Déclaration de Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative, sur le projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 dans les Alpes françaises, au Sénat le 24 juin 2025.

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Intervenant(s) : 
  • Marie Barsacq - Ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative

Circonstance : Examen du projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques de 2030 et Paralympiques

Texte intégral

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 (projet n° 630, texte de la commission n° 734, rapport n° 733, avis nos 714, 715, 720 et 711).

La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.

(…)

M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis aujourd'hui pour examiner le projet de loi relatif à l'organisation dans les Alpes françaises des jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de 2030. Ce texte vise à poser les fondations qui permettront de livrer les Jeux dans les meilleures conditions tout en veillant au respect du droit.

Pour rappel, la France s'est vue attribuer l'organisation des XXVIe jeux Olympiques et Paralympiques d'hiver par le Comité international olympique (CIO) le 24 juillet dernier. Cette attribution est le fruit d'une collaboration entre l'État, les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur (Paca) et Auvergne-Rhône-Alpes (Aura), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et le Comité paralympique et sportif français (CPSF).

L'attribution définitive des Jeux a été finalisée par la signature du contrat hôte olympique par le CIO le 9 avril 2025. Cette signature a été rendue possible grâce à la mise en place de plusieurs garanties apportées par l'État, notamment dans le cadre de la loi de finances pour 2025. Par ailleurs, le Premier ministre a signé les deux lettres de garantie nécessaires, l'une le 2 octobre 2024, l'autre le 14 mars 2025.

Nous devons collectivement mesurer la chance unique que nous avons d'organiser les jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 dans notre pays, six ans seulement après les Jeux de Paris 2024. Ils auront lieu du 1er au 17 février 2030 pour la période olympique et du 1er au 10 mars 2030 pour la période paralympique.

À cette occasion, nous accueillerons en France plus de 3 200 athlètes, 3 000 journalistes et 20 000 volontaires. Environ 2 millions de billets seront mis en vente. Au total, une vingtaine de collectivités locales françaises seront engagées dans ce magnifique projet.

La capacité à livrer un tel événement repose bien évidemment sur les organisateurs, qui jouent un rôle majeur, mais aussi sur l'engagement sans faille des forces de sécurité. Enfin, rien ne serait possible, je tiens à le souligner, mesdames, messieurs les sénateurs, sans votre travail, qui permet de doter le comité d'organisation d'un arsenal législatif donnant à chacun les moyens de remplir ses missions dans les meilleures conditions.

Tel est précisément l'objet de ce projet de loi : donner collectivement les moyens de réussir l'aventure des jeux Olympiques et paralympiques de 2030 dans les Alpes françaises. Ce texte est en quelque sorte une boîte à outils, qui permettra de réaliser les différents ouvrages nécessaires ; elle doit rester opérationnelle, précise et aussi concise que possible.

Ce projet de loi s'inscrit dans la continuité de l'expérience acquise, en reprenant les dispositions des précédentes lois votées en 2018 et en 2023 pour l'organisation des Jeux de Paris de 2024.

Aujourd'hui, nous renforçons ou nous améliorons certains dispositifs et nous en adaptons d'autres aux particularités des zones de montagne. Enfin, nous proposons de nouvelles mesures, utiles, en nous fondant sur le retour d'expérience des Jeux de Paris 2024.

La livraison d'un tel événement de portée mondiale est toujours complexe, mais elle suppose également de prendre en compte la spécificité d'un environnement, la montagne, confronté au changement climatique, auquel il faut s'adapter. Nous devons tous avoir conscience des craintes et des attentes que ce texte suscite. Ce projet doit être exemplaire du point de vue environnemental. Nous sommes bien sûr très attendus sur ce sujet.

De même, dans la période budgétaire que nous connaissons, nous devons trouver les voies et moyens pour organiser les Jeux dans le cadre d'un budget raisonné, raisonnable et maîtrisé.

Avant d'entrer dans le détail du texte, permettez-moi une petite incise plus générale. Souvenez-vous, nous avions, pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, de grandes ambitions. Nous voulions des Jeux populaires, inclusifs, responsables, paritaires, dans le cadre d'un budget maîtrisé. Nous avions évidemment aussi de fortes attentes en termes de médailles.

