Texte intégral
Epernay
Chers Amis,
Regardons les choses en face, regardons la France telle qu'elle est. Le chômage recommence à augmenter. Les entreprises délocalisent. L'insécurité croit, et le gouvernement vient même d'apprendre, à sa grande surprise, qu'elle touche plus les HLM que les quartiers cossus. La violence atteint de plus en plus l'Ecole.
Nous n'avons plus d'armée digne de ce nom ; nous y consacrons 1,77 % du PIB, contre 2,9 % aux Etats-Unis. Aussi, les Américains ne nous entendent plus. Nos crédits militaires se répartissent en 75 % pour les dépenses de personnel et 25 % pour le reste, soit le fonctionnement, l'investissement et la recherche. Et encore, cette ventilation ne prend pas en compte les récents redéploiements décidés par Lionel Jospin avec l'accord de Jacques Chirac. Dans la récente guerre d'Afghanistan, malgré le courage de nos soldats, de nos marins et de nos aviateurs, notre armée n'a pu faire qu'une figuration limitée. Les Américains ne s'y sont pas trompés. Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont essayés à des moulinets verbaux, qui ne pouvaient cacher une triste réalité. Cet abaissement de notre défense a commencé il y une dizaine d'années quand, au moment de la décomposition de l'Union Soviétique, certains, à la suite de Laurent Fabius, se sont mis à parler de " dividendes de la paix ". Les Etats-Unis, eux, n'ont pas baissé. Mais, nous nous trouvons fort dépourvus quand une menace nouvelle, celle du terrorisme, est apparue le 11 septembre dernier.
Alors, les casernes grognent. Ce mécontentement porte sur les conditions matérielles de la vie militaire. Mais, l'état de notre défense est aussi leur souci légitime. Jacques Chirac a supprimé le service militaire. Il n'a prévu aucun moyen pour assurer la défense opérationnelle du territoire, pour surveiller les points névralgiques en cas de besoin. Il n'a pas voulu prendre en compte qu'une armée de métier coûtait plus chère qu'une armée de conscription.
Je préfère ne pas parler de l'Europe de la défense. N'oublions pas qu'après la Grande Bretagne, la France est le pays de l'Union Européenne qui consacre le plus d'argent à son armée. Ils n'ont même pas été capables de créer l'Europe de l'armement. Ainsi, les Pays Bas, qui passent pour un excellent élève de la classe européenne, viennent tout juste de décider d'acheter plusieurs dizaines de chasseurs américains. Pourtant, il existe deux avions européens équivalents, dont le Rafale.
Un mot sur notre système de santé : il y a quelques mois l'organisation mondiale de la santé le reconnaît comme le meilleur du monde. La cause de ce rang flatteur est notre protection sociale. Mais, chacun le sent bien, il se dégrade. Certes, nous sommes encore très loin de la situation que connaît la Grande Bretagne. Mais, nous y tendons. Les mouvements actuels dans le personnel médical et paramédical, tant public que privé, témoignent de cette crainte. Enfin, n'oublions jamais que les difficultés de financement de la sécurité sociale viennent du niveau du chômage, et non du coût des soins. Le chômage prive celle-ci de ressources qui lui viennent du travail.
Nos services publics sont bradés sur le marché. Malgré les pannes d'électricité de Californie, malgré le scandale d'Enron, les deux sortants voudraient bien privatiser EDF. Jean-Claude Gayssot, quant à lui, ministre communiste des Transports, s'apprête à introduire en bourse la société des Autoroutes du Sud de la France. Je pourrais encore multiplier les exemples.
Tous ces constats, toutes ces évolutions ont une origine commune : l'oubli de la République. La République est noyée dans la mondialisation ultra-libérale, dans une construction européenne qui en est devenue la modalité continentale. La République est menacée par tous les particularismes, par tous les communautarismes. La République est grignotée par l'extension indéfinie du marché. Et, sans la République, il n'y a plus de citoyens. Sans la République, il n'y a plus que des individus qui errent dans une jungle hostile.
Mais, la disparition de la République n'est pas une fatalité. Elle n'est pas inscrite dans les astres. Mais, la République peut être relevée, et avec elle la France, si les citoyens en ont la volonté. Pour que s'exprime cette volonté, il faut que soit proposé aux citoyens un projet réaliste et crédible, un projet qui suscite leur confiance et même leur enthousiasme. En déclarant sa candidature, Jean-Pierre Chevènement a présenté un tel projet aux Français.
A Vincennes, le 9 septembre dernier, il a exposé les dix grands axes stratégiques d'un tel projet. Et, chacun sait que si les électeurs lui confient la lourde charge de la présidence de la République, il respectera ses engagements. Par trois fois, dans le passé, il a su montrer la force de ses convictions. Contrairement à d'autres, il ne trahira pas ses électeurs pour faire la politique de Jacques Chirac et de Lionel Jospin.
D'abord, l'Ecole. Car, dans la République, l'Ecole est à la base de tout. L'Ecole est l'endroit où se forme le citoyen, où l'enfant acquiert les éléments qui lui permettront d'exercer sa raison et son propre jugement. Lorsqu'il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin a mis l'enfant au centre de l'Ecole : quel erreur ! L'Ecole n'est plus alors un centre d'apprentissage, mais un lieu de vie. C'est oublier que l'enfant ne restera pas un enfant, que l'enfant deviendra un adulte. Non, au centre de l'Ecole, au centre de l'Ecole de la République, il faut mettre la transmission des savoirs, des connaissances et des repères.
Non, il n'y a pas d'égalité entre le Maître et l'Elève, le Maître sait, l'Elève apprend. Non, le Maître n'est pas le copain de l'Elève, le Maître instruit l'Elève. D'abord, donc, remettre sur ses pieds l'Ecole, en finir avec la démagogie " jeuniste ", avec les Marseillaises frelatées et autres tags, expressions d'une soi-disante spontanéité artistique.
Le retour à l'Ecole de la République aura aussi des effets directs positifs sur la sécurité. Il faut en finir avec l'angélisme en matière judiciaire. Il faut revoir en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. Elle n'est plus adaptée à notre temps. Il faut mettre les sauvageons dans ces centres fermés où ils apprendront les règles élémentaires de la vie en société. Souvenez-vous, quand Jean-Pierre Chevènement avait lancé ce mot, puis fait cette proposition, la coalition des bien-pensants n'avaient qu'un cri d'indignation. Et, aujourd'hui, où est-on ? Enfin, il faut appliquer la loi, certes avec intelligence et discernement, mais sans faiblesse. La répression fait partie de la prévention. Face au crime et à la délinquance, la répression relève de la dissuasion.
Pour donner des repères à nos enfants, il faut revaloriser le travail. La première mesure est de revaloriser la feuille de paye, Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans, en organisant dès son élection une conférence sur l'ensemble des salaires. La croissance et donc l'emploi ne peuvent être relancés que par la demande, et la demande dépend des revenus. Il propose de faire glisser une partie des charges sociales vers la fiscalité pour diminuer le coût du travail. Mais, nous devons aller encore au-delà en donnant une autre image du travailleur, de l'ouvrier. Il est aujourd'hui trop souvent moqué et brocardé. Or, on l'oublie trop souvent, les ouvriers représentent le tiers de la population active des salariés de notre pays.
Notre pays, voilà encore un repère qui doit être donné à notre jeunesse. Ceux parmi eux, dont les parents, les grands-parents parfois, sont venus d'autres pays, d'autres continents doivent être fiers d'être français, d'appartenir à cette communauté de citoyens qu'est la Nation française. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! La République a certes des ombres, mais elle a aussi beaucoup de lumières. Ne dissimulons rien de notre histoire, mais enseignons la dans sa totalité. Enfin, arrêtons de dissoudre la France dans une improbable Europe des régions. Sur tout le territoire de la République, la loi doit être la même pour tous. Et, la loi ne doit pas être faite à Bruxelles par des bureaucrates anonymes et incontrôlés, mais à Paris par des parlementaires élus par le peuple français souverain.
Voilà quelques thèmes que Jean-Pierre Chevènement soumet à la réflexion et au vote des Français. En face, il y a les deux sortants Jacques Chirac et Lionel Jospin, réunis par cinq années de cohabitation complice. Pas une virgule ne les a séparés, a fini par avouer l'un d'entre eux. Aujourd'hui, ils ont encore un même projet : leur ego. Ils sont candidats pour satisfaire leur ego et les Français ont appris combien ils étaient, ces ego, surdimensionnés. Mais, entre eux, c'est l'égalité des ego, c'est le heurt des ego.
Jacques Chirac est candidat par passion, par passion de son appétit, de l'appétit de ses amis. Ces appétits sont gigantesques, gargantuesques même. Encore, s'il n'y avait que le sien ! Mais, il y a aussi ceux de ses amis, de ses " premiers ministrables ". Ils provoquent l'effroi. Alain Juppé, on a déjà donné. Nicolas Sarkozy, on sait ce qu'il peut donner. Et aussi quelques autres encore qui se sont engouffrés un samedi de janvier dans la cour de l'Elysée derrière les vitres teintées de leur Safrane.
Lionel Jospin est candidat par désir, désir de changer de rive, désir de changer de palais, désir de satisfaire une soif sans limite de pouvoir. Qu'importe le flacon de la politique, pourvu qu'il ait l'ivresse du pouvoir. Son revirement sur la Corse en est une des preuves. Derrière lui, la cohorte des socialistes défroqués, de ces nouveaux libéraux qui ont la foi fanatique des convertis. Vous les connaissez, la télévision vous les montre et vous les remontre les Martine Aubry, les François Hollande, les Dominique Strauss-Kahn, les Laurent Fabius. Ils amusent la galerie en attendant que le candidat " probable ", " possible ", disponible ", daigne enfin s'annoncer à la France.
Ecoutez les tous, Jacques Chirac, Lionel Jospin et leurs amis. Ecoutez les, et vous n'entendrez pas la différence. Ils se chamaillent, mais ils ne débattent pas. Car, il veulent faire la même politique, car ils ne peuvent faire que la même politique, celle qui leur est dictée à Bruxelles par la Commission et à Francfort par la Banque Centrale Européenne. C'est si vrai que le Medef et Ernest Antoine Seillières ne savent plus à quel candidat se vouer. L'un ou l'autre, l'autre ou l'un, c'est du pareil au même !
L'un et l'autre menacent nos retraites. Et maintenant, publiquement, Bruxelles vient de leur donner l'ordre de modifier notre régime de retraites. C'est une conséquence explicite de l'euro qui, parait-il, est un succès. Déjà, le programme commun respectif du PS et du RPR prévoyait l'introduction progressive de la capitalisation au détriment de la répartition. Mais, aujourd'hui, le commandement est sans appel. Chacun des deux sortants a fait savoir qu'il s'y conformerait si, toutefois, le suffrage universel le lui permettait. Les Français sont attachés à la répartition, qui crée la solidarité entre les générations. Ils ne veulent pas de la capitalisation, qui est soumise aux aléas de la spéculation boursière. Ils ont raison. La faillite retentissante d'Enron aux Etats-Unis montre leur sagesse. Les salariés de cette entreprise ont perdu leur emploi. Ils ont aussi perdu leur retraite, parce que le capital, qui devait leur servir une retraite était investi dans cette entreprise. Le fond de garantie de la retraite par répartition est l'activité économique future. Rien ne l'assurait mieux que le secteur public des entreprises nationalisées. Mais, d'Edouard Balladur à Laurent Fabius, en passant par Alain Juppé et Dominique Strauss-Kahn, ils l'ont liquidé. L'avertissement de Bruxelles est inacceptable. Nous devons refuser de nous faire dépouiller au nom de l'euro.
Un mot tout de même sur quelques uns des innombrables autres candidats. Alain Madelin et François Bayrou ne sont que les réserves déjà épuisées pour une présence éventuelle de Jacques Chirac au second tour. Je ne dirai rien sur Nöel Mamère et sur Robert Hue. On ne tire pas sur une ambulance, et encore moins sur un corbillard. Mais, Noël Mamère confond une élection présidentielle avec une assemblée générale des verts dans une salle enfumée. Daniel Cohn-Bendit, en ancien combattant d'une révolution qui n'a jamais eu lieu, l'enfonce encore plus. Le Parti Communiste est un astre mort. Il a terminé son rôle historique. Il ne fut pas négligeable. Précisément, il méritait mieux que de mourir ainsi, dans un " bougisme " sans objectif entre deux défilés de mode.
Arlette Laguillier et Jean-Marie Le Pen sont deux candidats de déperdition. L'extrême gauche et l'extrême droite représentent respectivement des planchers incompressibles de 2 à 3 % de l'électorat. Pour le reste, il s'agit de votes protestataires, qui expriment un rejet justifié du bipartisme unique.
Ces votes soulagent peut être l'âme de ceux qui les émettent. Mais, ils restent sans avenir. Ni l'un, ni l'autre ne peuvent figurer au second tour. Et si, quand même, par aberration, l'un ou l'autre y figurait, il serait écrasé. Alors, disons à ceux qui pourraient voter pour eux, sans adhésion idéologique, laissez les à leurs affaires. Avec le soutien de Madame de Fontenay, Arlette Laguillier pourrait concourir au titre de Miss France. Les bien-pensants voudraient bien encore se servir de Jean-Marie Le Pen. Après l'avoir fait monter pendant des années en le diabolisant, voilà qu'il cherche à nous présenter un " Le Pen light " pour essayer de contrer Jean-Pierre Chevènement. Demain, ils sont encore prêts à la diaboliser si cela peut assurer leur confort.
Chers amis,
Eux, en haut, ils croyaient l'affaire réglée. L'élection devait se jouer au deuxième tour entre les deux sortants. Le premier tour serait pour ces derniers un temps d'échauffement. Pour le reste, une myriade de petits candidats sans avenir devait donner l'illusion de la démocratie en amusant la galerie par le pittoresque de certains.
Puis, peu à peu, un phénomène qu'ils n'attendaient pas a surgi. La candidature de Jean-Pierre Chevènement est devenue crédible. De plus en plus de citoyens, venant de tous les horizons politiques, ont perçu en lui l'Homme de la Nation, qu'il veut être. Son programme, contrairement à ceux des autres, existe ; et en plus, il intéresse. Autour de lui croit et se multiplie un rassemblement.
Ce rassemblement constitue le Pôle républicain, où se réunissent des citoyens qui considèrent que, dans l'état où se trouve la France, le clivage traditionnel entre la droite et la gauche ne répond pas aux problèmes. Peut-être demain, la distinction redeviendra pertinente ; mais, pour l'heure, comme à d'autres périodes sombres de notre histoire, il faut savoir mettre la France et la République au-dessus. Alors, nous ne demandons pas à ceux qui nous rejoignent d'où ils viennent, nous demandons seulement où ils veulent aller. Et, s'ils veulent aller à la République, nous leur proposons d'y aller ensemble.
Quelqu'un comme Philippe Seguin dit qu'il s'agit d'une auberge espagnole. C'est dommage qu'un homme qui se réclame à juste titre du Général de Gaulle, ne comprenne pas la nature diverse d'un rassemblement. Je crains surtout que, là où il se trouve, il s'agisse d'un hôtel " quatre étoiles " à l'Ile Maurice.
Désormais, tout le monde s'accorde à le reconnaître, l'élection de Jean-Pierre Chevènement à la Présidence de la République est possible. Sa progression dans les sondages est constante et continue. Les deux sortants sont au contraire en baisse.
Et contre qui serait-il au second tour ? Jean-Pierre Chevènement a dit que peu le lui importait. Max Gallo a précisé qu'un second tour entre Jean-Pierre Chevènement et Lionel Jospin serait un séisme politique. Il a raison. Mais, un second tour entre Jean-Pierre Chevènement et Jacques Chirac serait déjà une sérieuse secousse.
Après, il y aura les élections législatives. Il est encore trop tôt pour en parler, pour investir les candidats. Attendons, les évolutions ne sont pas encore terminées. Le Pôle républicain aura un candidat dans chaque circonscription. Nous renouvellerons alors un personnel politique vieilli, non tellement par l'âge, mais parce qu'il à tout promis et tout trahi.
Alors, courage et détermination, nous pouvons gagner, nous allons gagner. A nous de faire, ici et ailleurs, d'ici le 21 avril, ce qu'il faut pour convaincre, et encore convaincre, et toujours convaincre. Le travail ne manque pas, mais la tâche est exaltante.
En avant, pour l'élection de Jean-Pierre Chevènement.
En avant, pour l'élection de l'Homme de la Nation, face au candidat du désir et face au candidat de la passion.
En avant, pour relever la France avec la République.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Reims
Mesdames, Messieurs, Chers Amis,
Depuis lundi, Jacques Chirac est officiellement candidat à sa propre succession. Mais qui aurait pu, sincèrement, en douter ? De manière précipitée, il a levé un faux suspens. Dans son adresse aux Français, Jacques Chirac s'est déclaré candidat par passion. Ce mot dans la bouche de Jacques Chirac fait sourire. Qui peut y croire ? En réalité, c'est une ruse trouvée en la circonstance par une boite de communication. En vérité, Jacques Chirac veut garder le pouvoir. Et Lionel Jospin lui parle du désir pour expliquer l'annonce de son imminente candidature. Là encore, c'est de la communication. L'objectif étant dans les deux cas de faire mouche auprès des Français. Mais les deux sortants se trompent en voulant abuser les Français. En effet, nos compatriotes attendent un projet pour la France.
En venant à Reims, je ne pouvais m'empêcher de penser à ce jour de mai 1945, où les armées du Troisième Reich capitulèrent dans l'antique cité où étaient sacrés les rois de France. Surtout, je me souvenais du lendemain, de la cérémonie de signature à Berlin. Lorsque le Maréchal Keitel, qui fut plus tard condamné a mort par le tribunal de Nuremberg, entra dans la salle, il eut un mouvement de recul et s'écria : " Ah non, pas les Français ", en voyant l'uniforme du général de Lattre de Tassigny. Oui, en cinq ans, par l'énergie du Général de Gaulle, par le courage des résistants, par le dévouement de la France libre, notre pays avait retrouvé son rang. Nous étions au côté des alliés. Aujourd'hui, encore nous détenons un siège de membre permanent au conseil de sécurité de l'ONU.
Si je me livre à ce rappel, c'est qu'à nouveau, comme en 1958, la France est à la croisée des chemins. Nous sommes dans une situation exceptionnelle, historique.
Le déclin, l'effacement de la France sont-ils inexorables ? Oui, si le système du pareil au même est reconduit dans l'une ou l'autre version. Cohn-Bendit a pu déclarer dimanche "l'histoire de France se termine" en mettant en cause Jean-Pierre Chevènement.
En effet, le choix est là. Et bien nous pensons, nous que l'histoire de France n'est pas terminée.
Et c'est pour relever le gant que Jean-Pierre Chevènement est candidat à l'élection présidentielle et se présente comme l'Homme de la Nation, tel que le définissait Charles de Gaulle. Les deux sortants sont les candidats des partis.
Je dirais même que Jean-Pierre Chevènement est le seul élément nouveau et attractif de cette campagne.
Quelle différence avec Jacques Chirac. Celui-ci partage avec l'autre sortant, Lionel Jospin, un ego surdimensionné. Ils constituent à eux seuls un véritable club des ego. En effet, le candidat possible, qui joue à un cache-cache puéril avec les Français, se veut le candidat du désir, le désir du pouvoir, du pouvoir pour le pouvoir. Son retournement sur la Corse en est une des multiples preuves. La cohabitation a été pour eux l'occasion d'une habile répartition des rôles.
Jacques Chirac Président a désarmé la France. Il l'a réintégrée dans l'OTAN. Il a été le fossoyeur de notre monnaie. Lionel Jospin a été le champion toutes catégories des privatisations. Il a baissé pavillon devant les terroristes corses plutôt que de les combattre. Il a cédé au chantage permanent d'intérêts corporatistes. Il a cédé à l'angélisme béat de la gauche des beaux quartiers. Le gouvernement, à sa grande surprise, vient de découvrir que les premières victimes de l'insécurité sont les habitants des HLM. En abandonnant la République, Lionel Jospin s'est coupé du peuple, y compris du peuple de gauche.
Les cinq années de cohabitation ont permis de montrer aux Français que le système du pareil au même entre la droite établie et la gauche officielle fonctionnait à la virgule prés. C'est une société de connivence entre les sociaux-libéraux et les libéraux-sociaux, qui place le marché au-dessus de la cohésion sociale et qui s'appuie sur le condominium " RPR-PS ". Pour s'en convaincre, il suffit de lire les programmes respectifs de ces partis.
Ce sont en réalité deux versions d'un " programme commun de renoncement ". Ceci explique pourquoi 60 % des Français ne croient plus au clivage traditionnel " Gauche-Droite ". Peut-il en être autrement quand la gauche abandonne les services publics au marché et lorsque la droite dénigre la Nation au profit de la mondialisation libérale ?
Nous pouvons mettre un terme à cette comédie cynique. La candidature de Jean-Pierre Chevènement en est le moyen. C'est pour relever la France avec la République que Jean-Pierre Chevènement inscrit sa candidature dans la perspective d'orientations claires notamment pour revaloriser le travail et relancer la croissance. C'est pour redonner aux Français confiance en leur avenir qu'il s'adresse à la France qui travaille et à la France qui est fière d'elle-même, qui connaît les ombres de son histoire, mais qui en connaît aussi les lumières, les nombreuses pages de gloire.
Depuis septembre, une dynamique a vu le jour dans tout le pays. La République est toujours une idée neuve. Elle dépasse les clivages traditionnels. A 66 jours du premier tour, j'invite à se rapprocher de leur comité de soutien local celles et ceux qui souhaitent que Jean-Pierre Chevènement soit présent au second tour et qu'il devienne Président de la République au soir du 5 mai prochain.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Réunion publique à Blanc-Mesnil
Chers Amis,
Depuis maintenant une semaine, la France ironique a découvert dans l'un des deux sortants un candidat de la passion ; je dirai même de la compassion. Comment ne pas avoir une compassion étonnée pour le vide sidéral de son programme fantomatique ? Comment ne pas avoir une compassion inquiète pour son goût si affiché du pouvoir pour le pouvoir, du pouvoir pour ses colifichets ?
Comment ne pas avoir une compassion attendrie pour l'éternel soupirant qui, depuis trente ans, se prête à Marianne en jeune homme pressé ? Nous finissons par bien connaître Jacques Chirac avec le temps. La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est qu'il ne tiendra aucun des engagements qu'il prend.
Nous avons aussi l'autre sortant, le candidat nommé désir. Désir de pouvoir, désir de puissance, désir de l'autosatisfaction, bien sûr. En même temps, désir du rigide qui veut se faire désirer. Désir de l'austère qui voudrait tant se faire aimer. Alors, bien qu'il se réclame de la transparence, il ne dit surtout rien de ses intentions. Certes, le secret est bien éventé ; on connaît le directeur de campagne ; on connaît les locaux de campagne. Mais, le faux naïf fait semblant de ne pas savoir. Puéril, Lionel Jospin, à son âge, joue encore à cache-cache.
