Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, sur la formation des officiers de sapeurs pompiers à l'école d'Aix-les-Milles, Nainville-les-Roches le 27 juin 2002.

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Mesdames et Messieurs les officiers,
Vous venez de recevoir les insignes de vos promotions ; c'est un moment très important que je suis heureux de partager avec vous.
Cette école nationale supérieure d'officiers de sapeurs pompiers que vous quittez aujourd'hui a formé, depuis près de vingt ans des milliers d'officiers, et a su devenir une référence pour la sécurité civile. Je suis donc confiant pour son avenir, assuré de votre avenir.
J'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'exprimer ma considération, et celle de tous les Français, pour le travail des sapeurs pompiers, qu'ils soient professionnels ou volontaires. Je l'ai fait, notamment, à Valabre, il y a trois semaines, à la veille de la nouvelle campagne de lutte contre les feux de forêt. J'ai rencontré là des hommes et des femmes remarquablement motivés, formés, et organisés.
Je l'ai fait naturellement, il y a quelques jours à peine, lors de la journée du 22 juin dédiée aux sapeurs pompiers. J'ai tenu à les remercier tous pour leur dévouement et leur compétence. J'ai tenu aussi bien sûr à rendre hommage à la mémoire des 17 victimes du feu qui ont payé l'an passé leur engagement de leur vie, et qui nous rappellent la force de ce choix, qui est aussi le vôtre. Cette journée, je crois, a été un vrai succès, et a beaucoup contribué à une prise de conscience de la nation de votre mission, une mission vouée à son service.
Mesdames et messieurs les officiers, vous avez choisi une voie exigeante, car le métier de sapeur pompier lui-même est exigeant, mais aussi parce que les fonctions de commandement le sont, aujourd'hui encore plus qu'hier.
A l'épreuve du feu, commander des hommes et des femmes exige des qualités particulières. Ces qualités s'acquièrent dans le calme et s'aiguisent dans l'action.
Elles sont nombreuses : tout d'abord, une compétence professionnelle infaillible, car votre métier ne vous donne pas droit à l'erreur. De ce point de vue, je sais que l'école nationale des officiers de sapeurs pompiers a démontré depuis vingt ans son savoir-faire, ce savoir-faire devra bien sûr évoluer, mais il est d'ores et déjà solide et reconnu, il vous sera indispensable.
Au-delà du sang froid exigé de vous, il vous faudra aussi une aptitude à coordonner dans l'urgence l'action des autres. Ceci suppose évidemment de l'autorité, de la clairvoyance, de l'implication, toutes qualités indispensables dans vos fonctions de commandement.
Mais il faut aussi savoir tirer le meilleur de chacun, et pour cela bien connaître les hommes. Je sais que cela est votre tradition, il vous faut la perpétuer, car elle est incomparable, et irremplaçable.
Et enfin, il faut avoir cette force de caractère nécessaire à votre métier, qui est fait par définition d'une succession d'échecs surmontés et de succès maîtrisés : échec lorsque l'un de vous est blessé gravement, ce qui ne peut être le prix à payer lors des opérations difficiles. Succès lorsqu'un feu est maîtrisé sans dommage, ou lorsqu'un homme ou une femme garde la vie grâce à vous.
Cette alternance de très bons et de très difficiles moments, vous la connaissez depuis que vous avez choisi votre métier, il faudra maintenant l'assumer à la tête des autres, c'est-à-dire leur servir d'exemple dans ces circonstances. Et ceci demande une force de caractère particulière.
Je ne doute pas que vous y soyez préparés. Mais je veux vous dire qu'à mes yeux ces risques que vous connaissez si bien ne vont malgré tout pas de soi, ils engagent votre personne, votre vie. Même si c'est votre choix, il y a une exigence de reconnaissance de la part de ceux pour qui vous vous dévouez.
Ensemble, il nous faut faire évoluer le comportement des Français face au danger. Il est normal que leur attente soit de plus en plus grande, car on accepte de moins en moins le risque, de même que l'on accepte de moins en moins la douleur.
Ce sont là des évolutions naturelles, mais qui ne doivent pas exclure le sens des responsabilités. La prévention des risques, qu'ils viennent de la nature, de la technique, du sport, de la conduite automobile, ou bien tout simplement de la vie domestique, doit être beaucoup plus largement diffusée et partagée. Le risque c'est non seulement l'exceptionnel mais aussi le quotidien, vous le savez bien.
