Déclaration de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, sur les différentes composantes du budget 2000 de son ministère, Paris, le 17 septembre 1999.

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Mesdames, Messieurs,
C'est le troisième projet de budget que je présente. Cela me donne l'occasion de souligner les priorités auxquelles je me suis attachées, avec Louis BESSON et Michelle DEMESSINE qui me prie de l'excuser : elle inaugure en effet aujourd'hui le salon nautique de La Rochelle.
Vous trouverez dans le dossier toutes les précisions nécessaires. Et, si vous avez des questions, nous vous répondrons bien volontiers, Louis BESSON et moi-même.
Le champ de ce ministère recouvre des activités très nombreuses, ancrées dans des cultures et traditions fortes et diversifiées : le monde des bâtisseurs de routes n'est pas celui de l'aviation civile ou des ports maritimes, qui sont encore différents de celui du logement social. Mais, bien sûr, tous contribuent à équiper et moderniser ce pays, à répondre aux besoins essentiels de ses habitants en
terme de logement et de déplacement et à améliorer leur vie quotidienne.
Je ferai une présentation générale du projet de budget avant de laisser à Louis Besson le soin de développer les mesures intéressant le logement.
En tenant compte de toutes ses composantes, le projet de budget dont je dispose dans le projet de loi de finances pour 2000 s'élève à plus de 147 milliards de francs, ce qui représente une augmentation de 2,5 % par rapport à 1999. Encore faut-il préciser que, pour des raisons d'homogénéité des comparaisons d'une année sur l'autre, ce chiffre n'inclut pas la dotation de 12 milliards de francs à Réseau Ferré de France, apportée par l'État en application de l'engagement triennal destiné à maîtriser l'endettement du système ferroviaire.
De même, ne sont pas comprises dans les 147 milliards F les dotations du FARIF (Fonds d'Aménagement de la Région Île-de-France), dans la mesure où, en 2000, le FARIF sera clôturé pour faire place à des crédits budgétaires de même montant.
Ainsi, de manière globale -crédits budgétaires et diverses dotations confondues- les crédits disponibles pour l'an 2000 représentent plus de 160 milliards de francs.
La capacité d'intervention du ministère est notablement accrue. Comme vous le constatez, les crédits de mon département ministériel enregistrent une progression supérieure à celle des dépenses du budget de l'État, qui est -je vous le rappelle- de 0,9 % c'est-à-dire la stabilité en volume.
Le budget de l'urbanisme et du logement avec près de 48 milliards de francs de crédits de paiement, progresse de 5,3 % ce qui témoigne de l'importance que le Gouvernement -à la suite de la déclaration de politique générale du Premier Ministre en juin 1997- attache à cette intervention de l'État, essentielle pour la vie quotidienne des français, et notamment les plus modestes d'entre-eux.
Ce budget permet une relance significative de la construction de logements sociaux. En particulier grâce au prêt locatif à usage social, le "PLUS". Ce nouveau prêt a pour objectif de contribuer, à côté d'autres dispositifs, à relever le défi de la mixité sociale.
La ligne des aides personnelles au logement, qui bénéficient à la population la moins aisée, est dotée de 34,3 milliards de francs en 2000. Le pouvoir d'achat de ces aides, loin de diminuer, est maintenu grâce à l'actualisation régulière des barèmes.
Il y a un an, en juillet 1998, était voté la loi contre les exclusions. Les engagements de financement sont tenus avec une enveloppe de 718 millions de francs qui va au fonds de solidarité logement, à l'aide à la médiation locative et aux associations d'hébergement temporaire.
Les moyens pour les logements d'urgence sont maintenus et de nouveaux moyens ouverts pour prévenir le saturnisme.
Je voudrais néanmoins mentionner les mesures fiscales prises en faveur du logement. Ces mesures représentent 28 milliards de francs environ de réduction d'impôts. Je n'insiste pas. Vous le savez -la presse s'étant emparée de ce sujet depuis déjà quelques semaines- j'ai souhaité et -à mon modeste niveau- un peu contribué à la baisse du taux de TVA sur les travaux d'entretien dans les logements, ainsi qu'à la suppression du droit au bail ou encore à la baisse des droits de mutation sur les biens immobiliers. Louis BESSON vous en parlera plus en détail si vous le souhaitez.
