Texte intégral
RMC Info
le 6 février 2002
Vous avez les 500 signatures, c'est garanti sur tranche ?
Oui. Le Parti des travailleurs a recueilli un peu plus de 600 présignatures de maires ; maintenant, c'est au moment décisif à la fin du mois de février, qu'elles seront transformées en signatures définitives.
Bien sûr. Mais c'est vrai que le Parti des travailleurs a déjà eu, notamment avec Lambert, des représentants à l'élection présidentielle. Ce qui est d'ailleurs très étonnant, parce que c'est un parti dont on entend parler en général au moment des élections présidentielles, puisque c'est vrai que vous avez eu régulièrement des candidats, ou alors dans certaines biographies d'hommes politiques. Comment faites-vous, vous qui avez très peu d'élus, pour avoir même 600 promesses de signatures, alors que, je sais pas, Le Pen par exemple qui a beaucoup d'élus, dit qu'il a eu beaucoup de mal à en avoir ? Vous, ça a l'air d'avoir été sans peine.
Oh, sans peine est excessif. Vous savez, 2500 adhérents du Parti des travailleurs sont allés rencontrer entre 9 et 10 000 maires ; donc, ça ne s'est pas fait sans peine. Ils ont parcouru un peu plus d'un million de kilomètres. Ce qui est vrai, c'est que la discussion avec les maires dans notre pays a fait apparaître qu'ils partagent un certain nombre des préoccupations du Parti des travailleurs, et en particulier notre préoccupation sur la disparition des services publics dans les communes, notre préoccupation de manière plus générale sur ce qu'on appelle l'intercommunalité forcée, c'est-à-dire les projets qui visent à faire fusionner les communes entre elles dans le cadre de regroupements d'agglomérations. Ce sont des sujets qui nous préoccupent, qui préoccupent les maires, et beaucoup se sont montrés intéressés à mener cette discussion avec nous.
Oui, mais le côté - vous êtes très marqués politiquement - le côté trotskyste, parti quand même revendiqué d'extrême gauche, ça ne les gêne pas ?
Le Parti des travailleurs n'est ni trotskyste, ni d'extrême gauche.
Ah bon ?
Le Parti des travailleurs est un parti ouvrier indépendant. C'est un parti qui combat pour la reconquête de la démocratie. C'est un parti qui combat pour la défense des droits ouvriers, qui combat contre les privatisations, pour l'interdiction des licenciements. C'est un parti qui combat contre toutes les formes de déréglementation des droits ouvriers, pour la défense du Code du travail. C'est un parti qui combat pour l'indépendance des organisations syndicales, par exemple. Donc, il n'y a rien d'extrémiste dans les positions de ce parti. Un parti qui se situe sur le terrain de la défense des droits ouvriers et démocratiques.
Mais vous ne vous revendiquez pas de la IVe Internationale, ni du trotskysme, ni de..
Vous savez, je crois qu'en politique, il faut éviter de donner des étoiles jaunes. Il y a dans le Parti des travailleurs..
Ah non non, mais.. ouh la la pourquoi vous parlez d'étoile jaune ?
Je crois qu'il y a une manière de montrer du doigt des opinions qui peut-être n'est pas la bonne. Il y a dans le Parti des travailleurs, dans une période dont tout le monde convient que c'est une période de crise de toutes les représentations politiques - toutes les représentations politiques sont en crise, et en particulier celles qui se réclamaient traditionnellement de la gauche et du mouvement ouvrier -, dans cette période de crise, il y a des gens qui ont cherché à se regrouper. Et parmi les gens qui ont cherché à se regrouper, certains sont trotskystes, d'autres sont socialistes, d'autres sont communistes, d'autres sont des syndicalistes, d'autres n'ont pas d'étiquette particulière. Nous partageons en commun la conviction que les travailleurs ont besoin d'avoir un parti qui représente leurs intérêts. Et c'est pour cette raison que nous avons entrepris de bâtir ce parti des travailleurs.
Et quand on regarde - l'une de vos auditrices en parlait à l'instant - que des personnels hospitaliers qui viennent manifester à Paris, simplement pour demander des moyens pour soigner la population, sont accueillis à coups de matraques par un gouvernement qui en principe est un gouvernement de gauche, on admettra qu'il y a tout de même une sérieuse crise de la démocratie dans ce pays, et que l'idée qu'il y a besoin d'un parti pour défendre les travailleurs, est une idée qui n'a rien de saugrenu.
Vous êtes pas le seul parti qui défend la démocratie, et on peut être de tous horizons choqués qu'effectivement des infirmières se fassent recevoir à coups de triques ou de gaz lacrymogènes.
Oui, mais je crois qu'il faut réfléchir pourquoi. Pourquoi est-ce que, chaque fois qu'il y a une action revendicative dans la dernière période, les gens qui revendiquent sont confrontés à une fin de non recevoir. Il y a eu les personnels hospitaliers, les infirmières libérales se sont fait matraquer ; les 10 000 manifestants, parents et enseignants qui à Nantes samedi dernier, ont réclamé 500 classes, se sont vus opposer une fin de non recevoir. Pourquoi ce gouvernement refuse-t-il d'entendre toutes les revendications des ouvriers, des employés, des paysans, des personnels hospitaliers, des médecins, des jeunes ? Je sais bien, j'ai rencontré un ministre du gouvernement sur un plateau de télévision avant-hier ; il m'a répondu " ce sont les contraintes économiques, en particulier celles des critères de Maastricht ". Mais il s'avère que ces contraintes sont en train de s'opposer aux revendications les plus élémentaires de la population. C'est donc un problème de démocratie.
C'est pas les contraintes de Maastricht, c'est les contraintes budgétaires tout court.
Mais ces contraintes budgétaires, d'où proviennent-elles ? Elles proviennent des critères de Maastricht, elles proviennent de la nécessité de respecter les équilibres budgétaires, de respecter le non dépassement du déficit budgétaire. Elles procèdent d'abord et avant tout, de la nécessité de répondre aux exigences des multinationales et des grands groupes capitalistes. Donc, il y a un problème de démocratie, c'est vrai.
Vous pensez qu'avec la droite et avec Chirac, ce serait mieux ?
