Texte intégral
APOLLINE DE MALHERBE
Les maires France préoccupés par la sécurité de leurs habitants. Bonjour François-Noël BUFFET.
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Bonjour.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes le ministre près du ministre de l'Intérieur. Je précise que vous n'êtes pas dans ce studio, parce que vous êtes sur le terrain, précisément à Lyon. Et notamment sur ces questions de sécurité du quotidien. Grande étude menée auprès de 500 maires de France. On va y revenir dans un instant. Ils se disent abandonnés par l'État. Mais je voulais d'abord vous poser une question, vous l'avez peut-être entendue dans le journal de 7 h 30, des habitants en Seine-Saint-Denis, avec une école maternelle, quatre classes de maternelle, à qui on envisage, on propose éventuellement de déménager, parce que la cour de récréation des enfants est utilisée par les dealers, juste à côté d'un point de deal. Les enfants qui retrouvent même des sachets de drogue dans la cour. Finalement, est-ce qu'aujourd'hui, on se retrouve dans une situation où ce ne sont pas les dealers qui doivent partir, mais les élèves ou les habitants ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
En tous les cas, sur l'exemple que vous donnez, c'est le cas, et c'est proprement inadmissible et scandaleux. Et c'est aussi malheureusement la révélation de ce que l'on dit maintenant depuis plusieurs mois, à savoir que les stupéfiants, les drogues sont partout, sur tout le territoire, que ce soit urbain ou rural, dans nos écoles, et que nous avons bien raison d'avoir fait voter le texte sur le narcotrafic. Ces éléments juridiques, cette loi qui va nous donner des moyens supplémentaires pour lutter à la fois contre le haut du spectre, évidemment, en matière de stupéfiants. Je rappelle qu'on a voté le texte à l'Assemblée nationale la semaine dernière. Il sera en vote officiel demain. Et puis surtout, on a raison aussi de renforcer les pouvoirs des polices municipales pour pouvoir aussi, au quotidien, lutter contre ce fléau. Mais sur le fond, vous avez raison, il est impensable que l'on soit obligé de déménager une école à cause de l'action de voyous, de criminels, en réalité.
APOLLINE DE MALHERBE
C'est précisément ça qui est assez saisissant, et au fond, c'est un des meilleurs exemples de l'étude pour laquelle je voulais vous recevoir ce matin, François-Noël BUFFET. C'est le genre de difficultés auxquelles sont confrontées, aujourd'hui, les maires de France. 500 ont donc été, je le disais, entendu par l'IFOP, qui a mené une très vaste étude pour le centre de réflexion sur la sécurité intérieure. Et ce qui en ressort, c'est que la question de la sécurité est, à leurs yeux, un enjeu majeur, et en particulier pour ceux qui vivent et qui sont à la tête des grandes villes. Plus vous êtes en zone urbaine, plus la question de la sécurité vous paraît préoccupante. Ils se disent abandonnés par l'État. Qu'est-ce que vous leur répondez ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je leur réponds que ce n'est pas juste, plus exactement, que c'est injuste que de dire ça, puisque, au-delà de ce sondage du moment, cela fait plus d'un an que le Beauvau de la police municipale a été lancé par nos prédécesseurs, mais qui a subi malheureusement les vicissitudes d'une dissolution et d'une censure. J'ai repris le dossier au mois de février avec Bruno RETAILLEAU. Nous avons mené très, très, vite, en trois semaines, les dernières grandes réunions importantes, et que nous aurons un texte à proposer très vite, c'est-à-dire, avant l'été. Il est absolument nécessaire de renforcer les pouvoirs de nos policiers municipaux, que ce soit des petites ou des grandes communes, chacun ayant à adapter le dispositif à son propre territoire. Il faut en réaliser ce que nous voulons faire.
APOLLINE DE MALHERBE
Je précise d'ailleurs que vous-même, vous avez longtemps été maire de votre commune, c'était dans le Rhône. François-Noël BUFFET, lorsque vous dites qu'il faut renforcer les pouvoirs de la police municipale, aujourd'hui, c'est à l'appréciation des maires, justement, de décider s'il faut ou non armer les policiers. On se souvient évidemment, notamment, du débat au sein des maires écologistes. L'un à Bordeaux qui dit qu'il faut armer, l'autre à Grenoble qui dit qu'il ne faut pas armer. Est-ce que ça doit être une décision plus facile à prendre et est-ce qu'il faut plus d'harmonie sur le territoire ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
La décision, la police municipale est sous la responsabilité du maire, et cela doit le rester. Il doit avoir à sa disposition les outils juridiques pour permettre d'agir au quotidien et il doit pouvoir décider de tout. Il peut, de temps en temps, être à la disposition de la police nationale pour coordonner les actions, c'est-à-dire, en réalité, avoir ce continuum de sécurité que nous cherchons. L'objectif de notre texte, au-delà du matériel, au-delà de la déontologie, au-delà des responsabilités, c'est de donner plus de pouvoir. C'est quoi ? C'est pouvoir accéder plus facilement à certains fichiers qui sont interdits aujourd'hui. C'est pouvoir donner des amendes forfaitaires délictuelles en matière de stupéfiants, par exemple. C'est pouvoir contrôler les identités, c'est ce qu'ils demandent et c'est pouvoir s'inscrire dans ce continuum-là avec cette capacité-là que, pour l'instant, la loi ne donne pas. Nous sommes engagés notamment sur ces points-là. Et puis de rappeler, le point extrêmement important, c'est que le rôle de nos polices municipales, dont le nombre a doublé en 25 ans, ils sont 28 000, les policiers municipaux aujourd'hui, répartis sur 4 500 communes. Ils sont en première ligne de la lutte contre la délinquance.
