Déclaration de M. François Bayrou, Premier ministre, sur la dette publique, Châlons-en-Champagne (Marne) le 29 août 2025.

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Circonstance : Inauguration de la 79e foire de Châlons-en-Champagne

Texte intégral

(...) Je suis très heureux d'être avec vous depuis ce matin et de rencontrer, et de saluer avec vous, de retrouver avec vous Mesdames les ministres, à commencer par Catherine VAUTRIN, dont le caractère d'héroïne du département de la Marne est désormais avéré, avec Annie GENEVARD, le ministre de l'Agriculture, dans une foire largement consacrée à l'agriculture, avec Françoise GATEL, ministre de la Ruralité, dans un événement qui est entièrement – ou presque entièrement – construit autour de cette dimension de notre vie en commun, qui est la ruralité.

Je veux saluer Benoist APPARU, Monsieur le maire, le remercier du discours remarquable qu'il a tenu là. Je ne vais pas pouvoir dire quasiment un mot de plus que ce que tu as dit. C'est exactement la philosophie qui fait que nous sommes aujourd'hui dans un moment crucial de l'histoire de notre pays. Et tu as indiqué quelle était la dimension de responsabilité personnelle de chacun d'entre nous, dans les grands choix qui se présentent à nous.

Je salue les parlementaires. Je salue mon vieux complice Charles DE COURSON.

Je salue Mesdames et Messieurs les parlementaires, les sénateurs, Franck MENONVILLE (...). Cher Franck, je suis content de te rencontrer.

Les autres parlementaires, sénateurs en particulier, je les salue.

Monsieur le préfet de la région Grand-Est, merci pour votre présence assidue depuis ce matin. Monsieur le préfet Henri PRÉVOST, on est très heureux de vous offrir un pot d'adieu avec la totalité de ceux qui sont là.

Monsieur le président du conseil régional, cher Franck, à qui m'unissent des liens anciens et constamment renouvelés.

Monsieur le président du conseil départemental, Jean-Marc ROZE, qui est là-bas.

Mesdames et Messieurs, mes chers collègues, les maires et les élus.

Je salue Jacques JESSON, président de la communauté d'agglomération. Je salue Bruno FORGET, le commissaire.

Bruno FORGET, le commissaire général de cette manifestation, qui lui doit tant.

Je salue Pascal COLLARD, le président de la Chambre d'agriculture.

Je salue le président de la FNSEA, Arnaud ROUSSEAU, qui est là-bas, et tous les animateurs des mouvements professionnels et syndicaux que j'ai eu l'occasion de rencontrer, quelles que soient la diversité de leurs tendances et la dimension des accords ou des désaccords que nous avons.

J'aime beaucoup que cette vie démocratique du pays soit ainsi affirmée. Et j'ai été heureux de vous rencontrer tous et merci des mots d'encouragement très nombreux, très chaleureux et très spontanés que vous avez prononcés pour beaucoup d'entre vous ce matin.

On sait exactement où on en est. Chacun d'entre nous commence à mesurer la dimension exacte des rendez-vous que nous avons désormais, comme pays, comme nation, comme citoyens, et la responsabilité qui est la nôtre à l'égard de l'histoire de notre pays et plus largement de l'histoire du monde dans lequel nous sommes plongés aujourd'hui. Alors, il faut reprendre, en commençant par le plus large, la focale la plus large, l'objectif le plus large, le monde dans lequel nous sommes plongés. On a beaucoup parlé de bouleversements climatiques, de réchauffements et de désordres climatiques, et on constate qu'il y a une grande partie de la planète qui considère que ça n'est pas un sujet essentiel.

Les agriculteurs, eux, témoignent des évolutions qu'ils constatent simplement dans la végétation, dans leurs cultures, et pas seulement sur le thermomètre. Ce monde est livré à une loi qui est désormais impressionnante, bouleversante, et que nous avons cru écarter à jamais. Nous avons cru, tous autant que nous étions, que la guerre, la Seconde Guerre mondiale, mes chers amis, 30 millions de morts, que la Deuxième Guerre mondiale avait clos une époque et ouvert une autre. L'époque qu'on considérait avoir été close, c'était l'époque de la barbarie et de la loi du plus fort imposée par tous les moyens, depuis les moyens de la force militaire jusqu'aux moyens de la domination économique, ce qu'on appelait autrefois et qu'on doit continuer à envisager, on disait, c'est l'impérialisme. La volonté de ceux qui ont les moyens d'imposer leurs lois aux plus faibles, aux puissances moyennes ou aux petits États, aux communautés minoritaires. On pensait que la loi qui avait été créée après la guerre, c'était la loi du plus juste. On savait bien qu'il y avait, ici ou là, des manquements. On savait bien que c'était plus facile d'être très forts, que plus faibles devant la loi.

