Interview de M. Yannick Neuder, ministre de la santé et de l'accès aux soins, à RMC le 2 septembre 2025, sur l'envoi de médecins généralistes en renfort dans les déserts médicaux et les formulaires d'arrêts maladie infalsifiables.

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Média : RMC

Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Excellent réveil à tous, il est 7h44 sur RMC. Comment faire des économies tout en continuant à soigner ? C'est tout l'enjeu de cette rentrée. Bonjour Yannick NEUDER,

YANNICK NEUDER
Bonjour,

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes le ministre de la santé et de l'accès aux soins et désormais, c'est une vraie question, l'accès aux soins. Vous étiez en déplacement dans les Landes hier, vous êtes à Grenoble aujourd'hui, vous avez annoncé que l'envoi de médecins généralistes en renfort dans les déserts médicaux, ça sera effectif à partir de la semaine prochaine. Est-ce que ça veut dire, et vous le dites, ce matin, sur RMC, que vous avez trouvé assez de médecins volontaires ?

YANNICK NEUDER
Alors, effectivement ça va être une réalité, les déserts médicaux ne sont pas une fatalité. Alors je ne suis pas à Grenoble, aujourd'hui, puisque je serai dans l'Aude justement, pour continuer de déployer ce dispositif qui est un dispositif, un médecin près de chez vous. On avait édité en avril les cartes de 151 territoires particulièrement sous-dotés avec un âge des médecins élevé, un accès aux soins particulièrement difficile et d'ici une semaine, sous le principe d'une solidarité territoriale, des médecins vont pouvoir venir sur la base du volontariat, deux jours par mois, faire ces consultations pour rapprocher ce soin des patients qui, vous le savez, est une de leurs principales préoccupations.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous aviez listé 151 zones rouges prioritaires, notamment dans le centre et le sud-ouest. Il y a 57 médecins qui ont répondu présents.

YANNICK NEUDER
Non, le compte n'y est pas du tout. Ces 57 médecins, c'est pour uniquement le département des Landes. Donc, il y a un élan solidaire puisqu'à peu près hier, j'étais en Nouvelle-Aquitaine et sur la Nouvelle-Aquitaine, on dénombre à peu près 200 médecins, dont une cinquantaine, effectivement, sur le département des Landes. Et aujourd'hui, je suis en Occitanie et je serai dans le département de l'Aude et on trouve à peu près les mêmes chiffres. C'est à peu près 200, déjà au départ, médecins volontaires. Surtout que l'idée, c'est surtout aussi de permettre que ces médecins aussi soient revalorisés et ils auront donc, une prime, entre guillemets, d'engagement pour souligner leur solidarité territoriale vis-à-vis de leurs confrères, de 200 euros par jour.

APOLLINE DE MALHERBE
Qui s'ajoute à ce qu'ils gagneront par les consultations, évidemment.

YANNICK NEUDER
Exactement. Et puis, c'est surtout un dispositif qui est ouvert à tous les médecins. L'idée, c'est de ne pas déshabiller un territoire au profit d'un autre. Des médecins généralistes qui exercent déjà 5 à 6 jours par semaine, qui font entre 40 et 50 consultations, ne sont clairement pas la cible. Par contre, on sait très bien qu'il peut y avoir des médecins remplaçants qui n'exercent pas la totalité de leur temps, des médecins retraités, des médecins à temps partiel. Et donc, on les invite à faire ce dispositif de solidarité territoriale, qui est un engagement. Et ils permettent aussi de pouvoir apporter ce soin qui est tant attendu dans les territoires.

APOLLINE DE MALHERBE
Ça veut dire que vous avez le sentiment, aujourd'hui que le compte y est ? On est à combien précisément de médecins ?