Et puis, nous avons l'homme de la Nation. Le 4 septembre dernier, il s'est déclaré candidat. Le 9 septembre dernier, il a présenté ses dix grandes orientations programmatiques. Depuis, il fait campagne. Depuis, il est devenu crédible. Depuis, il leur fait peur. L'homme de la passion a précipité sa déclaration, non sans improvisation. L'homme du désir cherche à se dégager de ses minauderies sans trop de dégâts.
Jean-Pierre Chevènement propose aux Français de relever la France avec la République. Et, d'abord, parce que la sûreté des personnes et des biens est le premier des droits de l'homme et du citoyen, il veut rétablir en France sur tout, je dis bien tout, le territoire de la République la sécurité pour tous et pour chacun. Il s'est engagé à faire voter par la nouvelle Assemblée Nationale trois lois dans les cent premiers. jours Une loi de programmation pour la justice. Une loi de programmation pour la police et la gendarmerie. Ces lois que Lionel Jospin lui a refusées quand il était ministre de l'intérieur ; il ne fallait pas déplaire à une certaine gauche établie, encore imprégnée d'une idéologie de dépérissement de l'Etat. Jean-Pierre Chevènement considère, lui, que les représentants de la République doivent avoir des moyens et de la considération. Leur manquer de respect, c'est au-delà de l'atteinte à l'individu, manquer de respect à nous tous. Enfin, il faut une loi pour réformer en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. En plus d'un demi-siècle, le monde n'est plus le même, la société n'est plus la même, et les jeunes ne sont plus les mêmes. La délinquance commence de plus en plus tôt, et l'impunité accentue ce phénomène de pourrissement. La récidive généralisée exaspère, à juste titre, l'immense majorité des honnêtes gens. Il ne s'agit pas non plus d'abandonner la prévention, mais la répression participe pleinement à la prévention ; cela s'appelle même la dissuasion.
Jean-Pierre Chevènement propose de mettre en place soixante centres de retenue fermés pour les adolescents à la fois perdus et les plus dangereux. Ce n'est pas un retour aux anciennes maisons de correction. C'est l'établissement de lieux où ces futurs adultes pourront enfin apprendre les repères nécessaires à la vie en société, sans compter combler les lacunes de leur instruction et de leur formation professionnelle.
En son temps, Jean-Pierre Chevènement avait fait ces propositions à Lionel Jospin. Il les avait écartées. Il ne voulait pas heurter l'angélisme judiciaire qu'incarnait si bien Elisabeth Guigou.
Certes, dans la perspective des élections, les socialistes font semblant de mieux vouloir répondre aux voeux du peuple dans le domaine de la sécurité. Mais, ce n'est qu'une posture trompeuse de communication pour abuser les citoyens. Il suffit de constater qu'ils ont vidé de sa substance la récente loi portant réforme de la précédente loi sur la présomption d'innocence. D'ailleurs, le gouvernement vient de faire effectuer à grands frais une enquête.
Et, à son grand étonnement, Lionel Jospin y a découvert que les premières victimes de l'insécurité étaient les habitants des HLM, et non les bourgeois des quartiers bourgeois. Pourtant, il aurait du savoir depuis longtemps que les voitures brûlent plus facilement dans les banlieues populaires qu'à Saint-Germain des Prés.
Nous le savons, Jean-Pierre Chevènement le sait. Le retour de la sûreté ne dépend pas seulement de la répression et de la prévention. Le retour de la sûreté dépend aussi, dépend surtout de l'emploi. Le chômage est père de tous les vices, de tous les maux. Il faut une autre politique économique, il faut une relance par la demande pour obtenir de la croissance, il faut revaloriser la feuille de paie. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans et de convoquer très vite après son élection une conférence sur les salaires. D'autre part, il a prévu de transférer sur la fiscalité une partie des charges sociales, afin que le travail lui-même soit moins taxé.
Nos deux sortants sont incapables, non de prendre de tels engagements - en matière de promesses leur capacité est inépuisable - mais de les tenir. Ils se veulent les bons élèves de la classe européenne. Ils détruisent l'Ecole de la République ; en revanche, ils assimilent les relations entre les Etats à une compétition scolaire du temps où l'excellence était encore une vertu pédagogique. Jacques Chirac et Lionel Jospin sont contraints par le pacte de stabilité budgétaire et par les statuts de la Banque Centrale Européenne. Il faudra assouplir le premier. A son origine, était l'Allemagne. Sûre de sa puissance économique, elle tenait ainsi à manifester sa méfiance et son dédain pour ces pays qu'elle qualifiait ironiquement du " Club Med ". Mais, l'histoire a parfois des retours inattendus. Aujourd'hui, c'est précisément l'Allemagne qui arrive difficilement à respecter les contraintes de ce pacte. Seul un compromis politique, passé entre les ministres des Finances, lui a permis d'échapper à l'avertissement public dont elle était menacée par la Commission de Bruxelles. Les européistes ont parfois des moments de lucidité qui les font reculer devant le ridicule. Un blâme infligé à l'Allemagne aurait eu quelque chose de dérisoire ; il aurait poussé jusqu'à la caricature ce syndrome du bon élève, dont je viens de parler. Pour la Banque centrale, il faut d'abord en changer les statuts. Aujourd'hui, elle est chargée de lutter contre la seule inflation. Un tel combat est désormais dépassé ; il appartient à l'autre siècle. Il faut donc lui donner aussi pour objectifs la croissance et l'emploi.
Puisque nous sommes en Seine-Saint-Denis, dans le neuf trois, comme on dit, comment ne pas évoquer le problème de la désindustrialisation de la France ? Ce département, plus que d'autres, a souffert et souffre de cette idéologie à courte vu qui condamne les usines parce qu'elles polluent et sont sales.
Mais, si nous voulons consommer, il faut d'abord produire. La rente est anéantie quand le capital a été dilapidé. Jean-Pierre Chevènement l'a rappelé à Toulouse : il faut des usines chimiques. Bien sûr, il faut prendre toutes les précautions pour que des accidents, comme celui d'AZF, n'arrivent plus. D'ailleurs, les premières victimes en ont été les salariés de l'usine. Mais, ces précautions prises, les services de l'Etat ayant les moyens d'exercer leurs contrôles, il faut maintenir et développer des lieux de production industrielle ; Aujourd'hui, les ouvriers représentent le tiers de la population active de la France. On l'oublie trop souvent. Tous les gauchistes, anciens ou dissimilés, qui se sont répondus dans les sphères dirigeantes du pays, sont passés directement de l'ouvriérisme religieux de leur jeunesse à un mépris profond pour le monde du travail.
Ce mépris affiché pour le travail ne facilite pas l'intégration harmonieuse des jeunes d'aujourd'hui à notre société. Je pense notamment à ceux dont les parents ou les grands parents sont nés dans un autre pays, sur un autre continent. Car, à ce dédain pour la production, se joint la honte de soi qui frappe nos élites. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! Assumons l'histoire de France, toute l'histoire de France avec ses ombres certes, mais aussi avec ses nombreuses lumières. N'oublions pas que ces lumières ont éclairé le monde. La Marseillaise est notre hymne national. La Marseillaise est aussi le chant que tant d'hommes et de femmes, épris de liberté, ont entonné un peu partout sur la planète. Mais encore faudrait-il que la France se donne les moyens d'être digne de son rang, de pouvoir encore parler à l'humanité toute entière.
De manière unilatérale, Georges Bush vient de menacer de guerre un " axe du mal ", comprenant l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord. A juste titre, Hubert Védrine a qualifié cette analyse de " simpliste ". Collin Powell a qualifié ce propos de " vapeur ". Ainsi, le secrétaire d'Etat des Etats-Unis d'Amérique du Nord vient de signifier au ministre des Affaires Etrangères de la République Française qu'il tenait son opinion pour négligeable. Il parait pourtant que les deux pays sont alliés. Bien plus, l'ambassadeur de la République à Washington a été convoqué au Département d'Etat pour donner des explications sur les positions de la France à un fonctionnaire n'appartenant pas au meilleur niveau. Pourquoi, donc, la voix de la France n'est plus écoutée ? Pourquoi, donc, les représentants de la République sont ainsi traités ? Parce que la France est désarmée.
Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé la France. Bientôt, notre force de frappe aura perdu tout caractère opérationnel. Les super ordinateurs qui devaient remplacer le centre de Mururoa, désormais démantelé, ne sont toujours pas au point ; et, de toutes les manières, ils sont américains. De plus, pour s'assurer de la fiabilité du matériel, il faut de temps à autre faire un essai en grandeur réelle. Les Etats-Unis refusent de ratifier le traité interdisant tout essai nucléaire. Le service militaire a été supprimé, sans que soit prévu un système de garde nationale, assurant, en tant que de besoin, la défense opérationnelle du territoire et la garde des points névralgiques. Enfin, on le sait depuis longtemps, l'armée de métier coûte beaucoup plus chère que l'armée de conscription. Néanmoins, les crédits militaires ont baissé de manière considérable pour atteindre 1,77 % du PIB, alors qu'ils sont à 2,9 % du PIB aux Etats-Unis. Jacques Chirac et Lionel Jospin ont voulu profiter des " dividendes " de la paix, selon l'expression de Laurent Fabius. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que, lors de la récente guerre d'Afghanistan, notre armée ait du se contenter d'une pâle figuration qui a meurtri nos soldats, alors que Jacques Chirac se livrait à des moulinets verbaux.
Il n'est pas étonnant que les Etats-Unis fassent si peu de cas de pays qui ont abandonné tout véritable effort.
Ne parlons pas d'Europe de la défense, comme une sorte de solution miracle ; c'est une chimère. C'est encore pour longtemps une chimère. Ce sera une chimère tant que les différents pays européens n'auront pas d'intérêts identiques. Or, l'histoire, la culture, la langue, des liens économiques, des affinités politiques font que les pays européens au moins les grands pays européens, ont des intérêts différents, et parfois même divergents. L'attitude de la Grande-Bretagne, toujours prête à s'aligner sur les Etats-Unis, leur ancienne colonie, avec laquelle elle partage la même langue, est de ce point de vue caractéristique. Entre les pays européens, il peut y avoir une coopération militaire, étroite même éventuellement ; il ne peut y avoir d'armée commune. Et puis, regardons les choses telles qu'elles sont, l'Europe de l'armement n'arrive même pas à exister. Les européistes nous expliquent que les Pays Bas seraient l'un des meilleurs élèves de la classe européenne. Ils viennent de commander des dizaines de chasseurs aux Etats-Unis, alors qu'ils existent deux avions européens équivalents, dont le Rafale. N'oublions pas que notre continent a aussi perdu des milliers et des milliers d'heures de travail dans cette affaire.
N'oublions pas, enfin, que la recherche militaire a toujours d'importantes retombées civiles. L'actuelle formidable avancée technologique de l'industrie américaine vient d'abord des commandes de l'armée, et ensuite de la conquête spatiale. Notamment, les entreprises aéronautiques américaines sont discrètement, mais largement, subventionnées par le biais militaire. Là encore, il ne faut pas avoir une vision angélique et idéologique du monde et du marché. Il ne faut se laisser endormir par les discours pacifistes, qui sont souvent le contraire d'une politique véritablement pacifique. Aux Etats-Unis, de fait, mais selon une démarche consciente et bien organisée, l'industrie de défense structure une politique industrielle, qui ne s'avoue pas comme telle.
En France, nous devons avancer avec moins d'hypocrisie. Bien sûr, il faut redynamiser l'industrie de défense, qui avait été développée en son temps par le général de Gaulle dans un souci d'indépendance nationale. Mais, cela ne suffit pas. Il faudra mettre en uvre une véritable politique industrielle, adaptée aux conditions actuelles d'une économie ouverte. L'Etat doit inciter, impulser, entraîner ; il ne peut se contenter de regarder passer les trains. Il faudra évidemment commencer par le commencement, c'est-à-dire par la recherche. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à proposer à la Nouvelle Assemblée Nationale une grande loi de programmation pour les années 2003-2007 portant à 3 % la part de la recherche dans le PIB.
Chers Amis,
Nous connaissons un pays qui fut riche et puis qui a sombré dans la crise, le malheur et la pauvreté. Au temps de sa splendeur, l'Argentine n'a pas su construire un Etat. Elle n'a pas cherché à investir dans une industrie nationale. Elle a vendu ses services publics pour maintenir artificiellement une apparence d'économie pendant quelques années supplémentaire.
L'Argentine illustre les méfaits à terme d'un système qui ne repose que sur la rente, rente agricole en l'occurrence. Mais quand la rente disparaît, le pays se retrouve fort dépourvu. Il ne faut pas croire que la France ne pourrait jamais subir un tel sort. Nous avons certes encore des atouts, et même de beaux atouts. Encore, ne faudrait-il pas les gaspiller.
Or, de ce point de vue, l'"entente " entre le Parti socialiste et les verts doit susciter la plus grande inquiétude.
Les verts ont déjà empoché quarante deux circonscriptions réservées. C'est-à-dire qu'ils ont obtenu la possibilité d'avoir un groupe parlementaire en cas d'élection de Lionel Jospin. C'est-à-dire qu'ils peuvent être en mesure d'exercer un chantage permanent sur l'éventuel gouvernement socialiste.
Mais le plus grave n'est pas là. Le plus grave est la tactique de Lionel Jospin. Lionel Jospin montre ainsi qu'il n'est pas un homme d'Etat, mais un chef de parti qui rêve de revenir au régime des partis. Il a refusé tout accord formel avec les verts, parce qu'il sait que, dans leur immense majorité, les Français rejettent leur religion anti-nucléaire, leur phobie anti-automobile ou leur angélisme coupable sur les problèmes de sécurité. Lionel Jospin ne veut pas assumer ces fardeaux devant les électeurs. Mais, pour autant, il ne va pas leur proposer une politique cohérente dans ces domaines. Il attendra le résultat obtenu par Noël Mamère au premier tour de l'élection présidentielle. Ainsi, si par malheur, Noël Mamère obtenait un pourcentage de voix que Lionel Jospin considérait comme significatif, la politique énergétique de la France se trouverait menacée. Or, le nucléaire est l'un de nos atouts majeurs, y compris pour protéger l'environnement, puisqu'il ne dégage pas de gaz à effets de serre.
Cette affaire du nucléaire est très représentative de cette élection présidentielle. Les deux sortants ne sont pas des hommes libres. Ils sont prisonniers de leur camp, de leurs alliés. Ils doivent donner des gages aux uns et aux autres.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont des chefs de clan, qui doivent satisfaire les fantasmes et les appétits de leurs commensaux. Au contraire, Jean-Pierre Chevènement est un homme libre. Il a proposé au peuple, le 9 septembre dernier, dix grandes orientations. Qui s'y retrouve, le rejoint. Jean-Pierre Chevènement est un homme seul. Il ne dépend pas d'un appareil. Cela ne facilite pas toujours les aspects matériels de sa campagne. Mais, les Français sentent cette indépendance. Elle est à la base de son succès. Cependant, Jean-Pierre Chevènement n'est pas un homme isolé. Des Français de toute origine politique l'ont rejoint.
Ce rassemblement étonne et détourne parce qu'il réunit dans un même Pôle républicain des hommes et des femmes qui savent que, au dessus de la droite et de la gauche, par delà la droite et la gauche, il y a la France, il y a la République. Ce rassemblement fait peur parce qu'il menace des situations établies et des appétits insatiables. Alors, Jean-Pierre Chevènement est attaqué de tous les côtés. La contradiction ne fait pas peur à ses contradicteurs. Alain Juppé le traite de " marxiste " pendant que Daniel Cohn-Bendit lui répond qu'il représenterait la " France moisie " qu'il serait " nationaliste ". Jean Glavany, qui sera le directeur de campagne de Lionel Jospin, prédit que le Pôle républicain sera une " construction politique trop artificielle " pour ne pas se " décomposer ", tout en lui demandant de soutenir le candidat socialiste au deuxième tour si, d'aventure, celui-ci devait y figurer. Tous ces gens n'ont rien compris. Les Français en ont assez d'une alternance qui n'est pas une alternative. Voter Chirac, c'est revoir Juppé, Sarkozy, Toubon, Douste-Blazy avec en nouveauté Nicole Fontaine. Voter Jospin c'est revoir Fabius, Strauss-Kahn, Guigou, Aubry et peut être même Voynet. Voter Chirac, Voter Jospin, c'est reprendre les mêmes et recommencer.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est voter pour un renouvellement des équipes, et surtout de la politique.
Oui, il y a une possibilité d'en sortir !
Oui, il y a une possibilité de relever la France avec la République.
Oui, il y a une possibilité que Jean-Pierre Chevènement soit Président de la République Française.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Conférence de presse à Lyon
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je tiens d'abord à saluer les radicaux lyonnais, tant de gauche que valoisiens, qui ont décidé de rejoindre le Pôle républicain, qui se développe autour de la candidature de Jean-Pierre Chevènement. A l'exemple d'Emile Zucarelli et de quelques autres parlementaires, la grande famille radicale se retrouve dans ce combat qui est le sien, dans ce combat qui est le nôtre, dans ce combat pour la République. Je me réjouis de la décision d'un certain nombre de militants, de la Fédération du Rhône du Parti républicain-radical et radical-socialiste, et de celle de l'association " Radicalement Lyonnais ".
Ils s'inscrivent dans la tradition d'Edouard Herriot, figure historique du radicalisme s'il en est, et à Lyon plus qu'ailleurs. Dans les années trente du siècle dernier, qui furent lourdes de tant de menaces, il aimait à dire " Entre les rouges et les blancs, nous resterons les bleus ". Sous d'autres formes, nous poursuivons son combat pour la République. C'est tout le sens de la candidature de Jean-Pierre Chevènement.
Quelle différence avec la candidature de Lionel Jospin. Celui-ci a tout organisé sur la mise en scène, comme Jacques Chirac, sauf qu'il a voulu une mise en scène inverse. Il a cherché une modestie qui sonne faux. Le candidat du désir a cru nécessaire d'adresser un message d'amour aux Français. Il a confondu l'Agence France-Presse avec une agence matrimoniale. Jean-Pierre Chevènement a évité les artifices de la communication. Avec sa candidature, il a présenté dix grandes orientations. Elles forment la base constitutive du Pôle républicain.
La Pôle républicain a donc vocation à rassembler tous les citoyens de ce pays au-delà des clivages traditionnels entre la droite et la gauche. Bien sûr, la droite et la gauche continuent à exister ; les différences perdurent. Mais, dans la période actuelle, face aux problèmes cruciaux qui se posent à la France, il faut savoir aller à l'essentiel. Il faut savoir présenter au peuple des solutions sur la base des principes de la République. Car, l'enjeu de l'actuelle campagne présidentielle est l'indépendance de la France, ou alors elle risque à terme de se dissoudre.
La droite et la gauche existent toujours dans la conscience des citoyens. La droite et la gauche n'existent plus dans la pratique des dirigeants. La droite et la gauche n'existent plus précisément là où on se proclame de droite ou de gauche avec le plus d'ostentation. Jacques Chirac et Lionel Jospin se réclament respectivement de l'une et de l'autre. Ils doivent le claironner avec force ; car, personne ne se douterait qu'une telle différence les sépare au vu des politiques qu'ils ont menées. A quelques nuances près, ils ont fait, ils font et, éventuellement, ils feront la même politique, parce que, avant même d'agir, ils se soumettent aux mêmes contraintes préalables, celles de la mondialisation ultra-libérale et d'une construction européenne conçue comme une modalité de cette dernière.
La lecture comparée des programmes du PS et du RPR est de ce point de vue très instructive. On ne peut percevoir aucune différence de fond. Nous avons à faire à un véritable programme commun. Mais, il y a trente ans, il s'agissait d'un programme commun de gouvernement qui suscitait l'espérance. Aujourd'hui, il s'agit d'un programme commun de renoncement qui conduit à la résignation. Nous devons mettre fin à ce système de bipartisme unique, qui ne laisse le choix qu'entre le social libéralisme et le libéralisme social.
Aussi, quand Jean Glavany dit à Jean-Pierre Chevènement qu'il ne faut pas trahir, ou quand Philippe Séguin déclare que la moitié de l'électorat de Jean-Pierre Chevènement sera " cocue ", nous ne pouvons que leur répondre qu'ils se regardent eux-mêmes, qu'ils se regardent dans la glace. Que Jean Glavany relise le discours d'investiture prononcé par Lionel Jospin devant l'Assemblée national le 19 juin 1997. Son thème : faire retour en tout à la République. Et, maintenant, qu'il compare ce texte à la politique menée depuis cinq ans par Lionel Jospin. Quand à Philippe Séguin, il parle d'expérience. Il soutenait, il y a sept ans, le candidat qui promettait de résorber la fracture sociale. Ensuite, pendant deux ans, du haut de son " perchoir ", Philippe Séguin a contemplé Alain Juppé et sa politique.
Alors, soyons sans équivoque : la majorité plurielle est morte, définitivement morte. Lionel Jospin et ses amis prétendent le contraire. Ils espèrent encore en tirer quelques petits bénéfices électoraux. Ils cherchent à provoquer un réflexe conditionné en leur faveur chez ceux qui n'arrivent pas à se résoudre à cette diamétrale opposition entre la gauche réelle et la gauche officielle. Une fois de plus, ils sont aidés par la complicité des amis de Jacques Chirac qui développent la même tactique falsificatrice vis-à-vis des Français qui se veulent de droite.
En revanche, est apparu un axe stratégique entre le parti socialiste et les verts, auquel cherche désespérément à se raccrocher Robert Hue. Je ne parlerai même pas de Jean-Michel Baylet et de sa candidate improvisée. Cet axe stratégique penche naturellement du côté de la plus grande facilité. Il est donc dominé par l'idéologie libérale libertaire des verts. Ces derniers n'ont même plus besoin de se manifester ouvertement pour que les socialistes s'y conforment. Il n'y a en réalité que deux freins, l'un légitime : la crainte de l'électorat, l'autre trivial : les verts ne sont en fait intéressés que par les honneurs et les places. La loi dite sur la présomption d'innocence peut servir de modèle à ce schéma. Elle est inspirée par l'angélisme libéral libertaire, auquel se sont ralliés à l'époque les amis de Jacques Chirac. Puis, devant les réactions des Français, Lionel Jospin a proposé une loi modificative. Mais, dans sa propre majorité, l'angélisme est tellement fort qu'il en fut réduit à des aménagements mineurs.
Jacques Chirac, lui, vient de se livrer sur la sécurité à une opération de grand style démagogique. Il a enfoncé les portes ouvertes en proposant des dispositions qui existent déjà, comme le conseil de sécurité intérieure. Il a copié sur Jean-Pierre Chevènement avec les lois de programmation ou la réforme de l'ordonnance de 1945. Il a oublié ses propres erreurs, comme la suppression en 1987 de la détention provisoire pour les mineurs même multirécidivistes.