Je dirais seulement que ces mesures concilient plusieurs objectifs : l'efficacité et la simplification et, ce qui compte le plus à mes yeux, l'équité. Elles concernent un grand nombre de français, près de la moitié des ménages qui s'intéresseront sans doute un peu plus à la loi de finances parce qu'ils y "trouveront aussi un peu leur compte". Et, c'est là, pour notre démocratie, autant que pour des raisons sociales ou économiques, une avancée qui me semble très importante.
En ce qui concerne le tourisme, le bilan de la saison qui s'achève est brillant. La France confirme sa place au premier rang mondial des pays d'accueil. Michelle DEMESSINE a déjà eu l'occasion de l'exposer à certains d'entre vous.
L'impulsion publique dans ce secteur passe d'abord par la coordination des partenaires publics et privés mais aussi par l'outil budgétaire. Celui-ci n'a pas été négligé puisque les dotations au tourisme augmentent pour la deuxième année consécutive de plus de 7 %.
J'en viens maintenant au secteur de l'Équipement et des Transports, qui connaît avec 99 milliards de francs environ, une forte progression de ses moyens d'engagement (+ 2,6 %).
La reconstitution de la capacité d'investissement du ministère est un des points forts du budget 2000, qui engage l'avenir. Le montant des autorisations de programme progressera considérablement, de 8,1 %, pour atteindre 15,3 milliards de francs.
Sur 3 ans, la progression annuelle moyenne a été de 5,7 %. De fait, le ministère de l'équipement est le premier par les investissements civils qu'il finance. C'est ma responsabilité de maintenir cette capacité, de la développer et de bien l'employer.
La restauration des moyens d'engagement du ministère peut ainsi accompagner un partenariat rénové avec les collectivités territoriales, fondé à la fois sur la nouvelle génération des contrats de plan entre l'État et les régions -qui vont commencer en 2000- et sur une contractualisation permettant d'associer, au financement bien sûr, mais aussi au processus de décision, divers partenaires publics autour d'un grand projet d'intérêt national comme par exemple le TGV -est européen ou Port 2000-.
Conformément à la politique engagée depuis février 1998, l'augmentation des crédits d'investissement bénéficie au premier chef au transport ferroviaire et combiné. Ce mode de transport bénéficiera de 2,3 milliards de francs, ce qui représente un doublement en trois ans. C'est la montée en puissance du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) et l'accentuation de son caractère de redistribution intermodale qui permet de dégager ces moyens d'investissement : la route (par l'intermédiaire de la taxe d'aménagement du territoire) finance le fer.
Pour la première fois en 2000, les crédits du FITTVN seront affectés pour plus de la moitié (53 %) au transport ferroviaire et combiné.
Le développement du fret ferroviaire et le soutien au transport combiné seront encouragés notamment par une augmentation des subventions aux opérateurs, dans l'objectif de doubler en dix ans le volume de marchandises transportées par la voie ferrée.
Dans les grandes agglomérations, le développement des transports collectifs constitue une véritable exigence sociale, pour maintenir l'échange et la solidarité dans la ville. C'est aussi une exigence pour améliorer la qualité de la vie. C'est aussi un choix économique raisonnable.
En Île-de-France, l'État contribuera au fonctionnement des transports urbains à hauteur de 5,4 milliards de francs et investira, dans le cadre du futur contrat de plan, 470 millions de francs. Là encore, l'augmentation des crédits est importante : + 36 %.
Pour la province, l'aide à l'investissement pour les tramways, métros et bus en site propre continue à progresser, si bien que les moyens d'engagements se sont accrus de près de 30 % depuis 1997 pour atteindre près de 750 millions F.
Le réseau routier national demeure le premier poste d'investissement en infrastructure de transport de ce ministère. Les négociations des contrats de plan avec les régions ont révélé la permanence d'une forte exigence d'amélioration, de sécurisation et de poursuite de la modernisation du réseau routier. Nous pourrons y faire face avec, pour 2000, une enveloppe de 3,6 milliards de francs d'autorisations de programme. Il s'agit là d'une croissance très importante (+17 %), qui permettra d'engager un plus grand nombre d'opérations et, si ce rythme est maintenu, de tenir les engagements de l'État.
