Texte intégral
ADRIEN GINDRE
Bonjour Philippe TABAROT.
PHILIPPE TABAROT
Bonjour.
ADRIEN GINDRE
Vous présentez ce matin un plan très attendu pour renforcer la sécurité des transports scolaires notamment en matière de drogue - on va en parler - puisque le 30 janvier dernier, à Châteaudun, une lycéenne notamment avait trouvé la mort dans un accident de car scolaire. Le conducteur avait été contrôlé positif aux stupéfiants. Comment on fait pour que cela ne se reproduise pas ?
PHILIPPE TABAROT
Vous avez rappelé ce terrible fait divers où je m'étais rendue immédiatement en Eure-et-Loire, et où j'avais pu constater ce terrible accident et le décès de la petite Johanna, je crois qu'il y a trois fléaux concernant la question des cars en général, et plus particulièrement des cars scolaires : c'est le fléau de la vitesse, c'est le fléau de l'utilisation de téléphones portables, et c'est l'utilisation, comme dans notre société, je dirais, beaucoup plus accrue des produits stupéfiants.
ADRIEN GINDRE
Ce qui était le cas sur ce cas précis.
PHILIPPE TABAROT
Ce qui était le cas sur ce cas précis. L'enquête dira si les deux autres fléaux dont je vous ai parlé étaient responsables de l'accident, ou non, mais en tout cas, contre ces trois problématiques très fortes que nous souhaitons lutter à travers le plan que j'aurais l'occasion de tout à l'heure.
ADRIEN GINDRE
Et donc, par quelles mesures ça va passer ?
PHILIPPE TABAROT
Une quinzaine de mesures… Nous allons présenter ce matin, avec mon collègue François-Noël BUFFET, ministre délégué à l'Intérieur, avec Bruno RETAILLEAU, avec lequel nous avons beaucoup travaillé. Après, ce fait divers terrible, notamment avec un certain nombre de contrôles, qui nous a qui fait, quelque part, prendre la mesure de l'importance du phénomène, avec plus de 10 000 contrôles réalisés, et avec des conducteurs… Alors certes, ils ne sont pas majoritaires, bien au contraire, parce qu'il y a 30 000 conducteurs qui font leur travail bien, je dirais, dans de bonnes conditions pour la sécurité de nos enfants, mais des personnes qui, le matin, se lèvent pour aller travailler, et sont sous l'emprise de stupéfiants, et vont amener nos enfants à l'école primaire, au collège ou au lycée.
ADRIEN GINDRE
Qu'est-ce que vous allez donc pouvoir faire pour empêcher - j'y reviens – que cela se reproduise ?
PHILIPPE TABAROT
Alors, nous avons souhaité, avec les opérateurs de transport, avec les entreprises, multiplier les contrôles, au sein même de l'entreprise, de manière inopinée, concernant les stupéfiants, renforcer également les contrôles de police très régulièrement, avoir une meilleure formation de ces conducteurs sur les risques des produits stupéfiants notamment, utiliser des technologies nouvelles sur la fabrication de bus pour sécuriser encore un petit peu plus les enfants - je pense notamment aux questions de port de la ceinture et autres - l'utilisation de caméras qui puissent permettre, en cas de problème, d'alerter le conducteur sur une perte d'attention, la possibilité aux enfants de pouvoir immédiatement, à travers un numéro de téléphone, contacter des personnes référentes pour dire que quelque chose se passe dans le bus qui n'est pas conforme à ce qui devrait se passer… Bref, des mesures qui font que nous devons prendre en compte cette situation. Même, je veux rassurer quand même les parents aujourd'hui qui voient quels que soient leurs enfants, partir de la boue au ventre dans l'école scolaire, ça touche 158 accidents non mortels environ par an, mais c'est pratiquement un jour sur deux, et un accident est un accident de trop.
ADRIEN GINDRE
Philippe TABAROT, revenons sur la question des tests, pour être sûr d'avoir bien compris. Ce sont des tests qui seront aléatoires, à quelle fréquence et de quel type de test on parle pour détecter quoi ? Des tests salivaires qui pourront détecter tous les types de drogue ?
PHILIPPE TABAROT
Ce seront des tests qui seront opérés par les entreprises de transport plusieurs fois dans l'année, de manière aléatoire, bien sûr, des tests de police. Et puis également - et là, c'est à une échéance de plusieurs mois - mais je souhaite que l'on travaille énormément sur ces questions, et que la filière puisse avancer sur quelque chose qui puisse permettre de contrôler les chauffeurs dès qu'ils montent dans le bus, un petit peu dans l'esprit de ce qui s'était fait il y a quelques années avec les éthylotests dans les années 2010, et qui a plutôt bien fonctionné…
ADRIEN GINDRE
Ça sera pour bloquer le démarrage.
PHILIPPE TABAROT
…et éradiquer en grande partie l'alcool au volant. Ce sera pour stopper le démarrage, mais ça, ça demande encore quelques mois pour que la technologie puisse être avancée, notamment pour pouvoir contrôler tout type de drogue, que ce soit le cannabis, mais malheureusement quelquefois la cocaïne ou des dérivés comme la kétamine et autres.
