Déclaration de M. Jacques Dondoux, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur les réformes nécessaires au renforcement des investissements étrangers et des échanges commerciaux avec les pays de l'Est, Prague le 14 janvier 1998.

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Circonstance : Cinquième conférence des ministres de l'économie de l'industrie et du commerce à Prague le 14 janvier 1998

Texte intégral

Comme en 1996 à Baltimore, cette réunion autour d'une même table des Ministres des principales économies de marché et des pays en transition - je salue l'arrivée de représentants de la Croatie et de la Moldavie dans cette enceinte - offre une occasion de confronter nos expériences et de tirer les enseignements des dernières évolutions intervenues dans le monde.
L'association des représentants d'entreprises, pour nous faire part de leur expérience sur le terrain et de leurs recommandations, est désormais une nécessité reconnue. Le processus de Munster a, à cet égard, montré la voie en associant entreprises et autorités publiques, dès 1992.
1 - Le chemin parcouru est considérable.
L'ensemble des pays d'Europe centrale et orientale représentés ici ont jeté les bases d'une économie de marché et ont retrouvé, ou sont en voie de retrouver, le chemin de la croissance. Pour la première fois depuis 1989, les pays en transition se rapprochent sensiblement du PIB existant avant la transition économique.
Dans l'ensemble de la région, d'importantes réformes structurelles ont été menées à bien ou sont en cours. Les privatisations sont avancées, de même que la réforme du système bancaire.
L'expérience de ces premières années nous enseigne que les pays qui ont entrepris les réformes les plus rapides et les plus courageuses sont sortis de la récession les premiers et ont attiré la majeure partie des flux de capitaux privés.
Plus concrètement, nous nous étions fixés à Baltimore trois objectifs : investir 200 Md USD à l'Est, favoriser la croissance du secteur privé pour qu'il réalise au moins 70 % de la production locale et développer le commerce Est-Ouest pour qu'il représente 17 à 20 % des échanges mondiaux.
Où en sommes nous aujourd'hui, deux ans avant l'échéance que nous nous sommes fixée ?
En ce qui concerne le premier objectif, au début de cette année, dans plus de la moitié des PECO qui participent à cette conférence, le secteur privé représente déjà 70 % du PIB ou presque. La moyenne pour l'ensemble des participants s'établissait mi-1997 à 66,3 %. Le chemin parcouru est immense et je crois sincèrement que nous atteindrons en l'an 2000 notre objectif.
En ce qui concerne notre deuxième objectif, concernant le développement des investissements étrangers, ils dépassent en valeur cumulée au début de cette année les 60 Md USD environ et devraient progresser de 20 Md USD par an d'ici 2000. Ces résultats honorables sont cependant insuffisants pour atteindre notre objectif. Si l'on considère l'ensemble des mouvements de capitaux à moyen et long terme, en revanche, les chiffres sont bien meilleurs. Entre 1991 et 1997, ces flux nets ont atteint 221 Md USD, provenant majoritairement du secteur privé.
Beaucoup de raisons peuvent être trouvées à l'insuffisance des IDE. Le cadre juridique offert par les PECO à l'investissement étranger est-il partout de nature à attirer les investissements étrangers ? Des mesures permettant d'améliorer l'environnement des affaires, de stabiliser le cadre juridique et de faciliter la libre concurrence ne doivent-elles pas être prises ici ou là ? Je reviendrai sur ce point dans un instant.
Pour terminer sur notre troisième objectif, lié au développement des échanges entre pays du G7 et PECO nous devons reconnaître que nous avons été ambitieux. En 1995, le commerce entre G7 et PECO ne représentait que 1,5 % du commerce mondial. En 1996, les échanges entre pays du G7 et PECO (après exclusion des échanges intra-Union européenne et intra-Alena) représentaient 3,2 % des échanges globaux des pays du G7. Pour les membres européens du G7, ce chiffre toujours trop faible s'élevait à la même époque à 7,1 %. La France n'est certes pas le pays du G7 le mieux placé dans ce palmarès, mais enregistre des progrès constants. En 1996, elle effectuait 8,9 % de ses échanges (hors Union européenne) avec les PECO. Au cours des 10 premiers mois de 1997 nos échanges avec les PECO représentent 9,1 % de nos échanges extérieurs, grâce à une progression de 19 % de nos échanges.
2 - Comment poursuivre nos efforts et contribuer à la réalisation des objectifs que nous nous sommes fixés ?
Nous avons une tâche commune à mener :
2-1- Les grands acteurs du système international doivent poursuivre leurs efforts pour intégrer les économies en transition dans l'économie mondiale.
L'Union européenne fait de cet objectif l'une des priorités de sa politique économique extérieure.
depuis notre dernière réunion à Baltimore, l'Union européenne a achevé la mise en place de ses accords régionaux, qui garantissent aux pays en transition un très large accès privilégié au marché communautaire, soit par institution de zones de libre échange avec les pays ayant vocation à intégrer l'UE (le dernier accord a été conclu en juin 1996 avec la Slovénie), soit par démantèlement des restrictions quantitatives avec la Russie et les autres pays de l'ex-URSS : l'accord de partenariat et de coopération avec la Russie est entré en vigueur le 1er décembre dernier.