Par ailleurs, les grandes opérations de désenclavement du massif Central que sont l'autoroute A 75 Clermont-Ferrand/Béziers-Montpellier et la RN 7 entre Nevers et Roanne et les travaux de mise en sécurité de la RN 10 dans les Landes seront poursuivis , ainsi que les travaux de la Route Centre Europe Atlantique (RCEA).
A propos de l'investissement, j'ai entendu, la fédération nationale des travaux publics nous prédire une baisse de 6 200 emplois dans le secteur des travaux publics, du fait d'une prétendue baisse de crédits de paiement. C'est oublier que l'essentiel dans la loi de finance, ce sont les autorisations de programme, qui permettent les engagements de chantiers et de travaux pour l'avenir. C'est aussi oublier, que le secteur des travaux publics ne se limite pas à la route mais inclut également les infrastructures ferroviaires, les ports ou les transports collectifs. C'est, enfin, oublier que les crédits de paiement, c'est en loi de finance rectificative de fin d'année que nous les obtenons. Je ne doute pas que l'importance des recettes fiscales en 1999 me permettra d'obtenir un volume très significatif de crédit de paiement.
Si notre réseau peut être légitimement un motif de fierté, nous devons faire face à l'insécurité routière dans notre pays. Les moyens budgétaires de la sécurité routière sont en hausse de 17 %.
Je voudrais évoquer longuement les professionnels de la route que sont les transporteurs routiers. Les dispositions de la loi du 6 février 1998, votée à l'unanimité je vous le rappelle, sont maintenant en cours de mise en oeuvre. Le remboursement d'une fraction de la taxe intérieur sur les produits pétroliers (TIPP), qui avait été institué par la loi de finances pour 1999 est reconduit.
En ce qui concerne le transport fluvial, dont je reste persuadé qu'il peut et doit être plus utilisé. Les crédits disponibles sur le FITTVN sont en augmentation de plus de 40 % depuis 3 ans.
Là aussi, le transport combiné est encouragé, comme cela a été fait, par exemple, sur la Moselle où 4 lignes nouvelles ont été ouvertes pour le transport de conteneurs.
Concernant la batellerie, le budget 2000 prévoit une dotation de 13 millions de francs qui permettra d'accompagner la réorganisation de l'offre de transport fluvial, notamment avec la suppression du "tour de rôle".
Grâce à une dotation qui atteindra 500 MF au titre du FITTVN, au lieu de 450 MF en 1999 (soit une augmentation de plus de 40 % depuis 1997) à laquelle il convient d'ajouter les ressources propres de Voies navigables de France (VNF), l'effort en faveur de la restauration du réseau existant sera accentué en particulier sur les voies présentant un fort enjeu pour le transport de marchandises mais aussi sur celles intéressant le tourisme fluvial dont les enjeux en termes économiques et en termes d'aménagement du territoire sont essentiels.
L'amélioration du niveau de sécurité est un objectif central qui vaut pour tous les modes de déplacement, dans le domaine maritime et portuaire avec le renforcement des crédits des centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS) ou de ceux réservés à l'entretien des chenaux d'accès. Cette sécurité - qui conditionne l'accès dans les ports maritimes - est d'ailleurs une condition essentielle de leur compétitivité.
De manière générale, les infrastructures portuaires et le littoral font l'objet d'une première remise à niveau budgétaire : ainsi, 220 Millions de F ont été réservés pour 2000 au démarrage de la première tranche des travaux de " Port 2000 " au Havre, pour faire face à la croissance soutenue du trafic de marchandises conteneurisées.
Je suis heureux de vous confirmer que l'opération de désensablement du Mont-Saint-Michel, destinée à lui conserver son caractère maritime, fait l'objet des premiers financements dans le PLF 2000.
Enfin, je ne voudrais pas clore ce chapitre consacré à la mer sans évoquer la mise en place du service public de l'enseignement maritime, avec l'ouverture de 315 emplois publics permettant d'accueillir progressivement les agents de l'Association de Gérance des Écoles Maritimes et Aquacoles (AGEMA).
Je voudrais terminer ce tour d'horizon intermodal par le transport aérien.
Nous sommes confrontés à une croissance très forte du trafic aérien, bénéfique bien entendu pour les compagnies aériennes et notamment Air France, mais générateurs de certains dysfonctionnement qu'il nous appartient de surmonter. Nous devons en particulier mettre à niveau les moyens de contrôle de la navigation aérienne pour maintenir un très haut niveau de sécurité.