Certainement pas. Depuis 20 ans, tous les gouvernements qui se sont succédé, si vous regardez bien : 81-86, gouvernement de gauche ; 86-88, cohabitation gauche-droite ; 88-93 gouvernement de cohabitation gauche-droite ; puis on a eu des gouvernements de droite, puis des gouvernements de cohabitation Et chaque fois, que fait un gouvernement depuis 20 ans ? Il reprend toutes les mesures du gouvernement précédent et il les continue. Par conséquent, non, il n'y a strictement rien à attendre d'une alternance entre Chirac et Jospin, dans un sens ou dans l'autre.
Libération ce matin affirme que - je cite le titre de l'article - " l'Elysée s'acoquine avec les trotskystes ", et que " depuis des années, Chirac reçoit régulièrement les leaders du Parti des travailleurs ", clandestinement, discrètement, en tous cas secrètement, Pierre Boussel-Lambert en tête. Sur le thème finalement, les gaullistes et les trotskystes - il y a des précédents historiques, on y reviendra dans un instant - ont un ennemi commun, c'est les communistes et les sociaux-démocrates. Et il y a des sources qui sont citées, hein ! On cite Alexandre Hébert, qui est un de vos proches, ou qui a été un de vos proches. Vous confirmez ?
Cet article est un tissu de mensonges. Christophe Forcari et Didier Hassoux qui signent cet article, et Serge July qui dirige Libération, sont des canailles et des crapules. Cet article est un tissu de mensonges. D'ailleurs quand vous lisez l'article, il est question que " l'Elysée s'acoquine avec les trotskystes ", qu'il y a des rencontres, des liaisons cachées Quand vous lisez l'article, il est fait mention de deux rencontres. L'une de ces deux rencontres est une pure invention. Quant à l'autre, elle n'a rien de caché. Oui, il y a eu en 1995, et c'est de notoriété publique, des militants qui dans le cadre de leur mandat syndical sont allés rencontrer des conseillers du président de la République, pour chercher à empêcher ou à peser dans le sens contraire de la sortie du plan Juppé. Il se trouve que certains de ces militants, étaient membres du Parti des travailleurs. Mais vous devez savoir monsieur Attal qu'il y a tous les jours dans ce pays, des milliers de délégués syndicaux à tous les niveaux, qui vont frapper à la porte de responsables politiques pour plaider tel ou tel dossier. En dehors de ce fait.
Chirac vous a pas donné un coup de main pour les signatures de maires ?
Ecoutez monsieur, cette question est d'une grossièreté inouïe. Il faudrait aller voir les militants du Parti des travailleurs pour leur demander si Chirac a donné un coup de main.
J'attire votre attention sur la chose suivante. Cet article est non seulement une véritable canaillerie parce que ce sont des mensonges
Il y a des sources qui sont citées. Donc c'est Alexandre Hébert qui ment, alors.
Ecoutez-moi. Ces sources, il faudra demander à ceux qui y sont. Moi je vais vous donner une preuve concrète du mensonge. Vous avez dans cet article une référence à quelqu'un qui s'appelle Jean Grosset, et dont on dit ce Jean Grosset était responsable syndical à Force ouvrière, et il était membre du Parti des travailleurs, et il avait de bons rapports avec Chirac, donc CQFD, ça prouve bien les rapports entre le Parti des travailleurs et Chirac. A un détail près : Jean Grosset dans les années 90 auxquelles il est fait allusion ici, a été connu pour le pire adversaire du Parti des travailleurs. Par conséquent, il n'a jamais été membre du Parti des travailleurs, il avait rompu au moins dix ans auparavant avec l'organisation qui a précédé le Parti des travailleurs. Jean Grosset qui est aujourd'hui un responsable de l'UNSA, est connu pour son hostilité foncière au Parti des travailleurs. C'est un ami de Jean-Christophe Cambadélis, dirigeant du Parti socialiste. Donc, ce qu'a pu faire Jean Grosset ou pas avec Chirac, ce qui d'ailleurs le regarde, n'est aucunement une preuve de ce que fait le Parti des travailleurs. Ca nous est totalement étranger.
Je voulais un peu d'éclaircissements là-dessus aussi. J'ai appelé Claude Askolovitch qui est journaliste au Nouvel Observateur. Bonjour.
CA : Bonjour.
Auteur de la biographie de Lionel Jospin. Pourquoi ? Parce que vous avez au cours de votre enquête, comme ça, côtoyé un certain nombre d'anciens ou d'actuels responsables du Parti des travailleurs. Parce que Jospin a été proche de Lambert. Mais ça s'appuie sur quoi ? Je lisais, Libé dit que les trotskystes du Parti des travailleurs - déjà je suis surpris parce qu'ils disent qu'ils ne sont plus trotskystes -, disons que " le Parti des travailleurs et les gaullistes ont un ennemi commun, c'est les sociaux-démocrates et les communistes ". C'est sur ça que ça s'appuie, c'est çà ?
CA : deux, trois choses d'abord. Les expressions " canaillerie ", etc., sont très désagréables, très désagréables
DG : c'est la réalité
CA : ce n'est pas la réalité, mais chacun est libre
DG : et dire des choses sur la vie privée des autres, vous ne trouvez pas que c'est désagréable ?
CA : Daniel Gluckstein, on se connaît, on s'est déjà rencontrés, on peut se parler, donc un instant. Le préalable avant toute chose : Forcari et Hassoux, que je connais et avec qui il m'arrive de travailler, sont tout sauf des canailles. Ce sont des bons journalistes, des gens estimables. Deuxième chose, sur un point de la réponse de Daniel Gluckstein sur Grosset : c'est parfaitement exact. Grosset est quelqu'un qui avait rompu, on va dire, avec " la famille lambertiste " qui s'appelait encore en 1986 le Parti communiste internationaliste, qui est devenu par la suite le Parti des travailleurs
Monsieur Askolovitch, si vous pouvez ne pas entrer trop dans les détails, parce que c'est déjà l'heure, normalement je devrais vous couper. Vous savez ce que je vais faire ? Je suis obligé d'arrêter parce qu'il y a une autre émission qui part derrière à 17 heures. Si vous voulez, on peut continuer cette conversation, je vous appelle demain, on trouve un moment dans l'après-midi et on poursuit. Ce n'est pas du tout pour fuir, mais là il faut que je respecte l'horaire. Excusez-moi, et je pense que cet article aura certainement des suites. Merci à Daniel Gluckstein, à Claude Askolovitch.