J'ai oublié de citer quelques candidats. Mais, les ramasse-miettes, ceux qui déjà se sont prononcés au deuxième tour pour l'un des deux sortants, méritent à peine une mention. Les Français ne s'y trompent pas et se détournent d'eux. Toutefois, il faut s'intéresser aux oubliettes. Qu'il y ait respectivement à l'extrême droite et à l'extrême gauche un plancher incompressible de 2 à 3 % des électeurs, est sûrement une donnée incontestable. Mais, les autres citoyens, qui s'apprêtent à voter tant pour Arlette Laguiller que pour Jean-Marie Le Pen, veulent en fait manifester un profond mécontentement. Seulement, ils vont perdre leur voix. Car, ni l'un, ni l'autre ne peuvent figurer au second tour. Et si, d'aventure, l'un des deux y parvenait, il serait écrasé. Ainsi, en votant pour Arlette Laguiller ou pour Jean-Marie Le Pen, on conforte le système en place, en se donnant l'illusion de le contester.
Dans cette élection, l'enjeu n'est plus dans la bipolarité habituelle entre la droite et la gauche. L'enjeu est un triangle. L'enjeu est entre Jean-Pierre Chevènement, Jacques Chirac et Lionel Jospin. Mais, Jean-Pierre Chevènement est le seul candidat crédible, le seul candidat fiable, le seul candidat de l'alternative. Mais, nous sommes passés à une nouvelle phase, après la curiosité, vient l'inquiétude. On commence à percevoir contre lui des campagnes de calomnies et de dénigrements. C'est le contraire du serment d'Hippocrate : nuire par tous les moyens. Rassurez-vous, nous nous y attendions. Jean-Pierre Chevènement est un roc, il est solide. Nous répondrons coup pour coup. Et puis, en dernière instance, les Français seront juges.
Maintenant, que la campagne commence, que le débat s'ouvre. Il n'y a plus de Président de la République et de Premier Ministre qui tiennent, il n'y a plus que des candidats. Ils doivent être à armes égales.
(Source http://georges-sarre.net, le 5 mars 2002)
Réunion publique à Bourg-en-Bresse
Chers Amis,
Depuis hier, le candidat nommé désir s'est déclaré aux Français sous la forme d'une missive d'amour. Manifestement, il a confondu l'Agence France-Presse avec une agence matrimoniale. Il a voulu une annonce qui soit l'exact contre-pied de celle de Jacques Chirac. En réalité, le souci de la mise en scène était exactement le même. Mais, l'un a joué un péplum à grand spectacle, quand l'autre s'est rabattu sur un film intimiste. Tout cela n'est qu'artifice de communication. La fausse modestie de Lionel Jospin cache mal la nature véritable de son désir qui n'est pas seulement un mot. Désir de pouvoir, désir de puissance, désir de l'autosatisfaction. En même temps, désir du rigide qui veut se faire désirer. Désir de l'austère qui veut se faire désirer.
Que reste-t-il du parti socialiste ? Quelques militants égarés et beaucoup de notables craintifs. Et, ces notables sont craintifs parce que, eux aussi, ont un désir, un désir trivial, le désir de conserver leurs places de notables. Lionel Jospin leur semble le meilleur garant. Après l'élection présidentielle, il y a les élections législatives. Mais, en dehors de leur notabilité, ils n'ont plus d'idées, plus de projet, plus d'avenir. Seul leur appétit n'est pas épuisé. Mais, comment pourrait-il en être autrement ? Depuis vingt ans, ils ont tout promis, ils ont tout trahi.
Depuis maintenant une dizaine de jours, la France ironique a découvert dans l'autre des deux sortants un candidat de la passion ; je dirai même de la compassion. Comment ne pas avoir une compassion étonnée pour un pays qui, quand il ne relève pas du plagiat, ressemble au vide sidéral. Comment ne pas avoir une compassion inquiète pour son goût si affiché du pouvoir pour le pouvoir, du pouvoir pour ses colifichets ?
Comment ne pas avoir une compassion attendrie pour l'éternel soupirant qui, depuis trente ans, se présente à Marianne en jeune homme pressé ? Nous finissons par bien connaître Jacques Chirac avec le temps. La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est qu'il ne tiendra aucun des engagements qu'il prend. Après un petit succès de curiosité dû à sa déclaration de candidature, la cote de Jacques Chirac dans les sondages a recommencé à descendre.
Et puis, nous avons l'homme de la Nation. Le 4 septembre dernier, il s'est déclaré candidat. Le 9 septembre dernier, il a présenté ses dix grandes orientations programmatiques. Depuis, il fait campagne. Depuis, il est devenu crédible. Depuis, il leur fait peur. L'homme de la passion a précipité sa déclaration, non sans improvisation. L'homme du désir commence à s'inquiéter. Alors, il fait donner Jean Glavany. Celui-ci a invité Jean-Pierre Chevènement à ne pas trahir. Jean Glavany a donc invité Jean-Pierre Chevènement à ne pas imiter Lionel Jospin. Car, qui a trahi ses engagements pris devant l'Assemblée nationale le 19 juin 1997 ? Le thème du discours était : en tout faire retour à la République. Que Jean Glavany examine selon ses critères les cinq années du gouvernement de Lionel Jospin !
Jean-Pierre Chevènement, lui, n'a pas de problème de crédibilité. Il a su prouver dans le passé qu'il avait des convictions. Aujourd'hui il propose aux Français de relever la France avec la République. Et, d'abord, parce que la sûreté des personnes et des biens est le premier des droits de l'homme et du citoyen, il veut rétablir en France sur tout, je dis bien tout, le territoire de la République la sécurité pour tous et pour chacun. Il s'est engagé à faire voter par la nouvelle Assemblée nationale trois lois dans les cent premiers jours. Une loi de programmation pour la justice. Une loi de programmation pour la police et la gendarmerie.
Enfin, il faut une loi pour réformer en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. En plus d'un demi-siècle, le monde n'est plus le même, la société n'est plus la même, et les jeunes ne sont plus les mêmes. La délinquance commence de plus en plus tôt, et l'impunité accentue ce phénomène de pourrissement. La récidive généralisée exaspère, à juste titre, l'immense majorité des honnêtes gens. Il ne s'agit pas non plus d'abandonner la prévention, mais la répression participe pleinement à la prévention ; cela s'appelle même la dissuasion.
Jean-Pierre Chevènement propose de mettre en place soixante centres de retenue fermés pour les adolescents à la fois perdus et les plus dangereux. Ce n'est pas un retour aux anciennes maisons de correction. C'est l'établissement de lieux où ces futurs adultes pourront enfin apprendre les repères nécessaires à la vie en société, sans compter combler les lacunes de leur instruction et de leur formation professionnelle.
En son temps, Jean-Pierre Chevènement avait fait ces propositions à Lionel Jospin. Il les avait écartées. Il ne voulait pas heurter l'angélisme judiciaire qu'incarnait si bien Elisabeth Guigou.
Certes, dans la perspective des élections, les socialistes font semblant de mieux vouloir répondre aux voeux du peuple dans le domaine de la sécurité. Mais, ce n'est qu'une posture trompeuse de communication. Il suffit de constater qu'ils ont vidé de sa substance la récente loi portant réforme de la précédente loi sur la présomption d'innocence.
Jacques Chirac, alors Président de la République, s'est comporté en candidat en embuscade. Il n'a jamais apporté le moindre soutien à Jean-Pierre Chevènement. Alors, quand aujourd'hui il vient nous faire à grand renfort de publicité, le coup de la fracture sécuritaire. Comme pour tout le reste, c'est de la poudre aux yeux. Ses propositions se rangent en trois catégories : celles qui existent déjà, celles qu'il copie sur Jean-Pierre Chevènement et celles qu'il omet. Existent depuis longtemps le conseil de sécurité intérieure, les conseils locaux de sécurité et les plans de sécurité pour les établissements scolaires. Il copie sur Jean-Pierre Chevènement les trois lois à faire voter en urgence et la création de centres fermés pour mineurs.
Jacques Chirac a aussi omis de dire dans son récent discours sur la sécurité les mesures qu'il avait déjà prises. En 1987, il a supprimé la détention provisoire pour les mineurs, y compris multirécidivistes. En 1995, il n'a pas appliqué la loi de programmation que Charles Pasqua venait de faire voter. En 1997, il a lancé l'indépendance des parquets, démantelant toute politique pénale en France. De même, il a oublié certaines propositions qu'il a pu faire au cours de ces dernières années.
Ainsi, la suppression de la hiérarchie au sein des parquets, qui auraient entraîné en plus l'anarchie judiciaire. Ainsi, la municipalisation de la police nationale, qui aurait provoqué une fragmentation favorable aux criminels et aux délinquants. Une fois de plus, Jacques Chirac prend l'air du temps et cherche à nous présenter un menu préparé à la va-vite.
Le retour de la sûreté ne dépend pas seulement de la répression et de la prévention. Le retour de la sûreté dépend aussi, dépend surtout de l'emploi. Le chômage est père de tous les vices, de tous les maux. Il faut une autre politique économique, il faut une relance par la demande pour obtenir de la croissance, il faut revaloriser la feuille de paie. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans et de convoquer très vite après son élection une conférence sur les salaires. D'autre part, il a prévu de transférer sur la fiscalité une partie des charges sociales, afin que le travail lui-même soit moins taxé.
Jacques Chirac, lui, a proposé deux mesures, d'une part reconstruire en vingt ans un million de logements sociaux, d'autre part relancer la politique des zones franches urbaines. Actuellement, on construit 45 000 logements sociaux neufs par an, et on en rénove 1 000. Donc sur vingt ans, on en construit à peu près un million, et on en réhabilite environ deux millions. Jacques Chirac propose de faire ce qui se fait déjà : bel esprit d'innovation ! Par ailleurs, on a déjà l'expérience des zones franches. Elles ont un effet limité sur l'emploi des habitants des quartiers concernés. Jacques Chirac nous présente une fausse bonne idée.
Et puis la sécurité passe, nous le savons bien, par l'Ecole. Car, dans la République, l'Ecole est à la base de tout. L'Ecole est l'endroit où se forme le citoyen, où l'enfant acquiert les éléments qui lui permettront d'exercer sa raison et son propre jugement. Lorsqu'il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin a mis l'enfant au centre de l'Ecole : quel erreur ! L'Ecole n'est plus alors un centre d'apprentissage, mais un lieu de vie. C'est oublier que l'enfant ne restera pas un enfant, que l'enfant deviendra un adulte. Non, au centre de l'Ecole, au centre de l'Ecole de la République, il faut mettre la transmission des savoirs, des connaissances et des repères.
Non, il n'y a pas d'égalité entre le Maître et l'Elève, le Maître sait, l'Elève apprend. Non, le Maître n'est pas le copain de l'Elève, le Maître instruit l'Elève. D'abord, donc, remettre sur ses pieds l'Ecole, en finir avec la démagogie " jeuniste ", avec les Marseillaises frelatées et autres tags, expressions d'une soi-disante spontanéité artistique. En réalité, Jacques Chirac et Lionel Jospin seraient incapables de tenir des engagements analogues à ceux pris par Jean-Pierre Chevènement.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont contraints par le pacte de stabilité budgétaire et par les statuts de la Banque Centrale Européenne. Il faudra assouplir le premier. A son origine, était l'Allemagne. Sûre de sa puissance économique, elle tenait ainsi à manifester sa méfiance et son dédain pour ces pays qu'elle qualifiait ironiquement du " Club Med ". Mais, l'histoire a parfois des retours inattendus. Aujourd'hui, c'est précisément l'Allemagne qui arrive difficilement à respecter les contraintes de ce pacte. Seul un compromis politique, passé entre les ministres des Finances, lui a permis d'échapper à l'avertissement public dont elle était menacée par la Commission de Bruxelles. Pour la Banque centrale, il faut d'abord en changer les statuts. Aujourd'hui, elle est chargée de lutter contre la seule inflation. Un tel combat est désormais dépassé ; il appartient à l'autre siècle. Il faut donc lui donner aussi pour objectifs la croissance et l'emploi.
Comment ne pas évoquer le problème de la désindustrialisation de la France ? Pour consommer, il faut d'abord produire. La rente est anéantie quand le capital a été dilapidé. Jean-Pierre Chevènement l'a rappelé à Toulouse : il faut des usines chimiques. Bien sûr, il faut prendre toutes les précautions pour que des accidents, comme celui d'AZF, n'arrivent plus. Les premières victimes en ont été les salariés de l'usine. Mais, ces précautions prises, il faut maintenir et développer des lieux de production industrielle. Il faut en finir avec cette idéologie à courte vue qui condamne les usines parce qu'elles sont susceptibles de polluer.
Le mépris affiché pour le travail ne facilite pas l'intégration harmonieuse des jeunes d'aujourd'hui à notre société. Je pense notamment à ceux dont les parents ou les grands parents sont nés dans un autre pays, sur un autre continent. Car, à ce dédain pour la production, se joint la honte de soi qui frappe nos élites. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! Assumons l'histoire de France, toute l'histoire de France avec ses ombres certes, mais aussi avec ses nombreuses lumières. N'oublions pas que ces lumières ont éclairé le monde. La Marseillaise est notre hymne national. La Marseillaise est aussi le chant que tant d'hommes et de femmes, épris de liberté, ont entonné un peu partout sur la planète. La Marseillaise sifflée est une insulte à la France et à la liberté. Mais encore faudrait-il que la France se donne les moyens d'être digne de son rang, de pouvoir encore parler à l'humanité toute entière, d'être la voie que le monde continue à attendre.
Georges Bush vient de menacer de guerre un " axe du mal ", comprenant l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord. A juste titre, Hubert Védrine a qualifié cette analyse de " simpliste ". Collin Powell a qualifié ce propos de " vapeur ". Ainsi, le secrétaire d'Etat des Etats-Unis d'Amérique du Nord vient de signifier au ministre des Affaires Etrangères de la République Française qu'il tenait son opinion pour négligeable. Il parait pourtant que les deux pays sont alliés. Bien plus, l'ambassadeur de la République à Washington a été sèchement convoqué au Département d'Etat. Pourquoi, donc, un ministre de la République est ainsi méprisé ? Pourquoi, donc, les représentants de la France sont ainsi traités ? Parce que la France est désarmée.
Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé la France. Bientôt, notre force de frappe aura perdu tout caractère opérationnel. Le service militaire a été supprimé, sans que soit prévu un système de garde nationale, assurant, en tant que de besoin, la défense opérationnelle du territoire et la garde des points névralgiques. Enfin, l'armée de métier coûte beaucoup plus chère que l'armée de conscription.
Chers Amis,
Nous connaissons un pays qui fut riche et puis qui a sombré dans la crise, le malheur et la pauvreté. Au temps de sa splendeur, l'Argentine n'a pas su construire un Etat. Elle n'a pas cherché à investir dans une industrie nationale. Elle a vendu ses services publics pour maintenir artificiellement une apparence d'économie pendant quelques années supplémentaires.
L'Argentine illustre les méfaits à terme d'un système qui ne repose que sur la rente, rente agricole en l'occurrence. Mais quand la rente disparaît, le pays se retrouve fort dépourvu. Il ne faut pas croire que la France ne pourrait jamais subir un tel sort. Nous avons certes des atouts, et même de beaux atouts. Encore, ne faudrait-il pas les gaspiller.
Or, de ce point de vue, l' "entente " entre le Parti socialiste et les verts doit susciter la plus grande inquiétude.
Les verts ont déjà empoché quarante deux circonscriptions réservées. C'est-à-dire qu'ils ont obtenu la possibilité d'avoir un groupe parlementaire en cas d'élection de Lionel Jospin. C'est-à-dire qu'ils peuvent être en mesure d'exercer un chantage permanent sur l'éventuel gouvernement socialiste.
Mais le plus grave n'est pas là. Le plus grave est la tactique de Lionel Jospin. Lionel Jospin montre ainsi qu'il n'est pas un homme d'Etat, mais un chef de parti qui rêve de revenir au régime des partis. Il a refusé tout accord formel avec les verts, parce qu'il sait que, dans leur immense majorité, les Français rejettent leur religion anti-nucléaire, leur phobie anti-automobile ou leur angélisme coupable sur les problèmes de sécurité. Lionel Jospin ne veut pas assumer ces fardeaux devant les électeurs. Mais, pour autant, il ne va pas leur proposer une politique cohérente dans ces domaines. Il attendra le résultat obtenu par Noël Mamère au premier tour de l'élection présidentielle. Ainsi, si par malheur, Noël Mamère obtenait un pourcentage de voix que Lionel Jospin considérerait comme significatif, la politique énergétique de la France se trouverait menacée. Or, le nucléaire est l'un de nos atouts majeurs, y compris pour protéger l'environnement, puisqu'il ne dégage pas de gaz à effets de serre.
Cette affaire du nucléaire est très représentative de cette élection présidentielle. Les deux sortants ne sont pas des hommes libres. Ils sont prisonniers de leur camp, de leurs alliés. Ils doivent donner des gages aux uns et aux autres.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont des chefs de clan, qui doivent satisfaire les fantasmes et les appétits de leurs commensaux. Au contraire, Jean-Pierre Chevènement est un homme libre. Il a proposé au peuple, le 9 septembre dernier, dix grandes orientations. Qui s'y retrouve, le rejoint. Jean-Pierre Chevènement est un homme seul. Il ne dépend pas d'un appareil. Cela ne facilite pas toujours les aspects matériels de sa campagne. Mais, les Français sentent cette indépendance. Elle est à la base de son succès. Cependant, Jean-Pierre Chevènement n'est pas un homme isolé. Des Français de toute origine politique l'ont rejoint.
Ce rassemblement étonne parce qu'il réunit dans un même Pôle républicain des hommes et des femmes qui savent que, au dessus de la droite et de la gauche, par delà la droite et la gauche, il y a la France, il y a la République. Ce rassemblement fait peur parce qu'il menace des situations établies et des appétits insatiables. Alors, Jean-Pierre Chevènement est attaqué de tous les côtés. La contradiction ne fait pas peur à ses contradicteurs. Alain Juppé le traite de " marxiste " pendant que Daniel Cohn-Bendit déclare qu'il représenterait la " France moisie " qu'il serait " nationaliste ". Jean Glavany, qui sera le directeur de campagne de Lionel Jospin, prédit que le Pôle républicain sera une " construction politique trop artificielle " pour ne pas se " décomposer ", tout en lui demandant de soutenir le candidat socialiste au deuxième tour si, d'aventure, celui-ci devait y figurer. Tous ces gens n'ont rien compris. Les Français en ont assez d'une alternance qui n'est pas une alternative. Voter Chirac, c'est revoir Juppé, Sarkozy, Toubon, Douste-Blazy avec en nouveauté Nicole Fontaine. Voter Jospin c'est revoir Fabius, Strauss-Kahn, Guigou, Aubry et peut être même Voynet. Voter Chirac, Voter Jospin, c'est reprendre les mêmes et recommencer.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est voter pour un renouvellement des équipes, et surtout de la politique.
Oui, il y a une possibilité d'en sortir !
Oui, il y a une possibilité de relever la France avec la République.
Oui, il y a une possibilité que Jean-Pierre Chevènement soit Président de la République Française.
(Source http://georges-sarre.net, le 19 mars 2002)
Conférence de presse à Avignon
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Les deux grosses machines du bipartisme unique se sont enfin ébranlées. Elles vont essayer, du seul fait de leur masse pesante, de tout écraser sur leur passage, de monopoliser le débat au seul profit des deux sortants, de le réduire à un combat de coqs, les citoyens pourront prendre les paris. Les deux appareils vont tenter de nous présenter Jacques Chirac et Lionel Jospin en hommes quasi nouveaux, comme si l'un ne présidait pas depuis sept ans, comme si l'autre ne gouvernait pas depuis cinq ans. Jacques Chirac demande le renouvellement de son mandat. Lionel Jospin sollicite le renouvellement de son quinquennat. Pourquoi voulez-vous qu'avec l'un et l'autre, il y ait quelque chose de nouveau sous le soleil ?
Les deux grosses machines ressemblent aux dinosaures des temps préhistoriques. Des corps immenses et de toutes petites têtes. De gigantesques carcasses à nourrir avec des appétits insatiables, auxquelles il faut d'immenses et grasses prairies pour s'ébrouer. Des logiciels faibles pour vraiment penser un programme qui soit autre chose que quelques idées cueillies à la volée.
L'arrivée inopinée d'un nommé François Bayrou, a finalement dissimulé les véritables enjeux qui faisaient frémir la prairie de Toulouse. Trois conflits étaient sous-jacents. Le premier justifie le sigle UEM, qui devrait signifier Union économique et monétaire, et non Union en Mouvement. La question déterminante pour des protagonistes politiciens est de savoir qui détiendra les cordons de la bourse, qui, après les élections législatives recueillera le financement public. En clair, existera-t-il une ou des associations de financement ? S'il n'en existe qu'une, il y aura un maître, s'il en existe plusieurs, bien des ambitions personnelles pourront se redévelopper. Le second conflit porte sur la personne du Premier ministre, au cas où Jacques Chirac serait réélu. Chacun connaît la longue liste des " premiers ministrables " autoproclamés. Le combat est sévère autour de la peau d'un ours qui est loin d'être encore tué. Enfin, le troisième conflit concerne déjà la désignation virtuelle du candidat de 2007.
En revanche, devant ces appétits, le logiciel est resté atrophié. Pour une bonne part, la vingtaine d'engagements sont destinés au même avenir que la résorbtion de la fracture sociale promise il y a sept ans. Pour le reste, c'est la reprise du vieux slogan autrefois attribué à la gauche : " Demain, on rase gratis ". Avec Jacques Chirac et Lionel Jospin, droite et gauche finissent par se confondre. Demain, donc, on diminue les impôts, Laurent Fabius le fait bien. Mais, comme on vient quand même de la droite libérale, demain on diminue le nombre de fonctionnaires. Mais, comme en même temps on connaît les souhaits des Français, demain on augmente le nombre de policiers, de gendarmes, d'infirmières, d'enseignants... Pour résoudre cette quadrature du cercle, demain on liquide l'argenterie de famille. Demain, on vend EDF-GDF, Aéroports de Paris et quelques autres services publics. Tant pis, si après demain, la France connaît à son tour les gigantesques pannes d'électricité de la Californie. Tant pis, si après demain, la France est victime de retentissantes faillites comme celle d'Enron.
A quelques nuances près, l'autre sortant propose le même programme. Dès avril prochain, Jean-Claude Gayssot, ministre communiste des Transports, met en vente la société d'Autoroutes du Sud de la France. D'ailleurs, bien qu'investi, sans débat et sans concurrent, candidat du parti socialiste, Lionel Jospin déclare, dans un rare moment de franchise, que son programme n'est pas socialiste. La définition est trop étriquée dit-il. Aveu terrible qui montre que Lionel Jospin a abandonné la gauche, quoiqu'il prétende en conserver les suffrages au nom des rentes acquises.
