Texte intégral
PAUL BARCELONNE
Bonjour Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour !
PAUL BARCELONNE
Et merci d'être avec nous sur France Info. J-11 avant le vote de confiance demandé par François Bayrou. J-11 donc avant la probable démission du Gouvernement, est-ce que vous y croyez encore ou, ça y est, vous vous êtes fait une raison ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je voudrais revenir sur la question qui est posée lors de ce vote du 8 septembre prochain. La question qui est posée c'est " Est-ce qu'on partage le constat que la situation des finances publiques est très dégradée et que nous avons besoin de faire des économies massives et urgentes ? " C'est ça la question qui est posée.
HADRIEN BECT
Il n'en demeure pas moins, Agnès PANNIER-RUNACHER, que c'est quand même un format vote de confiance et que pour dire que la situation est dégradée, il n'y a peut-être pas besoin d'un vote à l'Assemblée Nationale.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est une façon de solenniser le moment. C'est une décision du Premier ministre, mais c'est une façon de solenniser le moment. L'article 49-1 ne parle pas de vote de confiance, et personne ne croit une minute que si on demandait au Rassemblement National, à LFI, ou même au Parti Socialiste de dire : " Est-ce que vous soutenez le Gouvernement de François BAYROU ? " Ils voteraient oui, tout le monde a bien compris qu'ils sont dans l'opposition. Ce que nous nous demandons, ce que le Premier ministre pose comme question, c'est une question beaucoup plus basique, c'est-à-dire " Est-ce qu'on peut se mettre d'accord sur le fait que la marche à franchir pour ce nouveau budget pour 2026 est de l'ordre de 40 milliards d'Euros ? "
HADRIEN BECT
Sauf qu'il a pris tout le monde par surprise.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et qu'il faut trouver les voies et les solutions, et qu'il faut travailler ensemble pour franchir cette marche. C'est ça. Ce n'est pas un chèque en blanc au gouvernement, évidemment, ce n'est pas pour ou contre le Premier ministre, ce n'est pas pour ou contre le Gouvernement.
HADRIEN BECT
Pardon, Agnès PANNIER-RUNACHER. Vous savez bien… Vous faites de la politique, vous savez bien qu'un vote, quand on vote pour, c'est souvent interprété comme un vote pour quelqu'un ; et donc quand on vote contre, on vote contre quelqu'un. Donc tout ça semble assez logique.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, mais je pense que c'est une facilité en fait.
HADRIEN BECT
C'est vieux comme le monde.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est une facilité parce que la question que nous posons, c'est une question sur la déclaration de Politique générale. Si dans la Déclaration de Politique générale, on était sur un grand projet sociétal, économique, etc. Mais ce n'est pas ce qu'on propose. Ce qu'on propose, c'est " Est-ce que oui ou non, on se dit que la situation des finances publiques est très dégradée ? Et est-ce que oui ou non, on est d'accord pour dire que la marche à franchir d'économie est de l'ordre de 40 milliards d'Euros ? " Pourquoi c'est important ? Parce que depuis quelques semaines, et par rapport aux différents points que le Gouvernement a fait sur la situation des finances publiques, il y a une tentation. Et je la comprends, ce n'est pas populaire de faire 40 milliards d'Euros d'économie, c'est difficile de faire 40 milliards d'Euros d'économie. Et donc il y a une tentation d'éviter cette question, de dire : " Toutes les mesures que vous proposez sont mauvaises. Mais par contre, je n'ai aucune alternative ". Et je vais être très claire. Moi-même, dans la copie budgétaire, il y a des mesures contre lesquelles je m'oppose. La suppression de deux jours fériés, je ne suis pas d'accord, je soutiens le fait que le travail paye plus.
PAUL BARCELONNE
Pourquoi vous n'êtes pas d'accord ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est parce que, je le redis, mon parti, Ensemble Pour la République, avec Gabriel ATTAL, nous sommes pour un travail qui paye mieux, qui paye plus. Donc deux jours fériés pas payés, ce n'est pas logique par rapport à notre ligne politique.
HADRIEN BECT
Vous l'avez dit à François BAYROU ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais peu importe.
