAS
L'engagement, moi, que j'ai partagé, hier, avec le Premier ministre, c'est qu'il y a une réflexion qui est en cours.

ORIANE MANCINI
Alors il y a un débat également sur le calendrier parlementaire. Est-ce que vous souhaitiez repousser, vous, le Gouvernement, l'examen du texte sur la fin de vie pour laisser la place à l'examen de la proposition de loi de Laurent DUPLON sur l'agriculture à l'Assemblée ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, la fin de vie est prévue pour un débat à la mi-mai. La question de la proposition sur les entraves à la production agricole portée par le sénateur, Laurent DUPLON va être inscrite à l'Assemblée nationale. Elle était inscrite en réalité, elle devait être inscrite cette semaine, mais en cinquième proposition des propositions de loi. Donc, quand on est en cinquième position pour voter les spectateurs, ça veut dire qu'il faut attendre que celle d'avant soit votée et aille au bout. Et en réalité, on s'est dit que c'est une mauvaise position pour cette proposition de loi qui est une proposition de loi attendue par les agriculteurs, souhaitée, qui fait l'objet d'un engagement de la ministre de l'Agriculture, Annie GENNEVARD. Et donc on l'a positionnée sur une semaine en mai, mais en première position, c'est-à-dire avec le temps pour l'examiner et le temps pour aller jusqu'au bout. Alors je sais que les agriculteurs sont impatients, ils ont raison de l'être, parce que depuis les promesses de Gabriel ATTAL, on a eu et une dissolution et une censure et des votes douloureux du budget qui retardent tout ça, mais nous sommes déterminés et l'engagement du Gouvernement est entier.

ORIANE MANCINI
Et sur la fin de vie, du coup, le calendrier ne bouge pas ?

SOPHIE PRIMAS
A priori, il y aura peut-être des ajustements, je ne suis pas ça au jour le jour. Le calendrier législatif est tellement plein, en particulier à l'Assemblée nationale, et tellement il ne reste pas une minute, c'est vraiment un casse-tête pour Patrick MIGNOLA qui s'occupe des relations avec le Parlement. Ce n'est pas stabilisé à quelques jours…

ORIANE MANCINI
Pour le moment, ça reste inscrit mi-mai, mais est-ce qu'il embête le Gouvernement ce texte ? Parce qu'on a l'impression que le texte sur la fin de vie…

SOPHIE PRIMAS
Non, non, le Premier ministre a dit assez rapidement dans les premiers jours qu'il était attaché à ce qu'il y ait un débat et que le texte, effectivement, scindé deux parties, une sur les soins palliatifs et une sur l'aide à mourir, soit examiné en même temps, avec des votes en même temps, et qu'il serait au calendrier, la session ordinaire.

ORIANE MANCINI
Donc à la mi-mai. Il y a un autre texte qui fait débat, c'est la réforme du mode de scrutin au municipal, à Paris, Lyon, Marseille. Est-ce que vous pensez que ce texte ira au bout et entrera en vigueur pour les prochaines municipales ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, aujourd'hui, il est inscrit, donc le débat va se passer au Parlement

ORIANE MANCINI
Début avril, à l'Assemblée.

SOPHIE PRIMAS
Vous n'ignorez pas qu'il y a des réticences extrêmement importantes, d'ailleurs, sur tous les bancs, à la fois de l'Assemblée nationale et du Sénat. Je sais que le Sénat a des réserves très importantes, à la fois sur le fait qu'on dissocie la gouvernance, en fait, de Paris, Lyon, Marseille, des compétences des arrondissements ou des mairies. Je sais qu'il y a des questions assez importantes sur une loi organique qui manquerait à cette loi, en disant, mais alors, le cumul des mandats, comment il s'exerce avec la nouvelle gouvernance, mais alors, les élections sénatoriales, comment est-ce qu'on fait ça à partir de cette nouvelle gouvernance ? Puis il y a des questions, par exemple, à Lyon, qui sont des questions techniques. Comment on fait, dans cette nouvelle loi, telle que les deux rapporteurs l'ont proposée à l'Assemblée nationale, pour élire, faire trois élections en même temps à Lyon ? Par exemple, la métropole, la mairie de Lyon, les mairies d'arrondissement.