Mais on pensait... Et je dois dire qu'un certain nombre d'entre nous imaginaient que jamais sur le sol de notre Europe, on ne pourrait retrouver ça. Et puis, nous avons connu, pour certains, en niant jusqu'au bout que ça arriverait, nous avons connu le drame qui ressemble au début de la Deuxième Guerre mondiale, le drame de l'envahissement de l'Ukraine par la puissante armée russe, simplement pour asservir ce pays, pour que la puissance russe mette à sa merci l'État démocratique de l'Ukraine, à peu près de la dimension ou de la gamme de dimension d'un pays comme la France et par la surface et par le nombre des habitants. Et puis, ce jour-là, on a, pour certains d'entre nous, senti que c'était un moment de bascule, que le monde avait changé. Et aussitôt, on a entendu, on a vu des indices, des déclarations, des attitudes qui permettaient de penser que ça n'allait pas s'arrêter là. Et on a vu se développer des rumeurs du côté de la Chine et de Taïwan et puis surtout, on a vu se manifester, hélas, la guerre au Moyen-Orient avec l'assaut du Hamas du 7 octobre 2023, qui était purement et simplement un pogrom pour tuer, pour être le plus sauvage possible. Et puis, les conséquences de tout ça, qui, je crois, avaient été programmées, parce que je pense que ceux qui avaient médité cet assaut barbare contre des femmes, des enfants, avec les plus grandes marques de sauvagerie possible, je pense qu'ils imaginaient ce qui allait se produire et que ce qu'ils voulaient, en réalité, c'était qu'il soit désormais impossible de marcher vers la paix. Vous savez qu'il y avait ces accords qui se dessinaient, qui se profilaient, qu'on appelait les Accords d'Abraham, entre un certain nombre de pays de cette région, de pays arabes, de pays musulmans et des représentants d'Israël. C'est ces accords-là qui étaient tués. Nous avons connu la suite avec le Liban et avec l'Iran.

Et puis, nous avons rencontré, à la surprise de beaucoup d'observateurs, un autre basculement du monde. C'est que dans notre alliance des pays de liberté, les États-Unis avaient décidé, avec le président TRUMP, qu'ils imposeraient leurs lois commerciales, industrielles, militaires, y compris à leurs alliés, que nous avons été loyalement sans faille, et avec raison, depuis la conclusion de la guerre. Et ça s'est traduit par beaucoup d'oukases, de décisions imposées, ça s'est traduit en particulier par la création unilatérale de droits de douane, déséquilibrés, droits de douane que les États-Unis imposent à leurs alliés européens et que leurs alliés européens ont décidé de laisser passer sans réaction. Alors, je disais ce matin : j'entends très bien le raisonnement économique qui a fait que l'Europe a décidé, elle à qui on impose 15 % de droits de douane, on ne proposerait que 0 % de droits en échange pour les produits américains. J'entends très bien le raisonnement. Le raisonnement, il est simple, c'est : contrairement à ce que croient ceux qui font des annonces dans ce domaine, les droits de douane, ce n'est pas les producteurs qui les paient, ce n'est pas les importateurs qui les paient, c'est les consommateurs qui les paient. Et donc, nous ouvrons nos portes et les autres filtrent les leurs. Et du point de vue économique, je peux comprendre, mais simplement du point de vue de ce qu'est l'influence dans le monde. Nous qui avions bâti l'Union européenne, pour ne plus jamais avoir à accepter la soumission à l'égard de qui que ce soit, nous qui avions bâti l'Union européenne pour avoir accès à l'indépendance par l'Alliance à laquelle nous n'aurions pas eu accès tout seul. Nous qui avons bâti, nous, France, qui avons participé à l'édification de l'Union européenne, et qui l'avons fait en disant – le général de Gaulle, prophétiquement – et le président de la République aujourd'hui, en disant : "il n'est pas prudent d'accepter de dépendre de qui que ce soit. On ne sait jamais ce qui peut se produire." Je cite à peu près exactement ce que le général de Gaulle avait dit : "on ne sait jamais ce qui peut se produire." Il avait présenté un regard sur les États-Unis dans lequel il soulignait les risques qui pouvaient se développer par des tensions internes aux États-Unis dans le prolongement de l'histoire du XIXe siècle.