Cette nécessité, qui s'est traduite dans le dernier protocole signé avec les contrôleurs aériens, conduit à poursuivre les créations d'emplois. 182 recrutements sont ainsi prévus, dans le cadre du budget annexe de l'aviation civile, pour pallier notamment les départs massifs à la retraite à partir de l'an 2000.
De plus, je puis vous annoncer que, compte tenu de la situation, -les retards importants d'avions-, due à la croissance du trafic aérien, je viens d'obtenir 30 emplois supplémentaires, à recruter dès 1999.
J'attache une grande importance à la préservation, dans le budget de l'État, des moyens de soutien à l'industrie aéronautique. L'engagement de poursuivre le développement de la gamme Airbus, notamment dans le domaine des gros porteurs, est concrètement affiché dans le budget avec les autorisations de programme nécessaires.
Pour terminer, je voudrais vous dire que l'action de ce ministère est d'abord l'oeuvre de son personnel. Ce ministère s'appuie sur une grande administration de plus de 11O 000 agents au total, femmes et hommes, implantés sur l'ensemble du territoire, et dont la compétence et le sens du service public sont très appréciés des citoyens, des élus et des partenaires professionnels.
L'habitude avait été prise depuis plusieurs années de "redéployer" les effectifs de fonctionnaires. Le ministère de l'Équipement est sans doute celui qui a le plus contribué à ce redéploiement.
Une telle constance dans la réduction des effectifs ne pouvait que conduire à affaiblir le service public et à ôter au ministère de l'Équipement les moyens d'accomplir ses missions au service des citoyens. Là aussi, le dialogue et l'échange au sein du gouvernement ont permis de commencer à rompre avec le dogme de la réduction systématique des effectifs .
Après la suppression de 1000 emplois par an puis un premier infléchissement en 1999 avec 490 emplois supprimés, cette tendance est amplifiée et consolidée avec un nombre de suppressions encore en diminution en 2000 (soit 385) dans le secteur de l'équipement.
Au total, les effectifs de l'ensemble du ministère seront affectés d'une baisse de - 0,18 %, soit 6 fois moins que lorsque nous sommes arrivés.
En guise de conclusion, alors que nous entamons la troisième année de la législature, je crois pouvoir dire que nous avons fait avancer plusieurs dossiers.
J'insisterai sur deux dispositifs, actuellement en cours de mise en place, qui, chacun à leur manière, contribuent à renouveler et à enrichir la démocratie. Je veux citer :
d'une part, le Conseil supérieur du service public ferroviaire (CSSPF), partie intégrante de la "réforme de la réforme" du système ferroviaire,
d'autre part, l'autorité de contrôle des nuisances sonores des aéroports (l'ACNUSA), autorité indépendante dotée de pouvoirs de contrôles et de sanctions, comme l'a souhaité le Parlement.
D'autres dossiers sont encore devant nous :
la réforme du financement des sociétés concessionnaires d'autoroutes, sur le point d'aboutir ;
plus largement, la recherche du bon équilibre entre une forte demande communautaire d'ouverture des frontières et de compétitivité dans l'espace européen et le développement d'activités de service et de transports publics -qui, jusqu'à présent, n'avaient pas ou peu cherché à exercer leurs missions en dehors des frontières nationales- constitue, pour l'avenir, un enjeu très important. On sait mon attachement à promouvoir et à développer les entreprises publiques nationales dans ce but.
Enfin, parmi les dossiers qui sont encore devant nous, il y a celui du projet de société dont nous avons besoin pour les mois et les années qui viennent. Je suis convaincu que celui-ci s'inscrit dans un autre rapport à la Ville :
c'est dans la ville que peut se reconstruire le lien social et se renouveler la participation des citoyens à la vie publique ;
l'aménagement du temps et de l'espace urbains est, à mes yeux, le fondement même des missions de ce ministère car elles sont garantes de la qualité de la vie quotidienne de nos concitoyens.
Comme l'a demandé le Premier ministre, Louis BESSON et moi présenterons en janvier prochain un projet de loi sur l'Urbanisme, l'Habitat et les déplacements, à la mesure des ambitions que nous formons pour la Ville et la reconstruction du lien social et démocratique.
Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques indications que je souhaitais vous apporter à l'occasion de la présentation du budget.

(source http://www.Equipement.gouv.fr. le 24 septembre 1999)