PAUL BARCELONNE
Vous, vous pensez qu'on s'en prend aux travailleurs, que c'est gratuit ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Si vous voulez, notre travail politique, ce n'est pas de dire : " C'est scandaleux, on ne va rien faire ". Notre travail politique, c'est de dire : il y a 40 milliards d'Euros d'économies à aller trouver, eh bien, soyons capables de nous mettre autour de la table et de dire : " Par rapport à cette mesure, elle ne nous va pas, on en propose une autre qui nous paraît mieux. "
HADRIEN BECT
Mais donc... Attendez Agnès PANNIER-RUNACHER. Il faut qu'on puisse aussi vous poser quelques questions. Donc, dans les négociations qui vont s'ouvrir, vous appelez François BAYROU à renoncer à ces deux jours fériés et à trouver autre chose ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Dans les négociations qui vont s'ouvrir, j'appelle les différents groupes politiques, et d'ailleurs, je sais que chacun a déjà commencé à travailler sur le sujet, il y a des propositions qui ont été faites, de nous dire " Quelles sont les alternatives ? "
PAUL BARCELONNE
C'était un leurre, ces jours fériés. C'était quelque chose à mettre dans la corbeille et qui est, aujourd'hui, en capacité... On est en capacité de revenir dessus ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, je le redis : 40 milliards d'euros d'économies, c'est gigantesque. Moi, je suis né en 1974. Je crois que depuis mon année de naissance, on n'a jamais fait un effort aussi considérable. Donc, il y a forcément des mesures impopulaires. Et le sujet, aujourd'hui, c'est de se dire qu'on est tous dans le même bateau, qu'on a tous intérêt à faire atterrir ce budget, qu'on a du temps pour ça. On a du temps pour ça.
PAUL BARCELONNE
Là, le temps presse, hein.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Le budget, il doit être adopté avant le 31 décembre de cette année. Il ne s'agit pas de l'adopter le 10 septembre. Donc, on a du temps pour ça. On est des gens matures, on a de l'expérience politique. On se met tous autour de la table en essayant de trouver le chemin et en étant très clair sur le fait que les mesures qui seront prises ne seront pas nécessairement enthousiasmantes pour chacun des groupes politiques. Il faut aller chercher des compromis. C'est bon pour les Français. Et c'est très concret, la situation des finances publiques aujourd'hui. C'est la question des taux d'intérêt. Quand le taux d'intérêt de la dette française augmente…
HADRIEN BECT
On va revenir sur ça.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Attendez. Je vais juste dire ça : quand le taux d'intérêt de la dette française augmente, ce n'est pas juste pour l'État, c'est pour l'achat de votre voiture, c'est pour votre crédit conso, pour acheter de l'électroménager. Donc, ça nous concerne tous, on est tous dans le même bateau. Et on est capables de réussir à trouver un budget.
HADRIEN BECT
On va aussi revenir aussi sur les conséquences, Agnès PANNIER-RUNACHER.
PAUL BARCELONNE
Pardon. Vous dites : « une question de méthode ». Vous dites : " On va se mettre autour de la table, il faut faire des compromis. " Est-ce qu'il n'est pas trop tard, déjà ? François BAYROU dit…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Quatre mois avant le 31 décembre ? Non, je pense qu'il n'est pas trop tard.
PAUL BARCELONNE
François BAYROU dit, hier soir aux 20 h de TF1 : " Tout le monde était en vacances ". Est-ce que cette excuse, quand même, n'est pas lunaire ? Est-ce qu'il n'a pas fait les choses à l'envers ? Il fallait commencer par négocier avant de décréter un vote de confiance qui, arithmétiquement, voit votre sort scellé ? Est-ce qu'il n'y a pas, là, quand même, un problème de méthode chez le Premier Ministre ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, moi, ce qui m'intéresse, c'est qu'aujourd'hui, on va recevoir les groupes politiques.
PAUL BARCELONNE
Dès lundi, à Matignon.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et encore une fois, dès lundi, à Matignon, on va travailler. Et je veux dire, par ailleurs, on en a parlé avec Gabriel ATTAL en réunion de groupe, avec tous nos Députés : Nous, on est prêts, on a commencé à nous rapprocher des autres groupes politiques pour, justement, regarder quelles sont les concessions…
PAUL BARCELONNE
Vous ne dites pas non sur l'erreur de méthode, quand même.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Quelles sont les concessions, quels sont les bougées qu'on peut faire, et de se donner le temps de le faire de manière ordonnée. C'est plus facile si on commence maintenant que si on s'y met mi-octobre ou mi-décembre.
