Texte intégral
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Indépendants – République et Territoires, sur le thème : " Revente de billets pour les manifestations sportives et culturelles : quelles actions pour protéger les consommateurs et lutter contre les fraudes et la spéculation ? ".
Je vous rappelle que dans ce débat, le Gouvernement aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque orateur pour une durée de deux minutes ; l'orateur disposera alors à son tour du droit de répartie, pour une minute.
Madame la ministre, vous pourrez donc, si vous le souhaitez, répondre après chaque orateur, une fois que celui-ci aura retrouvé sa place dans l'hémicycle.
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Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir inscrit à l'ordre du jour des travaux de la Haute Assemblée ce débat sur un sujet qui touche à la vie de nos citoyens. L'anecdote que vous avez relatée l'illustre bien.
En effet, il nous faut mener une réflexion sur l'encadrement de la revente des billets. Vous avez commencé à le faire d'abord en posant une question écrite, laquelle, vous l'avez rappelé, était adressée à mon prédécesseur, puis en menant des auditions et en déposant une proposition de loi. Finalement, vous avez préféré organiser ce débat, reconnaissant l'existence de multiples obstacles juridiques et de difficultés d'approche sur un certain nombre de points.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette évolution dans votre réflexion. Votre travail montre qu'il est nécessaire de s'attaquer à ce problème.
Je rappelle que 42% des Français de moins de 35 ans se déclarent coutumiers de ces pratiques, qui se sont développées en 2024 à l'occasion des jeux Olympiques et Paralympiques.
Je suis tout à fait favorable à ce que soient engagés une concertation et un dialogue entre les organisateurs, les plateformes, les parlementaires, donc bien entendu, vous-même, monsieur le sénateur.
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Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite tout d'abord saluer l'initiative du sénateur Cédric Chevalier qui, en soulevant la question de l'encadrement des plateformes de revente de billets, ouvre un débat nécessaire sur une pratique largement répandue chez les Français, notamment parmi les jeunes générations.
Le Gouvernement comprend pleinement les préoccupations qui sont à l'origine de cette initiative et reste ouvert à un dialogue constructif et approfondi. Vous avez été nombreux à exprimer ici votre souhait d'un tel dialogue.
La décision prise par vous-même, monsieur le sénateur Chevalier, de retirer la proposition de loi initiale pour la remplacer par un débat parlementaire, est particulièrement louable. Elle illustre une méthode de travail exemplaire, marquée par un large processus d'auditions, que vous avez évoqué, et par une véritable écoute des différents acteurs économiques et politiques concernés. Je tiens donc à vous remercier chaleureusement pour votre démarche.
Sur le fond, l'idée de faciliter la revente de billets par un encadrement clair des plateformes numériques est séduisante pour nombre de nos concitoyens, en particulier les jeunes, qui recourent fréquemment à ces pratiques, même lorsqu'elles sont en contradiction avec les conditions générales des événements.
Cependant, les incidents comme ceux qui ont marqué la finale de l'Euro de football au Stade de France nous rappellent que les risques de fraudes, de faux billets et d'atteintes à la sécurité demeurent très élevés, y compris avec les règles restrictives actuelles.
La loi de 2012, en l'état, ne permet pas à la DGCCRF d'intervenir. Le seul levier dont dispose cette direction pour agir sur ce sujet est celui des pratiques commerciales trompeuses. Par ailleurs, les plateformes étrangères posent également problème, car elles sont, en pratique, difficilement atteignables. Il est donc nécessaire d'engager une réflexion sur ce sujet.
Toutefois, comme vous l'avez souligné, plusieurs difficultés fondamentales subsistent, qui expliquent que le Gouvernement n'aurait pas pu soutenir la proposition de loi en l'état.
D'abord, un billet constitue non pas un droit de propriété, mais un droit d'accès à un événement précis, soumis aux conditions fixées par l'organisateur. Autoriser la revente libre sans le consentement explicite de ce dernier pourrait remettre en cause ce principe fondamental.
De plus, la suppression du caractère nominatif des billets pose un problème sérieux de sécurité publique. Nombre d'entre vous ont évoqué cette préoccupation. Elle pourrait notamment permettre à des individus interdits de stade d'accéder à des manifestations et de contourner ainsi les mesures préventives mises en place pour protéger le public, qui sont essentielles à nos yeux.
Par ailleurs, l'accès effectif aux stades pour les consommateurs achetant leurs billets via une plateforme de revente n'était pas suffisamment sécurisé dans cette proposition de loi. Sans garantie juridique solide, les premiers pénalisés auraient pu être les consommateurs eux-mêmes.
Enfin, cette initiative présentait le risque de favoriser l'augmentation des phénomènes de fraude et de marché noir, ainsi qu'une spéculation préjudiciable au pouvoir d'achat des consommateurs.
Face à ces constats, que nombre d'entre vous ont également faits, le Gouvernement considère que l'évolution législative envisagée dans cette proposition de loi n'était pas souhaitable.
Pour autant, il nous faut agir, et sur ce point, je vous rejoins, car la situation actuelle n'est pas satisfaisante. Nous privilégions ainsi une approche fondée sur la concertation et le dialogue entre les plateformes, les organisateurs d'événements et les consommateurs, ainsi que sur un travail conjoint avec les parlementaires. Vous avez été nombreux, avec Cédric Chevalier, à formuler des propositions variées et des pistes d'amélioration, et je vous en remercie. Ces contributions vont permettre d'alimenter la réflexion et le débat.
Je réaffirme donc ici la volonté du Gouvernement de poursuivre le travail engagé, en collaboration avec d'autres ministres, notamment Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, et Rachida Dati, ministre de la culture, avec toutes les parties prenantes et vous-même, monsieur le sénateur Cédric Chevalier.
L'objectif est d'aboutir à un consensus efficace, respectueux des enjeux de sécurité, du droit des consommateurs et du bon fonctionnement économique et juridique du secteur. Je reste bien entendu à votre disposition pour poursuivre ces échanges. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et Les Républicains.)
source https://www.senat.fr, le 3 avril 2025