ADRIEN GINDRE
En cas de contrôle positif, quelles seront les sanctions contre ces chauffeurs ? Est-ce que par exemple un chauffeur contrôlé positif sera définitivement empêché de conduire un car scolaire ?
PHILIPPE TABAROT
Écoutez, il le sera pour une période suffisamment dissuasive avec des sanctions qui seront aggravantes quand on conduit des enfants. Et à travers ça, nous avons un texte législatif qui va passer dans les semaines à venir, qui a été porté par le député Éric PAUGET concernant le délit d'homicide routier, qui existera pour tous les automobilistes. C'est pour lutter contre cette notion d'homicide involontaire qui révolte quelques victimes ou quelques familles de victimes à juste titre. Et il y aura des peines aggravantes bien sûr pour les conducteurs de bus, notamment pour enfants et adolescents.
ADRIEN GINDRE
Vous avez parlé de la possibilité d'alerte via un numéro de téléphone et d'alerte par des caméras pour le conducteur. Comment ça va se passer concrètement ? Comment est-ce qu'on saura qui on contacte et comment ?
PHILIPPE TABAROT
Concrètement, les enfants sur leur siège auront le rappel de l'obligation de porter la ceinture qui est indispensable et qui évite beaucoup d'accidents mortels. Et deuxièmement, un numéro à prévenir immédiatement en lien avec l'établissement et les informations porteront, puisque ce plan a été mené également en lien avec l'éducation nationale pour alerter immédiatement et que le chauffeur soit prévenu qu'une anomalie se passe dans son car qu'il soit ou non responsable.
ADRIEN GINDRE
Je voudrais également, Philippe TABAROT, qu'on évoque avec vous la grève qui se prépare à la SNCF pour la semaine prochaine au moment des ponts du 8 mai, d'ailleurs même dès le début de semaine pour certains syndicats. Est-ce que de votre point de vue, cette grève qui s'annonce comme une semaine noire, nous dit SUD-Rail, cette grève est encore évitable ?
PHILIPPE TABAROT
La semaine prochaine sera déterminante. Vous savez que les syndicats ont la possibilité de déposer tout au long de l'année des préavis dits dormants et qu'ils peuvent déclencher à n'importe quel moment. Simplement, ils ont 48 heures, j'aurais souhaité que ce soit 72 heures, mais c'est 48 heures pour décider individuellement s'ils vont faire grève ou pas. Donc aujourd'hui, on ne peut pas savoir combien de cheminots sont susceptibles de faire grève. Par contre, l'entreprise SNCF, sa direction, en est je crois à la 35e réunion de discussion dans le cadre du dialogue social avec les cheminots.
ADRIEN GINDRE
Mais vous pensez que la direction peut encore faire des concessions pour éviter cette grève, que la direction a encore des pas à faire ?
PHILIPPE TABAROT
Je ne m'en mêle pas ; c'est une discussion entre l'entreprise et ses salariés. L'entreprise sait jusqu'où elle peut aller. Ce que je sais, moi, c'est que la SNCF ne peut pas se permettre d'avoir une nouvelle fois une grève qui serait lourde de conséquences, à la fois financièrement, avec des conséquences très pénibles pour les usagers et pour l'image de la SNCF qui pâtit continuellement de ces mouvements sociaux.
BRUCE TOUSSAINT
Qu'est-ce que vous dites aux usagers ? Est-ce que vous leur dites, organisez-vous autrement ?
PHILIPPE TABAROT
Moi, je dis aux usagers que l'entreprise SNCF va mettre tout en oeuvre pour, un, éviter la grève et si malheureusement l'appel à la raison que je lance encore aujourd'hui sur votre antenne n'est pas entendu, de pouvoir organiser un service qui se rapproche du service normal. Alors possiblement avec peut-être quelques modifications en termes d'horaire, en termes de service, mais en tout cas…
BRUCE TOUSSAINT
Vous espérez des perturbations limitées, si je comprends bien.
PHILIPPE TABAROT
C'est exactement ça.
ADRIEN GINDRE
Vous aviez dit que ces revendications n'étaient pas légitimes sur les salaires, les emplois du temps. Vous le pensez toujours ?
PHILIPPE TABAROT
Non, j'ai précisé sur ces types de personnel, sur les revendications salariales, après qu'il y ait des avancées sur l'organisation des plannings et sur les questions de formation professionnelle et de dialogue social, sans m'en mêler directement, mais je pense que ce sont des revendications qui peuvent s'entendre. Par contre, au niveau financier, par rapport aux efforts qu'a fait l'entreprise ces dernières années, une entreprise qui certes fait des bénéfices, mais avec des financements publics très importants et puis des bénéfices qui sont là pour investir dans le réseau. Nous avons le réseau ferroviaire en France, un des plus vétustes d'Europe, nous avons besoin de le régénérer, de la modernisation et ça passe par les bons résultats ces dernières années de la SNCF.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 mai 2025