PAUL BARCELONNE
D'accord, mais pourquoi François BAYROU n'a pas répondu, par exemple, à la lettre de Marine LE PEN envoyée mi-juillet et qui est manifestement restée sur son bureau à Matignon, alors même qu'il y est resté enfermé tout l'été ? C'est ce que nous raconte son entourage. Comment vous justifiez ça, quand on est ministre de ce Gouvernement, Agnès PANNIER-RUNACHER ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'effectivement, lorsque vous avez une présidente d'un groupe politique…
PAUL BARCELONNE
Il faut lui répondre.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Il faut lui répondre. Et donc, je suis certaine que ce sera fait.
PAUL BARCELONNE
De la même manière, il fallait échanger avec le Parti Socialiste, les Députés.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Encore une fois, moi, je suis la première à dire que nous devons échanger avec chacun des partis politiques qui composent l'Assemblée Nationale, que par construction, il y a des éléments sur lesquels on devra faire des compromis. Et là, ce sont des groupes politiques qui parlent. Moi, je suis ministre d'un Gouvernement qui n'a pas la majorité absolue. Et je représente, au sein de ce Gouvernement, une tendance politique.
PAUL BARCELONNE
Plutôt gauche.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Effectivement, de sensibilité gauche. Et je ne suis pas nécessairement d'accord avec certains de mes collègues au sein du Gouvernement. Mais ce n'est pas grave. C'est-à-dire que nous, on assume effectivement de dire à un moment : on va faire des compromis, parce que comme tous les pays européens, nous sommes dans une situation où le Parlement est atomisé dans différentes sensibilités politiques, et nous sommes contraints à travailler ensemble et à trouver les meilleurs choix pour les Françaises et les Français. Et c'est notre intérêt, bien compris à tous les partis politiques. Aucun parti politique, quelle que soit leur ambition pour 2027, n'a intérêt à voir la situation des finances publiques se dégrader.
PAUL BARCELONNE
Ça, c'est le maintien de la responsabilité au parti du Gouvernement, que vous nous faites là ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, mais parce que je pense que c'est leur intérêt, parce que je pense qu'on fait une meilleure campagne si on a plus d'espace de jeu pour proposer un nouveau programme.
HADRIEN BECT
Vous disiez, Agnès PANNIER-RUNACHER, que vous veniez plutôt de la gauche. Comme chacun le sait, à gauche, il y a le parti socialiste parmi les partis de gouvernement. Est-ce que leur empressement ou leur rapidité à dire qu'ils comptaient voter contre François BAYROU lors de ce vote du 8 septembre vous a déçu ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je ne suis pas sur ça, je ne suis pas dans le commentaire immédiat.
HADRIEN BECT
Vous auriez pu vous attendre à autre chose.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'il y a eu un effet de surprise par rapport à la proposition du Premier ministre, qu'il est maintenant important de se parler.
PAUL BARCELONNE
Vous-même, ça vous a surpris ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et de se parler en donnant le cadre précis. C'est-à-dire, encore une fois, personne n'imagine une minute que les oppositions vont nous donner à chaque moment.
HADRIEN BECT
Alors, le cadre précis…
PAUL BARCELONNE
Sur la surprise. Vous-même, ça vous a surpris. Vous vous y attendiez, vous étiez au courant. Vous êtes une ministre d'expérience. Vous avez traversé la crise Covid. Vous êtes au Gouvernement depuis longtemps.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Comme tous les ministres, j'ai été convoquée à 15 h 30.
PAUL BARCELONNE
C'est à ce moment-là que vous l'avez appris ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et j'ai une demi-heure d'avance par rapport à la conférence de presse.
HADRIEN BECT
Si je reviens sur le parti socialiste, Agnès PANNIER-RUNACHER, l'une des demandes, elle porte, non pas sur les économies, elle porte davantage sur les recettes, sur la fiscalité. On n'a pas bien compris ce que François BAYROU proposait comme ouverture. En tout cas, il y a eu dans les mots avant-hier, même à la CFDT, un semblant d'ouverture sur des questions de fiscalité. Est-ce que pour vous, il faut accepter et aller peut-être, pour ne pas s'aligner de parti socialiste, vers une augmentation de la fiscalité sur les plus hauts revenus, plus que ça n'est déjà ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Dans le projet qui a été mis sur la table, il est prévu une augmentation de la fiscalité sur les plus hauts revenus.