Nous avions porté cette vision, et aujourd'hui, nous sommes loin de cette vision-là. Et donc, la reconstruction d'une indépendance européenne, d'une volonté européenne, d'existence et de résistance, à partir de l'indépendance dont nous avons besoin, elle est nécessaire. Elle n'est pas nécessaire seulement dans cette confrontation des puissances. Elle est nécessaire pour nous, à l'intérieur. Et je redis devant vous ce que j'ai dit aux organisations agricoles : l'Europe est nécessaire pour que les règles du jeu entre nous soient équitables. Et nous disons, nous redisons, je dis au nom du Gouvernement français que ce que nous voulons obtenir, c'est l'égalité de traitement devant les normes, devant les règles. Ce qui doit présider aux règles au sein de l'Union européenne, c'est l'unité du continent européen. Et c'est la réciprocité, c'est l'obligation que si des règles sont imposées aux uns, elles doivent être aussi imposées aux autres. Et voilà toute la réflexion que nous avons conduite depuis des mois et des années, en particulier, dans le cadre de cette loi dans laquelle Franck MENONVILLE a joué, avec le sénateur DUPLOMB, un rôle aussi important. L'Europe où nous voudrions voir unité et volonté d'indépendance, cette Europe-là, elle est aujourd'hui loin de ce que nous attendions, il va falloir reconstruire tout ça.

Et qui peut reconstruire ? Eh bien, la France a, dans son histoire, constamment joué un rôle déterminant dans l'avenir européen. Mais pour que la France soit entendue, il faut qu'elle soit forte. Et c'est toute la question qui est posée devant nous et que je veux simplement rappeler. Nous avons besoin d'une France forte, c'est-à-dire qu'en premier lieu, nous avons besoin d'une France qui produise en biens, en richesses, en agriculture, en industrie, dans les activités intellectuelles, scientifiques, technologiques. On a besoin d'une France qui produise. Le problème aujourd'hui, c'est que la France produit moins que ses voisins, pas un peu moins que ses voisins, beaucoup moins que ses voisins. 10 à 15 % de moins que les pays qui nous sont les plus proches sur le continent européen, ce qui a une traduction simple : quand vous avez dans votre foyer un salaire de 2 000, si vous produisiez 15 % de plus, vous auriez un salaire de 2 300. Et pour l'État, quand vous avez un déficit comme celui que nous avons aujourd'hui, vous auriez les ressources nécessaires pour le combler. Et il ne faut pas oublier que la dimension principale du déséquilibre que nous connaissons dans ce qu'on appelle les finances publiques, c'est-à-dire dans les dépenses de l'État et des collectivités locales et de la Sécurité sociale, des hôpitaux, la question, c'est d'abord celle de la capacité à pouvoir mobiliser des ressources pour que tout cela vive. Donc, produire plus, il faut toujours commencer par ça.

