Texte intégral
Madame la présidente, Monsieur le directeur général, Monsieur le directeur général adjoint,
Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux que ma première sortie en qualité de ministre du commerce extérieur ait lieu au CFCE et je remercie sa présidente de m'offrir ainsi l'occasion de venir à votre contact peu de temps après ma prise de fonctions. Je me réjouis également de retrouver à cette occasion l'Agence française de développement, dont je suis un ancien administrateur et que j'ai donc eu l'occasion de bien connaître en d'autres temps.
J'ai pu au cours de cette matinée faire mieux connaissance avec le CFCE et les produits qu'il propose aux entreprises. J'ai constaté à cette occasion combien cet organisme s'efforce d'être en permanence à l'écoute des besoins des entreprises et à leurs côtés pour toujours mieux les conseiller et les aider dans leurs démarches d'exportation. Il est l'interface en France des 154 missions économiques à l'étranger du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et dont l'une des missions principales est de servir nos entreprises sur les marchés étrangers. Je suis pour ma part convaincu que les pouvoirs publics doivent, autant que c'est possible, être aux côtés des entreprises pour les aider à surmonter les obstacles de toute sorte, notamment administratifs, qui freinent leur développement et leur croissance. C'est en tout cas comme cela que je comprends mon rôle de ministre du commerce extérieur. Sachez que je compte bien m'investir totalement en ce sens à vos côtés.
Ce séminaire est pour moi l'occasion de constater que le CFCE sait adapter avec intelligence ses produits aux interrogations des exportateurs. On me dit en effet que c'est la première fois que le CFCE consacre un séminaire à l'Agence française de développement, sa stratégie et ses procédures - même si, par le passé, des responsables de cet organisme sont venus présenter les projets qu'il finance dans tel ou tel pays. Votre présence à tous ici est en tout cas un témoignage de l'utilité de cette nouvelle initiative.
Il me paraît en effet particulièrement justifié que les entreprises qui prennent le risque d'investir dans des pays en développement reçoivent de la part des pouvoirs publics le meilleur soutien.
Mon sentiment est en effet que notre commerce extérieur reste très concentré dans une zone géographique limitée, principalement européenne. Il doit ouvrir de nouveaux marchés. La France réalise plus des trois quarts de ses échanges commerciaux avec les pays de l'OCDE, dont 60 % avec les pays de l'Union européenne. Notre commerce avec le continent africain représente seulement 5 % de nos échanges. Avec les pays les moins avancés, qui sont les pays les plus pauvres de la planète, nos échanges sont inférieurs à 2 %. Nos flux d'investissement direct vers l'Afrique étaient de 0,4 % en 2000, tandis que les stocks d'investissements vers ces pays étaient de 1,3 % en 1999. Notre présence commerciale dans l'ensemble des continents doit mieux s'affirmer. Pour établir la croissance en France, il faut que nous développions notre commerce avec des pays en forte croissance, ou disposant d'une croissance forte potentielle. Mais je ne veux pas minimiser les difficultés d'un tel exercice : je sais bien, selon l'exemple fameux, qu'un franc - mais je dois dire maintenant un euro - est bien plus difficile à investir au Sénégal qu'en Suède. L'investissement dans les pays les moins favorisés, ou l'engagement de relations commerciales avec ces pays, comporte une part de risque non négligeable que les pouvoirs publics se doivent de réduire autant que possible.
En effet, à travers les relations commerciales que vous développez avec ces régions, vous êtes, vous tous représentants d'entreprises, de toutes dimensions et de toutes origines géographiques, bien plus que des commerçants, des " businessmen " ou " women ". Vous êtes bien plus que des responsables d'entreprises soucieux du seul développement de votre entreprise, - ce qui constitue un souci légitime. Vous êtes les vecteurs de la politique publique d'aide au développement. Vous participez directement à la réalisation de cette politique, dans laquelle le nouveau gouvernement a déjà commencé à s'engager pleinement. Vous êtes les porteurs de cette " mondialisation humanisée " que le Premier ministre a appelée de ses vux dans son discours de politique générale.