YANNICK NEUDER
En gros, on a quasiment sur tous les territoires, sur les 151 territoires qui représentent à peu près 2,5 millions d'habitants, nous avons déjà pu identifier tous les lieux. C'est soit des salles communales mises à disposition par les élus, soit des centres de santé, soit des maisons de santé. Ça s'est identifié. Maintenant, on est en train de faire l'adéquation. Et donc, ça me permet aussi, grâce à votre message, de pouvoir dire à tous les médecins en France, s'ils ont envie de s'engager, ils peuvent contacter leur conseil de l'ordre. Le conseil de l'ordre est en train d'établir les plannings. Et nous allons progressivement, dans les semaines qui viennent, avoir quasiment nos 151 sites qui pourront bénéficier de ce dispositif. Un médecin près de chez vous qui va permettre clairement de pouvoir apporter ce soin qui fait tant d'efforts dans les territoires. Je pense que c'est le message de dire que ce n'est plus une fatalité, les déserts médicaux, et que si on demande peu à beaucoup de médecins, ça évite de demander beaucoup à peu. Et ça permet surtout de lutter contre ces déserts médicaux, parce qu'il y a bien sûr, d'autres vecteurs. Vous le savez, c'est la formation, c'est de former plus de médecins, de les former mieux.

APOLLINE DE MALHERBE
Le fameux numerus clausus dont on parle régulièrement.

YANNICK NEUDER
Qui a été supprimé le 18 juin.

APOLLINE DE MALHERBE
En attendant, ça veut dire qu'effectivement, vous estimez que ça va être une bonne réponse. Yannick NEUDER, il y a Bertrand qui…

YANNICK NEUDER
Je n'ai pas la prétention de dire que les déserts médicaux vont être réglés d'ici quelques semaines, bien entendu. Mais disons qu'on ne peut pas avoir un comportement de fatalité vis-à-vis de ces situations. Les patients ne peuvent plus attendre, les élus locaux sont désespérés. Que ça soit par la solidarité territoriale, par la formation de plus de médecins. C'est récupérer aussi nos étudiants en médecine qui sont à l'étranger. On a un système très sélectif, on a des étudiants qui sont en Roumanie, qui sont en Belgique, qui sont en Espagne. Les dispositifs, c'est de faire revenir nos étudiants français qui sont partis en Roumanie. Et puis c'est aussi les docteurs juniors. Vous savez, la médecine générale est devenue une spécialité. La quatrième année de spécialisation est une année de professionnalisation. Et là, il y aura un dispositif supplémentaire.

APOLLINE DE MALHERBE
Y compris s'ils ont fait leurs études de l'autre côté de la frontière ?

YANNICK NEUDER
Bien entendu. À un moment, il faut savoir récupérer l'ensemble de nos forces vives. La France doit garder la maîtrise de sa formation médicale. Il y a trop de besoins en France. Et c'est 3 700 médecins supplémentaires chaque année qui seront dans les territoires pour pouvoir justement avoir cette année de professionnalisation.

APOLLINE DE MALHERBE
Monsieur le ministre, je voulais dire un mot aussi des arrêts-maladie puisqu'ils vont être plus compliqués à obtenir avec des fiches qui seront infalsifiables. Alors évidemment, vous pointez le fait qu'il y a eu des augmentations et des fraudes sur les arrêts-maladie. Mais est-ce que vous n'avez pas peur de jeter aussi l'opprobre sur ceux qui nécessitent véritablement un arrêt ?

YANNICK NEUDER
C'est de jeter l'opprobre sur personne. Malheureusement, on ne choisit pas d'être malade. Et quand on est malade, on a la chance d'avoir, en France, un système de protection sociale qui vous permet justement de pouvoir arrêter de travailler pour vous soigner. Donc, l'arrêt-maladie n'est pas un droit. C'est une prescription médicale. C'est signé par mes confrères qui jugent si l'état de santé est compatible ou pas. Donc, il s'agit de culpabiliser personne, ni les patients, ni les médecins, ni les employeurs. Par contre, je crois qu'on est dans un dispositif responsable. Que ces arrêts-maladie, comme les ordonnances, deviennent infalsifiables, je pense que c'est une très bonne chose parce que la fraude est insupportable. Et je crois que les Français sont tout à fait prêts à faire des efforts du moment qu'ils soient juste répartis et qu'il y ait justement toute cette lutte contre la fraude qui ronge notre système social.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 septembre 2025