(Source http://www.informations-ouvrieres.presse.fr, le 8 avril 2002)
France Inter
Le 14 mars 2002
S. Paoli
Faut-il invoquer "l'infamie", comme le fait P. Broussel, dit Lambert, chef historique du Parti des travailleurs, ou la fatalité, après l'incendie qui a ravagé hier matin les locaux de la formation politique trotskiste ? Engagé dans la présidentielle, le Parti des travailleurs entendait profiter de la campagne pour s'organiser et se construire.
Prononcer le mot "infamie", comme le fait P. Broussel, est-ce considérer qu'il y a un complot contre le Parti des travailleurs ou pas ?
- "C'est un fait que depuis le début de cette campagne, il y a un traitement très particulier du candidat que je suis, du Parti des travailleurs : boycott des médias, accumulation de livres extrêmement hostiles à notre courant, diffamation, mensonges, calomnies. Cela n'arrête pas. Et qu'au milieu de tout cela, intervienne un incendie l'avant-veille du jour où les signatures officielles devaient être déposées au Conseil constitutionnel, disons que c'est pour le moins une coïncidence étonnante."
Mais est-ce qu'on n'en est qu'aux coïncidences ou est-ce que vous avez des éléments objectifs qui permettent de penser qu'il y a une mauvaise intention à votre égard ou à celui du Parti des travailleurs ?
- "L'enquête est en cours. La police et les pompiers n'excluent aucune hypothèse non plus."
Pourquoi dites-vous qu'il y a contre vous une forme d'ostracisme, contre vous ou contre le parti que vous représentez ?
- "Les comptes du CSA sont très clairs : le Parti des travailleurs n'a pas eu droit à la parole pendant deux mois sur les chaînes nationales dans les journaux du soir. Par ailleurs, dix livres, en deux mois, qui déversent un torrent de calomnies contre mon parti, c'est beaucoup."
Tous les petits candidats disent à peu près la même chose que vous, et souvent d'ailleurs à juste titre. C'est vrai qu'on les entend beaucoup moins que les autres. Mais pas vous moins que les autres petits.
- "Puisqu'on a peu l'occasion de m'entendre, je vais en profiter tout de suite et je vais passer au vif du sujet. La campagne présidentielle est une totale mascarade. Vous avez dans ce pays des millions de gens qui s'apprêtent à s'abstenir et ils ont raison de vouloir s'abstenir. Ils veulent s'abstenir, parce qu'aucun des problèmes auxquels l'immense majorité de la population est confrontée ne va trouver de solution dans la prochaine élection présidentielle. Il y a des centaines de milliers d'emplois qui sont en train d'être détruits dans l'industrie. Qui peut croire que, quel que soit le président élu, il va y avoir une amélioration de la situation après la prochaine élection ? Il y a des travailleurs hospitaliers qui sont en grève depuis trois mois pour obtenir des postes. Qui peut croire qu'ils vont obtenir ces postes plus facilement après l'élection, quel que soit celui qui est élu ? Vous avez les routiers, les instituteurs, les maires que j'ai rencontrés - nous avons rencontré 11.000 maires. Les maires s'inquiètent, parce qu'on veut liquider les communes en France, parce qu'on veut créer une situation où les habitants des communes devraient demain, comme dans d'autres pays d'Europe, faire 20, 30 à 40 kilomètres pour aller à la mairie. Il n'y aurait plus de Poste, plus d'école. Qui peut croire qu'après la prochaine élection présidentielle, ces problèmes vont trouver une solution ? Bien au contraire. Nous pensons que cela va continuer, que cela va même s'aggraver."
Vous pensez que c'est une des explications qu'il faudrait donner au fait que les maires sont à ce point réticents pour donner aujourd'hui leur caution aux candidats ?
- "C'est évident. Les maires sont extrêmement inquiets. Ils estiment qu'on veut liquider les communes. Il y a des projets sur l'intercommunalité forcée, il y a des projets sur l'élection du conseil d'intercommunalité au suffrage universel, et il est évident qu'aujourd'hui, dans le cadre des directives européennes, comme pour toutes les questions politiques, on veut, au nom de l'Europe, liquider les communes, parce que c'est l'instance de base de la démocratie et de la République. C'est une évidence."
Vous dénoncez au fond l'absence de propositions faites par les grands candidats pour cette présidentielle. Mais vous, pourquoi êtes-vous dans la présidentielle ? J'ai lu dans la presse que n'étant pas assuré évidemment d'être élu, que c'était au fond juste une occasion pour vous de construire ou d'organiser le Parti des Travailleurs ?
- "D'abord, vous vous méprenez. Il y a les propositions des différents candidats. Chirac et Jospin ont des propositions très précises. Par exemple, après les élections, ils ont l'intention de liquider les retraites par répartition. Il y en a un qui appelle "les fonds de retraite", l'autre qui appelle "l'épargne salariale". Mais en fait, ils veulent introduire les fonds de pension dans notre pays. Ils ont des propositions. Ils veulent accélérer les privatisations. C'est ce qu'ils font aujourd'hui et demain à Barcelone, à propos de l'électricité, lorsqu'ils siègent côte à côte au sommet européen. Ils ont les propositions qui se résument à ceci : après les élections, quel que soit l'élu, nous allons aggraver les mesures contre les travailleurs, contre la jeunesse, contre la démocratie. C'est des propositions très précises. Et si je suis candidat dans cette élection, c'est pour poser ces problèmes et c'est pour dire ce que tout le monde sait très bien, à savoir qu'il n'y aura aucune solution dans ces élections, à savoir qu'aucun de ces problèmes ne va trouver de réponse, et pourtant, il faudra bien qu'ils trouvent une réponse. Si vous croyez que les médecins, les hospitaliers, les instituteurs, les ouvriers victimes de licenciements, vont demain, après les élections, parce qu'on aura un nouveau président, accepter plus facilement ce qu'ils refusent aujourd'hui, vous vous trompez. Et tout le monde sait que ceux qui aujourd'hui se dressent contre cette politique continueront à se dresser demain. Si je suis candidat, c'est pour poser ces problèmes dont personne ne parle, et c'est effectivement pour poser à l'ordre du jour la construction d'un parti ouvrier qui est nécessaire à l'organisation de ce combat de résistance."