ORIANE MANCINI
Vous ne vous semblez pas très convaincue par cette loi, vous ?

SOPHIE PRIMAS
Écoutez, on verra. Il y a des questions importantes qui se posent, me semble-t-il. Bon, donc, on verra le débat parlementaire.

ORIANE MANCINI
Mais est-ce que changer le mode de scrutin à moins d'un an, ça fait un peu de tripatouillage ?

SOPHIE PRIMAS
Et puis, il y a cette question-là, en ne traitant que le mode de gouvernance et l'élection, effectivement, peut-être qu'on pourrait être, en tout cas, le passage de cette loi peut apparaître…

ORIANE MANCINI
Vous espérez que le Sénat le bloque, du coup ?

SOPHIE PRIMAS
En tout cas, qu'on réponde aux questions qui sont des vraies questions et qui sont des questions autour de ces trois élections.

ORIANE MANCINI
Christelle ?

CHRISTELLE BERTRAND
Dernière question. Dans la longue liste des chantiers en suspens qu'on a évoqués, il y a aussi ce grand débat dont a parlé le Premier ministre autour du thème "Qu'est-ce qu'être français ?". Est-ce qu'il est toujours d'actualité ? On entend parler d'une annonce, peut-être le 1er avril. Est-ce que vous pouvez nous le confirmer ?

SOPHIE PRIMAS
Alors, effectivement, il est toujours d'actualité. C'est un engagement du Premier ministre. Donc, aujourd'hui, le Premier ministre est en train de travailler sur les modalités. Et effectivement, il fera une déclaration, je pense, tout début avril. Il choisira bien l'endroit où il fait cette déclaration.

CHRISTELLE BERTRAND
Et ça pourrait être où, par exemple ?

ORIANE MANCINI
Ça pourrait être où, l'endroit ?

SOPHIE PRIMAS
Il y a plein d'endroits.

CHRISTELLE BERTRAND
Le CESE, par exemple ?

SOPHIE PRIMAS
Il y a des institutions. Par exemple, il y a le CESE, il y a l'Institut de France, il y a des institutions françaises.

CHRISTELLE BERTRAND
Ce grand débat pourrait être lancé le 1er avril, c'est ça ?

SOPHIE PRIMAS
Ce grand débat, le Premier ministre l'annoncera. C'est à lui de l'annoncer. C'est son idée. C'est à lui de l'annoncer. Les modalités seront annoncées. Ce que je peux vous dire, c'est que probablement, dans le début d'avril, il fera une déclaration concernant ce grand débat qui n'est pas enterré.

ORIANE MANCINI
Un dernier mot, très rapidement, puisque vous ne vous en cachez pas. Vous soutenez Bruno RETAILLEAU pour la présidence des Républicains. Est-ce que vous avez des doutes sur la sincérité du scrutin ?

SOPHIE PRIMAS
Je ne vais pas rentrer dans ces considérations de bas étage.

ORIANE MANCINI
Ah, non mais, par exemple, le camp de Laurent WAUQUIEZ ne veut plus travailler avec l'haute autorité.

SOPHIE PRIMAS
Oui, la politique de la chaise vide, je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée. Moi, j'appelle à beaucoup de calme. Je connais à la fois bien son directeur de campagne, à la fois bien ses soutiens, notamment Florence PORTELLI. On a tous à cœur que cette élection ne soit pas une confrontation. On a tous à cœur qu'il y ait le moins d'énervement possible. Il y en a toujours, surtout que comme il y a deux candidats, il y a forcément une confrontation, il y a forcément un peu d'énervement. Mais, soyons les garants du calme, du respect des uns et des autres. Il y a des lignes qui sont différentes, il y a des hommes avec des caractères différents. Il faut penser au lendemain de l'élection et au fait qu'on travaille ensemble sur un projet pour 2027 qui soit un projet pour les Français.

ORIANE MANCINI
Merci, Sophie PRIMAS.

SOPHIE PRIMAS
Merci beaucoup.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir été notre invitée. Christelle, c'est le petit Émile, elle a une de votre journal, "La fin du mystère ?". Merci beaucoup.

CHRISTELLE BERTRAND
Merci Oriane.

ORIANE MANCINI
Merci Christelle d'avoir été avec nous. On passe au Club Des Territoires.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 28 mars 2025