HADRIEN BECT
Oui, mais qui ne suffira pas au parti socialiste.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et les mesures qui sont présentées ont des niveaux de curseurs qui peuvent être discutés. Ça, c'est le premier élément. Et je veux juste le dire, parce qu'on n'en a pas parlé. L'équivalent de ce qu'il y a aujourd'hui dans le projet qui a été mis sur la table, et encore une fois, c'est une copie martyr, on assume qu'elle soit discutée, est l'équivalent en montant d'un rétablissement de l'ISF. Donc, il faut quand même dire que ce n'est pas rien du tout. Ce n'est pas des queues de cerises. Moi, je suis profondément persuadée qu'un des éléments clés d'acceptation d'un budget difficile, pas populaire, où on fait 40 milliards d'Euros d'économie, c'est le sentiment des Françaises et des Français, au-delà des groupes politiques, que ce budget, il est juste, que chacun fait sa part d'effort à due concurrence de ses capacités à le faire.
HADRIEN BECT
Il l'est pour l'instant ? Peut-être pas complètement ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'il y a des... j'ai mentionné une mesure avec laquelle je n'étais pas d'accord.
HADRIEN BECT
Mais sur la fiscalité ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'il y a des voies de progrès certainement. Maintenant, une chose qui est importante : nous sommes, et c'est une donnée, je dirais, factuelle, un des pays où le niveau de prélèvement obligatoire est le plus élevé du monde. Et donc, ça doit nous interpeller. Parce que ce n'est probablement pas le niveau des prélèvements obligatoires global qu'il faut augmenter.
HADRIEN BECT
Mais il y a une donne politique qui est telle qu'elle est.
AGNES PANNIER-RUNACHER
On voit bien qu'il y a des curseurs à régler. Et moi, ce que j'entends du Parti Socialiste, c'est une demande d'équité fiscale. Je rejoins cette demande d'équité fiscale. Donc, là encore, mettons-nous autour de la table.
HADRIEN BECT
Est-ce que l'ISF…
PAUL BARCELONNE
Il faudrait le rétablir ou pas, l'ISF ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais pourquoi on a supprimé l'ISF ? Parce que l'ISF avait eu un impact majeur sur la capacité de nos entreprises à grandir et à devenir des grandes entreprises. Nous sommes.... En France, nous avons quatre fois moins d'entreprises de taille intermédiaire du fait de cette taxation du capital. Donc, autant, j'entends la question d'aller chercher à rééquilibrer ou à se poser la question de la fiscalité sur les hauts revenus, à interroger la question de l'optimisation fiscale, mais attention non plus à ne pas tomber…
HADRIEN BECT
Là, vous ne dites pas vraiment autre chose que ce que dit François BAYROU. Une fois de plus, on avance peu finalement, et les socialistes risquent de rester sur leur faim.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je ne partage pas ce point de vue. Il y a des propositions qui ont été mises sur la table. Il y a des propositions qui ont été également mises sur la table par le Parti Socialiste, ou en tout cas des pistes du type autour de la taxation des holdings. Je ne vais pas rentrer dans les détails techniques, mais travaillons-y.
PAUL PARCELONNE
Comme sur les jours fériés ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Comme sur les jours fériés. Un jour férié, c'est plus que 7 heures travaillées. C'est une symbolique très forte.
PAUL PARCELONNE
Mais c'est le symbole que vous contestez ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est les moments de retrouvailles familiales, de retrouvailles amicales. Donc, je suis persuadée... Moi, je porte depuis des années l'idée qu'il faut que les jeunes acceptent plus vite le marché du travail, qu'il est scandaleux que les seniors, parce qu'ils ont 50 ans, et moi, j'ai plus de 50 ans aujourd'hui, et j'ai beaucoup de personnes dans mon entourage qui sont jetées comme des kleenex, parce qu'ils sont trop vieux, comme s'ils étaient obsolètes. Ça, je pense que c'est des vrais champs d'action.