Le candidat que vous êtes est face à une réalité incontournable : c'est l'Europe, c'est l'euro adopté par 320 millions citoyens. Vous dites quoi face à cela ?
- "Il n'y a aucune réalité incontournable. Ce qu'une loi a fait, une loi peut le défaire. Le Traité de Maastricht est une fabrication contre les intérêts de la démocratie, de la classe ouvrière, de la jeunesse, de la paysannerie. Il faudra défaire le Traité de Maastricht."
Savez-vous que C. Pasqua disait à peu près la même chose, avec les mêmes mots, il y a 48 heures, sur cette antenne ?
- "Non, non, non ! C. Pasqua, d'abord, dit qu'il faut amender l'euro. Surtout, C. Pasqua ne dit pas ce que je dis là, qu'il faut interdire les licenciements, qu'il faut interdire les privatisations, qu'il faut renationaliser les services publics. Il ne tient pas ce discours, parce qu'il ne se situe pas du côté de la classe ouvrière ni de la jeunesse."
Je parlais de l'Europe...
- "Mais c'est un tout ! Si nous nous opposons à l'Europe de Maastricht, c'est au nom des intérêts de la classe ouvrière, au nom de la défense des conventions collectives, la défense des statuts, la défense des droits ouvriers, la défense des prérogatives des organisations syndicales, et je crois que, de ce point de vue, elles ne sont défendues par personne d'autre dans cette élection."
Comment vous positionnez-vous par rapport à Lutte Ouvrière d'A. Laguiller, par rapport à la LCR ? Si on fait le total - il faut se méfier des sondages, bien entendu, à ce moment de la campagne - en gros des estimations, l'extrême gauche représenterait à peu près 10 % des voix aujourd'hui. Comment vous vous situez par rapport à eux ?
- "D'abord le Parti des travailleurs n'est pas un parti d'extrême gauche. C'est un parti ouvrier indépendant, dans lequel se retrouvent différents courants du mouvement ouvrier. Il y a beaucoup de choses qui peuvent être dites par A. Laguiller qui portent sur des constats que je peux partager, mais il y a pour le moins une finalité sur laquelle je m'interroge. D'abord, A. Laguiller est député au Parlement européen. Je ne l'ai jamais entendu dire qu'il fallait abroger l'Europe de Maastricht - elle s'est même abstenue lors du référendum de 1992. Ensuite, au Parlement européen, elle siège dans le groupe du Parti communiste, et le Parti communiste, lui, siège au Gouvernement avec Jospin. Donc, j'ai du mal à comprendre la stratégie qui consiste à critiquer le Gouvernement d'une part, et être membre d'un groupe qui lui-même est membre du Gouvernement et participe aux privatisations, comme le fait le ministre communiste Gayssot. Enfin, il y a un problème de finalité dans cette élection. Quand j'entends A. Laguiller polémiquer avec R. Hue pour savoir lequel des deux, en obtenant des voix, va, je la cite, "tirer Jospin vers la gauche", je crois que ce n'est pas réaliste. Aucun travailleur dans ce pays ne pense que plus il y aura de voix pour untel ou untel, que ce soit Laguiller ou qui que ce soit, y compris moi-même, c'est cela qui va tirer Jospin vers la gauche. Qui peut croire que quel que soit le résultat du premier tour, Jospin, s'il est élu, va moins privatiser, que Jospin ne va plus s'opposer aux licenciements, qu'il ne va plus satisfaire nos revendications ? Jospin, comme Chirac appliqueront les directives européennes de Maastricht et c'est une illusion mortelle que de croire qu'il est possible dans cette élection de faire pression sur celui qui sera élu au deuxième tour. Pour notre part - et c'est ce qui nous distingue -, nous ne sommes les supplétifs de personne pour le deuxième tour, ni Chirac bien évidemment, ni Jospin. Et la différence principale, elle est là. Nous, nous nous positionnons pour le règlement des véritables problèmes qui n'aura pas lieu dans cette élection présidentielle, mais qui, inévitablement, viendra dans l'après-élection présidentielle."
Une chose encore. Vous parliez de livres contre vous, contre le Parti des travailleurs. Un livre va paraître début avril aux éditions du Rocher, que vous signez, auquel vous êtes associé ?
- "Que j'ai écrit avec mon camarade P. Lambert."
Il paraît qu'on attend de grandes révélations sur les anciens, sur l'entrisme. Evidemment, à nouveau, on va se reposer la question Jospin.
- "Au risque de vous décevoir, je vous dirai qu'il ne faut pas croire tout ce que croient les médias, il ne faut pas croire tout ce que racontent les médias. Il y a dix livres qui ont été écrits contre notre courant. Il y en aura un qui sera écrit par les principaux intéressés, c'est-à-dire nous-mêmes. Et dans ce livre, on va expliquer pourquoi, depuis des décennies, nous nous sommes attelés à la construction d'un parti qui défend les intérêts des ouvriers, des employés, des jeunes, des exploités, des chômeurs. Nous allons expliquer le pourquoi, le comment et la finalité [passage inaudible] et on ne trouvera aucune complaisance à l'égard du Premier ministre Jospin, parce que, comme je viens de vous l'expliquer, ce qui caractérise notre courant, c'est que nous ne roulons pour personne au deuxième tour, ni Chirac ni Jospin. Il devrait y avoir une différence entre la gauche et la droite. Historiquement, l'électorat de gauche et l'électorat de droite, ce n'est pas pareil. Mais dans la vie aujourd'hui, quand on considère, c'est que et Chirac et Jospin veulent faire, une fois élu président, force est de constater que c'est exactement la même politique."
Vous dites qu'il n'y a plus de clivage ?
- "J'espère qu'un jour il y aura un clivage. Mais dans cette élection, Chirac et Jospin, sur toutes les questions concrètes qui concernent les travailleurs, c'est la même politique qui est en préparation."