Vous en conviendrez, tous ces objectifs ont été atteints et certains même dépassés, le Comité d'organisation de Paris 2024 ayant dégagé un excédent budgétaire de 76 millions d'euros. Ce boni va revenir au sport français, et je m'en félicite. Néanmoins, cet excédent n'exclut pas, je tiens à être claire sur ce point, un budget ambitieux pour le ministère des sports. Je tenais à le dire, car certains, un peu facilement, pourraient être tentés de faire cette confusion.

À partir de 2018, dans la perspective des jeux de 2024 – j'étais bien placée pour le savoir –, la France avait doté le ministère des sports d'un budget important, ce qui nous a permis de faire preuve d'ambition de 2018 à aujourd'hui. Il ne serait pas acceptable d'agir différemment dans la perspective des jeux de 2030. Les Jeux doivent être non pas une parenthèse, mais un levier en faveur du développement du sport d'ici à 2030.

Ces nouveaux moyens ont permis le développement de la pratique, l'émergence de nouveaux équipements et la rénovation d'autres, ainsi que l'accueil de nouveaux pratiquants, notamment ceux qui sont en situation de handicap. Il nous faut poursuivre dans cette voie.

Néanmoins, j'ai pleinement conscience de la gravité de la situation budgétaire que nous connaissons ; elle exige que nous ayons le sens des responsabilités et que nous fassions un bon usage des deniers publics. Mais je vois également dans ce contexte une occasion formidable de renforcer l'efficience de l'utilisation des deniers publics.

Dans une période où notre jeunesse peut parfois sembler désœuvrée, où la santé mentale est érigée en grande cause nationale et où la sédentarité et les problèmes de santé qui y sont associés progressent, on ne peut pas faire l'économie du sport. De plus en plus d'études le démontrent, investir dans le sport permet de réaliser des économies dans de nombreux domaines. Investir dans le sport, c'est aussi prévenir de futures dépenses publiques.

Je suis tentée de dire, et je suis sûre que vous me rejoindrez sur ce point, que préserver le budget du sport revient à garantir un retour sur investissement économique, social et de santé publique à court, à moyen et à long terme. Ces débats, nous les aurons lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2026. J'y serai particulièrement sensible et attentive.

J'en reviens au texte. Il compte trente-sept articles, que l'on peut répartir en quatre grandes séries de dispositions.

Les premières sont relatives à la livraison des Jeux, plus particulièrement au respect des stipulations du contrat hôte olympique conclu entre les régions, le CNOSF et le Comité international olympique.

Ces dispositions permettent d'attribuer au Comité d'organisation la qualité d'organisateur de compétitions sportives. Elles transfèrent des droits de propriété intellectuelle du CNOSF au Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques (Cojop). Un certain nombre de mesures garantissent aussi les droits des partenaires, y compris en matière de publicité.

La deuxième série de dispositions vise à instaurer un cadre éthique et un contrôle strict de l'Agence française anticorruption, mais aussi de la Cour des comptes, ainsi qu'une extension des compétences de l'Agence française de lutte contre le dopage.

La troisième série de dispositions vise à faire en sorte que les Jeux se déroulent dans de bonnes conditions, notamment en matière de réalisation d'infrastructures, grâce à la simplification des procédures, comme cela a été fait lors de Paris 2024. Tel est notamment l'objet des permis à double état délivrés pour la construction des villages olympique et paralympique. Bien que les bâtiments aient une seconde vie, leur construction ne nécessite qu'un seul permis.

Ces dispositions, qui s'appuient sur la réussite de Paris 2024, tiennent également compte des spécificités des territoires de montagne. Ainsi, l'article 20, qui prévoit une expérimentation, vise à accélérer la rénovation énergétique des immeubles collectifs en copropriété, afin de lutter contre le phénomène des lits froids, un sujet crucial dans nos territoires de montagne. Il s'agit d'une mesure forte en matière d'héritage.

Certaines dispositions visent à prévoir de bonnes conditions de sécurité lors des Jeux en tirant les enseignements de Paris 2024.

Ces mesures s'appuient sur ce qui a fonctionné en 2024, tout en levant des freins qui ont alors été identifiés. Je pense aux interdictions de paraître qui, pour les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, passaient par la prise de mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (Micas) très contraignantes. La mesure proposée dans ce projet de loi est plus simple administrativement : le texte prévoit une interdiction de paraître limitée aux sites où se dérouleront les épreuves.