HADRIEN BECT
Est-ce que, Agnès PANNIER-RUNACHER, si on revient sur cette question des jours fériés, qu'on dit : " Bon, ça, on met de côté ". Les 4 milliards que c'était censé rapporter, on se dit : " Bon, on les trouve ailleurs, peut-être sur de la fiscalité, peut-être ailleurs ", ou est-ce qu'on peut tout simplement dire : " Bon, c'était 44 milliards, si c'est 40, ce n'est pas si grave que ça " ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, il faut faire attention à ça. C'est-à-dire que 43,8 milliards, on n'est pas à la centaine de millions près. Mais si on commence à dire, ces 4 milliards-là, on les abandonne, puis on rajoute 2 milliards, puis on rajoute 3 milliards, à la fin, vous n'avez plus une copie à 40 milliards. Et l'effort, il doit être massif.
HADRIEN BECT
Donc, il faut être autour de 40 milliards ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Grosso modo, et je dis 40 milliards, parce que c'est un arrondi, hin. Ce n'est pas que je dis 40 milliards, parce que c'est un arrondi, c'est-à-dire, c'est un effort massif. Et moi, qui le vois dans les discussions que je peux avoir avec les Français, je suis élue à Arras, c'est mon territoire, les gens vous interpellent sur ces différentes mesures. Et c'est vrai qu'on a besoin de prendre la mesure de l'effort. On a fait énormément pour protéger les Français avec le Covid. La dette, elle ne vient pas de nulle part. Elle vient de crises. On a augmenté la dette publique, entre 2005 et 2015, de 1 000 milliards. On l'a augmenté entre 2015 et 2025 de 1 000 milliards. Et quand on regarde quand est-ce qu'on augmente la dette, c'est la crise, c'est le Covid, c'est la crise énergétique. Cet argent, on l'a donné aux Français. Et à un moment, on est tous dans le même bateau. Il faut voir comment on récupère les choses.
HADRIEN BECT
Agnès PANNIER-RUNACHER, vous restez avec nous. On se retrouve dans quelques secondes, juste après le rappel de l'essentiel de l'actualité : le fil info. 8 h 48 déjà.
(…)
PAUL BARCELONNE
Toujours avec Agnès PANNIER-RUNACHER, la ministre de la Transition écologique. François BAYROU, le Premier ministre, hier soir, chez nos confrères de TF1, semblait s'en prendre au confort, je le cite, des boomers, estimant que tout allait très bien pour eux. Qu'est-ce qu'il a voulu dire ? C'est une maladresse de plus, le Premier ministre ou il s'en prend aux retraités directement et ça suffit.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'on ne peut pas faire de généralité sur les gens qui sont nés juste après la guerre. Donc encore une fois, tout le sujet dans lequel nous sommes aujourd'hui, c'est de faire un effort considérable pour avoir un budget à la fin de l'année.
PAUL BARCELONNE
Il faut que tout le monde prenne sa part.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et cet effort considérable suppose que chacun prenne sa part.
HADRIEN BECT
Y compris donc les boomers, si l'on en croit François BAYROU.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Chacun prenne sa part parce que c'est un des éléments de l'équation d'acceptabilité. C'est-à-dire que si votre voisin ne prend pas sa part, vous avez l'impression qu'il n'y a que vous qui preniez votre part. C'est toute la thématique de... enfin moi, je l'entends sur les marchés à Arras. Je travaille tout le temps, je paie toujours et les autres…
HADRIEN BECT
Vous sentez quelquefois ce conflit générationnel aussi qui monte ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je ne serais pas aussi caricaturale. Je pense que vous avez des personnes qui ont plus de 70 ans qui sont dans des situations très vulnérables. Et qui sont en plus dans des situations de solitude affreuses. Et inversement, je pense qu'on a des îlots de prospérité formidables. Et c'est très bien. Nous, notre objectif, encore une fois, en tout cas le mien en tant que responsable politique, c'est trouver le juste équilibre entre les efforts portés par les Françaises et les Français. Et que chacun prenne sa part. Et que l'Etat prenne sa part dans son train de vie. Que chacun prenne sa part.