(Source :Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 14 mars 2002)
le 6 février 2002
Vous avez les 500 signatures, c'est garanti sur tranche ?
Oui. Le Parti des travailleurs a recueilli un peu plus de 600 présignatures de maires ; maintenant, c'est au moment décisif à la fin du mois de février, qu'elles seront transformées en signatures définitives.
Bien sûr. Mais c'est vrai que le Parti des travailleurs a déjà eu, notamment avec Lambert, des représentants à l'élection présidentielle. Ce qui est d'ailleurs très étonnant, parce que c'est un parti dont on entend parler en général au moment des élections présidentielles, puisque c'est vrai que vous avez eu régulièrement des candidats, ou alors dans certaines biographies d'hommes politiques. Comment faites-vous, vous qui avez très peu d'élus, pour avoir même 600 promesses de signatures, alors que, je sais pas, Le Pen par exemple qui a beaucoup d'élus, dit qu'il a eu beaucoup de mal à en avoir ? Vous, ça a l'air d'avoir été sans peine.
Oh, sans peine est excessif. Vous savez, 2500 adhérents du Parti des travailleurs sont allés rencontrer entre 9 et 10 000 maires ; donc, ça ne s'est pas fait sans peine. Ils ont parcouru un peu plus d'un million de kilomètres. Ce qui est vrai, c'est que la discussion avec les maires dans notre pays a fait apparaître qu'ils partagent un certain nombre des préoccupations du Parti des travailleurs, et en particulier notre préoccupation sur la disparition des services publics dans les communes, notre préoccupation de manière plus générale sur ce qu'on appelle l'intercommunalité forcée, c'est-à-dire les projets qui visent à faire fusionner les communes entre elles dans le cadre de regroupements d'agglomérations. Ce sont des sujets qui nous préoccupent, qui préoccupent les maires, et beaucoup se sont montrés intéressés à mener cette discussion avec nous.
Oui, mais le côté - vous êtes très marqués politiquement - le côté trotskyste, parti quand même revendiqué d'extrême gauche, ça ne les gêne pas ?
Le Parti des travailleurs n'est ni trotskyste, ni d'extrême gauche.
Ah bon ?
Le Parti des travailleurs est un parti ouvrier indépendant. C'est un parti qui combat pour la reconquête de la démocratie. C'est un parti qui combat pour la défense des droits ouvriers, qui combat contre les privatisations, pour l'interdiction des licenciements. C'est un parti qui combat contre toutes les formes de déréglementation des droits ouvriers, pour la défense du Code du travail. C'est un parti qui combat pour l'indépendance des organisations syndicales, par exemple. Donc, il n'y a rien d'extrémiste dans les positions de ce parti. Un parti qui se situe sur le terrain de la défense des droits ouvriers et démocratiques.
Mais vous ne vous revendiquez pas de la IVe Internationale, ni du trotskysme, ni de..
Vous savez, je crois qu'en politique, il faut éviter de donner des étoiles jaunes. Il y a dans le Parti des travailleurs..
Ah non non, mais.. ouh la la pourquoi vous parlez d'étoile jaune ?
Je crois qu'il y a une manière de montrer du doigt des opinions qui peut-être n'est pas la bonne. Il y a dans le Parti des travailleurs, dans une période dont tout le monde convient que c'est une période de crise de toutes les représentations politiques - toutes les représentations politiques sont en crise, et en particulier celles qui se réclamaient traditionnellement de la gauche et du mouvement ouvrier -, dans cette période de crise, il y a des gens qui ont cherché à se regrouper. Et parmi les gens qui ont cherché à se regrouper, certains sont trotskystes, d'autres sont socialistes, d'autres sont communistes, d'autres sont des syndicalistes, d'autres n'ont pas d'étiquette particulière. Nous partageons en commun la conviction que les travailleurs ont besoin d'avoir un parti qui représente leurs intérêts. Et c'est pour cette raison que nous avons entrepris de bâtir ce parti des travailleurs.
Et quand on regarde - l'une de vos auditrices en parlait à l'instant - que des personnels hospitaliers qui viennent manifester à Paris, simplement pour demander des moyens pour soigner la population, sont accueillis à coups de matraques par un gouvernement qui en principe est un gouvernement de gauche, on admettra qu'il y a tout de même une sérieuse crise de la démocratie dans ce pays, et que l'idée qu'il y a besoin d'un parti pour défendre les travailleurs, est une idée qui n'a rien de saugrenu.
Vous êtes pas le seul parti qui défend la démocratie, et on peut être de tous horizons choqués qu'effectivement des infirmières se fassent recevoir à coups de triques ou de gaz lacrymogènes.
Oui, mais je crois qu'il faut réfléchir pourquoi. Pourquoi est-ce que, chaque fois qu'il y a une action revendicative dans la dernière période, les gens qui revendiquent sont confrontés à une fin de non recevoir. Il y a eu les personnels hospitaliers, les infirmières libérales se sont fait matraquer ; les 10 000 manifestants, parents et enseignants qui à Nantes samedi dernier, ont réclamé 500 classes, se sont vus opposer une fin de non recevoir. Pourquoi ce gouvernement refuse-t-il d'entendre toutes les revendications des ouvriers, des employés, des paysans, des personnels hospitaliers, des médecins, des jeunes ? Je sais bien, j'ai rencontré un ministre du gouvernement sur un plateau de télévision avant-hier ; il m'a répondu " ce sont les contraintes économiques, en particulier celles des critères de Maastricht ". Mais il s'avère que ces contraintes sont en train de s'opposer aux revendications les plus élémentaires de la population. C'est donc un problème de démocratie.
C'est pas les contraintes de Maastricht, c'est les contraintes budgétaires tout court.
Mais ces contraintes budgétaires, d'où proviennent-elles ? Elles proviennent des critères de Maastricht, elles proviennent de la nécessité de respecter les équilibres budgétaires, de respecter le non dépassement du déficit budgétaire. Elles procèdent d'abord et avant tout, de la nécessité de répondre aux exigences des multinationales et des grands groupes capitalistes. Donc, il y a un problème de démocratie, c'est vrai.
Vous pensez qu'avec la droite et avec Chirac, ce serait mieux ?