Et puis, deuxièmement, être capable de remettre de l'ordre dans nos dépenses et dans nos finances. C'est pourquoi j'ai voulu poser devant tout le pays la question essentielle de la dette. Depuis 50 années, 51 ans, 51 comme le département, depuis 51 ans, la France n'a pas présenté un seul budget en équilibre. Alors, qu'est-ce que ça veut dire, un budget en déséquilibre ? Ça veut dire qu'à la fin de chaque année, il y a un déficit. Vous avez dépensé plus qu'il n'ait rentré de ressources dans votre budget. Et qu'est-ce que c'est le déficit ? C'est très simple. Ces sommes que vous avez dépensées en plus de vos ressources, ces sommes-là, vous les empruntez. Et en 51 ans, nous avons accumulé 3 350 milliards d'euros de dette. Alors, je rappelle à ceux qui prononcent le mot de milliard, comme ça, qu'un milliard, c'est 1 000 millions d'euros. 1 000 fois 1 million d'euros. Donc, nous avons accumulé 3 350 fois 1 000 millions d'euros de dette. Alors, on a trouvé beaucoup d'exemples ou d'illustrations pour le montrer, parce que c'est des chiffres qui dépassent de très loin la compréhension de chacun d'entre nous, surtout depuis que le calcul mental n'est peut-être plus une dimension essentielle. Alors, on se demande : de combien la dette du pays augmente-t-elle ? Augmente-t-elle ? Chaque seconde, elle augmente de 5 000 euros chaque seconde. Depuis 51 ans, de combien la dette du pays a-t-elle augmenté chaque heure de jour et de nuit ? Elle a augmenté de 12 millions d'euros chaque heure. Et tout ça, le propre de la dette, c'est que ce n'est pas celui qui la contracte qui doit la rembourser tout de suite, c'est qu'elle est remboursée plus tard. Et donc, qui va rembourser cette dette ? Qui devrait être en train de protester parce que cette dette, qui n'a pas été dépensée par les Gouvernements, qui a été dépensée par tous les Français, et je le prouve, qui a été dépensée par tous les Français, parce que 1 200 milliards de cette dette ont été consacrés aux retraites, parce que 600 milliards de cette dette ont été consacrés à la Sécurité sociale. Nous payons nos frais, nous faisons rembourser nos frais de maladie par nos enfants. Tout cela, c'est une accumulation. Est-ce que nous sommes un pays qui refuse de voir sa situation, ou est-ce que nous sommes un pays qui a décidé simplement d'ouvrir les yeux sur sa situation ? Et je disais deux catégories qui vont payer, ceux qui sont au travail, les salariés, et les jeunes qui arrivent. Et j'ai dit ce matin une formule, j'ai dit : "la dette, c'est l'esclavage des jeunes." Ce sont eux, sur lesquels on fait peser la légèreté ou la facilité des décisions qui ont été prises par les gouvernements successifs et par les Français qui les ont approuvés. Ce sont eux les victimes, c'est à eux qu'on manque, quand on dit : "ce n'est pas grave", c'est eux qu'on surcharge de ce poids de milliers d'euros par an pour chacun d'entre eux, parce qu'eux vont devoir travailler, pour assumer cette dette-là. Et si ce n'est pas le cas, alors nous allons vers des catastrophes encore beaucoup plus graves, parce que ça veut dire qu'un pays qui a besoin de ces ressources pour payer les fonctionnaires et pour payer les retraites, ce pays-là, il ne fera pas face à ses obligations. Et on sera, comme les autres, ceux qui nous entourent, obligés de couper dans les retraites, dans les salaires de la fonction publique et dans le nombre de fonctionnaires du pays de manière drastique. Ne me croyez pas sur parole. Allez sur internet voir ce qui s'est passé en Espagne, en Italie, en Grèce, en Suède, au Canada. Allez voir. Ne croyez pas sans vérifier. Si quelqu'un vous dit le contraire, vérifiez et vous verrez qui vous ment.

Alors, ça, c'est la situation d'aujourd'hui. Le constat que j'ai fait et que je fais avec vous et devant vous, nous ne pourrons pas soutenir une politique de redressement du pays s'il n'y a pas le soutien des Français. Parce qu'autrement, c'est l'épreuve de force. Ça veut dire que les gouvernants imposent aux citoyens, à ceux qui travaillent, à ceux qui sont à la retraite et qu'il y a un affrontement entre le haut et le bas de la société. Et ça, pour nous, pour moi, c'est impossible. Ce plan ou cette vision, nous la présentons pour protéger les Français, pour protéger ceux qui sont les plus fragiles et qui sont toujours ceux qui paient, c'est-à-dire ceux qui travaillent, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas fait d'économie, c'est-à-dire les femmes, les jeunes femmes qui élèvent toutes seules des enfants et à qui je pense tous les jours, parce que c'est elles qui vont, comme les plus fragiles, avec les plus fragiles, c'est elles qui vont se trouver en première ligne et ciblées. C'est exactement la question qui nous est posée. Et c'est une question... pas de politique, pas de Parti politique, c'est une question de citoyens et de pères et mères de famille. Et voilà où nous en sommes. Et il y a une deuxième dimension derrière tout ça. J'ai dit que c'était impossible si les Français n'apportent pas leur soutien, impossible si les Français n'apportent pas leur compréhension, impossible si ceux qui nous écoutent ne se disent pas : "Peut-être après tout, on ne sait pas, mais peut-être qu'il nous dit la vérité. Et s'il nous dit la vérité, alors ça a des conséquences pour notre vie personnelle." Et puis, il y a ceux qui disent : "Jamais nous n'accepterons ces efforts. Ce n'est pas à nous de faire des efforts. Il faut faire tomber le Gouvernement." Et je voudrais qu'on s'arrête une seconde à cette idée. On peut faire chuter le Gouvernement, les parlementaires ont le droit. Et pour moi, le Parlement est au centre de la vie nationale. Les parlementaires ont le pouvoir de faire sauter le Gouvernement… Et le lendemain ? Je voudrais que vous regardiez par la pensée l'addition des forces, la juxtaposition des forces qui affirment qu'ils veulent obtenir la chute du Gouvernement. Et excusez-moi de dire : les forces qui s'additionnent pour obtenir la chute du Gouvernement, elles sont en affrontement direct les unes avec les autres. Ce sont des forces qui, entre elles, il faut les voir à l'Assemblée nationale, se haïssent, s'insultent. Le Parti socialiste et LFI, au cours des universités du week-end dernier : que chantaient les participants à l'université de rentrée de LFI ? Ils chantaient : "tout le monde déteste le PS" et les dirigeants socialistes s'en sont émus, mais ils vont mélanger les voix. Je ne plaide pas ça pour des raisons politiciennes. Si j'ai pris le risque, c'est parce que je considère que l'essentiel de la vie du pays est en jeu. Et c'est parce que je considère que les citoyens disent tout le temps : "Oui, mais vous, les politiques, de toute façon, il n'y a qu'une chose qui vous intéresse, c'est de durer, qu'une chose qui vous intéresse, c'est de ne pas trop secouer la fourmilière, d'attendre que ça passe et que vous profitiez des avantages du pouvoir." Eh bien, pour une fois, il y a un Gouvernement qui décide que ce sont les Français, par leur influence sur les partis politiques et les parlementaires qui vont choisir. Mais vous mettez LFI et le Rassemblement national dans la même alliance pour faire tomber le Gouvernement ? Et qu'est-ce qu'il en sort derrière ? Il en sort le désordre et le chaos et l'image de la France livrée à ce choc des détestations et des haines.

