Intervention de M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie des finances et de l'industrie, et projet d'intervention de M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement, sur le réaménagement des PAP (Prêts d'accession à la propriété) du Crédit foncier et du Comptoir des entrepreneurs, Paris le 16 janvier 1998.

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Intervention de M. Dominique STRAUSS-KAHN
Mesdames, Messieurs
Je vous remercie de nous avoir rejoints, Jean Claude Gayssot, Louis Besson et moi même, avec, je crois, un préavis assez court.
Un dispositif public d'aide à l'accession à la propriété, le prêt d'accession à la propriété, le prêt PAP, a été mis en place en 1977. Il a fonctionné pendant pratiquement 20 ans et a été supprimé en 1995.
De nombreux ménages de condition modeste ont pu profiter de ce dispositif et bénéficier, grâce à l'aide de l'État, de prêts à des conditions préférentielles par rapport au marché.
Mais pour une part importante d'entre eux, ces prêts ont été souscrits avec des caractéristiques financières qui étaient celles d'une période de forte inflation ou d'inflation non encore totalement jugulée.
Aujourd'hui, pour plus de 500 000 familles titulaires d'un prêt PAP, le taux d'intérêt est très élevé par rapport aux conditions actuelles d'emprunt et les échéances continuent à croître, du fait de la progressivité.
Plus des deux tiers des prêts PAP portent un taux supérieur à 10 % et les emprunteurs doivent faire face à des échéances très lourdes.
Pour certains emprunteurs, la croissance des échéances, fixée à un moment où la France connaissait une inflation nettement plus forte, constitue une très forte menace. Des familles, dont certaines sont déjà en difficulté, craignent de ne plus pouvoir faire face, à l'avenir, à l'augmentation de leurs échéances.
Le nombreux courrier que nous recevons sur cette question est d'ailleurs très éclairant.
Certes, certains emprunteurs ont pu bénéficier de refinancements à des conditions nettement moins onéreuses sur le marché. Mais seules les familles dont la situation financière est la meilleure ont pu accéder à ces refinancements et ont même été sollicitées par certains établissements.
Les familles dont la situation financière est plus fragile ou, a fortiori, qui connaissent de graves difficultés, ne peuvent pas bénéficier de ces conditions plus favorables et n'ont d'autre solution que de continuer à supporter des taux totalement déconnectés des conditions actuelles d'emprunt et de voir croître leurs échéances à l'avenir.
Nous considérons que cette situation est inacceptable. Des centaines de milliers de familles restent bloquées dans un dispositif public conçu initialement pour les aider et qui aujourd'hui les pénalise lourdement.
La politique gouvernementale que Lionel Jospin a engagée contre l'exclusion n'était pas compatible avec le maintien de cette situation. Ainsi ce dispositif traduit notre volonté de prendre toute notre part de cette action contre l'exclusion. En particulier, ce dispositif se situe en cohérence totale avec le dossier du surendettement, dossier sur lequel avec Marilyse Lebranchu, je serai amené à faire des propositions très prochainement au Premier Ministre.
De la même manière, le traitement de ce dossier est évidemment une illustration supplémentaire de la priorité accordée au logement social que Jean-Claude Gayssot et Louis Besson mettent en oeuvre.
C'est pourquoi nous avons décidé de corriger cette situation et de prendre les mesures nécessaires pour que soient allégées les charges de remboursement des emprunteurs.
A la demande de l'État, un réaménagement d'ensemble des prêts d'accession à la propriété (prêts PAP) individuels du Crédit Foncier et du Comptoir des Entrepreneurs sera mis en oeuvre dans les prochaines semaines par les deux établissements.
Qu'est ce que cela veut dire concrètement ?
Cela signifie :
*qu'aujourd'hui, avant cette mesure la plupart des emprunteurs supportent des taux d'intérêt très élevés, proches de 10 % et fréquemment supérieurs, avec des échéances croissantes ;
*et- que demain, après cette mesure, les mensualités seront constantes jusqu'à la fin du prêt et que plus aucun emprunteur ne supportera de taux supérieur à 7 %.
Cette mesure s'appliquera sans aucun frais et, surtout, sans allongement de la durée des prêts, ce qui veut dire concrètement que, pour chaque personne concernée, le coût de l'emprunt baissera dans des proportions significatives.
Ce réaménagement sera appliqué à l'ensemble des prêts PAP individuels à taux fixe du Crédit Foncier et du Comptoir des Entrepreneurs, quelle que soit la date de souscription du prêt.
Le Crédit foncier et le Comptoir des entrepreneurs prendront dans les prochains jours contact avec les emprunteurs concernés afin de leur faire part des modalités pratiques de ce réaménagement dont la mise en oeuvre se déroulera au cours des prochaines semaines.
Cet allégement de charges représente un coût pour l'État mais permet également d'éviter les conséquences budgétaires lourdes entraînées par la vague actuelle de remboursements par anticipation. Nous considérons que la mesure que je viens de vous exposer permet d'atteindre un équilibre sur ce plan.
La mesure de réaménageaient que je viens de vous exposer est une mesure importante pour 500 000 familles, qui pourront enfin, pour certaines d'entre elles, ne plus vivre avec l'angoisse des échéances qui augmentent inéluctablement.
C'est une mesure de justice sociale.
C'est un ballon d'oxygène pour tous ceux qui étaient pris au piège d'un dispositif public calé sur un contexte économique différent et qui n'avaient plus d'espoir de pouvoir mener à bien jusqu'au bout leur projet d'accession à la propriété.
C'est, contrairement à ce qui a pu se faire en 1993, un véritable allégement de charges. On ne repousse pas les difficultés vers l'avenir, on n'allège pas les échéances à crédit.
Pour de nombreuses familles, cette mesure permettra d'éviter la spirale infernale des impayés, de la saisie et de la vente judiciaire de leur maison grâce à la stabilisation et, pour les emprunteurs les plus pénalisés, à la baisse des échéances mensuelles.
J'ai demandé au Gouverneur du Crédit Foncier de porter une particulière attention à la mise en oeuvre de ce dispositif. Je sais que ses équipes, qui ont beaucoup participé avec mes services à la préparation de cette mesure, feront preuve du savoir faire et professionnalisme qui leur sont reconnus dans la mise en oeuvre pratique du réaménageaient que je viens de vous exposer.
(source http://www.minefi.gouv.fr, le 1 août 2002)