Les Français doivent apprendre à l'éviter autant que possible, ou bien à le gérer au mieux. Ils se doivent de vous aider en étant plus responsables. L'institut national d'études de sécurité civile, à cet égard, a un rôle important à jouer dans l'éducation à la sécurité civile des citoyens de tous âges, de tous horizons.
Je voudrais enfin aborder la question de votre formation et de ceux qui vous succéderont. L'école nationale supérieure des sapeurs pompiers assure depuis près de vingt ans la formation, initiale et continue, des sapeurs pompiers professionnels et volontaires, ainsi que celle des personnels du service de santé et de secours médical.
Aujourd'hui, l'école doit pouvoir disposer d'installations techniques adaptées pour assurer les enseignements pratiques indispensables.
Les risques auxquels nous sommes confrontés se sont beaucoup diversifiés, qu'ils soient naturels ou issus des actions de l'homme : je pense aux tempêtes de 1999, comme aux menaces terroristes à l'anthrax, ou bien à la catastrophe d'AZF. Les risques doivent être pris en compte dans des formations adaptées.
Des installations de simulation doivent donc permettre à tous de se préparer à faire face aux situations les plus diverses, pour mieux maîtriser le moment venu des événements de nature ou d'ampleur inédite.
L'école doit donc disposer d'une aire d'entraînement pratique pour la simulation, ce qui n'est malheureusement pas réalisable à Nainville du fait des contraintes d'urbanisme. Je rappelle que le projet n'a pas pu être réalisé depuis 10 ans qu'il est évoqué.
L'implantation de l'école nationale des sapeurs pompiers sur un nouveau site est donc devenue indispensable.
Une étude très approfondie a été menée, en consultant les préfets de zone, et en faisant appel à un cabinet de conseil spécialisé : au final, ont été sélectionnés les sites de Cambrai et d'Aix les Milles. Plusieurs critères ont été considérés comme prioritaires : la palette des risques naturels et technologiques, l'environnement d'entreprises spécialisées et d'universités, la connaissance des techniques de feux de forêt, la proximité de moyens d'intervention de la sécurité civile, l'ouverture sur l'étranger. Enfin, naturellement la qualité du partenariat offert par la ville d'accueil.
Au terme d'une réflexion approfondie et en prenant en compte l'ensemble de ces critères, ce ne sont pas une mais deux réponses complémentaires qui sont aujourd'hui apportées aux besoins analysés : la création d'un pôle de sécurité civile et la création d'un pôle de défense civile.
Le site d'Aix a été retenu pour l'installation de l'école des officiers. Parallèlement à cette nouvelle installation, l'école sera transformée en établissement public, ce qui permettra de mettre en place des financements adaptés et de moderniser la gestion de l'ensemble de ses moyens.
L'accent sera mis sur l'international, afin de valoriser notre savoir-faire, qui est à juste titre très sollicité. Il devra donc être davantage valorisé.
Autour de l'école d'officiers se constituera un véritable pole de sécurité civile, mobilisant tous les moyens régionaux.
La deuxième décision concerne Cambrai, qui accueillera un pole de défense civile, avec une école nationale de formation à la lutte contre les techniques du terrorisme, un centre de recherche sur ces techniques, et dès que la loi de modernisation de la sécurité civile sera votée par le Parlement, une unité de 250 auxiliaires de sécurité civile, destinés à venir en renfort des interventions des sapeurs pompiers. Les tempêtes de 1999 ont mis en évidence la nécessité de ces renforts, qui seront bien sûr encadrés par des officiers de sapeurs pompiers.
La nouvelle école nationale d'Aix-les-Milles devra être opérationnelle le plus tôt possible. Les travaux devraient être achevés dans trois ans, mais il est important que dès septembre 2003, certaines formations puissent déjà s'y dérouler.
Pour Cambrai, j'ai désigné un directeur d'étude de projet. Il rencontrera dans les tous prochains jours les élus et les services concernés afin de mettre en place un calendrier rapide de réalisation.
Voici, Mesdames et messieurs les officiers, ce qu'il me paraissait important de dire devant vous en ce jour. Vous êtes près de 450 à terminer aujourd'hui votre formation, professionnels et volontaires, affectés à la lutte contre l'incendie, aux secours, ou au service de santé. Cette diversité d'origines et de formations, qui aujourd'hui se fondent dans une communauté de destin, est une image très précieuse pour notre pays. En son nom, je vous remercie de tout ce que vous avez choisi de faire pour lui.
(Source http://www.interieur.gouv.fr, le 28 juin 2002)