Ces accords encouragent également l'intégration entre pays en transition (CEFTA, CEI) afin de renforcer les complémentarités économiques régionales et prévoient une importante assistance financière et technique pour appuyer les réformes (programmes communautaires Phare, Tacis).
Cet effort d'intégration doit être poursuivi dans les enceintes internationales, notamment dans le cadre des processus d'accession à l'OMC et à l'OCDE.
2-2- Mais l'insertion dans l'économie internationale est indissociable d'un approfondissement des réformes.
Trois points prioritaires pour les autorités française :
1) la levée des entraves non tarifaires aux échanges,
2) la plus grande transparence des règles économiques, afin de garantir des conditions de concurrence satisfaisantes,
3) la mise en oeuvre d'un cadre plus favorable aux investissements étrangers, afin d'exploiter plus pleinement les convergences d'intérêts qui se dégagent dans plusieurs secteurs comme l'environnement.
1) la levée des entraves non tarifaires à l'accès au marché : des efforts importants ont été réalisés pour diminuer le niveau général des droits de douane. Ces efforts n'auraient cependant qu'une portée réduite si ne sont pas éliminées les entraves non tarifaires, qui limitent l'insertion dans les échanges internationaux : certifications, normes éloignées des standards internationaux, procédures douanières complexes et coûteuses.
2) la plus grande transparence des règles économiques : les pays en transition doivent achever la reprise des règles fondamentales du commerce international.
Les accords régionaux de l'Union européenne prévoient déjà un mouvement de convergence vers les dispositions communautaires en matière de propriété intellectuelle, de concurrence ou de monopoles d'État à vocation commerciale. La reprise de ces dispositions de l'acquis communautaire est un élément fondamental de la réforme économique et de la convergence avec les États membres de l'Union européenne.
Par ailleurs, nous avons, les uns et les autres des efforts importants à faire pour renforcer la lutte contre la corruption dans les échanges internationaux.
Une convention a été signée le 17 décembre à Paris par les pays membres de l'OCDE. C'est un premier pas important. Plusieurs pays non membres s'y sont déjà associés. Il serait souhaitable que ce mouvement s'étende à d'autres et que les travaux soient poursuivis et approfondis.
Le cas des marchés publics, enfin, ne peut être dissocié du processus général de libéralisation économique. Des règles garantissant la transparence dans l'attribution des marchés publics sont essentielles pour les entreprises.
3) la mise en oeuvre d'un cadre plus favorable aux investissements étrangers : l'investissement étranger est un déterminant essentiel de la croissance économique des États nouvellement entrés dans la voie de l'économie de marché. La libéralisation des échanges ne saurait atteindre ses objectifs si les investissements restent, par ailleurs, encadrés par des règles restrictives.
Je pense en particulier à la persistance ou à l'apparition de régimes d'investissement contraires aux règles de l'OMC, et à son accord sur les mesures d'investissement liées au commerce. Par ailleurs, l'instabilité des règles fiscales et juridiques pénalise les entreprises qui souhaitent s'implanter localement. Enfin, les lenteurs qui sont parfois constatées dans le processus de privatisations, freinent souvent le développement des entreprises étrangères.
Un cadre plus favorable aux investissements étrangers permettrait de mieux exploiter nos intérêts convergents dans plusieurs secteurs, tels que l'environnement :
l'environnement constitue l'un des domaines principaux de l'assistance technique et financière aux pays en transition. Je pense en particulier à l'action de la BERD ou aux programmes Phare et Tacis. La France est très impliquée dans ce secteur. Les références françaises sont bien connues, tout particulièrement en ce qui concerne la sûreté nucléaire et la gestion des déchets. Par ailleurs, l'environnement est désormais un thème majeur des discussions multilatérales, comme en témoignent les réunions internationales sur le sujet.
De ce fait, nous devons encourager les projets concernant l'environnement, en matière de lutte contre la pollution, de traitement des eaux ou de nucléaire.
Le processus de transition à l'Est doit être accéléré et stabilisé.
La France accorde une grande importance au développement de relations commerciales équilibrées avec les PECO et se réjouit de la forte progression des échanges avec les pays du G7. Mais il est vrai que les marchés des pays du G7 sont très concurrentiels et exigeants. Des efforts doivent être accomplis de part et d'autre pour améliorer la connaissance de nos marchés.
La poursuite des réformes, notamment sur les trois volets complémentaires des entraves non tarifaires, des grandes dispositions du commerce international et du régime régissant l'investissement étranger sont indispensables pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés ensemble et pour poursuivre les efforts remarquables effectués jusqu'à ce jour.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 23 août 2002)