Déclaration commune des ministres des finances et des gouverneurs de banque centrale des sept grands pays industrialisés, en date du 23 décembre 1987, sur la situation économique et monétaire.

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Texte intégral

1 - Les ministres des finances et les gouverneurs des Banques centrales des sept grands pays industrialisés ont procédé ces dernières semaines à des consultations étroites sur leurs politiques et leurs perspectives économiques, à la lumière de l'évolution des marchés financiers. Ils ont réaffirmé leur conviction que les principaux objectifs et les principales orientations de politique économique convenus dans l'Accord du Louvre restent valables et fournissent le cadre d'une évolution positive de l'économie mondiale. Ils poursuivront en 1988 leurs efforts de coordination des politiques économiques, selon le dispositif approuvé au Sommet de Venise.
- 2 - Les ministres et les gouverneurs ont à nouveau souligné la nécessité de corriger les principaux déséquilibres externes de l'économie mondiale. Les politiques qui ont été mises en oeuvre cette année produisent progressivement les effets recherchés. En particulier la configuration de la demande interne et de la production aux Etats-Unis, au Japon et en RFA a évolué dans un sens qui favorise l'ajustement externe, et les déséquilibres commerciaux de ces trois pays diminuent en volume. La plus grande stabilité des taux de change observée durant la majeure partie de l'année écoulée, à la suite des modifications substantielles intervenues auparavant, a contribué à cet ajustement.
- Cependant les mouvements accentués de taux de change au cours des dernières semaines soulignent la nécessité d'améliorer les données économiques fondamentales et de poursuivre la coopération en matière de politique économique.
- 3 - Les développements intervenus sur les marchés boursiers depuis la mi-octobre peuvent avoir des effets défavorables sur les perspectives de croissance économique dans les pays industrialisés pris globalement. Les ministres et les gouverneurs estiment cependant qu'avec des politiques économiques saines et une coordination efficace, le taux de croissance de l'économie mondiale devrait être substantiel. A cette fin, ils sont convenus de la nécessité de mener dans leurs pays des politiques visant à renforcer une croissance non inflationniste.
4 - En conséquence, les ministres et les gouverneurs sont convenus d'intensifier leurs efforts de coordination des politiques économiques. Cette action commune vise à la réduction des déséquilibres externes. En particulier, les Etats-Unis ont engagé la procédure législative devant aboutir à la mise en oeuvre de l'accord conclu entre le Président et les responsables des deux partis au Congrès sur un programme biennal d'économies budgétaires supplémentaires ; ce programme accentuera les progrès déjà accomplis en matière de réduction du déficit budgétaire. Le Japon a mis en oeuvre un important programme de stimulation de la demande intérieure et veillera à ce que dans le budget 1988 les dépenses de travaux publics ne soient pas inférieures à celles du budget 1987, y compris le budget supplémentaire de juillet. La RFA complète l'augmentation déjà annoncée des réductions d'impôts de 1988 par de nouvelles mesures d'accroissement de l'investissement, et elle ne cherchera pas à compenser les pertes de recettes budgétaires qu'entraîneront les événements récents. Ont été également opérées des réductions coordonnées des taux d'intérêt en Europe ; elles devraient contribuer à la progression de la demande interne et à la réduction des déséquilibres commerciaux. Les intentions et engagements spécifiques de politique économique de chaque pays figurent en annexe de cette déclaration.
- 5 - Les ministres et les gouverneurs estiment que les récentes décisions de politique monétaire et les réductions de taux d'intérêt dans certains pays étaient appropriées et contribueront à restaurer la stabilité des marchés financiers. Ils sont convenus que les politiques monétaires devraient continuer à rechercher les conditions propres à assurer une croissance économique forte dans un contexte de stabilité des prix et à promouvoir la stabilité des marchés financiers.
- 6 - Les ministres et les gouverneurs ont résolument écarté les mesures protectionnistes comme moyen de faire face aux déséquilibres actuels. Le protectionnisme constitue une menace directe et grave pour la prospérité et l'équilibre mondiaux et aurait des conséquences dommageables pour les pays qui voudraient y recourir. Ils ont réaffirmé leur détermination à combattre le protectionnisme et à promouvoir un système d'échanges commerciaux ouvert.
