Texte intégral
8 h 14. Le 7 minutes pour comprendre. Ce que changerait et quels seraient les risques s'il y avait augmentation des pouvoirs des polices municipales.
JOURNALISTE
Accroître les pouvoirs des policiers municipaux, c'est l'ambition du projet de loi dont la présentation est prévue début septembre en conseil des ministres. Projet porté par François-Noël BUFFET, ministre délégué auprès du ministre de l'Intérieur, chargé de la Sécurité du quotidien. Merci d'être avec nous. Et en plateau. Mathieu ZAGRODSKI, chercheur associé au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales.
CHRISTOPHE DELAY
On va commencer avec vous, François-Noël BUFFET. Quels sont les pouvoirs qui manquent aujourd'hui aux policiers municipaux ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Eh bien, aujourd'hui, en réalité, nos policiers municipaux sont face à la violence au quotidien en permanence. Et les maires qui en ont la responsabilité souhaitent pouvoir à la fois les préserver eux-mêmes et leur permettre de pouvoir agir pour la tranquillité de leur population. Donc, il y a quelques moyens supplémentaires nécessaires, en particulier pour donner quelques exemples : des dispositifs de contrôle ou de possibilité de délivrer ce qu'on appelle des amendes forfaitaires délictuelles. En matière de contrôle, par exemple, c'est la possibilité de pouvoir accéder à des fichiers de façon beaucoup plus facilitée, beaucoup plus facile, beaucoup plus efficace, beaucoup plus rapide, alors qu'aujourd'hui, ils sont limités. C'est évidemment l'impossibilité, par contre, il faut le dire, d'accéder à des fichiers de renseignement. C'est la possibilité de pouvoir regarder ce qu'il y a dans un coffre de voiture. C'est la possibilité de faire un contrôle d'identité qu'ils ne peuvent pas faire aujourd'hui. C'est la possibilité, demain, de pouvoir délivrer une amende forfaitaire délictuelle pour des gens qui, en trottinette, auraient bousculé, causé un accident sur un trottoir, pour pouvoir à la fois donner une amende et confisquer la dite trottinette. C'est la possibilité de pouvoir saisir l'usage de stupéfiants sur un constat ou de pouvoir donner une amende à des gens qui occupent illégalement un hall d'immeuble. C'est de cette nature-là. Mais c'est aussi la possibilité…
CHRISTOPHE DELAY
Donc, en faire comme des gendarmes ou des policiers, mais qui seront aussi bien formés que les gendarmes et policiers nationaux ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Vous savez, nos policiers municipaux, ils sont plus de 28 000 aujourd'hui. Ils sont bien formés. Ils ont une formation exigeante. Il y a un dispositif de contrôle qui existe, qui, bien sûr, va perdurer. Nous avons prévu, et nous allons prévoir dans le texte, un renfort déontologique, de formation déontologique, bien évidemment, mais nos policiers, ils sont déjà extrêmement bien formés.
JOURNALISTE
Mathieu, est-ce que les policiers municipaux ont besoin davantage de pouvoir pour être plus efficaces ?
MATHIEU ZAGRODSKI
Disons que c'est une demande de beaucoup d'entre eux. En fait, on voit depuis une grosse dizaine d'années une montée en puissance de ces policiers municipale. Le chiffre vient d'être donné. Ils sont 38 000 policiers municipaux en France. Ils étaient à peine une vingtaine de milliers à peu près autour des attentats de 2015. C'est vrai qu'aujourd'hui, les maires, les municipalités, en fait, captent la demande en fait de sécurité. En gros, les citoyens s'adressent à leur maire, à leurs policiers municipaux quand ils ont un problème, parce que la police nationale, la gendarmerie nationale, ont tendance un tout petit peu à se retirer de la petite délinquance, des incivilités du quotidien. Et c'est vrai qu'encore une fois, il y a cette demande, d'être mieux outillés juridiquement et matériellement, de la part des policiers municipaux.
CHRISTOPHE DELAY
Monsieur BUFFET, est-ce qu'il n'y a pas un risque d'une police municipale renforcée soit soumise peut-être de façon plus forte aux pressions de leur patron, en l'occurrence, aux pressions du maire ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non. Aujourd'hui, nos polices municipales, quand vous regardez dans nos grandes villes notamment, mais y compris dans des villes plus moyennes ou plus petites, ils sont aux ordres des maires, mais les maires ne sont pas non plus des fous furieux. Ils ont conscience du rôle qui est le leur et de leur pouvoir. Il ne faut pas croire que les maires sont tous des cowboy. Ce n'est pas vrai. Ce sont des gens qui sont extrêmement sérieux et qui font les choses extrêmement sérieusement. Mais je voudrais reprendre ce qui vient d'être dit. C'est vrai que la police municipale, aujourd'hui, c'est la troisième force de sécurité intérieure. Il ne faut pas l'oublier. Et que d'ici 2030-31, on imagine que le nombre de policiers municipaux va encore augmenter entre 10 000 et 11 000 personnels, ce qui est considérable. Et nous nous inscrivons en fait... Ce que nous voulons au ministère et au Gouvernement, c'est inscrire la police dans un continuum de sécurité.
