Texte intégral
Chers amis, chers camarades,
Je vous remercie d'avoir répondu si nombreux à l'invitation de la CGT. Rhône-Alpes, c'est la deuxième région de France avec une situation géographique privilégiée qui en fait un lieu de passage et de contact, un carrefour des échanges économiques et des métissages culturels européens. Nous sommes réunis ce soir à cinq petites semaines des élections prud'homales. Cette perspective exige de conjuguer toutes nos forces : ces élections constituent un moment décisif pour affirmer la représentativité du mouvement syndical en général et celle de la CGT en particulier. Le 11 décembre, une grosse partie se jouera ici en Rhône-Alpes, et le résultat global de la CGT dépendra pour une part de votre engagement.
Défendre les droits individuels et collectifs des salariés est une des tâches fondamentales du syndicalisme. Le combat syndical est et sera toujours inspiré par le progrès du droit contre l'injustice et l'arbitraire.
Il est un homme, parmi nous ce soir, qui, plus que d'autres, envisage son avenir avec angoisse. Il a besoin de nous, de notre solidarité.
Il est chauffeur routier et syndiqué à la CGT. Il a déjà dû subir plus de 7 mois de prison alors que la procédure, qui dure maintenant depuis plus de 6 ans, ne permet aucunement de le considérer coupable des faits qui lui sont reprochés.
Lucien BERTRAND, malgré un dossier qui plaide en sa faveur, est renvoyé en Cours d'Assises où il risque 10 ans de prison et de lourdes amendes en dommages et intérêts.
Il est de notre devoir d'être vigilants, de ne pas admettre que la vindicte publique puisse s'abattre aveuglément sur n'importe quel salarié, au seul motif qu'il était présent lors de faits graves se produisant à l'occasion d'un conflit social. Il est de notre responsabilité à tous de ne pas laisser commettre une erreur judiciaire.
Je veux dire à Lucien tout notre solidarité, mais aussi notre détermination à empêcher sa condamnation qui serait une insulte à l'idée que nous nous faisons de la justice.
Chers camarades,
Chaque jour fournit son lot de motifs supplémentaires d'avoir une meilleure prise sur les événements, et le vote CGT du 11 décembre s'inscrit clairement comme un des moyens pour y parvenir.
On peut prendre la situation par tous les bouts, pour les salariés, les sources d'inquiétude sont bien plus nombreuses que les sources de satisfaction.
Que l'on se tourne du côté des stratégies des entreprises ou de l'action gouvernementale, on se heurte depuis des années aux mêmes discours obstinément rabâchés, aux mêmes mesures qui débouchent immanquablement sur de plus grandes inégalités, des gâchis et autant d'occasions manquées de façonner un univers de progrès et de justice sociale. D'autres choix, d'autres orientations sont possibles. Les salariés et le mouvement syndical doivent se mettre en capacité de les faire prévaloir.
Utopie déclareront certains ! Certes, le syndicalisme est historiquement porteur d'espoir voire d'une part de rêve, mais il est d'abord bien placé pour apprécier si les décisions qui sont prises et qui intéressent la vie de dizaines de millions de salariés et de leurs familles sont bien de nature à s'attaquer à l'insécurité sociale qui marque la société française.
La question de l'emploi reste la source d'inquiétude la plus constante des salariés de notre pays, une inquiétude que celle de l'avenir des retraites vient redoubler.
La situation est grave, ici en Rhône-Alpes comme dans les autres régions. Chacun sait bien malheureusement que, mois après mois, le chômage ne cesse d'augmenter depuis un an et demi maintenant Que cela est commun à presque tous les pays d'Europe Que personne ne voit d'amélioration prévisible avant douze ou dix-huit mois C'est une autre manière de dire qu'il faudrait encore attendre.
Le Fonds Monétaire International qui publiait la semaine dernière ses prévisions, se déclarait " déçu des performances européennes ". Venant d'un organisme financier, tristement célèbre pour sa foi inébranlable dans les vertus magiques du néolibéralisme et des remèdes de cheval qu'il a préconisés aux pays du tiers-monde, c'est à la fois inquiétant sur le fond, et " limite " provocation sur la forme !
Sa méthode c'est celle des médecins de Molière : la saignée. Quand pendant une courte période la situation s'améliore, il en attribue immédiatement le mérite à l'efficacité supposée du traitement. Quand la situation se dégrade, cela prouve la nécessité d'en accélérer le rythme ! A ce compte là, le malade risque de mourir guéri.