Lionel Jospin vient de se rendre à Stockholm au sommet des " modernes ", c'est-à-dire précisément au sommet de ceux qui viennent de la gauche pour mieux l'abandonner au nom de la mondialisation ultra-libérale. Cette réunion aurait du inspirer au moins deux réflexions salutaires à Lionel Jospin. A la première place de ce sommet, trônait Tony Blair. Or, celui-ci vient de signer avec Silvio Berlusconi une déclaration prévoyant notamment le démantèlement de tout droit du travail au nom de la flexibilité. Les propos de Catherine Tasca, refusant de rencontrer Silvio Berlusconi au Salon du Livre, relèvent de la palinodie, où l'on se contredit entre la cour et le jardin pour mieux attirer le chaland. La deuxième réflexion aurait du venir d'une absence. La réunion de Stockholm était prévue pour septembre dernier. Elle a été repoussée à cause de l'attentat de New York. Depuis, l'un des invités a disparu. Ils s'agit de Fernando de la Rua, qui était alors Président de l'Argentine. Nous devons méditer sur le sort de l'Argentine. Un pays qui n'a jamais vraiment cherché à construire un Etat. Un pays qui n'a pas su investir dans l'industrie quand il en avait les moyens. Un pays qui a liquidé ses services publics pour faire illusion quelques années supplémentaires.
Je ne dirai rien des appétits qui entourent Lionel Jospin. Ils sont connus depuis longtemps. Ils n'ont jamais été avares de promesses. Aujourd'hui, eux aussi, on les voit s'ébrouer.
Pour manifester leur colère devant les deux sortants, un certain nombre de nos concitoyens s'apprêtent à voter pour les candidats qui, dans leurs discours, s'expriment avec le plus de virulence. Certes, il existe en France un plancher incompressible de 2 à 3 % des électeurs qui se reconnaissent respectivement soit dans l'extrême gauche, soit dans l'extrême droite. Mais, pour les autres, il s'agit seulement d'exprimer une forte protestation contre le système du pareil au même. Pourtant, en donnant leur suffrage soit à Arlette Laguiller, soit à Jean-Marie Le Pen, ces Français jettent leur bulletin de vote dans une oubliette. Jamais l'un ou l'autre ne sera au second tour. Et si, d'aventure, l'un des deux y figurait, il serait écrasé.
Jean-Pierre Chevènement est déjà la surprise de cette campagne. Il est aujourd'hui suffisamment crédible pour devenir la surprise du scrutin lui-même. Jean-Pierre Chevènement a su montrer dans le passé la force de ses convictions. Chacun sait qu'il tiendra les engagements qu'il a pris, tels qu'il les a fixés lorsqu'il a présenté ses dix grandes orientations à Vincennes, le 9 septembre dernier. Son objectif est de relever la France avec la République.
Soudain, les deux sortants nous parlent de sécurité. Très bien ! Mais, pourquoi n'ont-ils pas suivi Jean-Pierre Chevènement quand il était leur ministre de l'Intérieur ? Pourquoi Lionel Jospin a-t-il toujours tranché contre lui et en faveur d'Elisabeth Guigou ? Pourquoi Jacques Chirac s'est-il tu, se comportant en candidat en embuscade, et non en chef de l'Etat ? Aussi, quand Jean-Pierre Chevènement présente ses mesures contre l'insécurité, il est cohérent avec lui-même, avec la politique qui est la sienne. Quand les deux autres présentent les mêmes mesures, ils ne font que se conformer aux sondages. Ils ne s'adressent pas aux citoyens pour leur proposer un avenir. Ils se contentent de flatter une opinion mouvante pour garder le pouvoir. J'ai pris l'exemple de la sécurité, parce que la sécurité est devenu l'un des thèmes les plus cruciaux. Mais, si vous le souhaitez, nous pourrions en prendre bien d'autres, comme le travail, l'Ecole, la Défense...
La France a encore un avenir. La République a encore un avenir. Et cet avenir dépend du prochain scrutin présidentiel. N'oublions pas que Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont accordés, en décembre dernier, à la conférence de Laeken pour doter l'Union Européenne d'une constitution, c'est-à-dire d'un texte qui sera au-dessus de la constitution de la République Française. Ainsi, notre pays serait réduit à n'être tout au plus que la Louisiane de l'Europe.
Bien sur, il faut un traité pour rendre compréhensible tous les textes, toutes les jurisprudences qui se sont accumulées depuis prés d'un demi-siècle.
Mais ce traité doit rester inférieur aux constitutions nationales. Alors, la République ne se dissoudra pas dans une improbable Europe des régions.
Alors, la France impulsera la construction d'une Europe des Nations, où chaque peuple conservera sa pleine souveraineté, tout en déléguant les compétences nécessaires, selon des modalités permettant un constant contrôle démocratique.
(Source http://georges-sarre.net, le 5 mars 2002)
Réunion publique de Laudun-L'Ardoise
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Nos deux sortants sont tellement interchangeables qu'ils finissent par l'avouer publiquement sans même s'en rendre compte. Ainsi, dans les slogans de campagne tant de Jacques Chirac que de Lionel Jospin, nous trouvons le même mot auquel ils veulent donner une valeur centrale: " ensemble ". C'est un véritable message subliminal qu'ils adressent ensemble aux Français. Ils ont gouverné ensemble pendant cinq ans. Ils pourraient encore gouverner ensemble demain. Mais, ils sont irrémédiablement séparés par l'abysse de leurs ambitions personnelles respectives, par les précipices des appétits insatiables de chacune des deux équipes qui les entourent. Leur " ensemble " se sépare au seul moment du partage des honneurs et des places. Le chant de Lionel Jospin écrit et composé par Jean Jacques Goldman s'intitule " Ensemble ".
Tout au long du quinquennat de Lionel Jospin, Jacques Chirac n'a jamais utilisé ses pouvoirs présidentiels pour infléchir la politique du gouvernement, et encore moins pour la contrer. Cet acquiescement s'est même étendu aux affaires étrangères et à la défense, domaines que la pratique constitutionnelle réserve normalement au Président de la République. Tout au plus, Jacques Chirac s'est contenté ici ou là d'une critique plus ou moins voilée, plus ou moins feutrée, qui relevait d'un candidat en embuscade, et non du chef de l'Etat. De son côté, Lionel Jospin a reconnu depuis longtemps que pas une virgule ne l'avait séparé de l'autre sortant. Cette complicité n'est pas un hasard. Ils sont d'accord sur les préalables fondamentaux. Ils acceptent de se soumettre aux contraintes de la mondialisation ultra-libérale et d'une construction européïste conçue comme la modalité continentale de cette dernière. Disons le clairement, Jacques Chirac et Lionel Jospin ont été solidaires durant toute la cohabitation.
Néanmoins, il faut faire accroire aux Français que chacun des deux propose un programme différent. Alors, Jacques Chirac parle de gouverner autrement. Alors, Lionel Jospin parle de présider autrement. Même dans leur effort surhumain pour se distinguer l'un de l'autre, ils finissent par se retrouver dans une belle symétrie, qui se conclut par un adverbe commun. Et puis, que signifie gouverner autrement ? Ne pas gouverner comme Lionel Jospin, mais gouverner comme Alain Juppé. Il suffit de voir le rôle central que joue Alain Juppé dans la campagne de Jacques Chirac. Et puis, que signifie présider autrement ? Ne pas présider comme Jacques Chirac, mais présider comme Lionel Jospin a gouverné. Lionel Jospin nous a déjà promis la continuité, s'il était élu. Bref " ensemble " ou " autrement ", nos deux sortants n'arrivent pas à se séparer. Enfin, n'oublions pas que cet " autrement " ne porte que sur la forme.
Sur le fond, l'un et l'autre commencent à faire semblant d'exposer un programme. Ainsi il y a quelques jours, à grand renfort médiatique de publicité, Jacques Chirac nous a énoncé les mesures qu'il comptait prendre pour combattre l'insécurité. On peut les ranger en trois catégories : celles qui existent déjà, celles proposées par Jean-Pierre Chevènement et celles que Jacques Chirac a oubliées. Ainsi, existent déjà le conseil de sécurité intérieure, les conseils locaux de sécurité ou les plans de sécurité dans les établissements scolaires.
Il reprend à Jean-Pierre Chevènement notamment la refonte de l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs et les lois de programmation pour la justice et pour les forces de maintien de l'ordre. Quand Lionel Jospin a tranché au sein du gouvernement contre ces propositions de Jean-Pierre Chevènement, Jacques Chirac aurait pu, aurait du intervenir pour soutenir le ministre de l'Intérieur, son ministre de l'Intérieur. Il s'est tu. Voilà un exemple concret, et grave, de son comportement de candidat en embuscade, et non de chef de l'Etat. Enfin, il y a les dispositions que Jacques Chirac a oubliées. C'est lui qui, en 1987, a supprimé la détention provisoire des mineurs, y compris des multirécidivistes. C'est lui qui, en 1995, n'a pas appliqué la loi de programmation que Charles Pasqua avait fait voter. C'est lui qui, en 1997, a engagé la réforme visant à l'indépendance des parquets, supprimant ainsi toute politique pénale au niveau national. Je ne parlerai pas des propositions qu'il a formulées un jour et qu'il n'a pas reprises le lendemain, suivant son habitude ancienne. Ainsi, une fois, il s'est prononcé pour la municipalisation de la police nationale au risque de fragmenter et de disperser jusqu'à l'impuissance. Une autre fois, il a évoqué la suppression de la hiérarchie au sein des parquets au risque de l'anarchie judiciaire.
Pour le moment, Lionel Jospin, quant à lui, ne nous a encore gratifié que de mots. Les promesses viendront ; et il n'en sera pas avare. Il veut donc une France active, une France sûre, une France juste, une France moderne et une France forte. Il nous assure en même temps qu'il veut atteindre ces objectifs dans la continuité de la politique qu'il mène depuis cinq ans. Je reviendrai sur la France active. Pour la France sûre, après ce que je viens déjà de dire, je me contenterai de m'interroger pour connaître les raisons qui l'ont conduit à toujours préférer l'angélisme d'Elisabeth Guigou à la fermeté républicaine de Jean-Pierre Chevènement. Récemment encore, il a voulu corriger les dispositions les plus catastrophiques de la loi sur la présomption d'innocence. Eh bien, devant les pressions de sa propre majorité parlementaire, il a dû reculer sur des points essentiels.
Sur la France juste, je ne peux y voir qu'une figure démagogique. Tout le monde sait que, depuis cinq ans, les inégalités se sont considérablement accrues en France. Récemment, un hebdomadaire se réjouissait que les revenus des patrons français aient rejoint ceux des patrons américains. Concrètement, cela signifie que, aujourd'hui, en France, dix sept dirigeants d'entreprises privées gagnent près de cinq cent fois le SMIC, oui je dis bien cinq cent fois. Il nous parle d'égalité entre les territoires. Avec l'introduction de la concurrence, l'équivalent de vingt départements n'est pas couvert par le téléphone mobile. De même, la péréquation des tarifs de l'électricité est désormais en péril. Pour les retraites, il faut être sans illusion : avec Jacques Chirac comme avec Lionel Jospin, une menace pèse sur nos retraites par répartition. Les programmes tant du PS que du RPR prévoient de commencer à instiller la capitalisation. D'ailleurs, le président du principal fond de pension américain par capitalisation a déclaré publiquement qu'il voterait pour Lionel Jospin. On a les soutiens que l'on mérite.
Sur la France moderne, Lionel Jospin nous vante la formation permanente. C'est très bien. Mais, pour être efficace, la formation permanente doit compléter et actualiser une bonne formation initiale. Dans la République, l'Ecole est à la base de tout. Au centre de l'Ecole, il doit y avoir la transmission des savoirs et des repères. Le Maître et l'Elève ne sont pas égaux, ne sont même pas équivalents. Le Maître sait, l'Elève apprend. Quand, il fut ministre de l'Education Nationale, Lionel Jospin a accentué les dérives post soixante-huitardes.
Il a fait voter une loi qui plaçait l'Elève au centre de l'Ecole. Mais alors, l'Ecole devient un simple lieu de vie. Mais alors, l'élève n'est plus considéré comme un adulte en devenir, comme un futur citoyen. Il est considéré dans le seul instantané du moment présent. Ce bouleversement des repères n'est pas pour rien dans l'actuelle augmentation de la délinquance juvénile.
Jack Lang, actuel ministre de l'Education nationale, vient de découvrir, dix huit ans après Jean-Pierre Chevènement, qu'à l'Ecole primaire les enfants doivent apprendre à lire, à écrire et à compter. Nous ne serions pas à deux mois d'une élection présidentielle, je m'en réjouirais sans y voir malice. Mais, je ne peux oublier que le même Jack Lang vient de diffuser dans nos écoles des Marseillaises frelatées. Notre hymne national mérite le respect. Il ne peut être un jouet livré aux humeurs d'un ministre de passage. Il est vrai qu'il fut un temps où Jack Lang, déjà ministre, se répandait pour nous dire combien étaient " formidables " les tags, qui seraient une forme spontanée d'expression artistique.
Sur la France forte, simplement un mot pour dire que si, dans la crise actuelle les Etats-Unis traitent la France avec autant de légèreté, c'est parce que Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé notre pays. Les agents du CEA le savent bien : pour que notre force de frappe reste opérationnelle, nous devons procéder, de temps à autre, à un tir réel. D'autre part, les super ordinateurs, américains qui remplaceront les essais par des calculs, sont loin d'être au point. Le service militaire a été supprimé, mais aucune garde nationale n'a été instituée pour la surveillance des points névralgiques en cas d'alerte, terroriste par exemple. Enfin, on le sait bien, une armée de métier coûte beaucoup plus cher qu'une armée de conscription. Néanmoins, le budget de la défense a continué à baisser- les fameux " dividendes de la paix " de Laurent Fabius - jusqu'à atteindre 1,96 % du PIB, contre 3,7 % en 1990.
Je reviens sur la France active. Désormais, pour la production par tête d'habitant, notre pays se place dans les derniers rangs de l'Union Européenne alors que, il y a encore quelques années, il figurait dans le groupe de tête. La principale cause de ce recul grave est le mépris dans lequel sont tenus l'industrie en particulier et le travail en général. Il faut donc en finir avec la dictature de la spéculation boursière. La solution ne passe pas par le traitement social du chômage, mais par son traitement économique grâce à la mise en oeuvre d'une autre politique.
D'abord revaloriser le travail en revalorisant la feuille de paye. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % en cinq ans. Il a aussi prévu une grande conférence sur les salaires dans les semaines suivant son élection. Ces mesures relèvent d'abord de la plus élémentaire justice sociale. Mais, elles permettront en même temps une relance de l'économie par la demande. Pour qu'elles n'aient pas d'effets pervers sur l'emploi, les charges sociales, au moins sur les plus bas salaires, seront progressivement transférées sur la fiscalité. Mais, pour aussi nécessaires que soient ces dispositions, on ne saurait s'en contenter. Il faut redonner à la France le goût de son industrie, et d'abord de celles qui, à tort, semblent poser un problème. Lorsqu'il s'est rendu à Toulouse, en janvier dernier, Jean-Pierre Chevènement n'a pas hésité à se définir comme le candidat du pôle chimique, du pôle industriel, du pôle nucléaire, parce qu'il s'agit des pôles de l'emploi et des pôles de l'avenir.
Car, il ne faut pas l'oublier, les premières victimes du grave accident de l'usine AZF ont été les ouvriers de cette entreprise. Pour autant, ils ne souhaitent pas voir disparaître leur outil de travail, leur gagne-pain. Que deviendrait d'ailleurs la France sans industrie chimique ? Nous aurions quand même besoin des produits fabriqués par cette filière. Il faudrait donc les importer, tout en laissant au chômage les salariés de cette activité. Nous irions vers une économie de la rente, où l'on croit que l'on peut consommer sans produire. Une telle illusion n'a qu'un temps ; puis, vient le moment où le capital a été mangé. Et ce moment, un pays le connaît aujourd'hui ; il se nomme l'Argentine. Si nous n'y prenons garde, à un terme relativement proche de quelques décennies, la France pourrait connaître le sort de l'Argentine.
A l'inverse, il ne faut pas faire n'importe quoi. La sécurité des salariés doit être assurée. Les accidents, comme celui d'AZF, doivent être empêchés, non en supprimant l'usine, mais en la rendant sûre, notamment grâce à la participation vigilante des premiers intéressés. Au nom d'un principe de précaution qui n'a aucun fondement scientifique, on voudrait supprimer les activités humaines dangereuses. Mais toute activité humaine est dangereuse. Croyez-vous que la conduite automobile soit sans danger ? Il faut en finir avec ces absurdités d'une modernité qui voudrait nous renvoyer à la lampe à l'huile et à la marine à voile.
Le second scandale à Toulouse est le temps mis par les compagnies privées d'assurances pour commencer a rembourser les " sans fenêtre ". Et, dire que le RPR, suivant le Medef, voudrait introduire de la concurrence dans la sécurité sociale. Aujourd'hui, des gens se plaignent, à juste titre, pour quelques jours de retards dans les remboursements. Demain, si l'on suivait Nicolas Sarkozy, il faudrait patienter de longs mois.
Mais, il y a encore plus inquiétant : c'est l'avenir du nucléaire. L'entente passée entre le PS et les verts deviendra un accord au lendemain du premier tour. Le contenu de cet accord dépendra du résultat obtenu par Noël Mamère. Lionel Jospin abandonne ainsi la logique des institutions de la Cinquième République, selon lesquelles le Président définit ses orientations et une majorité se constitue autour. Lionel Jospin revient au régime des partis de son enfance, dans lequel la politique du pays résulte de compromis instables entre des groupes d'intérêts. Si donc, par malheur, les verts recueillaient un nombre trop important de suffrages, le nucléaire serait menacé en France. Or, cette filière énergétique est à la fois la moins chère, celle qui donne un avantage compétitif à l'ensemble de notre économie, et la moins polluante, elle n'émet pas de gaz à effet de serre. Il ne me revient pas de rechercher les raisons religieuses ou psychanalytiques qui animent les verts. En revanche, il nous revient à tous de dénoncer les dégâts qu'ils provoquent tant sur l'emploi que pour l'indépendance de la France.
Déjà, en 1997, Dominique Voynet avait exigé et obtenu la fermeture, puis le démantèlement de Super Phénix. Depuis, les verts ont empêché la mise en chantier du premier prototype de l'EPR, le réacteur de la prochaine génération. Or, on sait que la consommation électrique continue à augmenter. Comment pourra-t-on y satisfaire d'ici quelques années, sans construire de nouveaux moyens de production ou alors en construisant à la va-vite des moyens pollueurs au gaz ou au pétrole ? Surtout, d'ici une quinzaine d'années, il faudra commencer à remplacer les actuels réacteurs ; serons-nous prêts ? Les verts, qui savent leur audience limitée, essayent aussi de bloquer le nucléaire en catimini par inertie, tout en se réclamant bien sûr de la transparence. Ainsi, Yves Cochet, ministre de l'Environnement, s'abstient de répondre pour la simple ouverture d'une enquête publique à propos de l'augmentation de la production de mox. Ce soi-disant démocrate empêche les citoyens de s'informer et de s'exprimer sur le cycle du combustible nucléaire. J'ai saisi personnellement Lionel Jospin de cette question. J'attends toujours une réponse qui ne soit pas dilatoire.
Le nucléaire est enfin menacé par la privatisation annoncée d'EDF. Les amis de Jacques Chirac demandent la mise à l'encan de cette magnifique entreprise de service public. Lionel Jospin s'est montré plus tortueux. Il a parlé d'une simple ouverture du capital, l'Etat restant majoritaire. Mais, on sait que de tels seuils finissent toujours par sauter. Pour mieux nous endormir, il a aussi évoqué les missions de service public et l'accord du personnel. En fait, Jacques Chirac et Lionel Jospin sont décidés à liquider EDF en tant qu'entreprise publique. Ni les pannes gigantesques dont a souffert la Californie, ni la faillite retentissante d'Enron ne leur ont appris à se dégager de leur passion idéologique ou de leur plaisir spéculatif. Pour EDF privatisée, le nucléaire sera moins intéressant, parce que plus difficilement source de profit immédiat.
Chers Amis,
Avec Jean-Pierre Chevènement, nous avons un candidat qui a des convictions et qui a su montrer qu'il n'était pas prêt à les brader pour conserver un honneur ministériel dans le déshonneur personnel. Demain, si nous le portons à la tête de l'Etat, nous aurons un Président qui veillera à ce que le gouvernement mette en oeuvre les dix grandes orientations qu'il a présentées à Vincennes le 9 septembre dernier. Ces orientations prennent leurs racines dans les principes mêmes de la République. Je vous en ai donné un aperçu.
En revanche, si Jacques Chirac devait être réélu ou si Lionel Jospin pouvait exercer un second quinquennat, l'avenir de la France serait difficile. L'un et l'autre, par exemple, se sont accordés pour la rédaction d'une constitution européenne qui, par nature, réduirait notre pays au rang de Louisiane de l'Europe. Bien sûr, il faut un nouveau traité européen. Depuis quarante cinq ans, les textes et la jurisprudence se sont accumulés dans la confusion. Nous étions partis à six pays, nous sommes quinze, nous serons bientôt trente. Mais entre les nations, mais entre les peuples, mais entre des peuples aussi différents, il faut un traité, et non une constitution. Un traité qui laisse à chaque peuple sa souveraineté, quitte à en déléguer une part sous contrôle démocratique. Et non une constitution qui soumet chaque peuple à la discrétion des autres.
Encore un mot sur Lionel Jospin, puisque c'est le dernier qui se soit déclaré. Il nous a promis la continuité, il nous a promis de prolonger les courbes, mais les courbes vont dans le mauvais sens, notamment celle de l'emploi. Lionel Jospin nous dit que tout cela est passager, que la reprise va venir des Etats-Unis. Mais je crains que Lionel Jospin soit comme soeur Anne et qu'il attende longtemps avant de voir venir. Et, lorsqu'il verra enfin venir, le nombre des chômeurs et des exclus aura considérablement progressé.
Nous pouvons éviter les deux sortants. Nous pouvons éviter le retour de la ronde du chiraquisme. Nous pouvons éviter le maintien de l'autosatisfaction de la jospinerie. Nous avons un candidat fiable. Nous avons un candidat crédible. Nous avons un candidat pour relever la France avec la République.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner une chance à la France.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir à la République.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est nous donner à nous-mêmes une espérance.
(Source http://goerges-sarre.net, le 5 mars 2002)
Chers Amis,
Regardons les choses en face, regardons la France telle qu'elle est. Le chômage recommence à augmenter. Les entreprises délocalisent. L'insécurité croit, et le gouvernement vient même d'apprendre, à sa grande surprise, qu'elle touche plus les HLM que les quartiers cossus. La violence atteint de plus en plus l'Ecole.