Vous connaissez donc déjà les liens qui unissent intimement le commerce et l'ensemble des politiques d'aide au développement. Vous le savez bien, dans la plupart des pays en développement, les besoins en investissements sont illimités, et la formation brute de capital fixe est insuffisante. La part d'investissement dans le budget public doit être augmentée. Toute action commerciale dans ces pays s'accompagne dès lors de négociations avec les autorités locales. Les investisseurs dans les pays en développement doivent bénéficier d'un accompagnement des pouvoirs publics. Et parallèlement, pour que le commerce international aide efficacement les pays en développement à se développer en respectant leurs identités, il faut que les pouvoirs publics fixent des règles d'accompagnement du commerce.
C'est tout le sens de l'action que la France développe sur le plan international : nous voulons que la libéralisation des échanges s'accompagne de la mise en place d'une régulation. Ces règles devront ainsi préserver :
- les droits sociaux fondamentaux, notamment les conventions de base de l'Organisation internationale du travail,
- l'environnement : nous militons en faveur de la création d'une organisation mondiale de l'environnement, sur le modèle de l'OMC, et appelons nos partenaires à mettre en uvre la convention de Kyoto sur le climat,
- la santé : nous avons engagé plusieurs initiatives pour lutter contre les grandes pandémies, sida, malaria, tuberculose, qui créent des ravages sur tous les continents.
La communauté internationale, aussi bien le G8 que les organisations multilatérales comme l'Organisation mondiale du commerce, commence désormais à admettre le bien-fondé de nos appels à la régulation internationale. Sous l'impulsion de la France au sein de l'Union européenne, les membres de l'OMC ont accepté, lors de la conférence ministérielle qui s'est tenue à Doha à la fin de 2001, d'intégrer pour la première fois dans les futures négociations commerciales multilatérales des problématiques nouvelles telles que la lutte contre les maladies pandémiques dans les pays en développement. De même a été accepté l'engagement de négociations qui permettront, pour la première fois, d'aborder la problématique du lien entre le commerce et la protection de l'environnement.
D'autres règles telles que la protection de l'investissement, la lutte contre les monopoles, les marchés publics, s'ajouteront à celles qui existaient déjà comme par exemple en matière de protection de la propriété intellectuelle. Elles constitueront autant d'instruments nouveaux qui pourront permettre de mieux asseoir des investissements nouveaux dans les pays en développement et ainsi aider ces pays à trouver le chemin de la croissance.
L'idée de régulation de la mondialisation, d'accompagnement des actions commerciales par d'autres actions, y compris concertées avec les pays pauvres, est au coeur du message que le Président de la République a adressé à l'Afrique, lors du sommet du G7 qui s'est tenu fin juin au Canada. Avec cette région du monde, il a demandé à construire un partenariat " d'un type nouveau, ni complaisant ni rhétorique, mais généreux, précis et exigeant ". L'aide au développement était jusqu'alors plutôt conçue comme un don. Peu à peu est apparue la nécessité de transformer cette aide en investissement structurant, favorisant l'environnement des affaires. C'est ainsi qu'il a été décidé par le G7 de privilégier l'octroi de l'aide publique au développement aux pays d'Afrique qui s'engagent à créer les conditions nécessaires à l'investissement privé. Cela pourrait prendre, dès 2003, la forme de contributions des pays du G7 destinées à favoriser la définition de projets d'investissement, compléter les tours de tables ou garantir les opérations en capital. Au-delà, les bailleurs de fonds souhaitent ainsi aider les producteurs africains à satisfaire aux normes des marchés d'exportation, favoriser le renforcement des organismes de crédit à l'exportation en Afrique, apporter les informations nécessaires sur les marchés de débouchés potentiels.
Le commerce avec les pays en développement est donc, comme la mondialisation, devenu global : impossible de penser ou d'agir en termes strictement commerciaux, il faut associer les objectifs, les moyens et les acteurs.
Ce faisant, les pouvoirs publics ne peuvent évidemment se dispenser d'aider les entreprises qui coopèrent dans cette politique de développement à atteindre leur finalité propre, c'est à dire la réalisation d'un chiffre d'affaires leur permettant de se rémunérer et d'assurer leur pérennité. C'est pour le pays la condition de la croissance. Il faut que nous nous engagions à vos côtés pour que vous tiriez le meilleur profit des dispositifs existants, qu'ils soient nationaux, communautaires ou multilatéraux.