En quatre semaines, nous avons recensé 66 annonces de plans de suppressions d'emplois représentant plus de 37 000 postes de travail qui devraient être rayés de la carte au cours des prochains mois. Lorsque l'on égrène cette sinistre liste, cela fait penser à ces interminables appels aux morts devant les monuments des deux dernières guerres.
" Le gouvernement se mobilise " titraient les journaux ces derniers jours. Comment parler de mobilisation, lorsque dès le coup d'envoi il faut sortir le carton jaune !
Nous jugeons de l'action gouvernementale aux actes. Ainsi, les smicards n'ont pu avoir la revalorisation tant attendue de leur salaire en juillet. Dans la foulée, le gouvernement adopte une série de dispositions qui mettent fin au processus de réduction du temps de travail, en particulier pour les salariés des petites entreprises, et offrent au patronat un cadre idéal dans lequel il ne manquera pas de s'engouffrer pour généraliser les emplois à temps partiels complétés d'heures supplémentaires plus nombreuses et moins coûteuses pour les entreprises.
Volonté de revanche et manque de lucidité sur l'évolution des besoins sociaux, tout y est, mais cela n'empêchera pas que la relation entre temps de travail, temps privé et temps social doit être repensée, ni que le processus 35 heures a remis durablement l'organisation du travail au centre de l'activité revendicative. La flexibilisation, les flux tendus, l'extension du travail posté, du travail des samedis et des dimanches et du temps partiel contraint, et la mise sous tension permanente du personnel d'encadrement ne sont pas un tribut éternel à payer au nom de la concurrence et de la modernité. Les exigences et les méfaits d'une conception intensive de la productivité deviendront progressivement insupportables : si pour certains " le temps c'est de l'argent ", pour un salarié son temps c'est sa vie.
La majorité parlementaire, enivrée par un résultat qui doit plus à la providence qu'à ses mérites, brûle de profiter des commodités d'une victoire pléthorique. C'est manifestement le cas des 130 députés du groupe UMP à l'Assemblée Nationale qui ont déposé un projet de loi destiné à limiter le droit de grève dans les transports entre 10 heures et 17 heures. Le gouvernement qui, à juste titre, proscrit la conduite en état d'ivresse, a pris le parti de calmer les ardeurs de ses députés apprentis sorciers.
Je le dis tout net, si d'aventure il lui venait à l'esprit de changer d'avis, notre réaction pour défendre le droit constitutionnel qu'est le droit de grève serait immédiate.
Mercredi 30 octobre, c'est Jacques BARROT lui-même, le général et maréchal du groupe UMP à l'Assemblée, qui ne cachait pas sa vision d'avenir de la Sécurité Sociale. " Ce n'est plus la peine d'être hypocrite " - a-t-il dit - " Ce que l'on souhaite, c'est une concentration de l'assurance maladie obligatoire sur toute les maladies graves ". " Pour le maintien en santé, il faut que chaque français puisse être en mesure d'avoir une assurance complémentaire, il faut que chacun consente un petit effort supplémentaire ".
Le plus dangereux et le plus cher dans les maladies, ce sont les rechutes ! Monsieur BARROT qui était Ministre du Travail en 1995 vient, à l'évidence, de nous en faire une.
Le budget 2003 du gouvernement, tiraillé par des tactiques contradictoires et prisonnier de ses promesses, allie les ingrédients de l'inefficacité économique au parti pris de l'injustice sociale.
Pour ficeler ce mauvais budget, on a affiché l'objectif de 2,5 % de croissance pour l'année prochaine, mais les choix politiques qui l'accompagnent rendent non crédible une telle ambition. Lorsque l'on confond politique et communication, c'est le double langage qui triomphe, c'est l'austérité qui s'avance masquée derrière l'esbroufe et la manipulation.
L'injustice de ce budget transparaît dans les choix fiscaux. Tout est fait pour une clientèle politique ayant des revenus confortables. Le soi disant pouvoir d'achat redonné aux français ira en fait gonfler l'épargne des ménages aisés sans impact positif sur l'économie et l'emploi. L'Etat lui devra compenser les conséquences sur la Sécurité sociale des allégements consentis aux entreprises, au moment même où les rentrées fiscales vont diminuer : moralité ce sont les services publics, école, santé, recherche et compagnie qui paieront les pots cassés.