Certainement pas. Depuis 20 ans, tous les gouvernements qui se sont succédé, si vous regardez bien : 81-86, gouvernement de gauche ; 86-88, cohabitation gauche-droite ; 88-93 gouvernement de cohabitation gauche-droite ; puis on a eu des gouvernements de droite, puis des gouvernements de cohabitation Et chaque fois, que fait un gouvernement depuis 20 ans ? Il reprend toutes les mesures du gouvernement précédent et il les continue. Par conséquent, non, il n'y a strictement rien à attendre d'une alternance entre Chirac et Jospin, dans un sens ou dans l'autre.
Libération ce matin affirme que - je cite le titre de l'article - " l'Elysée s'acoquine avec les trotskystes ", et que " depuis des années, Chirac reçoit régulièrement les leaders du Parti des travailleurs ", clandestinement, discrètement, en tous cas secrètement, Pierre Boussel-Lambert en tête. Sur le thème finalement, les gaullistes et les trotskystes - il y a des précédents historiques, on y reviendra dans un instant - ont un ennemi commun, c'est les communistes et les sociaux-démocrates. Et il y a des sources qui sont citées, hein ! On cite Alexandre Hébert, qui est un de vos proches, ou qui a été un de vos proches. Vous confirmez ?
Cet article est un tissu de mensonges. Christophe Forcari et Didier Hassoux qui signent cet article, et Serge July qui dirige Libération, sont des canailles et des crapules. Cet article est un tissu de mensonges. D'ailleurs quand vous lisez l'article, il est question que " l'Elysée s'acoquine avec les trotskystes ", qu'il y a des rencontres, des liaisons cachées Quand vous lisez l'article, il est fait mention de deux rencontres. L'une de ces deux rencontres est une pure invention. Quant à l'autre, elle n'a rien de caché. Oui, il y a eu en 1995, et c'est de notoriété publique, des militants qui dans le cadre de leur mandat syndical sont allés rencontrer des conseillers du président de la République, pour chercher à empêcher ou à peser dans le sens contraire de la sortie du plan Juppé. Il se trouve que certains de ces militants, étaient membres du Parti des travailleurs. Mais vous devez savoir monsieur Attal qu'il y a tous les jours dans ce pays, des milliers de délégués syndicaux à tous les niveaux, qui vont frapper à la porte de responsables politiques pour plaider tel ou tel dossier. En dehors de ce fait.
Chirac vous a pas donné un coup de main pour les signatures de maires ?
Ecoutez monsieur, cette question est d'une grossièreté inouïe. Il faudrait aller voir les militants du Parti des travailleurs pour leur demander si Chirac a donné un coup de main.
J'attire votre attention sur la chose suivante. Cet article est non seulement une véritable canaillerie parce que ce sont des mensonges
Il y a des sources qui sont citées. Donc c'est Alexandre Hébert qui ment, alors.
Ecoutez-moi. Ces sources, il faudra demander à ceux qui y sont. Moi je vais vous donner une preuve concrète du mensonge. Vous avez dans cet article une référence à quelqu'un qui s'appelle Jean Grosset, et dont on dit ce Jean Grosset était responsable syndical à Force ouvrière, et il était membre du Parti des travailleurs, et il avait de bons rapports avec Chirac, donc CQFD, ça prouve bien les rapports entre le Parti des travailleurs et Chirac. A un détail près : Jean Grosset dans les années 90 auxquelles il est fait allusion ici, a été connu pour le pire adversaire du Parti des travailleurs. Par conséquent, il n'a jamais été membre du Parti des travailleurs, il avait rompu au moins dix ans auparavant avec l'organisation qui a précédé le Parti des travailleurs. Jean Grosset qui est aujourd'hui un responsable de l'UNSA, est connu pour son hostilité foncière au Parti des travailleurs. C'est un ami de Jean-Christophe Cambadélis, dirigeant du Parti socialiste. Donc, ce qu'a pu faire Jean Grosset ou pas avec Chirac, ce qui d'ailleurs le regarde, n'est aucunement une preuve de ce que fait le Parti des travailleurs. Ca nous est totalement étranger.
Je voulais un peu d'éclaircissements là-dessus aussi. J'ai appelé Claude Askolovitch qui est journaliste au Nouvel Observateur. Bonjour.
CA : Bonjour.
Auteur de la biographie de Lionel Jospin. Pourquoi ? Parce que vous avez au cours de votre enquête, comme ça, côtoyé un certain nombre d'anciens ou d'actuels responsables du Parti des travailleurs. Parce que Jospin a été proche de Lambert. Mais ça s'appuie sur quoi ? Je lisais, Libé dit que les trotskystes du Parti des travailleurs - déjà je suis surpris parce qu'ils disent qu'ils ne sont plus trotskystes -, disons que " le Parti des travailleurs et les gaullistes ont un ennemi commun, c'est les sociaux-démocrates et les communistes ". C'est sur ça que ça s'appuie, c'est çà ?
CA : deux, trois choses d'abord. Les expressions " canaillerie ", etc., sont très désagréables, très désagréables
DG : c'est la réalité
CA : ce n'est pas la réalité, mais chacun est libre
DG : et dire des choses sur la vie privée des autres, vous ne trouvez pas que c'est désagréable ?
CA : Daniel Gluckstein, on se connaît, on s'est déjà rencontrés, on peut se parler, donc un instant. Le préalable avant toute chose : Forcari et Hassoux, que je connais et avec qui il m'arrive de travailler, sont tout sauf des canailles. Ce sont des bons journalistes, des gens estimables. Deuxième chose, sur un point de la réponse de Daniel Gluckstein sur Grosset : c'est parfaitement exact. Grosset est quelqu'un qui avait rompu, on va dire, avec " la famille lambertiste " qui s'appelait encore en 1986 le Parti communiste internationaliste, qui est devenu par la suite le Parti des travailleurs
Monsieur Askolovitch, si vous pouvez ne pas entrer trop dans les détails, parce que c'est déjà l'heure, normalement je devrais vous couper. Vous savez ce que je vais faire ? Je suis obligé d'arrêter parce qu'il y a une autre émission qui part derrière à 17 heures. Si vous voulez, on peut continuer cette conversation, je vous appelle demain, on trouve un moment dans l'après-midi et on poursuit. Ce n'est pas du tout pour fuir, mais là il faut que je respecte l'horaire. Excusez-moi, et je pense que cet article aura certainement des suites. Merci à Daniel Gluckstein, à Claude Askolovitch.