A cet égard, le nouveau dispositif mis en place dans mes services constitue un pas important pour mieux répondre aux préoccupations des entreprises. Les différents services à l'étranger du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ont été fusionnés dans de nouvelles entités, les missions économiques. Désormais, tous les services de l'Etat à l'étranger travaillent en étroite collaboration avec les grands bailleurs de fonds multilatéraux, la Banque mondiale et les banques régionales de développement, qui représentent une part croissante de l'aide au développement. Le rapprochement de ces services est un gage d'efficacité, de synergie, de transparence de l'information. Il vous permettra de disposer d'une information plus complète pour mieux utiliser les financements internationaux. Une meilleure coopération entre administrations françaises était indispensable.
Je comprends par ailleurs que cette préoccupation est pleinement partagée par l'AFD et je ne puis que m'en réjouir. Nous poursuivons ensemble des objectifs convergents au service des entreprises. Ainsi, le déliement de l'aide, qui a été décidé par le précédent gouvernement devrait, c'est en tout cas ce qui a sous-tendu la décision, vous permettre aussi d'accéder à des financements étrangers qui vous étaient fermés jusqu'alors. Cette décision devrait également permettre aux entreprises françaises d'échapper au soupçon injuste de bénéficier de chasses gardées qui pesait finalement sur vous. Au total, vous devriez donc être bénéficiaires de cette décision.
De même, les orientations stratégiques définies par l'AFD tiennent bien compte, me semble-t-il, à la fois de vos intérêts d'entreprise et des besoins des pays en développement. En effet, l'agence a décidé de concentrer son action dans des domaines d'excellence française consacrée sur le plan international, tels que par exemple l'eau et l'assainissement, où vous avez su développer un savoir-faire inégalé. Je constate que ces secteurs sont largement représentés parmi vous. Ces domaines sont dans le même temps, et l'on ne peut que s'en réjouir, évidemment vitaux pour les pays en développement.
La réorientation géographique de l'AFD, qui souhaite élargir son champ d'action géographique en s'ouvrant aux pays émergents, devrait également rencontrer vos objectifs propres de développement.
Et, je le cite en dernier mais ce n'est pas le moindre exemple de cet engagement de coopération entre commerce et développement, l'AFD vous aura peut-être indiqué ce matin que la France a décidé de lancer un programme bilatéral d'aide au renforcement des capacités commerciale des pays pauvres, notamment en Afrique. Ce programme portera sur la période 2002-2005 et pourrait être doté d'un montant total de 30 millions d'euros. Il vise en particulier à permettre aux pays africains de gérer au mieux leur insertion dans les échanges internationaux et à bénéficier des avancées résultant des cycles de négociations commerciales multilatérales, passés et à venir. Sa mise en uvre opérationnelle vient d'être confiée par la Direction des relations économiques extérieures à l'AFD, au travers de la signature d'une convention DREE-AFD qui définit les modalités pratiques d'application de ce programme. Voilà clairement un exemple des améliorations que l'on peut apporter à notre dispositif public.
Ce programme s'inscrit naturellement dans la dynamique du plan d'action pour l'Afrique adopté par le G8 dont je vous parlais à l'instant.
Votre action, vous le voyez donc bien, est déterminante non seulement pour votre entreprise, mais aussi pour la réussite des objectifs de notre pays. Vous enrichissez la France, vous lui permettez de tenir une place reconnue au niveau international. Et vous êtes le meilleur témoignage de solidarité et d'amitié que notre pays, fidèle à sa tradition séculaire, doit continuer à porter dans le monde.
Je veux aussi vous assurer de mon écoute constante pour que vous m'aidiez à améliorer encore notre dispositif. Tout cela, j'en suis bien conscient, est perfectible. Il faut coordonner nos actions, adapter en permanence nos stratégies, assurer la meilleure information, répondre aux nouveaux défis de la concurrence internationale. Il faut aussi que vous m'informiez sur les comportements des entreprises étrangères, des financeurs et des autres Etats qui interviennent sur vos marchés.
Vous seuls, sur le terrain, pouvez me dire ce qu'il faut faire pour être mieux à la hauteur des défis qui nous attendent. Sachez que moi-même et mes collaborateurs sommes à votre disposition pour vous écouter et pour répondre à vos demandes et à vos besoins.
(source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 24 juillet 2002)