Déclarations de M. Pierre Moscovici, ministre délégué aux affaires européennes, en réponse à des questions sur le refus de l'Irak de coopérer avec la commission de l'ONU sur le désarmement, à l'Assemblée nationale les 12 et 18 novembre 1997.

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Circonstance : FRANCE-PARIS-ASSEMBLEE NATIONALE

Texte intégral

En soulevant cette question, vous avez aussi émis une opinion sur ce qui se passe en Iraq qui traduit aussi des interrogations que l'on peut avoir. La France est attachée au respect de toutes les résolutions des Nations unies. Je dis bien, toutes. C'est là où intervient la crise actuelle. Qu'est-ce qui la fonde ? Ce qui a provoqué cette crise, c'est justement le fait que le 29 octobre, l'Iraq ait pris la décision d'expulser les experts, américains certes, mais appartenant à la Commission spéciale des Nations unies mise en place pour vérifier le processus de désarmement de l'Iraq et que, de plus, l'Iraq ait aussi décidé d'interdire à l'avion U2 qui travaille, là encore pour les Nations unies, de survoler son territoire.

Ces décisions ont été unanimement condamnées le même jour par le Conseil de sécurité qui a adopté une résolution, une déclaration exigeant des Iraquiens une coopération sans condition ni restriction avec la Commission spéciale. Quelle est dans cette affaire la position de la France aujourd'hui, puisque telle est votre question ?

Depuis le début de la crise, la France a appelé et continue d'appeler l'Iraq à rapporter ces décisions, qui sont des décisions inacceptables, car contraires aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. A notre sens, les décisions iraqiennes ne peuvent que retarder précisément le moment où les Nations unies seront en mesure de constater les progrès du désarmement en Iraq et de lever les sanctions qui frappent effectivement et durement - vous avez attiré l'attention là-dessus - le peuple iraquien. C'est cela l'esprit de la déclaration franco-russe qui a été adoptée par MM. Védrine et Primakov lors de la visite du Premier ministre à Moscou. La position française dans toute cette affaire est donc que seule une coopération et effective avec la Commission spéciale pourra permettre la mise en oeuvre du paragraphe 22 de la résolution 687, auquel, je suis sûr, vous êtes attachés, et qui précise que la levée de l'embargo suppose effectivement cette coopération et un processus de désarmement complet. Notre politique toute entière vise à assurer la réinsertion de l'Iraq au sein de la communauté internationale. Elle vise aussi à vérifier que les obligations fixées par les résolutions auront été remplies. Notre approche générale est que les mesures qui pèsent sur l'Iraq ont justement pour objectif de l'inciter à modifier son comportement dans le sens d'une plus grande coopération, seule à même de préserver une perspective de sortie du système des sanctions. Pour ce qui concerne le vote d'aujourd'hui aux Nations unies, il y a un projet qui est sur la table, qui semble recueillir un accord, soyez, en tout cas, certains d'une chose : la France est attachée à l'application de toutes les résolutions, de tout le droit international, et qu'elle est également très attachée à l'unanimité du Conseil de sécurité. Ce sera notre attitude aujourd'hui comme cela l'a été hier.


(source http://www,diplomatie,gouv,fr, le 26 septembre 2001)
Vous avez raison, la situation en Iraq est extraordinairement préoccupante. Je ne rappelle pas, car j'ai eu l'occasion de le faire ici-même, la genèse de l'affaire, à travers notamment la remise en cause par Bagdad, de la présence des experts américains au sein de la Commission spéciale le 29 octobre.
Depuis, c'est dans le cadre des Nations unies, et en relation avec nos partenaires, que nous agissons. Nous avons incité, par tous les moyens possibles, l'Iraq à rapporter ses décisions, qui sont des décisions inacceptables, car contraire au droit international.
Nous avons ensuite, constatant cette impasse, agi dans le cadre des Nations unies, en soutenant la résolution du Conseil de sécurité du 12 novembre, la résolution 1137, qui met en oeuvre des sanctions nouvelles mais limitées - interdiction de tout voyage pour les Iraquiens responsables de la non-coopération avec la Commission spéciale, au premier chef.
J'insiste sur le fait, car vous avez parlé des souffrances du peuple iraquien, que l'application de cette résolution ne remet nullement en cause, et n'a aucun impact sur la population iraquienne, et que notamment, nous continuons à militer pour le meilleur fonctionnement possible de la résolution 986, "pétrole
contre nourriture".
Il demeure que l'Iraq ne bouge pas, ou ne bouge pas suffisamment, et donc que pour nous, toute action doit être examinée au sein du Conseil de sécurité. C'est ce que nous faisons en continuant de soutenir ces efforts et en plaidant pour qu'il y ait une très grande unité au sein du Conseil de sécurité.
Enfin, la France a une diplomatie, et le ministre des Affaires étrangères est en contact permanent avec toutes les parties. Il a eu des contacts téléphoniques très récents avec ses homologues américain, britannique et russe, et nous essayons de trouver une solution. M. Tarek Aziz est également passé à Paris le 10 novembre. Nous incitons les Iraquiens à rapporter, encore une fois, leurs décisions. Car une chose doit être claire.
Il suffit que l'Iraq revienne sur ces décisions du 29 octobre pour que la crise cesse et que s'applique intégralement, comme nous le souhaitons, la résolution 687, c'est-à-dire celle qui est fondatrice en la matière, notamment son paragraphe 22, qui stipule qu'une fois que l'Iraq a rempli ses obligations, alors, à ce moment-là, les mesures qui le visent, y compris l'embargo, pourront être rapportées.
Mais c'est bien de cela dont il s'agit. Nous agissons donc dans le cadre du Conseil de sécurité, et par les moyens diplomatiques pour faire en sorte que l'Iraq revienne à la raison et applique le droit international, mais ceci dans le cadre d'un dialogue permanent et en cherchant à faire descendre la tension.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 25 septembre 2001)