(Source http://www.informations-ouvrieres.presse.fr, le 8 avril 2002)
France Inter
Le 14 mars 2002
S. Paoli
Faut-il invoquer "l'infamie", comme le fait P. Broussel, dit Lambert, chef historique du Parti des travailleurs, ou la fatalité, après l'incendie qui a ravagé hier matin les locaux de la formation politique trotskiste ? Engagé dans la présidentielle, le Parti des travailleurs entendait profiter de la campagne pour s'organiser et se construire.
Prononcer le mot "infamie", comme le fait P. Broussel, est-ce considérer qu'il y a un complot contre le Parti des travailleurs ou pas ?
- "C'est un fait que depuis le début de cette campagne, il y a un traitement très particulier du candidat que je suis, du Parti des travailleurs : boycott des médias, accumulation de livres extrêmement hostiles à notre courant, diffamation, mensonges, calomnies. Cela n'arrête pas. Et qu'au milieu de tout cela, intervienne un incendie l'avant-veille du jour où les signatures officielles devaient être déposées au Conseil constitutionnel, disons que c'est pour le moins une coïncidence étonnante."
Mais est-ce qu'on n'en est qu'aux coïncidences ou est-ce que vous avez des éléments objectifs qui permettent de penser qu'il y a une mauvaise intention à votre égard ou à celui du Parti des travailleurs ?
- "L'enquête est en cours. La police et les pompiers n'excluent aucune hypothèse non plus."
Pourquoi dites-vous qu'il y a contre vous une forme d'ostracisme, contre vous ou contre le parti que vous représentez ?
- "Les comptes du CSA sont très clairs : le Parti des travailleurs n'a pas eu droit à la parole pendant deux mois sur les chaînes nationales dans les journaux du soir. Par ailleurs, dix livres, en deux mois, qui déversent un torrent de calomnies contre mon parti, c'est beaucoup."
Tous les petits candidats disent à peu près la même chose que vous, et souvent d'ailleurs à juste titre. C'est vrai qu'on les entend beaucoup moins que les autres. Mais pas vous moins que les autres petits.
- "Puisqu'on a peu l'occasion de m'entendre, je vais en profiter tout de suite et je vais passer au vif du sujet. La campagne présidentielle est une totale mascarade. Vous avez dans ce pays des millions de gens qui s'apprêtent à s'abstenir et ils ont raison de vouloir s'abstenir. Ils veulent s'abstenir, parce qu'aucun des problèmes auxquels l'immense majorité de la population est confrontée ne va trouver de solution dans la prochaine élection présidentielle. Il y a des centaines de milliers d'emplois qui sont en train d'être détruits dans l'industrie. Qui peut croire que, quel que soit le président élu, il va y avoir une amélioration de la situation après la prochaine élection ? Il y a des travailleurs hospitaliers qui sont en grève depuis trois mois pour obtenir des postes. Qui peut croire qu'ils vont obtenir ces postes plus facilement après l'élection, quel que soit celui qui est élu ? Vous avez les routiers, les instituteurs, les maires que j'ai rencontrés - nous avons rencontré 11.000 maires. Les maires s'inquiètent, parce qu'on veut liquider les communes en France, parce qu'on veut créer une situation où les habitants des communes devraient demain, comme dans d'autres pays d'Europe, faire 20, 30 à 40 kilomètres pour aller à la mairie. Il n'y aurait plus de Poste, plus d'école. Qui peut croire qu'après la prochaine élection présidentielle, ces problèmes vont trouver une solution ? Bien au contraire. Nous pensons que cela va continuer, que cela va même s'aggraver."
Vous pensez que c'est une des explications qu'il faudrait donner au fait que les maires sont à ce point réticents pour donner aujourd'hui leur caution aux candidats ?
- "C'est évident. Les maires sont extrêmement inquiets. Ils estiment qu'on veut liquider les communes. Il y a des projets sur l'intercommunalité forcée, il y a des projets sur l'élection du conseil d'intercommunalité au suffrage universel, et il est évident qu'aujourd'hui, dans le cadre des directives européennes, comme pour toutes les questions politiques, on veut, au nom de l'Europe, liquider les communes, parce que c'est l'instance de base de la démocratie et de la République. C'est une évidence."
Vous dénoncez au fond l'absence de propositions faites par les grands candidats pour cette présidentielle. Mais vous, pourquoi êtes-vous dans la présidentielle ? J'ai lu dans la presse que n'étant pas assuré évidemment d'être élu, que c'était au fond juste une occasion pour vous de construire ou d'organiser le Parti des Travailleurs ?
- "D'abord, vous vous méprenez. Il y a les propositions des différents candidats. Chirac et Jospin ont des propositions très précises. Par exemple, après les élections, ils ont l'intention de liquider les retraites par répartition. Il y en a un qui appelle "les fonds de retraite", l'autre qui appelle "l'épargne salariale". Mais en fait, ils veulent introduire les fonds de pension dans notre pays. Ils ont des propositions. Ils veulent accélérer les privatisations. C'est ce qu'ils font aujourd'hui et demain à Barcelone, à propos de l'électricité, lorsqu'ils siègent côte à côte au sommet européen. Ils ont les propositions qui se résument à ceci : après les élections, quel que soit l'élu, nous allons aggraver les mesures contre les travailleurs, contre la jeunesse, contre la démocratie. C'est des propositions très précises. Et si je suis candidat dans cette élection, c'est pour poser ces problèmes et c'est pour dire ce que tout le monde sait très bien, à savoir qu'il n'y aura aucune solution dans ces élections, à savoir qu'aucun de ces problèmes ne va trouver de réponse, et pourtant, il faudra bien qu'ils trouvent une réponse. Si vous croyez que les médecins, les hospitaliers, les instituteurs, les ouvriers victimes de licenciements, vont demain, après les élections, parce qu'on aura un nouveau président, accepter plus facilement ce qu'ils refusent aujourd'hui, vous vous trompez. Et tout le monde sait que ceux qui aujourd'hui se dressent contre cette politique continueront à se dresser demain. Si je suis candidat, c'est pour poser ces problèmes dont personne ne parle, et c'est effectivement pour poser à l'ordre du jour la construction d'un parti ouvrier qui est nécessaire à l'organisation de ce combat de résistance."