7 - Les ministres et les gouverneurs considèrent que la réduction des déséquilibres du commerce mondial exige la coopération active d'autres pays, particulièrement des pays à surplus. Ils ont exprimé, en particulier, leur profonde préoccupation devant le fait que quelques pays nouvellement industrialisés n'aient pu adopter les mesures nécessaires à la réduction de leurs excédents commerciaux ; ceux-ci, importants et en augmentation, exacerbent les déséquilibres globaux et encouragent les pressions protectionnistes. Ils ont appelé les pays nouvellement industrialisés à mettre en oeuvre, de toute urgence, des politiques commerciales et de change qui faciliteront la réduction d'excédents commerciaux excessifs et permettront à leurs monnaies de refléter intégralement la forte compétitivité de leurs économies.
- 8 - Les ministres et les gouverneurs sont convenus qu'une fluctuation excessive des taux de change, une baisse supplémentaire du dollar, ou une hausse du dollar à un niveau tel que le processus d'ajustement serait enrayé, pourraient être contreproductives car elles détérioreraient les perspectives de croissance de l'économie mondiale. Ils ont souligné à nouveau leur intérêt commun pour des taux de change plus stables entre leurs monnaies, et sont convenus de continuer à coopérer étroitement dans la surveillance et la mise en oeuvre de politiques visant à améliorer les données économiques fondamentales, de manière à favoriser la stabilité des taux de change. En outre ils sont convenus de coopérer étroitement sur les marchés des changes. Les ministres et les gouverneurs ont souligné la nécessité de politiques cohérentes se renforçant mutuellement et estiment que les mesures prises accélèreront les progrès en direction d'une croissance économique plus forte et plus équilibrée, et d'un retour à une configuration des paiements extérieurs propice à une plus grande stabilité des taux de change.
La stratégie budgétaire suivie par le gouvernement du Canada a permis une baisse du taux d'augmentation de ses dépenses et des réductions substantielles du déficit budgétaire qui se poursuivent. Un net progrès a été enregistré dans le ralentissement de la croissance de la dette, de même qu'en direction de l'objectif à moyen terme de stabilisation du ratio dette/PIB. Une politique budgétaire restrictive a été accompagnée d'une croissance impressionnante de la demande interne, de la production et de l'emploi. D'importantes mesures structurelles orientées vers le renforcement de la compétitivité et des capacités sous-jacentes de l'économie ont été adoptées, en particulier la réforme fiscale et la négociation d'un accord de libre-échange avec les Etats-Unis. La politique monétaire reste orientée vers une croissance non inflationniste dans un contexte de marché des changes ordonnés.
- Le gouvernement français a tenu globalement son engagement de réduire à la fois le déficit budgétaire et la pression fiscale. Le déficit du budget sera réduit de 0,8 % du PIB entre 1986 et 1988. Les allègements fiscaux sur la même période représentent 1,3 % du PIB. Un plan triennal couvrant la période 1989-1991, qui constitue la stratégie à long terme du gouvernement et sera mis en oeuvre dans les budgets annuels, permettra de réduire de 45 milliards de francs le déficit budgétaire et d'un montant équivalent les impôts. Le programme de privatisation prévu au début de l'année a été réalisé et ses objectifs ont même été dépassés. Sa mise en oeuvre sera poursuivie dès que les conditions du marché le permettront.
- Le gouvernement français poursuivra sa politique d'assainissement et de libéralisation. Il a pris de nouvelles mesures pour encourager l'épargne des particuliers, favoriser le développement du marché financier et renforcer la compétitivité des entreprises. Il prendra de nouvelles mesures dans le même sens en 1988.
Le gouvernement de la RFA a porté le montant des réductions fiscales pour 1988 et au-delà à environ 14 Mds DM, et ne cherchera pas à compenser les pertes de recettes budgétaires entraînées par les récents développements. En outre les décisions nécessaires ont été prises en vue d'une réforme fiscale structurelle comportant une réduction supplémentaire nette de recettes fiscales de 20 Mds DM à partir de 1990.