Nous n'avons plus d'armée digne de ce nom ; nous y consacrons 1,77 % du PIB, contre 2,9 % aux Etats-Unis. Aussi, les Américains ne nous entendent plus. Nos crédits militaires se répartissent en 75 % pour les dépenses de personnel et 25 % pour le reste, soit le fonctionnement, l'investissement et la recherche. Et encore, cette ventilation ne prend pas en compte les récents redéploiements décidés par Lionel Jospin avec l'accord de Jacques Chirac. Dans la récente guerre d'Afghanistan, malgré le courage de nos soldats, de nos marins et de nos aviateurs, notre armée n'a pu faire qu'une figuration limitée. Les Américains ne s'y sont pas trompés. Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont essayés à des moulinets verbaux, qui ne pouvaient cacher une triste réalité. Cet abaissement de notre défense a commencé il y une dizaine d'années quand, au moment de la décomposition de l'Union Soviétique, certains, à la suite de Laurent Fabius, se sont mis à parler de " dividendes de la paix ". Les Etats-Unis, eux, n'ont pas baissé. Mais, nous nous trouvons fort dépourvus quand une menace nouvelle, celle du terrorisme, est apparue le 11 septembre dernier.
Alors, les casernes grognent. Ce mécontentement porte sur les conditions matérielles de la vie militaire. Mais, l'état de notre défense est aussi leur souci légitime. Jacques Chirac a supprimé le service militaire. Il n'a prévu aucun moyen pour assurer la défense opérationnelle du territoire, pour surveiller les points névralgiques en cas de besoin. Il n'a pas voulu prendre en compte qu'une armée de métier coûtait plus chère qu'une armée de conscription.
Je préfère ne pas parler de l'Europe de la défense. N'oublions pas qu'après la Grande Bretagne, la France est le pays de l'Union Européenne qui consacre le plus d'argent à son armée. Ils n'ont même pas été capables de créer l'Europe de l'armement. Ainsi, les Pays Bas, qui passent pour un excellent élève de la classe européenne, viennent tout juste de décider d'acheter plusieurs dizaines de chasseurs américains. Pourtant, il existe deux avions européens équivalents, dont le Rafale.
Un mot sur notre système de santé : il y a quelques mois l'organisation mondiale de la santé le reconnaît comme le meilleur du monde. La cause de ce rang flatteur est notre protection sociale. Mais, chacun le sent bien, il se dégrade. Certes, nous sommes encore très loin de la situation que connaît la Grande Bretagne. Mais, nous y tendons. Les mouvements actuels dans le personnel médical et paramédical, tant public que privé, témoignent de cette crainte. Enfin, n'oublions jamais que les difficultés de financement de la sécurité sociale viennent du niveau du chômage, et non du coût des soins. Le chômage prive celle-ci de ressources qui lui viennent du travail.
Nos services publics sont bradés sur le marché. Malgré les pannes d'électricité de Californie, malgré le scandale d'Enron, les deux sortants voudraient bien privatiser EDF. Jean-Claude Gayssot, quant à lui, ministre communiste des Transports, s'apprête à introduire en bourse la société des Autoroutes du Sud de la France. Je pourrais encore multiplier les exemples.
Tous ces constats, toutes ces évolutions ont une origine commune : l'oubli de la République. La République est noyée dans la mondialisation ultra-libérale, dans une construction européenne qui en est devenue la modalité continentale. La République est menacée par tous les particularismes, par tous les communautarismes. La République est grignotée par l'extension indéfinie du marché. Et, sans la République, il n'y a plus de citoyens. Sans la République, il n'y a plus que des individus qui errent dans une jungle hostile.
Mais, la disparition de la République n'est pas une fatalité. Elle n'est pas inscrite dans les astres. Mais, la République peut être relevée, et avec elle la France, si les citoyens en ont la volonté. Pour que s'exprime cette volonté, il faut que soit proposé aux citoyens un projet réaliste et crédible, un projet qui suscite leur confiance et même leur enthousiasme. En déclarant sa candidature, Jean-Pierre Chevènement a présenté un tel projet aux Français.
A Vincennes, le 9 septembre dernier, il a exposé les dix grands axes stratégiques d'un tel projet. Et, chacun sait que si les électeurs lui confient la lourde charge de la présidence de la République, il respectera ses engagements. Par trois fois, dans le passé, il a su montrer la force de ses convictions. Contrairement à d'autres, il ne trahira pas ses électeurs pour faire la politique de Jacques Chirac et de Lionel Jospin.
D'abord, l'Ecole. Car, dans la République, l'Ecole est à la base de tout. L'Ecole est l'endroit où se forme le citoyen, où l'enfant acquiert les éléments qui lui permettront d'exercer sa raison et son propre jugement. Lorsqu'il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin a mis l'enfant au centre de l'Ecole : quel erreur ! L'Ecole n'est plus alors un centre d'apprentissage, mais un lieu de vie. C'est oublier que l'enfant ne restera pas un enfant, que l'enfant deviendra un adulte. Non, au centre de l'Ecole, au centre de l'Ecole de la République, il faut mettre la transmission des savoirs, des connaissances et des repères.
Non, il n'y a pas d'égalité entre le Maître et l'Elève, le Maître sait, l'Elève apprend. Non, le Maître n'est pas le copain de l'Elève, le Maître instruit l'Elève. D'abord, donc, remettre sur ses pieds l'Ecole, en finir avec la démagogie " jeuniste ", avec les Marseillaises frelatées et autres tags, expressions d'une soi-disante spontanéité artistique.
Le retour à l'Ecole de la République aura aussi des effets directs positifs sur la sécurité. Il faut en finir avec l'angélisme en matière judiciaire. Il faut revoir en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. Elle n'est plus adaptée à notre temps. Il faut mettre les sauvageons dans ces centres fermés où ils apprendront les règles élémentaires de la vie en société. Souvenez-vous, quand Jean-Pierre Chevènement avait lancé ce mot, puis fait cette proposition, la coalition des bien-pensants n'avaient qu'un cri d'indignation. Et, aujourd'hui, où est-on ? Enfin, il faut appliquer la loi, certes avec intelligence et discernement, mais sans faiblesse. La répression fait partie de la prévention. Face au crime et à la délinquance, la répression relève de la dissuasion.
Pour donner des repères à nos enfants, il faut revaloriser le travail. La première mesure est de revaloriser la feuille de paye, Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans, en organisant dès son élection une conférence sur l'ensemble des salaires. La croissance et donc l'emploi ne peuvent être relancés que par la demande, et la demande dépend des revenus. Il propose de faire glisser une partie des charges sociales vers la fiscalité pour diminuer le coût du travail. Mais, nous devons aller encore au-delà en donnant une autre image du travailleur, de l'ouvrier. Il est aujourd'hui trop souvent moqué et brocardé. Or, on l'oublie trop souvent, les ouvriers représentent le tiers de la population active des salariés de notre pays.
Notre pays, voilà encore un repère qui doit être donné à notre jeunesse. Ceux parmi eux, dont les parents, les grands-parents parfois, sont venus d'autres pays, d'autres continents doivent être fiers d'être français, d'appartenir à cette communauté de citoyens qu'est la Nation française. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! La République a certes des ombres, mais elle a aussi beaucoup de lumières. Ne dissimulons rien de notre histoire, mais enseignons la dans sa totalité. Enfin, arrêtons de dissoudre la France dans une improbable Europe des régions. Sur tout le territoire de la République, la loi doit être la même pour tous. Et, la loi ne doit pas être faite à Bruxelles par des bureaucrates anonymes et incontrôlés, mais à Paris par des parlementaires élus par le peuple français souverain.
Voilà quelques thèmes que Jean-Pierre Chevènement soumet à la réflexion et au vote des Français. En face, il y a les deux sortants Jacques Chirac et Lionel Jospin, réunis par cinq années de cohabitation complice. Pas une virgule ne les a séparés, a fini par avouer l'un d'entre eux. Aujourd'hui, ils ont encore un même projet : leur ego. Ils sont candidats pour satisfaire leur ego et les Français ont appris combien ils étaient, ces ego, surdimensionnés. Mais, entre eux, c'est l'égalité des ego, c'est le heurt des ego.
Jacques Chirac est candidat par passion, par passion de son appétit, de l'appétit de ses amis. Ces appétits sont gigantesques, gargantuesques même. Encore, s'il n'y avait que le sien ! Mais, il y a aussi ceux de ses amis, de ses " premiers ministrables ". Ils provoquent l'effroi. Alain Juppé, on a déjà donné. Nicolas Sarkozy, on sait ce qu'il peut donner. Et aussi quelques autres encore qui se sont engouffrés un samedi de janvier dans la cour de l'Elysée derrière les vitres teintées de leur Safrane.
Lionel Jospin est candidat par désir, désir de changer de rive, désir de changer de palais, désir de satisfaire une soif sans limite de pouvoir. Qu'importe le flacon de la politique, pourvu qu'il ait l'ivresse du pouvoir. Son revirement sur la Corse en est une des preuves. Derrière lui, la cohorte des socialistes défroqués, de ces nouveaux libéraux qui ont la foi fanatique des convertis. Vous les connaissez, la télévision vous les montre et vous les remontre les Martine Aubry, les François Hollande, les Dominique Strauss-Kahn, les Laurent Fabius. Ils amusent la galerie en attendant que le candidat " probable ", " possible ", disponible ", daigne enfin s'annoncer à la France.
Ecoutez les tous, Jacques Chirac, Lionel Jospin et leurs amis. Ecoutez les, et vous n'entendrez pas la différence. Ils se chamaillent, mais ils ne débattent pas. Car, il veulent faire la même politique, car ils ne peuvent faire que la même politique, celle qui leur est dictée à Bruxelles par la Commission et à Francfort par la Banque Centrale Européenne. C'est si vrai que le Medef et Ernest Antoine Seillières ne savent plus à quel candidat se vouer. L'un ou l'autre, l'autre ou l'un, c'est du pareil au même !
L'un et l'autre menacent nos retraites. Et maintenant, publiquement, Bruxelles vient de leur donner l'ordre de modifier notre régime de retraites. C'est une conséquence explicite de l'euro qui, parait-il, est un succès. Déjà, le programme commun respectif du PS et du RPR prévoyait l'introduction progressive de la capitalisation au détriment de la répartition. Mais, aujourd'hui, le commandement est sans appel. Chacun des deux sortants a fait savoir qu'il s'y conformerait si, toutefois, le suffrage universel le lui permettait. Les Français sont attachés à la répartition, qui crée la solidarité entre les générations. Ils ne veulent pas de la capitalisation, qui est soumise aux aléas de la spéculation boursière. Ils ont raison. La faillite retentissante d'Enron aux Etats-Unis montre leur sagesse. Les salariés de cette entreprise ont perdu leur emploi. Ils ont aussi perdu leur retraite, parce que le capital, qui devait leur servir une retraite était investi dans cette entreprise. Le fond de garantie de la retraite par répartition est l'activité économique future. Rien ne l'assurait mieux que le secteur public des entreprises nationalisées. Mais, d'Edouard Balladur à Laurent Fabius, en passant par Alain Juppé et Dominique Strauss-Kahn, ils l'ont liquidé. L'avertissement de Bruxelles est inacceptable. Nous devons refuser de nous faire dépouiller au nom de l'euro.
Un mot tout de même sur quelques uns des innombrables autres candidats. Alain Madelin et François Bayrou ne sont que les réserves déjà épuisées pour une présence éventuelle de Jacques Chirac au second tour. Je ne dirai rien sur Nöel Mamère et sur Robert Hue. On ne tire pas sur une ambulance, et encore moins sur un corbillard. Mais, Noël Mamère confond une élection présidentielle avec une assemblée générale des verts dans une salle enfumée. Daniel Cohn-Bendit, en ancien combattant d'une révolution qui n'a jamais eu lieu, l'enfonce encore plus. Le Parti Communiste est un astre mort. Il a terminé son rôle historique. Il ne fut pas négligeable. Précisément, il méritait mieux que de mourir ainsi, dans un " bougisme " sans objectif entre deux défilés de mode.
Arlette Laguillier et Jean-Marie Le Pen sont deux candidats de déperdition. L'extrême gauche et l'extrême droite représentent respectivement des planchers incompressibles de 2 à 3 % de l'électorat. Pour le reste, il s'agit de votes protestataires, qui expriment un rejet justifié du bipartisme unique.
Ces votes soulagent peut être l'âme de ceux qui les émettent. Mais, ils restent sans avenir. Ni l'un, ni l'autre ne peuvent figurer au second tour. Et si, quand même, par aberration, l'un ou l'autre y figurait, il serait écrasé. Alors, disons à ceux qui pourraient voter pour eux, sans adhésion idéologique, laissez les à leurs affaires. Avec le soutien de Madame de Fontenay, Arlette Laguillier pourrait concourir au titre de Miss France. Les bien-pensants voudraient bien encore se servir de Jean-Marie Le Pen. Après l'avoir fait monter pendant des années en le diabolisant, voilà qu'il cherche à nous présenter un " Le Pen light " pour essayer de contrer Jean-Pierre Chevènement. Demain, ils sont encore prêts à la diaboliser si cela peut assurer leur confort.
Chers amis,
Eux, en haut, ils croyaient l'affaire réglée. L'élection devait se jouer au deuxième tour entre les deux sortants. Le premier tour serait pour ces derniers un temps d'échauffement. Pour le reste, une myriade de petits candidats sans avenir devait donner l'illusion de la démocratie en amusant la galerie par le pittoresque de certains.
Puis, peu à peu, un phénomène qu'ils n'attendaient pas a surgi. La candidature de Jean-Pierre Chevènement est devenue crédible. De plus en plus de citoyens, venant de tous les horizons politiques, ont perçu en lui l'Homme de la Nation, qu'il veut être. Son programme, contrairement à ceux des autres, existe ; et en plus, il intéresse. Autour de lui croit et se multiplie un rassemblement.
Ce rassemblement constitue le Pôle républicain, où se réunissent des citoyens qui considèrent que, dans l'état où se trouve la France, le clivage traditionnel entre la droite et la gauche ne répond pas aux problèmes. Peut-être demain, la distinction redeviendra pertinente ; mais, pour l'heure, comme à d'autres périodes sombres de notre histoire, il faut savoir mettre la France et la République au-dessus. Alors, nous ne demandons pas à ceux qui nous rejoignent d'où ils viennent, nous demandons seulement où ils veulent aller. Et, s'ils veulent aller à la République, nous leur proposons d'y aller ensemble.
Quelqu'un comme Philippe Seguin dit qu'il s'agit d'une auberge espagnole. C'est dommage qu'un homme qui se réclame à juste titre du Général de Gaulle, ne comprenne pas la nature diverse d'un rassemblement. Je crains surtout que, là où il se trouve, il s'agisse d'un hôtel " quatre étoiles " à l'Ile Maurice.
Désormais, tout le monde s'accorde à le reconnaître, l'élection de Jean-Pierre Chevènement à la Présidence de la République est possible. Sa progression dans les sondages est constante et continue. Les deux sortants sont au contraire en baisse.
Et contre qui serait-il au second tour ? Jean-Pierre Chevènement a dit que peu le lui importait. Max Gallo a précisé qu'un second tour entre Jean-Pierre Chevènement et Lionel Jospin serait un séisme politique. Il a raison. Mais, un second tour entre Jean-Pierre Chevènement et Jacques Chirac serait déjà une sérieuse secousse.
Après, il y aura les élections législatives. Il est encore trop tôt pour en parler, pour investir les candidats. Attendons, les évolutions ne sont pas encore terminées. Le Pôle républicain aura un candidat dans chaque circonscription. Nous renouvellerons alors un personnel politique vieilli, non tellement par l'âge, mais parce qu'il à tout promis et tout trahi.
Alors, courage et détermination, nous pouvons gagner, nous allons gagner. A nous de faire, ici et ailleurs, d'ici le 21 avril, ce qu'il faut pour convaincre, et encore convaincre, et toujours convaincre. Le travail ne manque pas, mais la tâche est exaltante.
En avant, pour l'élection de Jean-Pierre Chevènement.
En avant, pour l'élection de l'Homme de la Nation, face au candidat du désir et face au candidat de la passion.
En avant, pour relever la France avec la République.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Reims
Mesdames, Messieurs, Chers Amis,
Depuis lundi, Jacques Chirac est officiellement candidat à sa propre succession. Mais qui aurait pu, sincèrement, en douter ? De manière précipitée, il a levé un faux suspens. Dans son adresse aux Français, Jacques Chirac s'est déclaré candidat par passion. Ce mot dans la bouche de Jacques Chirac fait sourire. Qui peut y croire ? En réalité, c'est une ruse trouvée en la circonstance par une boite de communication. En vérité, Jacques Chirac veut garder le pouvoir. Et Lionel Jospin lui parle du désir pour expliquer l'annonce de son imminente candidature. Là encore, c'est de la communication. L'objectif étant dans les deux cas de faire mouche auprès des Français. Mais les deux sortants se trompent en voulant abuser les Français. En effet, nos compatriotes attendent un projet pour la France.
En venant à Reims, je ne pouvais m'empêcher de penser à ce jour de mai 1945, où les armées du Troisième Reich capitulèrent dans l'antique cité où étaient sacrés les rois de France. Surtout, je me souvenais du lendemain, de la cérémonie de signature à Berlin. Lorsque le Maréchal Keitel, qui fut plus tard condamné a mort par le tribunal de Nuremberg, entra dans la salle, il eut un mouvement de recul et s'écria : " Ah non, pas les Français ", en voyant l'uniforme du général de Lattre de Tassigny. Oui, en cinq ans, par l'énergie du Général de Gaulle, par le courage des résistants, par le dévouement de la France libre, notre pays avait retrouvé son rang. Nous étions au côté des alliés. Aujourd'hui, encore nous détenons un siège de membre permanent au conseil de sécurité de l'ONU.
Si je me livre à ce rappel, c'est qu'à nouveau, comme en 1958, la France est à la croisée des chemins. Nous sommes dans une situation exceptionnelle, historique.
Le déclin, l'effacement de la France sont-ils inexorables ? Oui, si le système du pareil au même est reconduit dans l'une ou l'autre version. Cohn-Bendit a pu déclarer dimanche "l'histoire de France se termine" en mettant en cause Jean-Pierre Chevènement.
En effet, le choix est là. Et bien nous pensons, nous que l'histoire de France n'est pas terminée.
Et c'est pour relever le gant que Jean-Pierre Chevènement est candidat à l'élection présidentielle et se présente comme l'Homme de la Nation, tel que le définissait Charles de Gaulle. Les deux sortants sont les candidats des partis.
Je dirais même que Jean-Pierre Chevènement est le seul élément nouveau et attractif de cette campagne.
Quelle différence avec Jacques Chirac. Celui-ci partage avec l'autre sortant, Lionel Jospin, un ego surdimensionné. Ils constituent à eux seuls un véritable club des ego. En effet, le candidat possible, qui joue à un cache-cache puéril avec les Français, se veut le candidat du désir, le désir du pouvoir, du pouvoir pour le pouvoir. Son retournement sur la Corse en est une des multiples preuves. La cohabitation a été pour eux l'occasion d'une habile répartition des rôles.
Jacques Chirac Président a désarmé la France. Il l'a réintégrée dans l'OTAN. Il a été le fossoyeur de notre monnaie. Lionel Jospin a été le champion toutes catégories des privatisations. Il a baissé pavillon devant les terroristes corses plutôt que de les combattre. Il a cédé au chantage permanent d'intérêts corporatistes. Il a cédé à l'angélisme béat de la gauche des beaux quartiers. Le gouvernement, à sa grande surprise, vient de découvrir que les premières victimes de l'insécurité sont les habitants des HLM. En abandonnant la République, Lionel Jospin s'est coupé du peuple, y compris du peuple de gauche.
Les cinq années de cohabitation ont permis de montrer aux Français que le système du pareil au même entre la droite établie et la gauche officielle fonctionnait à la virgule prés. C'est une société de connivence entre les sociaux-libéraux et les libéraux-sociaux, qui place le marché au-dessus de la cohésion sociale et qui s'appuie sur le condominium " RPR-PS ". Pour s'en convaincre, il suffit de lire les programmes respectifs de ces partis.
Ce sont en réalité deux versions d'un " programme commun de renoncement ". Ceci explique pourquoi 60 % des Français ne croient plus au clivage traditionnel " Gauche-Droite ". Peut-il en être autrement quand la gauche abandonne les services publics au marché et lorsque la droite dénigre la Nation au profit de la mondialisation libérale ?
Nous pouvons mettre un terme à cette comédie cynique. La candidature de Jean-Pierre Chevènement en est le moyen. C'est pour relever la France avec la République que Jean-Pierre Chevènement inscrit sa candidature dans la perspective d'orientations claires notamment pour revaloriser le travail et relancer la croissance. C'est pour redonner aux Français confiance en leur avenir qu'il s'adresse à la France qui travaille et à la France qui est fière d'elle-même, qui connaît les ombres de son histoire, mais qui en connaît aussi les lumières, les nombreuses pages de gloire.
Depuis septembre, une dynamique a vu le jour dans tout le pays. La République est toujours une idée neuve. Elle dépasse les clivages traditionnels. A 66 jours du premier tour, j'invite à se rapprocher de leur comité de soutien local celles et ceux qui souhaitent que Jean-Pierre Chevènement soit présent au second tour et qu'il devienne Président de la République au soir du 5 mai prochain.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Réunion publique à Blanc-Mesnil
Chers Amis,
Depuis maintenant une semaine, la France ironique a découvert dans l'un des deux sortants un candidat de la passion ; je dirai même de la compassion. Comment ne pas avoir une compassion étonnée pour le vide sidéral de son programme fantomatique ? Comment ne pas avoir une compassion inquiète pour son goût si affiché du pouvoir pour le pouvoir, du pouvoir pour ses colifichets ?
Comment ne pas avoir une compassion attendrie pour l'éternel soupirant qui, depuis trente ans, se prête à Marianne en jeune homme pressé ? Nous finissons par bien connaître Jacques Chirac avec le temps. La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est qu'il ne tiendra aucun des engagements qu'il prend.
Nous avons aussi l'autre sortant, le candidat nommé désir. Désir de pouvoir, désir de puissance, désir de l'autosatisfaction, bien sûr. En même temps, désir du rigide qui veut se faire désirer. Désir de l'austère qui voudrait tant se faire aimer. Alors, bien qu'il se réclame de la transparence, il ne dit surtout rien de ses intentions. Certes, le secret est bien éventé ; on connaît le directeur de campagne ; on connaît les locaux de campagne. Mais, le faux naïf fait semblant de ne pas savoir. Puéril, Lionel Jospin, à son âge, joue encore à cache-cache.