Mais continuons l'inventaire.
Quelle est la crédibilité de la nouvelle cellule de prévention des suppressions d'emplois dont le ministre du Travail a annoncé la mise en place ? Quelle est la crédibilité du renvoi à la négociation avec le patronat des mesures à prendre pour éviter les licenciements lorsque l'on a entendu, comme nous l'avons entendu le 24 octobre dernier, le MEDEF dire " qu'il n'y avait pas grande chance d'aboutir " sur ce sujet ?
Tout cela ressemble au mieux à un cautère sur une jambe de bois, au pire à une tentative d'esquive visant à rejeter sur les organisations syndicales tout ou partie de la responsabilité des difficultés de l'emploi qui ont pour cause la gestion des entreprises et les politiques économiques du gouvernement.
Sortir de cette logique implique la capacité à impulser une dynamique de développement et d'emploi. L'échec de la politique d'exonérations des cotisations sociales menée depuis dix ans est évident. Il ne sert à rien d'octroyer des aides, sans contrôle ni contreparties à des entreprises qui avouent que leur première préoccupation c'est la rémunération de leurs actionnaires. Il y a là 19 milliards d'euros, 120 milliards de francs de crédits publics gâchés qu'il vaudrait mieux utiliser pour un vaste plan de formation et de qualification de tous les salariés.
La CGT avance l'idée d'une " sécurité sociale professionnelle ". C'est le moment de discuter de cette proposition qui vise à bâtir une alternative au licenciement et à garantir une formation et un emploi à chacun.
C'est ce que nous vous proposons de faire au cours des prochaines semaines avec les salariés des entreprises où s'annoncent des suppressions d'emplois, avec les autres salariés du privé, mais aussi avec les personnels du secteur public et des administrations. Nous avons un véritable intérêt commun à défendre : c'est l'emploi et la qualification contre le chômage et la précarité.
Nous en avons d'autant plus besoin que s'agissant de l'indemnisation du chômage, le MEDEF annonce la couleur et en appelle à des décisions " courageuses " pour la fin de l'année : un peu plus de sacrifices, toujours pour les mêmes !
Lors du lancement de la " refondation " sociale, dont il est un des brillants promoteurs, Denis KESSLER, qui était le n° 2 du MEDEF jusqu'à ce matin - nous avons appris sa démission dans la journée - expliquait, je le cite : " Les impératifs de l'économie moderne sont incompatibles avec les exigences de sécurité et de protection qu'attendent les salariés des entreprises ".
Cet homme qui, comme dirait un prof de maths, ne se prend pas pour son logarithme, croit en permanence qu'il a un message révolutionnaire à donner au monde alors que tout ça se résume au catéchisme de sa classe d'adoption : " laissez nous les mains libres pour faire des salariés flexibles, ne nous soumettez pas à des obligations pour les rémunérations et délivrez nous des cotisations sociales en abaissant les charges patronales. Ainsi soit il ! "
A gauche, beaucoup d'analystes politiques et économiques ont cru à ce catéchisme ou se sont résignés à n'y voir qu'un regrettable mais inéluctable tribut à payer au nom de la sacro-sainte efficacité de l'économie concurrentielle de marché.
On a renâclé à mettre en cause le développement de l'emploi précaire. On a trop facilement accepté le principe de l'irresponsabilité des entreprises vis-à-vis des dégâts sociaux provoqués par leurs objectifs, leurs critères ou leurs erreurs de gestion. On en est même venu à prôner la réduction des prélèvements fiscaux et sociaux indispensables tant à la justice sociale qu'à l'efficacité de l'économie.
Comment s'imaginer qu'à partir de tels présupposés on soit en capacité de proposer une véritable alternative à la dérive dangereuse dans laquelle s'engage le monde capitaliste, c'est-à-dire le monde entier, à travers la domination des logiques de rentabilité financière ? Si les opinions, les analyses, les propositions formulées par la CGT sur de nombreux plans avaient été plus souvent prises en considération, alors, alors peut-être, les choses auraient été différentes.
On ne refait pas l'histoire, mais ce n'est pas une raison pour ne pas nous soucier de celle qui est à faire maintenant. Et cette histoire nouvelle, comme l'aurait certainement dit Monsieur de la PALLICE, c'est bien les jeunes qui vont la faire !