- Dans le but de renforcer l'investissement privé et public, le gouvernement fédéral assurera la mise en place durant les trois prochaines années de prêts spéciaux pour un montant total de 21 Mds DM à des conditions préférentielles. De plus il accélèrera les investissements d'infrastructure dans le domaine des télécommunications et prendra des initiatives en vue d'une plus grande dérégulation des marchés.
- La Bundesbank a réduit de manière substantielle ses taux d'intérêt à court terme au cours des dernières semaines. La politique monétaire continuera à maintenir les conditions appropriées pour une croissance soutenue non inflationniste.
- Le gouvernement italien a pris, dans un contexte de croissance continue et significative, des mesures temporaires pour arrêter la détérioration de la balance des paiements due à une progression de la demande interne plus élevée en Italie que dans d'autres pays industrialisés. La loi de finances pour 1988 a pour objectif de maintenir un niveau de croissance relativement élevé et de réduire l'inflation, tout en poursuivant les progrès dans la correction du déficit du secteur public.
- Pour améliorer à moyen terme la situation de l'emploi, les autorités italiennes ont l'intention d'atteindre des taux de croissance économique satisfaisants tout en maintenant la balance des paiements courants dans un équilibre substantiel, de stabiliser le montant de la dette rapporté au PIB, et de consacrer de plus amples ressources au financement des investissements productifs et d'infrastructure, ce qui améliorera la qualité des services publics.
Le gouvernement du Japon a noté que l'économie japonaise se trouvait dans une phase d'expansion vigoureuse induite par la croissance de la demande interne. Le gouvernement poursuivra avec constance la réalisation du programme de 6000 milliards de yens décidé en mai dernier et veillera à ce que dans le budget 1988 les dépenses de travaux publics ne soient pas inférieures à celles du budget 1987, le supplément de juillet inclus.
- La Banque du Japon mènera une politique monétaire appropriée et flexible pour favoriser une croissance non inflationniste et la stabilité des taux de change.
- Le gouvernement du Royaume-Uni, dans le contexte de croissance continue et vigoureuse de la production et de la demande interne que connaît l'économie britannique, et qui est liée à une situation saine des finances publiques, continuera à chercher à réduire l'inflation, en menant une politique monétaire prudente ; il augmentera simultanément ses capacités de croissance non inflationniste par le biais de mesures supplémentaires destinées à libérer le fonctionnement des marchés et à accroître l'utilisation efficace des ressources, comportant notamment des réductions d'impôts et une réforme fiscale. Les dépenses publiques continueront à croître moins rapidement que l'économie dans son ensemble, et le gouvernement continuera à oeuvrer au démantèlement des barrières commerciales, à la fois au sein de la Communauté Européenne et dans le contexte de l'Uruguay Round du GATT.
Le gouvernement des Etats-Unis a engagé la procédure législative nécessaire à la mise en oeuvre de l'accord entre le Président et les responsables des deux partis du Congrès sur un programme biennal d'économies budgétaires en vue de réduire le déficit budgétaire américain. Cet accord prévoit des économies budgétaires totales d'environ 76 milliards de dollars pour les années budgétaires 1988 et 1989, par une combinaison de réductions des dépenses et d'une hausse de la fiscalité.
- Cet accord budgétaire est un élément du processus continu de réduction du déficit prévu par la loi Gramm-Rudman-Hollings révisée. Il renforcera les progrès déjà réalisés dans la réduction du déficit (notamment une coupe de 73 milliards de dollars, soit 1,9 % du PNB, durant l'année budgétaire 1987), progrès qui ont ramené le déficit d'un sommet de 6,3 % à 3,4 % du PNB.
- L'administration américaine continuera également à s'opposer fermement à des mesures de protectionnisme commercial, tout en travaillant à une législation qui permette des négociations tendant à favoriser un système plus ouvert et équitable d'échanges internationaux de biens, de services et d'investissements.