Et puis, nous avons l'homme de la Nation. Le 4 septembre dernier, il s'est déclaré candidat. Le 9 septembre dernier, il a présenté ses dix grandes orientations programmatiques. Depuis, il fait campagne. Depuis, il est devenu crédible. Depuis, il leur fait peur. L'homme de la passion a précipité sa déclaration, non sans improvisation. L'homme du désir cherche à se dégager de ses minauderies sans trop de dégâts.
Jean-Pierre Chevènement propose aux Français de relever la France avec la République. Et, d'abord, parce que la sûreté des personnes et des biens est le premier des droits de l'homme et du citoyen, il veut rétablir en France sur tout, je dis bien tout, le territoire de la République la sécurité pour tous et pour chacun. Il s'est engagé à faire voter par la nouvelle Assemblée Nationale trois lois dans les cent premiers. jours Une loi de programmation pour la justice. Une loi de programmation pour la police et la gendarmerie. Ces lois que Lionel Jospin lui a refusées quand il était ministre de l'intérieur ; il ne fallait pas déplaire à une certaine gauche établie, encore imprégnée d'une idéologie de dépérissement de l'Etat. Jean-Pierre Chevènement considère, lui, que les représentants de la République doivent avoir des moyens et de la considération. Leur manquer de respect, c'est au-delà de l'atteinte à l'individu, manquer de respect à nous tous. Enfin, il faut une loi pour réformer en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. En plus d'un demi-siècle, le monde n'est plus le même, la société n'est plus la même, et les jeunes ne sont plus les mêmes. La délinquance commence de plus en plus tôt, et l'impunité accentue ce phénomène de pourrissement. La récidive généralisée exaspère, à juste titre, l'immense majorité des honnêtes gens. Il ne s'agit pas non plus d'abandonner la prévention, mais la répression participe pleinement à la prévention ; cela s'appelle même la dissuasion.
Jean-Pierre Chevènement propose de mettre en place soixante centres de retenue fermés pour les adolescents à la fois perdus et les plus dangereux. Ce n'est pas un retour aux anciennes maisons de correction. C'est l'établissement de lieux où ces futurs adultes pourront enfin apprendre les repères nécessaires à la vie en société, sans compter combler les lacunes de leur instruction et de leur formation professionnelle.
En son temps, Jean-Pierre Chevènement avait fait ces propositions à Lionel Jospin. Il les avait écartées. Il ne voulait pas heurter l'angélisme judiciaire qu'incarnait si bien Elisabeth Guigou.
Certes, dans la perspective des élections, les socialistes font semblant de mieux vouloir répondre aux voeux du peuple dans le domaine de la sécurité. Mais, ce n'est qu'une posture trompeuse de communication pour abuser les citoyens. Il suffit de constater qu'ils ont vidé de sa substance la récente loi portant réforme de la précédente loi sur la présomption d'innocence. D'ailleurs, le gouvernement vient de faire effectuer à grands frais une enquête.
Et, à son grand étonnement, Lionel Jospin y a découvert que les premières victimes de l'insécurité étaient les habitants des HLM, et non les bourgeois des quartiers bourgeois. Pourtant, il aurait du savoir depuis longtemps que les voitures brûlent plus facilement dans les banlieues populaires qu'à Saint-Germain des Prés.
Nous le savons, Jean-Pierre Chevènement le sait. Le retour de la sûreté ne dépend pas seulement de la répression et de la prévention. Le retour de la sûreté dépend aussi, dépend surtout de l'emploi. Le chômage est père de tous les vices, de tous les maux. Il faut une autre politique économique, il faut une relance par la demande pour obtenir de la croissance, il faut revaloriser la feuille de paie. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans et de convoquer très vite après son élection une conférence sur les salaires. D'autre part, il a prévu de transférer sur la fiscalité une partie des charges sociales, afin que le travail lui-même soit moins taxé.
Nos deux sortants sont incapables, non de prendre de tels engagements - en matière de promesses leur capacité est inépuisable - mais de les tenir. Ils se veulent les bons élèves de la classe européenne. Ils détruisent l'Ecole de la République ; en revanche, ils assimilent les relations entre les Etats à une compétition scolaire du temps où l'excellence était encore une vertu pédagogique. Jacques Chirac et Lionel Jospin sont contraints par le pacte de stabilité budgétaire et par les statuts de la Banque Centrale Européenne. Il faudra assouplir le premier. A son origine, était l'Allemagne. Sûre de sa puissance économique, elle tenait ainsi à manifester sa méfiance et son dédain pour ces pays qu'elle qualifiait ironiquement du " Club Med ". Mais, l'histoire a parfois des retours inattendus. Aujourd'hui, c'est précisément l'Allemagne qui arrive difficilement à respecter les contraintes de ce pacte. Seul un compromis politique, passé entre les ministres des Finances, lui a permis d'échapper à l'avertissement public dont elle était menacée par la Commission de Bruxelles. Les européistes ont parfois des moments de lucidité qui les font reculer devant le ridicule. Un blâme infligé à l'Allemagne aurait eu quelque chose de dérisoire ; il aurait poussé jusqu'à la caricature ce syndrome du bon élève, dont je viens de parler. Pour la Banque centrale, il faut d'abord en changer les statuts. Aujourd'hui, elle est chargée de lutter contre la seule inflation. Un tel combat est désormais dépassé ; il appartient à l'autre siècle. Il faut donc lui donner aussi pour objectifs la croissance et l'emploi.
Puisque nous sommes en Seine-Saint-Denis, dans le neuf trois, comme on dit, comment ne pas évoquer le problème de la désindustrialisation de la France ? Ce département, plus que d'autres, a souffert et souffre de cette idéologie à courte vu qui condamne les usines parce qu'elles polluent et sont sales.
Mais, si nous voulons consommer, il faut d'abord produire. La rente est anéantie quand le capital a été dilapidé. Jean-Pierre Chevènement l'a rappelé à Toulouse : il faut des usines chimiques. Bien sûr, il faut prendre toutes les précautions pour que des accidents, comme celui d'AZF, n'arrivent plus. D'ailleurs, les premières victimes en ont été les salariés de l'usine. Mais, ces précautions prises, les services de l'Etat ayant les moyens d'exercer leurs contrôles, il faut maintenir et développer des lieux de production industrielle ; Aujourd'hui, les ouvriers représentent le tiers de la population active de la France. On l'oublie trop souvent. Tous les gauchistes, anciens ou dissimilés, qui se sont répondus dans les sphères dirigeantes du pays, sont passés directement de l'ouvriérisme religieux de leur jeunesse à un mépris profond pour le monde du travail.
Ce mépris affiché pour le travail ne facilite pas l'intégration harmonieuse des jeunes d'aujourd'hui à notre société. Je pense notamment à ceux dont les parents ou les grands parents sont nés dans un autre pays, sur un autre continent. Car, à ce dédain pour la production, se joint la honte de soi qui frappe nos élites. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! Assumons l'histoire de France, toute l'histoire de France avec ses ombres certes, mais aussi avec ses nombreuses lumières. N'oublions pas que ces lumières ont éclairé le monde. La Marseillaise est notre hymne national. La Marseillaise est aussi le chant que tant d'hommes et de femmes, épris de liberté, ont entonné un peu partout sur la planète. Mais encore faudrait-il que la France se donne les moyens d'être digne de son rang, de pouvoir encore parler à l'humanité toute entière.
De manière unilatérale, Georges Bush vient de menacer de guerre un " axe du mal ", comprenant l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord. A juste titre, Hubert Védrine a qualifié cette analyse de " simpliste ". Collin Powell a qualifié ce propos de " vapeur ". Ainsi, le secrétaire d'Etat des Etats-Unis d'Amérique du Nord vient de signifier au ministre des Affaires Etrangères de la République Française qu'il tenait son opinion pour négligeable. Il parait pourtant que les deux pays sont alliés. Bien plus, l'ambassadeur de la République à Washington a été convoqué au Département d'Etat pour donner des explications sur les positions de la France à un fonctionnaire n'appartenant pas au meilleur niveau. Pourquoi, donc, la voix de la France n'est plus écoutée ? Pourquoi, donc, les représentants de la République sont ainsi traités ? Parce que la France est désarmée.
Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé la France. Bientôt, notre force de frappe aura perdu tout caractère opérationnel. Les super ordinateurs qui devaient remplacer le centre de Mururoa, désormais démantelé, ne sont toujours pas au point ; et, de toutes les manières, ils sont américains. De plus, pour s'assurer de la fiabilité du matériel, il faut de temps à autre faire un essai en grandeur réelle. Les Etats-Unis refusent de ratifier le traité interdisant tout essai nucléaire. Le service militaire a été supprimé, sans que soit prévu un système de garde nationale, assurant, en tant que de besoin, la défense opérationnelle du territoire et la garde des points névralgiques. Enfin, on le sait depuis longtemps, l'armée de métier coûte beaucoup plus chère que l'armée de conscription. Néanmoins, les crédits militaires ont baissé de manière considérable pour atteindre 1,77 % du PIB, alors qu'ils sont à 2,9 % du PIB aux Etats-Unis. Jacques Chirac et Lionel Jospin ont voulu profiter des " dividendes " de la paix, selon l'expression de Laurent Fabius. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que, lors de la récente guerre d'Afghanistan, notre armée ait du se contenter d'une pâle figuration qui a meurtri nos soldats, alors que Jacques Chirac se livrait à des moulinets verbaux.
Il n'est pas étonnant que les Etats-Unis fassent si peu de cas de pays qui ont abandonné tout véritable effort.
Ne parlons pas d'Europe de la défense, comme une sorte de solution miracle ; c'est une chimère. C'est encore pour longtemps une chimère. Ce sera une chimère tant que les différents pays européens n'auront pas d'intérêts identiques. Or, l'histoire, la culture, la langue, des liens économiques, des affinités politiques font que les pays européens au moins les grands pays européens, ont des intérêts différents, et parfois même divergents. L'attitude de la Grande-Bretagne, toujours prête à s'aligner sur les Etats-Unis, leur ancienne colonie, avec laquelle elle partage la même langue, est de ce point de vue caractéristique. Entre les pays européens, il peut y avoir une coopération militaire, étroite même éventuellement ; il ne peut y avoir d'armée commune. Et puis, regardons les choses telles qu'elles sont, l'Europe de l'armement n'arrive même pas à exister. Les européistes nous expliquent que les Pays Bas seraient l'un des meilleurs élèves de la classe européenne. Ils viennent de commander des dizaines de chasseurs aux Etats-Unis, alors qu'ils existent deux avions européens équivalents, dont le Rafale. N'oublions pas que notre continent a aussi perdu des milliers et des milliers d'heures de travail dans cette affaire.
N'oublions pas, enfin, que la recherche militaire a toujours d'importantes retombées civiles. L'actuelle formidable avancée technologique de l'industrie américaine vient d'abord des commandes de l'armée, et ensuite de la conquête spatiale. Notamment, les entreprises aéronautiques américaines sont discrètement, mais largement, subventionnées par le biais militaire. Là encore, il ne faut pas avoir une vision angélique et idéologique du monde et du marché. Il ne faut se laisser endormir par les discours pacifistes, qui sont souvent le contraire d'une politique véritablement pacifique. Aux Etats-Unis, de fait, mais selon une démarche consciente et bien organisée, l'industrie de défense structure une politique industrielle, qui ne s'avoue pas comme telle.
En France, nous devons avancer avec moins d'hypocrisie. Bien sûr, il faut redynamiser l'industrie de défense, qui avait été développée en son temps par le général de Gaulle dans un souci d'indépendance nationale. Mais, cela ne suffit pas. Il faudra mettre en uvre une véritable politique industrielle, adaptée aux conditions actuelles d'une économie ouverte. L'Etat doit inciter, impulser, entraîner ; il ne peut se contenter de regarder passer les trains. Il faudra évidemment commencer par le commencement, c'est-à-dire par la recherche. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à proposer à la Nouvelle Assemblée Nationale une grande loi de programmation pour les années 2003-2007 portant à 3 % la part de la recherche dans le PIB.
Chers Amis,
Nous connaissons un pays qui fut riche et puis qui a sombré dans la crise, le malheur et la pauvreté. Au temps de sa splendeur, l'Argentine n'a pas su construire un Etat. Elle n'a pas cherché à investir dans une industrie nationale. Elle a vendu ses services publics pour maintenir artificiellement une apparence d'économie pendant quelques années supplémentaire.
L'Argentine illustre les méfaits à terme d'un système qui ne repose que sur la rente, rente agricole en l'occurrence. Mais quand la rente disparaît, le pays se retrouve fort dépourvu. Il ne faut pas croire que la France ne pourrait jamais subir un tel sort. Nous avons certes encore des atouts, et même de beaux atouts. Encore, ne faudrait-il pas les gaspiller.
Or, de ce point de vue, l'"entente " entre le Parti socialiste et les verts doit susciter la plus grande inquiétude.
Les verts ont déjà empoché quarante deux circonscriptions réservées. C'est-à-dire qu'ils ont obtenu la possibilité d'avoir un groupe parlementaire en cas d'élection de Lionel Jospin. C'est-à-dire qu'ils peuvent être en mesure d'exercer un chantage permanent sur l'éventuel gouvernement socialiste.
Mais le plus grave n'est pas là. Le plus grave est la tactique de Lionel Jospin. Lionel Jospin montre ainsi qu'il n'est pas un homme d'Etat, mais un chef de parti qui rêve de revenir au régime des partis. Il a refusé tout accord formel avec les verts, parce qu'il sait que, dans leur immense majorité, les Français rejettent leur religion anti-nucléaire, leur phobie anti-automobile ou leur angélisme coupable sur les problèmes de sécurité. Lionel Jospin ne veut pas assumer ces fardeaux devant les électeurs. Mais, pour autant, il ne va pas leur proposer une politique cohérente dans ces domaines. Il attendra le résultat obtenu par Noël Mamère au premier tour de l'élection présidentielle. Ainsi, si par malheur, Noël Mamère obtenait un pourcentage de voix que Lionel Jospin considérait comme significatif, la politique énergétique de la France se trouverait menacée. Or, le nucléaire est l'un de nos atouts majeurs, y compris pour protéger l'environnement, puisqu'il ne dégage pas de gaz à effets de serre.
Cette affaire du nucléaire est très représentative de cette élection présidentielle. Les deux sortants ne sont pas des hommes libres. Ils sont prisonniers de leur camp, de leurs alliés. Ils doivent donner des gages aux uns et aux autres.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont des chefs de clan, qui doivent satisfaire les fantasmes et les appétits de leurs commensaux. Au contraire, Jean-Pierre Chevènement est un homme libre. Il a proposé au peuple, le 9 septembre dernier, dix grandes orientations. Qui s'y retrouve, le rejoint. Jean-Pierre Chevènement est un homme seul. Il ne dépend pas d'un appareil. Cela ne facilite pas toujours les aspects matériels de sa campagne. Mais, les Français sentent cette indépendance. Elle est à la base de son succès. Cependant, Jean-Pierre Chevènement n'est pas un homme isolé. Des Français de toute origine politique l'ont rejoint.
Ce rassemblement étonne et détourne parce qu'il réunit dans un même Pôle républicain des hommes et des femmes qui savent que, au dessus de la droite et de la gauche, par delà la droite et la gauche, il y a la France, il y a la République. Ce rassemblement fait peur parce qu'il menace des situations établies et des appétits insatiables. Alors, Jean-Pierre Chevènement est attaqué de tous les côtés. La contradiction ne fait pas peur à ses contradicteurs. Alain Juppé le traite de " marxiste " pendant que Daniel Cohn-Bendit lui répond qu'il représenterait la " France moisie " qu'il serait " nationaliste ". Jean Glavany, qui sera le directeur de campagne de Lionel Jospin, prédit que le Pôle républicain sera une " construction politique trop artificielle " pour ne pas se " décomposer ", tout en lui demandant de soutenir le candidat socialiste au deuxième tour si, d'aventure, celui-ci devait y figurer. Tous ces gens n'ont rien compris. Les Français en ont assez d'une alternance qui n'est pas une alternative. Voter Chirac, c'est revoir Juppé, Sarkozy, Toubon, Douste-Blazy avec en nouveauté Nicole Fontaine. Voter Jospin c'est revoir Fabius, Strauss-Kahn, Guigou, Aubry et peut être même Voynet. Voter Chirac, Voter Jospin, c'est reprendre les mêmes et recommencer.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est voter pour un renouvellement des équipes, et surtout de la politique.
Oui, il y a une possibilité d'en sortir !
Oui, il y a une possibilité de relever la France avec la République.
Oui, il y a une possibilité que Jean-Pierre Chevènement soit Président de la République Française.
(source http://www.georges-sarre.net, le 20 février 2002)
Conférence de presse à Lyon
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je tiens d'abord à saluer les radicaux lyonnais, tant de gauche que valoisiens, qui ont décidé de rejoindre le Pôle républicain, qui se développe autour de la candidature de Jean-Pierre Chevènement. A l'exemple d'Emile Zucarelli et de quelques autres parlementaires, la grande famille radicale se retrouve dans ce combat qui est le sien, dans ce combat qui est le nôtre, dans ce combat pour la République. Je me réjouis de la décision d'un certain nombre de militants, de la Fédération du Rhône du Parti républicain-radical et radical-socialiste, et de celle de l'association " Radicalement Lyonnais ".
Ils s'inscrivent dans la tradition d'Edouard Herriot, figure historique du radicalisme s'il en est, et à Lyon plus qu'ailleurs. Dans les années trente du siècle dernier, qui furent lourdes de tant de menaces, il aimait à dire " Entre les rouges et les blancs, nous resterons les bleus ". Sous d'autres formes, nous poursuivons son combat pour la République. C'est tout le sens de la candidature de Jean-Pierre Chevènement.
Quelle différence avec la candidature de Lionel Jospin. Celui-ci a tout organisé sur la mise en scène, comme Jacques Chirac, sauf qu'il a voulu une mise en scène inverse. Il a cherché une modestie qui sonne faux. Le candidat du désir a cru nécessaire d'adresser un message d'amour aux Français. Il a confondu l'Agence France-Presse avec une agence matrimoniale. Jean-Pierre Chevènement a évité les artifices de la communication. Avec sa candidature, il a présenté dix grandes orientations. Elles forment la base constitutive du Pôle républicain.
La Pôle républicain a donc vocation à rassembler tous les citoyens de ce pays au-delà des clivages traditionnels entre la droite et la gauche. Bien sûr, la droite et la gauche continuent à exister ; les différences perdurent. Mais, dans la période actuelle, face aux problèmes cruciaux qui se posent à la France, il faut savoir aller à l'essentiel. Il faut savoir présenter au peuple des solutions sur la base des principes de la République. Car, l'enjeu de l'actuelle campagne présidentielle est l'indépendance de la France, ou alors elle risque à terme de se dissoudre.
La droite et la gauche existent toujours dans la conscience des citoyens. La droite et la gauche n'existent plus dans la pratique des dirigeants. La droite et la gauche n'existent plus précisément là où on se proclame de droite ou de gauche avec le plus d'ostentation. Jacques Chirac et Lionel Jospin se réclament respectivement de l'une et de l'autre. Ils doivent le claironner avec force ; car, personne ne se douterait qu'une telle différence les sépare au vu des politiques qu'ils ont menées. A quelques nuances près, ils ont fait, ils font et, éventuellement, ils feront la même politique, parce que, avant même d'agir, ils se soumettent aux mêmes contraintes préalables, celles de la mondialisation ultra-libérale et d'une construction européenne conçue comme une modalité de cette dernière.
La lecture comparée des programmes du PS et du RPR est de ce point de vue très instructive. On ne peut percevoir aucune différence de fond. Nous avons à faire à un véritable programme commun. Mais, il y a trente ans, il s'agissait d'un programme commun de gouvernement qui suscitait l'espérance. Aujourd'hui, il s'agit d'un programme commun de renoncement qui conduit à la résignation. Nous devons mettre fin à ce système de bipartisme unique, qui ne laisse le choix qu'entre le social libéralisme et le libéralisme social.
Aussi, quand Jean Glavany dit à Jean-Pierre Chevènement qu'il ne faut pas trahir, ou quand Philippe Séguin déclare que la moitié de l'électorat de Jean-Pierre Chevènement sera " cocue ", nous ne pouvons que leur répondre qu'ils se regardent eux-mêmes, qu'ils se regardent dans la glace. Que Jean Glavany relise le discours d'investiture prononcé par Lionel Jospin devant l'Assemblée national le 19 juin 1997. Son thème : faire retour en tout à la République. Et, maintenant, qu'il compare ce texte à la politique menée depuis cinq ans par Lionel Jospin. Quand à Philippe Séguin, il parle d'expérience. Il soutenait, il y a sept ans, le candidat qui promettait de résorber la fracture sociale. Ensuite, pendant deux ans, du haut de son " perchoir ", Philippe Séguin a contemplé Alain Juppé et sa politique.
Alors, soyons sans équivoque : la majorité plurielle est morte, définitivement morte. Lionel Jospin et ses amis prétendent le contraire. Ils espèrent encore en tirer quelques petits bénéfices électoraux. Ils cherchent à provoquer un réflexe conditionné en leur faveur chez ceux qui n'arrivent pas à se résoudre à cette diamétrale opposition entre la gauche réelle et la gauche officielle. Une fois de plus, ils sont aidés par la complicité des amis de Jacques Chirac qui développent la même tactique falsificatrice vis-à-vis des Français qui se veulent de droite.
En revanche, est apparu un axe stratégique entre le parti socialiste et les verts, auquel cherche désespérément à se raccrocher Robert Hue. Je ne parlerai même pas de Jean-Michel Baylet et de sa candidate improvisée. Cet axe stratégique penche naturellement du côté de la plus grande facilité. Il est donc dominé par l'idéologie libérale libertaire des verts. Ces derniers n'ont même plus besoin de se manifester ouvertement pour que les socialistes s'y conforment. Il n'y a en réalité que deux freins, l'un légitime : la crainte de l'électorat, l'autre trivial : les verts ne sont en fait intéressés que par les honneurs et les places. La loi dite sur la présomption d'innocence peut servir de modèle à ce schéma. Elle est inspirée par l'angélisme libéral libertaire, auquel se sont ralliés à l'époque les amis de Jacques Chirac. Puis, devant les réactions des Français, Lionel Jospin a proposé une loi modificative. Mais, dans sa propre majorité, l'angélisme est tellement fort qu'il en fut réduit à des aménagements mineurs.
Jacques Chirac, lui, vient de se livrer sur la sécurité à une opération de grand style démagogique. Il a enfoncé les portes ouvertes en proposant des dispositions qui existent déjà, comme le conseil de sécurité intérieure. Il a copié sur Jean-Pierre Chevènement avec les lois de programmation ou la réforme de l'ordonnance de 1945. Il a oublié ses propres erreurs, comme la suppression en 1987 de la détention provisoire pour les mineurs même multirécidivistes.