Enfin, l'article 36 vise à pérenniser les mesures d'assainissement prises pour les bateaux et les établissements flottants, en aval de Paris, afin de garantir la baignabilité de la Seine. C'est là un très bel exemple de l'héritage des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024.

Le texte initial a été examiné par les cinq commissions saisies au fond et pour avis. Un certain nombre d'amendements ont été adoptés, afin d'apporter des précisions utiles. D'autres ont visé à modifier substantiellement le texte et amené le Gouvernement à présenter des amendements de rétablissement.

Il en est ainsi de l'article 5, qui prévoyait d'autoriser les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur à contribuer à la garantie accordée au CIO pour couvrir un éventuel déficit du Cojop. Cette disposition ouvrait seulement une possibilité, laquelle ne pouvait reposer que sur l'existence d'un accord entre l'État et les régions.

Les régions ont indéniablement joué un rôle majeur dans l'obtention de ces Jeux. L'État a apporté les garanties demandées par le Comité international olympique. Au regard de l'enjeu de sobriété budgétaire qui nous incombe collectivement, il m'apparaît utile que chacun puisse être solidaire d'un déficit éventuel.

Il en va de même pour l'article additionnel 18 bis adopté en commission, qui prévoit que l'artificialisation inhérente aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2030 ne sera pas décomptée au titre de l'objectif "zéro artificialisation nette" (ZAN).

Si les projections d'artificialisation étaient importantes, la question se poserait en effet de ne pas obérer les capacités d'artificialisation des communes concernées. Cependant, le projet des Alpes 2030 sera particulièrement économe en surfaces à artificialiser, puisque 95 % des sites de compétition des Jeux existent déjà. Le seul bâtiment neuf réalisé le sera à Nice – c'est une patinoire –, sur un site déjà urbanisé.

Il en va de même pour les villages de Nice et de Briançon. Seuls les villages de Savoie et de Haute-Savoie seront réalisés sur du foncier non artificialisé, ainsi que, potentiellement, quelques bâtiments connexes. Alors que l'un des enjeux de ce projet est d'être vertueux d'un point de vue écologique, comptabiliser cette artificialisation raisonnable dans le ZAN me semble nourrir cette ambition.

D'autres amendements adoptés en commission visent à enrichir le débat parlementaire et à ouvrir des perspectives qui ne figuraient pas dans le texte initial. Je pense notamment à l'amendement de M. le rapporteur Kern ; ce dernier a supprimé la présence des parlementaires au sein du comité d'éthique et des rémunérations du comité d'organisation, préférant la remise d'un rapport annuel au Parlement. Il vous appartient de définir de quelle façon vous souhaitez être associés à ces enjeux importants, mesdames, messieurs les sénateurs.

En outre, Mme la rapporteure Berthet a déposé un amendement visant à compléter l'article 24 concernant les servitudes relatives aux pistes de ski et aux remontées mécaniques, afin d'y introduire l'accès aux tremplins et à la piste de bobsleigh. Le texte initial incluait les rampes de neige. Néanmoins, nous comprenons que cette précision puisse être utile, dans la mesure où elle ne crée pas d'a contrario.

L'adoption d'autres amendements a permis de clarifier certains points de la version initiale du texte. Ainsi de celui de M. le rapporteur Arnaud qui vise à clarifier les conditions d'extension du dispositif d'enquête administrative pour les personnels intérimaires travaillant au sein des entreprises de transport collectif. Il en va de même de l'amendement de M. le rapporteur Michallet tendant à corriger un oubli dans la version initiale du texte.

Enfin, différents amendements de Mme la rapporteure Demas ont pour objet de renforcer le cadre de contrôle et d'exercice des médecins amenés à intervenir pendant les jeux Olympiques et Paralympiques.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je connais votre attachement à la fois à la bonne organisation des jeux des Alpes françaises de 2030 et à la réussite collective et responsable de ce projet, sur le modèle des Jeux de Paris 2024. Je me réjouis par avance de la qualité des échanges que nous allons avoir sur ce projet de loi.


Source https://www.senat.fr, le 9 juillet 2025