CHRISTOPHE DELAY
Est-ce que c'est forcé de retour Monsieur BUFFET ? J'en connais de proximité qui ne dit pas son nom ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Oui, mais moi, j'assume. C'est le retour d'une police de proximité, en fait, qui a toujours été de proximité. C'est plutôt son renforcement, car la police municipale est une police de proximité par nature. C'est un renforcement de nos polices municipales, de leur pouvoir, de leur capacité à s'inscrire dans ce continuum de sécurité, qui se traduira par des conventions renforcées avec les préfets, entre les maires et les préfets, qui pourra se traduire également au niveau intercommunal. Il y a beaucoup de choses qui se font sur le territoire national, qui sont très efficaces. Et on parle de police municipale, mais n'oublions pas nos gardes champêtres. Nos gardes champêtres, aujourd'hui, ils sont un peu plus de 600. Ils ont été beaucoup plus nombreux par le passé, mais eux-mêmes font partie de la réforme, pour leur donner également plus de visibilité et plus de pouvoir.
JOURNALISTE
Alors, faut-il qu'elles soient toutes armées, ces polices municipales ? C'est la question aussi... A ce propos, écoutez Mathilde PANOT de la France insoumise en cas d'élection d'un maire LFI.
INTERVENANT
Si vous élisez un maire de la France insoumise, nous désarmerons la police municipale de votre ville si elle est armée ?
MATHILDE PANOT, PRESIDENTE DU GROUPE LA FRANCE INSOUMISE A L'ASSEMBLEE, DEPUTEE DU VAL-DE-MARNE
Oui. Oui. Et nous nous battrons pour qu'au niveau national, il soit réintégré dans la police nationale avec de la police de proximité. Quant aux caméras de surveillance, là aussi, il faut voir dans le cadre des contrats. Mais moi, je le redis : je ne suis pas favorable à ce qu'on mette des caméras de surveillance partout, qui n'ont, encore une fois, jamais prouvé leur utilité.
CHRISTOPHE DELAY
Voilà. En cas de mairie, donc, La France insoumise, il y aura désarmement des policiers municipaux et réintégration dans la police nationale. Votre réaction, Monsieur BUFFET.
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
C'est tout à fait scandaleux, irresponsable et, par ailleurs, complètement faux. La surveillance par la vidéo a montré son efficacité en terme d'élucidation des délits ou des ou des crimes, d'ailleurs, à plus de 30 %, en taux d'augmentation. C'est parfait. Une collaboration étroite avec la police nationale qui fonctionne très, très, bien. C'est par ailleurs un élément de sécurité, et de partout a été reconnu, qui fait l'unanimité. En dehors de LFI, mais on sait pourquoi. On sait pourquoi ils sont dans la polémique permanente et dans l'irresponsabilité. Vraiment, ne pas se rendre compte de ce qu'est la réalité, c'est de la polémique pour la polémique, hein. Franchement.
JOURNALISTE
80 % des policiers municipaux sont armés aujourd'hui. Est-ce qu'il faudrait que ce soit 100 %, et avec quelles armes ?
FRANÇOIS-NOËL BUFFET
Non, il ne faut pas être forcément à 100%. C'est à la discrétion des maires. Il est vrai que les maires dans les grandes communes ont besoin d'armer leur police municipale et ils le font. Dans des plus petites communes, ils n'en ont pas besoin et ils ne le font pas. Donc il ne faut pas vouloir faire une sorte de jardin à la française, comme on dit habituellement. C'est en fonction des situations, du territoire, et de la volonté du maire. On n'est pas obligé d'être à 100%. Ce qui compte, c'est l'efficacité et l'objectif. Et en fonction des territoires, cet objectif et cette efficacité est déterminée par le maire, naturellement, en accord, souvent d'ailleurs avec les préfets, parce qu'il y a toujours une discussion qui se met en place. Mais on n'est pas obligé d'atteindre absolument 100%.
CHRISTOPHE DELAY
Mathieu, l'une des questions concerne évidemment le financement de ces polices municipales. Est-ce que les municipalités, compte tenu évidement des contraintes financières que nous connaissons aujourd'hui, disposent des moyens pour le faire ?
MATHIEU ZAGRODSKI
C'est sûr que c'est compliqué. On est dans une période budgétaire qui est complexe pour tout le monde, y compris pour les collectivités territoriales. Et c'est vrai que recruter plus de policiers municipaux, mieux les équiper, les armer, tout ça, c'est un coût extrêmement important. Et la question est effectivement de savoir, quand vous me demandez : " Est-ce que les municipalités sont sans outil pour le faire ? »" En fait, ça varie énormément d'un territoire à l'autre. Et c'est un petit peu ce qui est reproché à ce développement des polices municipales, c'est qu'on va accentuer des inégalités territoriales entre des villes. Par exemple, en Nice, qui sont très fortunées, la police municipale de Nice, elle, est très, très, bien équipée, du point de vue du matériel, du point de vue de la vidéo. Et puis vous allez avoir des polices municipales, notamment dans des zones urbaines sensibles, avec peu de revenus fiscaux, qui ne vont pas avoir ces mêmes moyens pour développer leurs PM.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 juillet 2025