J'ai oublié de citer quelques candidats. Mais, les ramasse-miettes, ceux qui déjà se sont prononcés au deuxième tour pour l'un des deux sortants, méritent à peine une mention. Les Français ne s'y trompent pas et se détournent d'eux. Toutefois, il faut s'intéresser aux oubliettes. Qu'il y ait respectivement à l'extrême droite et à l'extrême gauche un plancher incompressible de 2 à 3 % des électeurs, est sûrement une donnée incontestable. Mais, les autres citoyens, qui s'apprêtent à voter tant pour Arlette Laguiller que pour Jean-Marie Le Pen, veulent en fait manifester un profond mécontentement. Seulement, ils vont perdre leur voix. Car, ni l'un, ni l'autre ne peuvent figurer au second tour. Et si, d'aventure, l'un des deux y parvenait, il serait écrasé. Ainsi, en votant pour Arlette Laguiller ou pour Jean-Marie Le Pen, on conforte le système en place, en se donnant l'illusion de le contester.
Dans cette élection, l'enjeu n'est plus dans la bipolarité habituelle entre la droite et la gauche. L'enjeu est un triangle. L'enjeu est entre Jean-Pierre Chevènement, Jacques Chirac et Lionel Jospin. Mais, Jean-Pierre Chevènement est le seul candidat crédible, le seul candidat fiable, le seul candidat de l'alternative. Mais, nous sommes passés à une nouvelle phase, après la curiosité, vient l'inquiétude. On commence à percevoir contre lui des campagnes de calomnies et de dénigrements. C'est le contraire du serment d'Hippocrate : nuire par tous les moyens. Rassurez-vous, nous nous y attendions. Jean-Pierre Chevènement est un roc, il est solide. Nous répondrons coup pour coup. Et puis, en dernière instance, les Français seront juges.
Maintenant, que la campagne commence, que le débat s'ouvre. Il n'y a plus de Président de la République et de Premier Ministre qui tiennent, il n'y a plus que des candidats. Ils doivent être à armes égales.
(Source http://georges-sarre.net, le 5 mars 2002)
Réunion publique à Bourg-en-Bresse
Chers Amis,
Depuis hier, le candidat nommé désir s'est déclaré aux Français sous la forme d'une missive d'amour. Manifestement, il a confondu l'Agence France-Presse avec une agence matrimoniale. Il a voulu une annonce qui soit l'exact contre-pied de celle de Jacques Chirac. En réalité, le souci de la mise en scène était exactement le même. Mais, l'un a joué un péplum à grand spectacle, quand l'autre s'est rabattu sur un film intimiste. Tout cela n'est qu'artifice de communication. La fausse modestie de Lionel Jospin cache mal la nature véritable de son désir qui n'est pas seulement un mot. Désir de pouvoir, désir de puissance, désir de l'autosatisfaction. En même temps, désir du rigide qui veut se faire désirer. Désir de l'austère qui veut se faire désirer.
Que reste-t-il du parti socialiste ? Quelques militants égarés et beaucoup de notables craintifs. Et, ces notables sont craintifs parce que, eux aussi, ont un désir, un désir trivial, le désir de conserver leurs places de notables. Lionel Jospin leur semble le meilleur garant. Après l'élection présidentielle, il y a les élections législatives. Mais, en dehors de leur notabilité, ils n'ont plus d'idées, plus de projet, plus d'avenir. Seul leur appétit n'est pas épuisé. Mais, comment pourrait-il en être autrement ? Depuis vingt ans, ils ont tout promis, ils ont tout trahi.
Depuis maintenant une dizaine de jours, la France ironique a découvert dans l'autre des deux sortants un candidat de la passion ; je dirai même de la compassion. Comment ne pas avoir une compassion étonnée pour un pays qui, quand il ne relève pas du plagiat, ressemble au vide sidéral. Comment ne pas avoir une compassion inquiète pour son goût si affiché du pouvoir pour le pouvoir, du pouvoir pour ses colifichets ?
Comment ne pas avoir une compassion attendrie pour l'éternel soupirant qui, depuis trente ans, se présente à Marianne en jeune homme pressé ? Nous finissons par bien connaître Jacques Chirac avec le temps. La seule chose dont nous soyons sûrs, c'est qu'il ne tiendra aucun des engagements qu'il prend. Après un petit succès de curiosité dû à sa déclaration de candidature, la cote de Jacques Chirac dans les sondages a recommencé à descendre.
Et puis, nous avons l'homme de la Nation. Le 4 septembre dernier, il s'est déclaré candidat. Le 9 septembre dernier, il a présenté ses dix grandes orientations programmatiques. Depuis, il fait campagne. Depuis, il est devenu crédible. Depuis, il leur fait peur. L'homme de la passion a précipité sa déclaration, non sans improvisation. L'homme du désir commence à s'inquiéter. Alors, il fait donner Jean Glavany. Celui-ci a invité Jean-Pierre Chevènement à ne pas trahir. Jean Glavany a donc invité Jean-Pierre Chevènement à ne pas imiter Lionel Jospin. Car, qui a trahi ses engagements pris devant l'Assemblée nationale le 19 juin 1997 ? Le thème du discours était : en tout faire retour à la République. Que Jean Glavany examine selon ses critères les cinq années du gouvernement de Lionel Jospin !
Jean-Pierre Chevènement, lui, n'a pas de problème de crédibilité. Il a su prouver dans le passé qu'il avait des convictions. Aujourd'hui il propose aux Français de relever la France avec la République. Et, d'abord, parce que la sûreté des personnes et des biens est le premier des droits de l'homme et du citoyen, il veut rétablir en France sur tout, je dis bien tout, le territoire de la République la sécurité pour tous et pour chacun. Il s'est engagé à faire voter par la nouvelle Assemblée nationale trois lois dans les cent premiers jours. Une loi de programmation pour la justice. Une loi de programmation pour la police et la gendarmerie.
Enfin, il faut une loi pour réformer en profondeur l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs. En plus d'un demi-siècle, le monde n'est plus le même, la société n'est plus la même, et les jeunes ne sont plus les mêmes. La délinquance commence de plus en plus tôt, et l'impunité accentue ce phénomène de pourrissement. La récidive généralisée exaspère, à juste titre, l'immense majorité des honnêtes gens. Il ne s'agit pas non plus d'abandonner la prévention, mais la répression participe pleinement à la prévention ; cela s'appelle même la dissuasion.
Jean-Pierre Chevènement propose de mettre en place soixante centres de retenue fermés pour les adolescents à la fois perdus et les plus dangereux. Ce n'est pas un retour aux anciennes maisons de correction. C'est l'établissement de lieux où ces futurs adultes pourront enfin apprendre les repères nécessaires à la vie en société, sans compter combler les lacunes de leur instruction et de leur formation professionnelle.
En son temps, Jean-Pierre Chevènement avait fait ces propositions à Lionel Jospin. Il les avait écartées. Il ne voulait pas heurter l'angélisme judiciaire qu'incarnait si bien Elisabeth Guigou.
Certes, dans la perspective des élections, les socialistes font semblant de mieux vouloir répondre aux voeux du peuple dans le domaine de la sécurité. Mais, ce n'est qu'une posture trompeuse de communication. Il suffit de constater qu'ils ont vidé de sa substance la récente loi portant réforme de la précédente loi sur la présomption d'innocence.
Jacques Chirac, alors Président de la République, s'est comporté en candidat en embuscade. Il n'a jamais apporté le moindre soutien à Jean-Pierre Chevènement. Alors, quand aujourd'hui il vient nous faire à grand renfort de publicité, le coup de la fracture sécuritaire. Comme pour tout le reste, c'est de la poudre aux yeux. Ses propositions se rangent en trois catégories : celles qui existent déjà, celles qu'il copie sur Jean-Pierre Chevènement et celles qu'il omet. Existent depuis longtemps le conseil de sécurité intérieure, les conseils locaux de sécurité et les plans de sécurité pour les établissements scolaires. Il copie sur Jean-Pierre Chevènement les trois lois à faire voter en urgence et la création de centres fermés pour mineurs.
Jacques Chirac a aussi omis de dire dans son récent discours sur la sécurité les mesures qu'il avait déjà prises. En 1987, il a supprimé la détention provisoire pour les mineurs, y compris multirécidivistes. En 1995, il n'a pas appliqué la loi de programmation que Charles Pasqua venait de faire voter. En 1997, il a lancé l'indépendance des parquets, démantelant toute politique pénale en France. De même, il a oublié certaines propositions qu'il a pu faire au cours de ces dernières années.
Ainsi, la suppression de la hiérarchie au sein des parquets, qui auraient entraîné en plus l'anarchie judiciaire. Ainsi, la municipalisation de la police nationale, qui aurait provoqué une fragmentation favorable aux criminels et aux délinquants. Une fois de plus, Jacques Chirac prend l'air du temps et cherche à nous présenter un menu préparé à la va-vite.
Le retour de la sûreté ne dépend pas seulement de la répression et de la prévention. Le retour de la sûreté dépend aussi, dépend surtout de l'emploi. Le chômage est père de tous les vices, de tous les maux. Il faut une autre politique économique, il faut une relance par la demande pour obtenir de la croissance, il faut revaloriser la feuille de paie. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % sur cinq ans et de convoquer très vite après son élection une conférence sur les salaires. D'autre part, il a prévu de transférer sur la fiscalité une partie des charges sociales, afin que le travail lui-même soit moins taxé.
Jacques Chirac, lui, a proposé deux mesures, d'une part reconstruire en vingt ans un million de logements sociaux, d'autre part relancer la politique des zones franches urbaines. Actuellement, on construit 45 000 logements sociaux neufs par an, et on en rénove 1 000. Donc sur vingt ans, on en construit à peu près un million, et on en réhabilite environ deux millions. Jacques Chirac propose de faire ce qui se fait déjà : bel esprit d'innovation ! Par ailleurs, on a déjà l'expérience des zones franches. Elles ont un effet limité sur l'emploi des habitants des quartiers concernés. Jacques Chirac nous présente une fausse bonne idée.
Et puis la sécurité passe, nous le savons bien, par l'Ecole. Car, dans la République, l'Ecole est à la base de tout. L'Ecole est l'endroit où se forme le citoyen, où l'enfant acquiert les éléments qui lui permettront d'exercer sa raison et son propre jugement. Lorsqu'il était ministre de l'Education nationale, Lionel Jospin a mis l'enfant au centre de l'Ecole : quel erreur ! L'Ecole n'est plus alors un centre d'apprentissage, mais un lieu de vie. C'est oublier que l'enfant ne restera pas un enfant, que l'enfant deviendra un adulte. Non, au centre de l'Ecole, au centre de l'Ecole de la République, il faut mettre la transmission des savoirs, des connaissances et des repères.
Non, il n'y a pas d'égalité entre le Maître et l'Elève, le Maître sait, l'Elève apprend. Non, le Maître n'est pas le copain de l'Elève, le Maître instruit l'Elève. D'abord, donc, remettre sur ses pieds l'Ecole, en finir avec la démagogie " jeuniste ", avec les Marseillaises frelatées et autres tags, expressions d'une soi-disante spontanéité artistique. En réalité, Jacques Chirac et Lionel Jospin seraient incapables de tenir des engagements analogues à ceux pris par Jean-Pierre Chevènement.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont contraints par le pacte de stabilité budgétaire et par les statuts de la Banque Centrale Européenne. Il faudra assouplir le premier. A son origine, était l'Allemagne. Sûre de sa puissance économique, elle tenait ainsi à manifester sa méfiance et son dédain pour ces pays qu'elle qualifiait ironiquement du " Club Med ". Mais, l'histoire a parfois des retours inattendus. Aujourd'hui, c'est précisément l'Allemagne qui arrive difficilement à respecter les contraintes de ce pacte. Seul un compromis politique, passé entre les ministres des Finances, lui a permis d'échapper à l'avertissement public dont elle était menacée par la Commission de Bruxelles. Pour la Banque centrale, il faut d'abord en changer les statuts. Aujourd'hui, elle est chargée de lutter contre la seule inflation. Un tel combat est désormais dépassé ; il appartient à l'autre siècle. Il faut donc lui donner aussi pour objectifs la croissance et l'emploi.
Comment ne pas évoquer le problème de la désindustrialisation de la France ? Pour consommer, il faut d'abord produire. La rente est anéantie quand le capital a été dilapidé. Jean-Pierre Chevènement l'a rappelé à Toulouse : il faut des usines chimiques. Bien sûr, il faut prendre toutes les précautions pour que des accidents, comme celui d'AZF, n'arrivent plus. Les premières victimes en ont été les salariés de l'usine. Mais, ces précautions prises, il faut maintenir et développer des lieux de production industrielle. Il faut en finir avec cette idéologie à courte vue qui condamne les usines parce qu'elles sont susceptibles de polluer.
Le mépris affiché pour le travail ne facilite pas l'intégration harmonieuse des jeunes d'aujourd'hui à notre société. Je pense notamment à ceux dont les parents ou les grands parents sont nés dans un autre pays, sur un autre continent. Car, à ce dédain pour la production, se joint la honte de soi qui frappe nos élites. Assez de repentances ! Assez de coulpes battues ! Assumons l'histoire de France, toute l'histoire de France avec ses ombres certes, mais aussi avec ses nombreuses lumières. N'oublions pas que ces lumières ont éclairé le monde. La Marseillaise est notre hymne national. La Marseillaise est aussi le chant que tant d'hommes et de femmes, épris de liberté, ont entonné un peu partout sur la planète. La Marseillaise sifflée est une insulte à la France et à la liberté. Mais encore faudrait-il que la France se donne les moyens d'être digne de son rang, de pouvoir encore parler à l'humanité toute entière, d'être la voie que le monde continue à attendre.
Georges Bush vient de menacer de guerre un " axe du mal ", comprenant l'Iran, l'Irak et la Corée du Nord. A juste titre, Hubert Védrine a qualifié cette analyse de " simpliste ". Collin Powell a qualifié ce propos de " vapeur ". Ainsi, le secrétaire d'Etat des Etats-Unis d'Amérique du Nord vient de signifier au ministre des Affaires Etrangères de la République Française qu'il tenait son opinion pour négligeable. Il parait pourtant que les deux pays sont alliés. Bien plus, l'ambassadeur de la République à Washington a été sèchement convoqué au Département d'Etat. Pourquoi, donc, un ministre de la République est ainsi méprisé ? Pourquoi, donc, les représentants de la France sont ainsi traités ? Parce que la France est désarmée.
Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé la France. Bientôt, notre force de frappe aura perdu tout caractère opérationnel. Le service militaire a été supprimé, sans que soit prévu un système de garde nationale, assurant, en tant que de besoin, la défense opérationnelle du territoire et la garde des points névralgiques. Enfin, l'armée de métier coûte beaucoup plus chère que l'armée de conscription.
Chers Amis,
Nous connaissons un pays qui fut riche et puis qui a sombré dans la crise, le malheur et la pauvreté. Au temps de sa splendeur, l'Argentine n'a pas su construire un Etat. Elle n'a pas cherché à investir dans une industrie nationale. Elle a vendu ses services publics pour maintenir artificiellement une apparence d'économie pendant quelques années supplémentaires.
L'Argentine illustre les méfaits à terme d'un système qui ne repose que sur la rente, rente agricole en l'occurrence. Mais quand la rente disparaît, le pays se retrouve fort dépourvu. Il ne faut pas croire que la France ne pourrait jamais subir un tel sort. Nous avons certes des atouts, et même de beaux atouts. Encore, ne faudrait-il pas les gaspiller.
Or, de ce point de vue, l' "entente " entre le Parti socialiste et les verts doit susciter la plus grande inquiétude.
Les verts ont déjà empoché quarante deux circonscriptions réservées. C'est-à-dire qu'ils ont obtenu la possibilité d'avoir un groupe parlementaire en cas d'élection de Lionel Jospin. C'est-à-dire qu'ils peuvent être en mesure d'exercer un chantage permanent sur l'éventuel gouvernement socialiste.
Mais le plus grave n'est pas là. Le plus grave est la tactique de Lionel Jospin. Lionel Jospin montre ainsi qu'il n'est pas un homme d'Etat, mais un chef de parti qui rêve de revenir au régime des partis. Il a refusé tout accord formel avec les verts, parce qu'il sait que, dans leur immense majorité, les Français rejettent leur religion anti-nucléaire, leur phobie anti-automobile ou leur angélisme coupable sur les problèmes de sécurité. Lionel Jospin ne veut pas assumer ces fardeaux devant les électeurs. Mais, pour autant, il ne va pas leur proposer une politique cohérente dans ces domaines. Il attendra le résultat obtenu par Noël Mamère au premier tour de l'élection présidentielle. Ainsi, si par malheur, Noël Mamère obtenait un pourcentage de voix que Lionel Jospin considérerait comme significatif, la politique énergétique de la France se trouverait menacée. Or, le nucléaire est l'un de nos atouts majeurs, y compris pour protéger l'environnement, puisqu'il ne dégage pas de gaz à effets de serre.
Cette affaire du nucléaire est très représentative de cette élection présidentielle. Les deux sortants ne sont pas des hommes libres. Ils sont prisonniers de leur camp, de leurs alliés. Ils doivent donner des gages aux uns et aux autres.
Jacques Chirac et Lionel Jospin sont des chefs de clan, qui doivent satisfaire les fantasmes et les appétits de leurs commensaux. Au contraire, Jean-Pierre Chevènement est un homme libre. Il a proposé au peuple, le 9 septembre dernier, dix grandes orientations. Qui s'y retrouve, le rejoint. Jean-Pierre Chevènement est un homme seul. Il ne dépend pas d'un appareil. Cela ne facilite pas toujours les aspects matériels de sa campagne. Mais, les Français sentent cette indépendance. Elle est à la base de son succès. Cependant, Jean-Pierre Chevènement n'est pas un homme isolé. Des Français de toute origine politique l'ont rejoint.
Ce rassemblement étonne parce qu'il réunit dans un même Pôle républicain des hommes et des femmes qui savent que, au dessus de la droite et de la gauche, par delà la droite et la gauche, il y a la France, il y a la République. Ce rassemblement fait peur parce qu'il menace des situations établies et des appétits insatiables. Alors, Jean-Pierre Chevènement est attaqué de tous les côtés. La contradiction ne fait pas peur à ses contradicteurs. Alain Juppé le traite de " marxiste " pendant que Daniel Cohn-Bendit déclare qu'il représenterait la " France moisie " qu'il serait " nationaliste ". Jean Glavany, qui sera le directeur de campagne de Lionel Jospin, prédit que le Pôle républicain sera une " construction politique trop artificielle " pour ne pas se " décomposer ", tout en lui demandant de soutenir le candidat socialiste au deuxième tour si, d'aventure, celui-ci devait y figurer. Tous ces gens n'ont rien compris. Les Français en ont assez d'une alternance qui n'est pas une alternative. Voter Chirac, c'est revoir Juppé, Sarkozy, Toubon, Douste-Blazy avec en nouveauté Nicole Fontaine. Voter Jospin c'est revoir Fabius, Strauss-Kahn, Guigou, Aubry et peut être même Voynet. Voter Chirac, Voter Jospin, c'est reprendre les mêmes et recommencer.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est voter pour un renouvellement des équipes, et surtout de la politique.
Oui, il y a une possibilité d'en sortir !
Oui, il y a une possibilité de relever la France avec la République.
Oui, il y a une possibilité que Jean-Pierre Chevènement soit Président de la République Française.
(Source http://georges-sarre.net, le 19 mars 2002)
Conférence de presse à Avignon
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Les deux grosses machines du bipartisme unique se sont enfin ébranlées. Elles vont essayer, du seul fait de leur masse pesante, de tout écraser sur leur passage, de monopoliser le débat au seul profit des deux sortants, de le réduire à un combat de coqs, les citoyens pourront prendre les paris. Les deux appareils vont tenter de nous présenter Jacques Chirac et Lionel Jospin en hommes quasi nouveaux, comme si l'un ne présidait pas depuis sept ans, comme si l'autre ne gouvernait pas depuis cinq ans. Jacques Chirac demande le renouvellement de son mandat. Lionel Jospin sollicite le renouvellement de son quinquennat. Pourquoi voulez-vous qu'avec l'un et l'autre, il y ait quelque chose de nouveau sous le soleil ?
Les deux grosses machines ressemblent aux dinosaures des temps préhistoriques. Des corps immenses et de toutes petites têtes. De gigantesques carcasses à nourrir avec des appétits insatiables, auxquelles il faut d'immenses et grasses prairies pour s'ébrouer. Des logiciels faibles pour vraiment penser un programme qui soit autre chose que quelques idées cueillies à la volée.
L'arrivée inopinée d'un nommé François Bayrou, a finalement dissimulé les véritables enjeux qui faisaient frémir la prairie de Toulouse. Trois conflits étaient sous-jacents. Le premier justifie le sigle UEM, qui devrait signifier Union économique et monétaire, et non Union en Mouvement. La question déterminante pour des protagonistes politiciens est de savoir qui détiendra les cordons de la bourse, qui, après les élections législatives recueillera le financement public. En clair, existera-t-il une ou des associations de financement ? S'il n'en existe qu'une, il y aura un maître, s'il en existe plusieurs, bien des ambitions personnelles pourront se redévelopper. Le second conflit porte sur la personne du Premier ministre, au cas où Jacques Chirac serait réélu. Chacun connaît la longue liste des " premiers ministrables " autoproclamés. Le combat est sévère autour de la peau d'un ours qui est loin d'être encore tué. Enfin, le troisième conflit concerne déjà la désignation virtuelle du candidat de 2007.
En revanche, devant ces appétits, le logiciel est resté atrophié. Pour une bonne part, la vingtaine d'engagements sont destinés au même avenir que la résorbtion de la fracture sociale promise il y a sept ans. Pour le reste, c'est la reprise du vieux slogan autrefois attribué à la gauche : " Demain, on rase gratis ". Avec Jacques Chirac et Lionel Jospin, droite et gauche finissent par se confondre. Demain, donc, on diminue les impôts, Laurent Fabius le fait bien. Mais, comme on vient quand même de la droite libérale, demain on diminue le nombre de fonctionnaires. Mais, comme en même temps on connaît les souhaits des Français, demain on augmente le nombre de policiers, de gendarmes, d'infirmières, d'enseignants... Pour résoudre cette quadrature du cercle, demain on liquide l'argenterie de famille. Demain, on vend EDF-GDF, Aéroports de Paris et quelques autres services publics. Tant pis, si après demain, la France connaît à son tour les gigantesques pannes d'électricité de la Californie. Tant pis, si après demain, la France est victime de retentissantes faillites comme celle d'Enron.
A quelques nuances près, l'autre sortant propose le même programme. Dès avril prochain, Jean-Claude Gayssot, ministre communiste des Transports, met en vente la société d'Autoroutes du Sud de la France. D'ailleurs, bien qu'investi, sans débat et sans concurrent, candidat du parti socialiste, Lionel Jospin déclare, dans un rare moment de franchise, que son programme n'est pas socialiste. La définition est trop étriquée dit-il. Aveu terrible qui montre que Lionel Jospin a abandonné la gauche, quoiqu'il prétende en conserver les suffrages au nom des rentes acquises.