PAUL BARCELONNE
Au-delà des conséquences politiques dont on a beaucoup parlé du vote de confiance le 8 septembre, de ce vote de confiance à venir à l'Assemblée nationale, une question sur les conséquences que pourrait avoir un renversement du Gouvernement. On a entendu hier à votre place Patrick MARTIN, le président du MEDEF, être extrêmement inquiet. Nous dire que la crise financière pouvait guetter. Et qu'il avait un peu la sensation que les chefs d'entreprise avaient une cible dans le dos. Vous qui êtes ministre de la Transition écologique, est-ce que la dette écologique n'est pas aussi l'une des grandes oubliées de cette affaire ? Elle est moins importante que la dette financière ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Le 9 septembre, il y aura toujours une dette écologique, une dette financière et un mur budgétaire. Maintenant, moi je ne suis pas restée inactive. C'est-à-dire que pendant les travaux, la vente continue. Le plan national d'adaptation…
PAUL BARCELONNE
Et il y a eu cet été des feux, des canicules, qui sont aussi la conséquence du dérèglement climatique.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Justement, le plan national d'adaptation au changement climatique que j'ai présenté en mars, il produit déjà ses effets. On a eu des feux conséquents cet été. Mais ces feux, ils ont porté sur à peu près 20 000 hectares en France, 300 000 hectares en Espagne. Je ne dis pas qu'on est dans la même situation. Mais ce que les gens, peut-être ceux qui nous écoutent, ne savent pas, c'est que par rapport aux années, au début des années 80, en moyenne, en France, il y a deux fois moins d'hectares brûlés chaque année. Et pourtant, nous sommes confrontés au dérèglement climatique. Et ça, c'est l'effet de politique publique assumée. On a augmenté notre investissement dans la sécurité civile de 40%. Et donc pendant les travaux, la vente continue. On va continuer à travailler, quoi qu'il arrive.
PAUL BARCELONNE
Ma question c'est de savoir si la donne politique, ça ne va pas perturber ce processus-là.
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est la continuité de l'État. Si les décisions sont prises rapidement, et je n'ai aucun doute sur le fait que le président de la République, quel que soit le…
PAUL BARCELONNE
Le résultat du 8 septembre.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Le résultat du vote, on continuera à travailler, c'est très clair, d'une manière ou d'une autre. Et vous avez raison de dire que l'urgence écologique est à nos portes, et qu'il ne faut surtout pas baisser la garde. Et ça doit être une préoccupation de tous les partis politiques.
PAUL BARCELONNE
Vous dites que la balle va être dans le camp, inévitablement, du président de la République au soir du 8 septembre.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je n'ai pas le résultat du vote du 8 septembre. Je ne vais pas faire de la politique fiction.
PAUL BARCELONNE
Arithmétiquement, on peut penser que la balle va lui revenir, et qu'à un moment, il va falloir qu'il prenne ses responsabilités. Dissolution ou démission ? Dissolution, Edouard PHILIPPE, ancien Premier ministre, disait hier, elle est inéluctable. Gérald DARMANIN, votre collègue ministre de la Justice, disait il n'y a pas plus tard que deux jours, c'est une hypothèse à ne pas écarter. Et vous ? Vous n'écartez pas la possibilité d'une dissolution, ce serait une bonne solution ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Encore une fois, je ne lis pas dans le marc de café, et je ne suis pas le président de la République. Donc c'est lui qui décide de cette décision. Ce que je sais, c'est que la dernière dissolution…
PAUL BARCELONNE
A été très…
AGNES PANNIER-RUNACHER
A fait émerger trois camps, et pas une majorité absolue.
PAUL BARCELONNE
Celle-ci non plus, c'est ce que vous nous dites. Celle-ci ne clarifierait pas non plus, ne donnerait pas de majorité.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je ne vais pas préempter ce que serait un vote théorique des Français. Mais moi, je pense que le pays, il a besoin de stabilité, il a besoin de gens qui travaillent ensemble, et que de manière inéluctable, des gens d'opposition sont obligés de se mettre d'accord pour donner de la stabilité au pays. Et je rejoins Patrick MARTIN sur un point. On a besoin de donner de la visibilité aux ménages français, on a besoin de donner de la visibilité aux entreprises françaises. Et encore une fois, c'est l'intérêt de tous les partis de le faire. Peut-être pas de LFI, parce que LFI a théorisé la conflictualisation, et a théorisé le fait de bordéliser le pays. Donc je mets de côté. Mais pour tous les autres qui aspirent à gouverner, il y a un intérêt aujourd'hui à montrer qu'on est capable de gouverner, c'est-à-dire qu'on est capable de faire des choses.