Ma vision est exactement le contraire. Ma vision est que nous devons construire un pays uni. Et un pays uni, c'est un pays qui accepte un accord minimal pour agir et qui, après, se met autour de la table et discute mesure par mesure. Je suis ouvert à toutes les discussions, je l'ai dit dès le premier jour, et je l'ai montré dans ma vie assez souvent – un pays qui discute mesure par mesure de ce qu'il faudrait faire, mais qui ne nie pas la réalité et qui ne se livre pas à ces affrontements perpétuels. Ils vont voter ensemble. Regardez les hurlements à l'Assemblée nationale d'un bord sur l'autre, de LFI sur le RN et du RN sur LFI. Regardez la manière dont ils parlent les uns des autres. Regardez les éclairs d'animosité. Je ne participe pas, nous ne participons pas, le Gouvernement ne participe pas à ce déchaînement de violence et de mise en accusation. Pour moi, tous les parlementaires sont des parlementaires également respectables, je l'ai montré, je crois, tout au long de ma vie politique. Et le but à atteindre, ce n'est pas de séparer les Français en camps antagonistes. Le but à atteindre, c'est de les rapprocher, de les rassembler et de construire avec eux la compréhension minimale qu'il faut pour bâtir une nation. J'ai eu une grande différence, et je finis sur cette idée avec ces forces politiques-là : eux croient que la question, c'est de prendre le contrôle du bateau et de savoir qui va le gouverner et qui on va jeter par-dessus bord. Et moi, je crois qu'il n'y a qu'un bateau et que nous sommes tous sur le même bateau.

Je pense que, quelle que soit notre situation dans le pays, quelle que soit notre génération, quelle que soient nos responsabilités, nous sommes tous sur le même bateau. Et que la question n'est pas de jeter les uns par-dessus bord et que les autres aient le monopole du commandement. La question, c'est que nous arrivions à bon port. Ce qui impose le travail en commun, le rassemblement et l'engagement de tous les Français. Voilà la situation devant laquelle nous sommes. Et vous voyez bien que, sur deux ou trois points essentiels, la foire de Châlons ressemble à ça : 1) Il faut de la production. 2) Il faut de l'unité pour le pays (et Dieu sait que toutes tendances confondues, nous avons vécu cette unité). 3) Il faut de la lucidité, il faut le courage. C'est un mot qui est galvaudé, souvent. Il faut le courage de s'adresser à ses concitoyens comme on s'adresserait à son frère, à sa sœur, à son ami, en lui disant : "On a un vrai problème tous ensemble, et ce vrai problème… c'est le moment d'essayer de le résoudre". Pour ça, nous n'économisons aucun risque. Parce que si nous le faisions, personne ne croirait parmi les citoyens français.

Voilà pourquoi la foire de Châlons était le bon lieu pour que nous le répétions ensemble. J'ai adoré passer la matinée avec vous. J'ai adoré les exposants que je salue. J'ai eu beaucoup de reconnaissance pour les organisateurs. Et je remercie les élus d'avoir été le ciment de cette démocratie locale et de cette vie locale dont nous avons le plus urgent besoin.

Merci à tous.


Source https://www.info.gouv.fr, le 8 septembre 2025