APOLLINE DE MALHERBE
Qui paie ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
À Mulhouse, ce sont des policiers municipaux et des ASVP qui ont arrêté le criminel. Qui paie ? C'est évidemment la collectivité, puisque c'est une police municipale. Donc, c'est la collectivité qui équipe ces personnels, qui les loge bien évidemment. L'État intervient et peut intervenir en termes de subventions ou d'aides, je pense en particulier pour tous les sujets de vidéosurveillance qui ont été développés dans les communes, et qui ont montré leur efficacité, y compris parmi les plus récalcitrants d'entre nous, qui n'étaient pas d'accord. Ils sont enfin arrivés à l'idée qu'il fallait installer ces dispositifs parce que ça fait baisser la délinquance, parce que ça augmente les taux d'élucidation entre 20, 25 et 30%. Et donc, l'État aide par ces moyens-là.
APOLLINE DE MALHERBE
Vous avez vous-même évolué aussi sur cette question de la vidéosurveillance. 74% des maires interrogés disent qu'ils souhaitent simplifier les démarches administratives pour les installer. Donc, aujourd'hui, le problème n'est pas l'aide que vous leur apportez, c'est la complexité du système.
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Alors, ça fait partie des sujets de simplification en matière de procédures que l'on va aborder dans le cadre de la loi. Parce qu'au-delà de la simplification qui est nécessaire et de la rapidité d'installation souhaitée, il faut aussi, malgré tout, que l'on veille à ce que les installations soient faites dans de bonnes conditions et respectueuses des libertés individuelles, et qu'on n'ait pas une multiplication de moyens qui puisse atteindre à la vie privée. Donc, il faut qu'on soit sur cet équilibre-là. Mais il n'y a pas de difficultés. Nous savons faire. Les maires savent faire et l'État sait faire. Il faut qu'il conventionne plus rapidement, sans doute, avec les collectivités. Mais je crois que nous sommes sur le bon chemin. Et ce texte qui arrivera au mois de juin, qui tiendra compte de tous ces débats, va remplir cet objectif.
APOLLINE DE MALHERBE
François-Noël BUFFET, une dernière question sur les permis de conduire. On l'entend depuis ce matin, ça fait beaucoup réagir. Les professeurs d'auto-école, qui pour un grand nombre d'entre eux, demandent plus d'heures de conduite obligatoires, passant de 20 à 28 heures. C'est vous, au fond, François-Noël BUFFET, qui êtes en charge de cette question-là. Est-ce que vous estimez qu'il faut rajouter ces heures ou est-ce qu'il ne faut pas les rendre obligatoires ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Je crois que je suis un peu dans la même réaction que les auditeurs qu'il y avait précédemment, à savoir que ça dépend de chacun et que c'est la liberté de chacun de pouvoir s'adapter au nombre d'heures dont il a besoin. Il faut un principe obligatoire. Je ne suis pas sûr que ce soit le nombre qui fasse la qualité. En revanche, l'instruction du code comme un cours de classe, et pas simplement par Internet, me paraît d'une excellente utilité, car elle permet la compréhension immédiate et l'échange avec le moniteur. Je suis plutôt dans cet état d'esprit-là, sachant qu'effectivement, tout le monde n'est pas en capacité de réussir dès le premier coup. Écoutez, j'ai quelques souvenirs, ça s'est bien passé pour moi, un peu comme vous, d'après ce que j'ai compris, et comme beaucoup d'autres. C'est un peu plus compliqué pour d'autres. Qu'ils aient un peu plus d'heures, ça me paraît normal. Mais vraiment, c'est plutôt de l'adaptation en réalité, je crois.
APOLLINE DE MALHERBE
Merci beaucoup, François-Noël BUFFET. En revanche, l'idée peut être de rétablir la présence physique des élèves pour être vraiment dans l'esprit du code. Ça pourrait être utile. François-Noël BUFFET, ministre auprès du ministre de l'Intérieur. Merci d'avoir répondu à mes questions ce matin sur RMC.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 1er avril 2025