PAUL BARCELONNE
Mais Emmanuel MACRON se priverait du pouvoir de faire peur et d'un pouvoir constitutionnel s'il écartait la dissolution. C'est pour ça que vous ne le faites pas, peut-être.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais, encore une fois, je ne vais pas préempter une discussion qui n'a pas lieu d'être aujourd'hui.
HADRIEN BECT
La question, c'est aussi, Agnès PANNIER-RUNACHER, ça va inévitablement revenir, et ça commence, ce sont les appels à la démission du président de la République, à une élection présidentielle en tout cas anticipée. Est-ce que, et c'est vrai que la question peut quand même légitimement se poser, si on a potentiellement trois Premiers ministres, voire quatre en un an et demi, est-ce qu'on peut tenir comme ça jusqu'en 2027 ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais je pense que ce qui est important, c'est est-ce qu'on continue à avoir des politiques publiques qui se déroulent, est-ce qu'on continue à avoir des lois qui sont votées, est-ce qu'on continue à avancer ? Et la réponse est oui.
HADRIEN BECT
Qu'à…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais le clapotis des changements de portefeuille de ministres, c'est une chose. Ce qui est intéressant, c'est le quotidien des Français. Donc nous, notre sujet…
HADRIEN BECT
Pardon Agnès PANNIER-RUNACHER, on avait ce matin la présidente de l'UNICEF France, on parlait des enfants qui dorment dehors, et elle nous disait le fait qu'il y ait une alternance perpétuelle, un changement perpétuel de ministre du Logement est très préjudiciable pour nous, parce qu'on n'a plus d'interlocuteur.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous avez une interlocuteur hyper engagée qui s'appelle Valérie LETARD. Je vais me permettre de la défendre.
HADRIEN BECT
Ministre du Logement. Non mais ce n'est pas contre Valérie LETARD, c'est simplement que les interlocuteurs changent beaucoup. Et je pense que dans votre secteur c'est potentiellement la même chose. Un ministre, à un moment donné, il sert quand même à quelque chose.
AGNES PANNIER-RUNACHER
J'ai de la continuité depuis sept ans, et sur la transition écologique, je suis quasiment présente depuis…
HADRIEN BECT
Donc ce n'est pas grave pour vous l'instabilité ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce n'est pas ça que je vous dis. Je ne vous dis pas que ce n'est pas grave. Je vous dis juste qu'on a collectivement une responsabilité de mettre de côté les sujets de personnes pour faire avancer le pays. C'est quand même ce qu'attendent les Françaises et les Français. Donc moi, je travaille pour que, quoi qu'il arrive, mes administrations aient un plan, qu'ils travaillent sur l'adaptation au changement climatique, qu'ils travaillent sur la transition écologique, et qu'on puisse avancer. On ne peut pas se permettre de perdre du temps sur des sujets aussi importants.
PAUL BARCELONNE
Un mot aussi, s'il vous plaît, sur le mouvement et ces appels à manifester, à tout bloquer même le 10 septembre, deux jours après le vote de confiance dont on a beaucoup parlé. Vous nous disiez, il y a un instant, Jean-Luc MELENCHON se rend coupable et responsable, je cite, de la bordélisation du pays.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ce n'est pas moi qui le dis, je crois que c'est lui.
PAUL BARCELONNE
C'est la bordélisation, c'est le chaos avant l'heure ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
J'invoque les meilleurs auteurs. Non. Il y a deux choses. Le droit de manifester, il est constitutionnel. Descendre dans la rue pour dire qu'on est contre ceci ou pour cela, c'est constitutionnel. Et c'est respectable.
PAUL BARCELONNE
Et le droit de tout bloquer ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Le droit de casser... Enfin, il n'y a pas de droit ni de casser, ni de bloquer. Les Françaises et les Français, ils aspirent aussi à avoir de la sérénité. Les commerçants aspirent à ce que leurs vitrines ne soient pas cassées et à pouvoir exercer leur métier dans la sérénité. Et ça, c'est inacceptable. Et effectivement, il y a une tentation de certains groupes, on le voit sur les réseaux sociaux, de certains groupes politiques, LFI par exemple, de récupérer le mouvement, mais surtout d'y mettre de la violence. Et la violence est inacceptable.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 septembre 2025