Le candidat que vous êtes est face à une réalité incontournable : c'est l'Europe, c'est l'euro adopté par 320 millions citoyens. Vous dites quoi face à cela ?
- "Il n'y a aucune réalité incontournable. Ce qu'une loi a fait, une loi peut le défaire. Le Traité de Maastricht est une fabrication contre les intérêts de la démocratie, de la classe ouvrière, de la jeunesse, de la paysannerie. Il faudra défaire le Traité de Maastricht."
Savez-vous que C. Pasqua disait à peu près la même chose, avec les mêmes mots, il y a 48 heures, sur cette antenne ?
- "Non, non, non ! C. Pasqua, d'abord, dit qu'il faut amender l'euro. Surtout, C. Pasqua ne dit pas ce que je dis là, qu'il faut interdire les licenciements, qu'il faut interdire les privatisations, qu'il faut renationaliser les services publics. Il ne tient pas ce discours, parce qu'il ne se situe pas du côté de la classe ouvrière ni de la jeunesse."
Je parlais de l'Europe...
- "Mais c'est un tout ! Si nous nous opposons à l'Europe de Maastricht, c'est au nom des intérêts de la classe ouvrière, au nom de la défense des conventions collectives, la défense des statuts, la défense des droits ouvriers, la défense des prérogatives des organisations syndicales, et je crois que, de ce point de vue, elles ne sont défendues par personne d'autre dans cette élection."
Comment vous positionnez-vous par rapport à Lutte Ouvrière d'A. Laguiller, par rapport à la LCR ? Si on fait le total - il faut se méfier des sondages, bien entendu, à ce moment de la campagne - en gros des estimations, l'extrême gauche représenterait à peu près 10 % des voix aujourd'hui. Comment vous vous situez par rapport à eux ?
- "D'abord le Parti des travailleurs n'est pas un parti d'extrême gauche. C'est un parti ouvrier indépendant, dans lequel se retrouvent différents courants du mouvement ouvrier. Il y a beaucoup de choses qui peuvent être dites par A. Laguiller qui portent sur des constats que je peux partager, mais il y a pour le moins une finalité sur laquelle je m'interroge. D'abord, A. Laguiller est député au Parlement européen. Je ne l'ai jamais entendu dire qu'il fallait abroger l'Europe de Maastricht - elle s'est même abstenue lors du référendum de 1992. Ensuite, au Parlement européen, elle siège dans le groupe du Parti communiste, et le Parti communiste, lui, siège au Gouvernement avec Jospin. Donc, j'ai du mal à comprendre la stratégie qui consiste à critiquer le Gouvernement d'une part, et être membre d'un groupe qui lui-même est membre du Gouvernement et participe aux privatisations, comme le fait le ministre communiste Gayssot. Enfin, il y a un problème de finalité dans cette élection. Quand j'entends A. Laguiller polémiquer avec R. Hue pour savoir lequel des deux, en obtenant des voix, va, je la cite, "tirer Jospin vers la gauche", je crois que ce n'est pas réaliste. Aucun travailleur dans ce pays ne pense que plus il y aura de voix pour untel ou untel, que ce soit Laguiller ou qui que ce soit, y compris moi-même, c'est cela qui va tirer Jospin vers la gauche. Qui peut croire que quel que soit le résultat du premier tour, Jospin, s'il est élu, va moins privatiser, que Jospin ne va plus s'opposer aux licenciements, qu'il ne va plus satisfaire nos revendications ? Jospin, comme Chirac appliqueront les directives européennes de Maastricht et c'est une illusion mortelle que de croire qu'il est possible dans cette élection de faire pression sur celui qui sera élu au deuxième tour. Pour notre part - et c'est ce qui nous distingue -, nous ne sommes les supplétifs de personne pour le deuxième tour, ni Chirac bien évidemment, ni Jospin. Et la différence principale, elle est là. Nous, nous nous positionnons pour le règlement des véritables problèmes qui n'aura pas lieu dans cette élection présidentielle, mais qui, inévitablement, viendra dans l'après-élection présidentielle."
Une chose encore. Vous parliez de livres contre vous, contre le Parti des travailleurs. Un livre va paraître début avril aux éditions du Rocher, que vous signez, auquel vous êtes associé ?
- "Que j'ai écrit avec mon camarade P. Lambert."
Il paraît qu'on attend de grandes révélations sur les anciens, sur l'entrisme. Evidemment, à nouveau, on va se reposer la question Jospin.
- "Au risque de vous décevoir, je vous dirai qu'il ne faut pas croire tout ce que croient les médias, il ne faut pas croire tout ce que racontent les médias. Il y a dix livres qui ont été écrits contre notre courant. Il y en aura un qui sera écrit par les principaux intéressés, c'est-à-dire nous-mêmes. Et dans ce livre, on va expliquer pourquoi, depuis des décennies, nous nous sommes attelés à la construction d'un parti qui défend les intérêts des ouvriers, des employés, des jeunes, des exploités, des chômeurs. Nous allons expliquer le pourquoi, le comment et la finalité [passage inaudible] et on ne trouvera aucune complaisance à l'égard du Premier ministre Jospin, parce que, comme je viens de vous l'expliquer, ce qui caractérise notre courant, c'est que nous ne roulons pour personne au deuxième tour, ni Chirac ni Jospin. Il devrait y avoir une différence entre la gauche et la droite. Historiquement, l'électorat de gauche et l'électorat de droite, ce n'est pas pareil. Mais dans la vie aujourd'hui, quand on considère, c'est que et Chirac et Jospin veulent faire, une fois élu président, force est de constater que c'est exactement la même politique."
Vous dites qu'il n'y a plus de clivage ?
- "J'espère qu'un jour il y aura un clivage. Mais dans cette élection, Chirac et Jospin, sur toutes les questions concrètes qui concernent les travailleurs, c'est la même politique qui est en préparation."
(Source :Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 14 mars 2002)