Lionel Jospin vient de se rendre à Stockholm au sommet des " modernes ", c'est-à-dire précisément au sommet de ceux qui viennent de la gauche pour mieux l'abandonner au nom de la mondialisation ultra-libérale. Cette réunion aurait du inspirer au moins deux réflexions salutaires à Lionel Jospin. A la première place de ce sommet, trônait Tony Blair. Or, celui-ci vient de signer avec Silvio Berlusconi une déclaration prévoyant notamment le démantèlement de tout droit du travail au nom de la flexibilité. Les propos de Catherine Tasca, refusant de rencontrer Silvio Berlusconi au Salon du Livre, relèvent de la palinodie, où l'on se contredit entre la cour et le jardin pour mieux attirer le chaland. La deuxième réflexion aurait du venir d'une absence. La réunion de Stockholm était prévue pour septembre dernier. Elle a été repoussée à cause de l'attentat de New York. Depuis, l'un des invités a disparu. Ils s'agit de Fernando de la Rua, qui était alors Président de l'Argentine. Nous devons méditer sur le sort de l'Argentine. Un pays qui n'a jamais vraiment cherché à construire un Etat. Un pays qui n'a pas su investir dans l'industrie quand il en avait les moyens. Un pays qui a liquidé ses services publics pour faire illusion quelques années supplémentaires.
Je ne dirai rien des appétits qui entourent Lionel Jospin. Ils sont connus depuis longtemps. Ils n'ont jamais été avares de promesses. Aujourd'hui, eux aussi, on les voit s'ébrouer.
Pour manifester leur colère devant les deux sortants, un certain nombre de nos concitoyens s'apprêtent à voter pour les candidats qui, dans leurs discours, s'expriment avec le plus de virulence. Certes, il existe en France un plancher incompressible de 2 à 3 % des électeurs qui se reconnaissent respectivement soit dans l'extrême gauche, soit dans l'extrême droite. Mais, pour les autres, il s'agit seulement d'exprimer une forte protestation contre le système du pareil au même. Pourtant, en donnant leur suffrage soit à Arlette Laguiller, soit à Jean-Marie Le Pen, ces Français jettent leur bulletin de vote dans une oubliette. Jamais l'un ou l'autre ne sera au second tour. Et si, d'aventure, l'un des deux y figurait, il serait écrasé.
Jean-Pierre Chevènement est déjà la surprise de cette campagne. Il est aujourd'hui suffisamment crédible pour devenir la surprise du scrutin lui-même. Jean-Pierre Chevènement a su montrer dans le passé la force de ses convictions. Chacun sait qu'il tiendra les engagements qu'il a pris, tels qu'il les a fixés lorsqu'il a présenté ses dix grandes orientations à Vincennes, le 9 septembre dernier. Son objectif est de relever la France avec la République.
Soudain, les deux sortants nous parlent de sécurité. Très bien ! Mais, pourquoi n'ont-ils pas suivi Jean-Pierre Chevènement quand il était leur ministre de l'Intérieur ? Pourquoi Lionel Jospin a-t-il toujours tranché contre lui et en faveur d'Elisabeth Guigou ? Pourquoi Jacques Chirac s'est-il tu, se comportant en candidat en embuscade, et non en chef de l'Etat ? Aussi, quand Jean-Pierre Chevènement présente ses mesures contre l'insécurité, il est cohérent avec lui-même, avec la politique qui est la sienne. Quand les deux autres présentent les mêmes mesures, ils ne font que se conformer aux sondages. Ils ne s'adressent pas aux citoyens pour leur proposer un avenir. Ils se contentent de flatter une opinion mouvante pour garder le pouvoir. J'ai pris l'exemple de la sécurité, parce que la sécurité est devenu l'un des thèmes les plus cruciaux. Mais, si vous le souhaitez, nous pourrions en prendre bien d'autres, comme le travail, l'Ecole, la Défense...
La France a encore un avenir. La République a encore un avenir. Et cet avenir dépend du prochain scrutin présidentiel. N'oublions pas que Jacques Chirac et Lionel Jospin se sont accordés, en décembre dernier, à la conférence de Laeken pour doter l'Union Européenne d'une constitution, c'est-à-dire d'un texte qui sera au-dessus de la constitution de la République Française. Ainsi, notre pays serait réduit à n'être tout au plus que la Louisiane de l'Europe.
Bien sur, il faut un traité pour rendre compréhensible tous les textes, toutes les jurisprudences qui se sont accumulées depuis prés d'un demi-siècle.
Mais ce traité doit rester inférieur aux constitutions nationales. Alors, la République ne se dissoudra pas dans une improbable Europe des régions.
Alors, la France impulsera la construction d'une Europe des Nations, où chaque peuple conservera sa pleine souveraineté, tout en déléguant les compétences nécessaires, selon des modalités permettant un constant contrôle démocratique.
(Source http://georges-sarre.net, le 5 mars 2002)
Réunion publique de Laudun-L'Ardoise
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Nos deux sortants sont tellement interchangeables qu'ils finissent par l'avouer publiquement sans même s'en rendre compte. Ainsi, dans les slogans de campagne tant de Jacques Chirac que de Lionel Jospin, nous trouvons le même mot auquel ils veulent donner une valeur centrale: " ensemble ". C'est un véritable message subliminal qu'ils adressent ensemble aux Français. Ils ont gouverné ensemble pendant cinq ans. Ils pourraient encore gouverner ensemble demain. Mais, ils sont irrémédiablement séparés par l'abysse de leurs ambitions personnelles respectives, par les précipices des appétits insatiables de chacune des deux équipes qui les entourent. Leur " ensemble " se sépare au seul moment du partage des honneurs et des places. Le chant de Lionel Jospin écrit et composé par Jean Jacques Goldman s'intitule " Ensemble ".
Tout au long du quinquennat de Lionel Jospin, Jacques Chirac n'a jamais utilisé ses pouvoirs présidentiels pour infléchir la politique du gouvernement, et encore moins pour la contrer. Cet acquiescement s'est même étendu aux affaires étrangères et à la défense, domaines que la pratique constitutionnelle réserve normalement au Président de la République. Tout au plus, Jacques Chirac s'est contenté ici ou là d'une critique plus ou moins voilée, plus ou moins feutrée, qui relevait d'un candidat en embuscade, et non du chef de l'Etat. De son côté, Lionel Jospin a reconnu depuis longtemps que pas une virgule ne l'avait séparé de l'autre sortant. Cette complicité n'est pas un hasard. Ils sont d'accord sur les préalables fondamentaux. Ils acceptent de se soumettre aux contraintes de la mondialisation ultra-libérale et d'une construction européïste conçue comme la modalité continentale de cette dernière. Disons le clairement, Jacques Chirac et Lionel Jospin ont été solidaires durant toute la cohabitation.
Néanmoins, il faut faire accroire aux Français que chacun des deux propose un programme différent. Alors, Jacques Chirac parle de gouverner autrement. Alors, Lionel Jospin parle de présider autrement. Même dans leur effort surhumain pour se distinguer l'un de l'autre, ils finissent par se retrouver dans une belle symétrie, qui se conclut par un adverbe commun. Et puis, que signifie gouverner autrement ? Ne pas gouverner comme Lionel Jospin, mais gouverner comme Alain Juppé. Il suffit de voir le rôle central que joue Alain Juppé dans la campagne de Jacques Chirac. Et puis, que signifie présider autrement ? Ne pas présider comme Jacques Chirac, mais présider comme Lionel Jospin a gouverné. Lionel Jospin nous a déjà promis la continuité, s'il était élu. Bref " ensemble " ou " autrement ", nos deux sortants n'arrivent pas à se séparer. Enfin, n'oublions pas que cet " autrement " ne porte que sur la forme.
Sur le fond, l'un et l'autre commencent à faire semblant d'exposer un programme. Ainsi il y a quelques jours, à grand renfort médiatique de publicité, Jacques Chirac nous a énoncé les mesures qu'il comptait prendre pour combattre l'insécurité. On peut les ranger en trois catégories : celles qui existent déjà, celles proposées par Jean-Pierre Chevènement et celles que Jacques Chirac a oubliées. Ainsi, existent déjà le conseil de sécurité intérieure, les conseils locaux de sécurité ou les plans de sécurité dans les établissements scolaires.
Il reprend à Jean-Pierre Chevènement notamment la refonte de l'ordonnance de 1945 sur la délinquance des mineurs et les lois de programmation pour la justice et pour les forces de maintien de l'ordre. Quand Lionel Jospin a tranché au sein du gouvernement contre ces propositions de Jean-Pierre Chevènement, Jacques Chirac aurait pu, aurait du intervenir pour soutenir le ministre de l'Intérieur, son ministre de l'Intérieur. Il s'est tu. Voilà un exemple concret, et grave, de son comportement de candidat en embuscade, et non de chef de l'Etat. Enfin, il y a les dispositions que Jacques Chirac a oubliées. C'est lui qui, en 1987, a supprimé la détention provisoire des mineurs, y compris des multirécidivistes. C'est lui qui, en 1995, n'a pas appliqué la loi de programmation que Charles Pasqua avait fait voter. C'est lui qui, en 1997, a engagé la réforme visant à l'indépendance des parquets, supprimant ainsi toute politique pénale au niveau national. Je ne parlerai pas des propositions qu'il a formulées un jour et qu'il n'a pas reprises le lendemain, suivant son habitude ancienne. Ainsi, une fois, il s'est prononcé pour la municipalisation de la police nationale au risque de fragmenter et de disperser jusqu'à l'impuissance. Une autre fois, il a évoqué la suppression de la hiérarchie au sein des parquets au risque de l'anarchie judiciaire.
Pour le moment, Lionel Jospin, quant à lui, ne nous a encore gratifié que de mots. Les promesses viendront ; et il n'en sera pas avare. Il veut donc une France active, une France sûre, une France juste, une France moderne et une France forte. Il nous assure en même temps qu'il veut atteindre ces objectifs dans la continuité de la politique qu'il mène depuis cinq ans. Je reviendrai sur la France active. Pour la France sûre, après ce que je viens déjà de dire, je me contenterai de m'interroger pour connaître les raisons qui l'ont conduit à toujours préférer l'angélisme d'Elisabeth Guigou à la fermeté républicaine de Jean-Pierre Chevènement. Récemment encore, il a voulu corriger les dispositions les plus catastrophiques de la loi sur la présomption d'innocence. Eh bien, devant les pressions de sa propre majorité parlementaire, il a dû reculer sur des points essentiels.
Sur la France juste, je ne peux y voir qu'une figure démagogique. Tout le monde sait que, depuis cinq ans, les inégalités se sont considérablement accrues en France. Récemment, un hebdomadaire se réjouissait que les revenus des patrons français aient rejoint ceux des patrons américains. Concrètement, cela signifie que, aujourd'hui, en France, dix sept dirigeants d'entreprises privées gagnent près de cinq cent fois le SMIC, oui je dis bien cinq cent fois. Il nous parle d'égalité entre les territoires. Avec l'introduction de la concurrence, l'équivalent de vingt départements n'est pas couvert par le téléphone mobile. De même, la péréquation des tarifs de l'électricité est désormais en péril. Pour les retraites, il faut être sans illusion : avec Jacques Chirac comme avec Lionel Jospin, une menace pèse sur nos retraites par répartition. Les programmes tant du PS que du RPR prévoient de commencer à instiller la capitalisation. D'ailleurs, le président du principal fond de pension américain par capitalisation a déclaré publiquement qu'il voterait pour Lionel Jospin. On a les soutiens que l'on mérite.
Sur la France moderne, Lionel Jospin nous vante la formation permanente. C'est très bien. Mais, pour être efficace, la formation permanente doit compléter et actualiser une bonne formation initiale. Dans la République, l'Ecole est à la base de tout. Au centre de l'Ecole, il doit y avoir la transmission des savoirs et des repères. Le Maître et l'Elève ne sont pas égaux, ne sont même pas équivalents. Le Maître sait, l'Elève apprend. Quand, il fut ministre de l'Education Nationale, Lionel Jospin a accentué les dérives post soixante-huitardes.
Il a fait voter une loi qui plaçait l'Elève au centre de l'Ecole. Mais alors, l'Ecole devient un simple lieu de vie. Mais alors, l'élève n'est plus considéré comme un adulte en devenir, comme un futur citoyen. Il est considéré dans le seul instantané du moment présent. Ce bouleversement des repères n'est pas pour rien dans l'actuelle augmentation de la délinquance juvénile.
Jack Lang, actuel ministre de l'Education nationale, vient de découvrir, dix huit ans après Jean-Pierre Chevènement, qu'à l'Ecole primaire les enfants doivent apprendre à lire, à écrire et à compter. Nous ne serions pas à deux mois d'une élection présidentielle, je m'en réjouirais sans y voir malice. Mais, je ne peux oublier que le même Jack Lang vient de diffuser dans nos écoles des Marseillaises frelatées. Notre hymne national mérite le respect. Il ne peut être un jouet livré aux humeurs d'un ministre de passage. Il est vrai qu'il fut un temps où Jack Lang, déjà ministre, se répandait pour nous dire combien étaient " formidables " les tags, qui seraient une forme spontanée d'expression artistique.
Sur la France forte, simplement un mot pour dire que si, dans la crise actuelle les Etats-Unis traitent la France avec autant de légèreté, c'est parce que Jacques Chirac et Lionel Jospin ont désarmé notre pays. Les agents du CEA le savent bien : pour que notre force de frappe reste opérationnelle, nous devons procéder, de temps à autre, à un tir réel. D'autre part, les super ordinateurs, américains qui remplaceront les essais par des calculs, sont loin d'être au point. Le service militaire a été supprimé, mais aucune garde nationale n'a été instituée pour la surveillance des points névralgiques en cas d'alerte, terroriste par exemple. Enfin, on le sait bien, une armée de métier coûte beaucoup plus cher qu'une armée de conscription. Néanmoins, le budget de la défense a continué à baisser- les fameux " dividendes de la paix " de Laurent Fabius - jusqu'à atteindre 1,96 % du PIB, contre 3,7 % en 1990.
Je reviens sur la France active. Désormais, pour la production par tête d'habitant, notre pays se place dans les derniers rangs de l'Union Européenne alors que, il y a encore quelques années, il figurait dans le groupe de tête. La principale cause de ce recul grave est le mépris dans lequel sont tenus l'industrie en particulier et le travail en général. Il faut donc en finir avec la dictature de la spéculation boursière. La solution ne passe pas par le traitement social du chômage, mais par son traitement économique grâce à la mise en oeuvre d'une autre politique.
D'abord revaloriser le travail en revalorisant la feuille de paye. Jean-Pierre Chevènement s'est engagé à augmenter le SMIC de 25 % en cinq ans. Il a aussi prévu une grande conférence sur les salaires dans les semaines suivant son élection. Ces mesures relèvent d'abord de la plus élémentaire justice sociale. Mais, elles permettront en même temps une relance de l'économie par la demande. Pour qu'elles n'aient pas d'effets pervers sur l'emploi, les charges sociales, au moins sur les plus bas salaires, seront progressivement transférées sur la fiscalité. Mais, pour aussi nécessaires que soient ces dispositions, on ne saurait s'en contenter. Il faut redonner à la France le goût de son industrie, et d'abord de celles qui, à tort, semblent poser un problème. Lorsqu'il s'est rendu à Toulouse, en janvier dernier, Jean-Pierre Chevènement n'a pas hésité à se définir comme le candidat du pôle chimique, du pôle industriel, du pôle nucléaire, parce qu'il s'agit des pôles de l'emploi et des pôles de l'avenir.
Car, il ne faut pas l'oublier, les premières victimes du grave accident de l'usine AZF ont été les ouvriers de cette entreprise. Pour autant, ils ne souhaitent pas voir disparaître leur outil de travail, leur gagne-pain. Que deviendrait d'ailleurs la France sans industrie chimique ? Nous aurions quand même besoin des produits fabriqués par cette filière. Il faudrait donc les importer, tout en laissant au chômage les salariés de cette activité. Nous irions vers une économie de la rente, où l'on croit que l'on peut consommer sans produire. Une telle illusion n'a qu'un temps ; puis, vient le moment où le capital a été mangé. Et ce moment, un pays le connaît aujourd'hui ; il se nomme l'Argentine. Si nous n'y prenons garde, à un terme relativement proche de quelques décennies, la France pourrait connaître le sort de l'Argentine.
A l'inverse, il ne faut pas faire n'importe quoi. La sécurité des salariés doit être assurée. Les accidents, comme celui d'AZF, doivent être empêchés, non en supprimant l'usine, mais en la rendant sûre, notamment grâce à la participation vigilante des premiers intéressés. Au nom d'un principe de précaution qui n'a aucun fondement scientifique, on voudrait supprimer les activités humaines dangereuses. Mais toute activité humaine est dangereuse. Croyez-vous que la conduite automobile soit sans danger ? Il faut en finir avec ces absurdités d'une modernité qui voudrait nous renvoyer à la lampe à l'huile et à la marine à voile.
Le second scandale à Toulouse est le temps mis par les compagnies privées d'assurances pour commencer a rembourser les " sans fenêtre ". Et, dire que le RPR, suivant le Medef, voudrait introduire de la concurrence dans la sécurité sociale. Aujourd'hui, des gens se plaignent, à juste titre, pour quelques jours de retards dans les remboursements. Demain, si l'on suivait Nicolas Sarkozy, il faudrait patienter de longs mois.
Mais, il y a encore plus inquiétant : c'est l'avenir du nucléaire. L'entente passée entre le PS et les verts deviendra un accord au lendemain du premier tour. Le contenu de cet accord dépendra du résultat obtenu par Noël Mamère. Lionel Jospin abandonne ainsi la logique des institutions de la Cinquième République, selon lesquelles le Président définit ses orientations et une majorité se constitue autour. Lionel Jospin revient au régime des partis de son enfance, dans lequel la politique du pays résulte de compromis instables entre des groupes d'intérêts. Si donc, par malheur, les verts recueillaient un nombre trop important de suffrages, le nucléaire serait menacé en France. Or, cette filière énergétique est à la fois la moins chère, celle qui donne un avantage compétitif à l'ensemble de notre économie, et la moins polluante, elle n'émet pas de gaz à effet de serre. Il ne me revient pas de rechercher les raisons religieuses ou psychanalytiques qui animent les verts. En revanche, il nous revient à tous de dénoncer les dégâts qu'ils provoquent tant sur l'emploi que pour l'indépendance de la France.
Déjà, en 1997, Dominique Voynet avait exigé et obtenu la fermeture, puis le démantèlement de Super Phénix. Depuis, les verts ont empêché la mise en chantier du premier prototype de l'EPR, le réacteur de la prochaine génération. Or, on sait que la consommation électrique continue à augmenter. Comment pourra-t-on y satisfaire d'ici quelques années, sans construire de nouveaux moyens de production ou alors en construisant à la va-vite des moyens pollueurs au gaz ou au pétrole ? Surtout, d'ici une quinzaine d'années, il faudra commencer à remplacer les actuels réacteurs ; serons-nous prêts ? Les verts, qui savent leur audience limitée, essayent aussi de bloquer le nucléaire en catimini par inertie, tout en se réclamant bien sûr de la transparence. Ainsi, Yves Cochet, ministre de l'Environnement, s'abstient de répondre pour la simple ouverture d'une enquête publique à propos de l'augmentation de la production de mox. Ce soi-disant démocrate empêche les citoyens de s'informer et de s'exprimer sur le cycle du combustible nucléaire. J'ai saisi personnellement Lionel Jospin de cette question. J'attends toujours une réponse qui ne soit pas dilatoire.
Le nucléaire est enfin menacé par la privatisation annoncée d'EDF. Les amis de Jacques Chirac demandent la mise à l'encan de cette magnifique entreprise de service public. Lionel Jospin s'est montré plus tortueux. Il a parlé d'une simple ouverture du capital, l'Etat restant majoritaire. Mais, on sait que de tels seuils finissent toujours par sauter. Pour mieux nous endormir, il a aussi évoqué les missions de service public et l'accord du personnel. En fait, Jacques Chirac et Lionel Jospin sont décidés à liquider EDF en tant qu'entreprise publique. Ni les pannes gigantesques dont a souffert la Californie, ni la faillite retentissante d'Enron ne leur ont appris à se dégager de leur passion idéologique ou de leur plaisir spéculatif. Pour EDF privatisée, le nucléaire sera moins intéressant, parce que plus difficilement source de profit immédiat.
Chers Amis,
Avec Jean-Pierre Chevènement, nous avons un candidat qui a des convictions et qui a su montrer qu'il n'était pas prêt à les brader pour conserver un honneur ministériel dans le déshonneur personnel. Demain, si nous le portons à la tête de l'Etat, nous aurons un Président qui veillera à ce que le gouvernement mette en oeuvre les dix grandes orientations qu'il a présentées à Vincennes le 9 septembre dernier. Ces orientations prennent leurs racines dans les principes mêmes de la République. Je vous en ai donné un aperçu.
En revanche, si Jacques Chirac devait être réélu ou si Lionel Jospin pouvait exercer un second quinquennat, l'avenir de la France serait difficile. L'un et l'autre, par exemple, se sont accordés pour la rédaction d'une constitution européenne qui, par nature, réduirait notre pays au rang de Louisiane de l'Europe. Bien sûr, il faut un nouveau traité européen. Depuis quarante cinq ans, les textes et la jurisprudence se sont accumulés dans la confusion. Nous étions partis à six pays, nous sommes quinze, nous serons bientôt trente. Mais entre les nations, mais entre les peuples, mais entre des peuples aussi différents, il faut un traité, et non une constitution. Un traité qui laisse à chaque peuple sa souveraineté, quitte à en déléguer une part sous contrôle démocratique. Et non une constitution qui soumet chaque peuple à la discrétion des autres.
Encore un mot sur Lionel Jospin, puisque c'est le dernier qui se soit déclaré. Il nous a promis la continuité, il nous a promis de prolonger les courbes, mais les courbes vont dans le mauvais sens, notamment celle de l'emploi. Lionel Jospin nous dit que tout cela est passager, que la reprise va venir des Etats-Unis. Mais je crains que Lionel Jospin soit comme soeur Anne et qu'il attende longtemps avant de voir venir. Et, lorsqu'il verra enfin venir, le nombre des chômeurs et des exclus aura considérablement progressé.
Nous pouvons éviter les deux sortants. Nous pouvons éviter le retour de la ronde du chiraquisme. Nous pouvons éviter le maintien de l'autosatisfaction de la jospinerie. Nous avons un candidat fiable. Nous avons un candidat crédible. Nous avons un candidat pour relever la France avec la République.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner une chance à la France.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est donner un espoir à la République.
Voter pour Jean-Pierre Chevènement, c'est nous donner à nous-mêmes une espérance.
(Source http://goerges-sarre.net, le 5 mars 2002)