Et les jeunes bougent en Europe. J'en veux pour preuve une grande initiative récente qui associe des belges, des allemands, des espagnols et des français, en l'occurrence la CGT. Ils ont conçu ensemble un projet de charte européenne des garanties collectives pour les jeunes des secteurs de la restauration rapide et des parcs de loisirs. La précarité n'a pas de frontières, le syndicalisme doit savoir dépasser les siennes.
Aujourd'hui, un jeune qui veut prendre l'ascenseur social doit commencer par descendre au sous sol.
Aujourd'hui plus d'un jeune sur deux est en intérim ou dans un dispositif d'aide à l'emploi, à moins qu'il ne soit tout simplement au chômage : 75 % des moins de trente ans connaissent la précarité de l'emploi.. Comment espérer, dans de telles conditions, pouvoir construire un projet personnel et familial ?
L'angoisse et la désillusion sont énormes pour beaucoup de parents qui voient ou redoutent de voir leurs enfants " galérer " pour s'insérer dans le monde du travail. Au bout de l'allongement des scolarités, les débouchés ne sont pas toujours au rendez-vous ou sans rapport avec les efforts consentis. Malgré la démocratisation de l'enseignement, de nombreux jeunes sortent encore sans diplôme et surtout sont marqués durablement par le traumatisme de l'échec scolaire qui vient trop souvent confirmer et redoubler les difficultés liées à leur origine sociale.
Il faut s'appliquer à réduire les inégalités de conditions de vie entre les familles au sein desquelles les enfants grandissent et aussi favoriser davantage la mixité sociale par des politiques publiques d'urbanisme et d'emploi.
Bien sûr cette revendication ne nous dispense pas d'essayer de mieux comprendre la relation entre formation et emploi. Cette relation est au centre d'un champ revendicatif très important et qui le deviendra de plus en plus, en raison de la tendance lourde au développement de l'économie fondée sur la connaissance. Il faut bannir les processus de production qui confinent ouvriers et employés dans des zones de faible qualification, tout au long de leur vie et parfois de génération en génération.
Il s'agit d'une politique publique très importante qui concerne directement la jeunesse, car c'est dès cette période, brève mais intense de la vie, qu'un destin social peut être scellé ou une trajectoire professionnelle être dangereusement compromise.
Trop de gouvernements ont privilégié depuis 15 ans le développement de l'emploi peu qualifié. Résultat : nous sommes un des pays d'Europe où les inégalités de salaires sont les plus importantes et où la concentration des salariés est la plus forte en bas de la hiérarchie, tout en conservant un taux de chômage très élevé.
Beaucoup de nos interlocuteurs ne sont d'ailleurs jamais à une contradiction près. Il y a peu, lorsque la reprise était là et que le mirage ou l'escroquerie de la " nouvelle économie " faisait encore recette, la mode était au discours alarmé sur la pénurie de main d'oeuvre qualifiée qui n'allait pas tarder à s'abattre sur les entreprises. Cet argument hâtivement exhibé faisait bien sûr partie de l'arsenal anti 35 heures. Il nourrissait à nouveau la mise en cause de l'école déclarée incapable de s'adapter aux exigences du marché et de fournir à l'activité économique les compétences dont elle a besoin. Bref l'école était réputée produire des ânes, une façon originale de lui faire jouer le rôle du bouc émissaire !
On ferait mieux d'interroger le phénoménal gaspillage de compétences professionnelles au sein de l'entreprise dont font état les jeunes ouvriers et plus largement l'ensemble des jeunes sortis depuis quelques années de la formation initiale à tous les niveaux du système scolaire. Le sentiment de n'être pas employé à la mesure de ses compétences est si largement diffusé qu'il faudrait être gonflé pour l'attribuer à leur impatience ou à leurs illusions.
De façon générale les politiques jeunes se succèdent avec des incohérences redoutables. Le dispositif " emploi jeunes " concerne 220 000 salariés dont 80 % sont diplômés. Le gouvernement a décidé de sa suppression pour le remplacer par le contrat d'insertion dans la vie sociale, le CIVIS, qui lui devrait s'adresser à des jeunes possédant au plus le bac. Résultat, beaucoup d'espoirs déçus, de nombreux jeunes seront de la revue !
Les directions d'entreprise offrent peu de perspectives de progrès, la plupart des parcours professionnels sont étriqués, notamment pour la plupart des jeunes ouvriers.
La France se singularise, en Europe, par le peu de moyens que les entreprises consacrent à la formation continue, ainsi que par l'inégale répartition de celle ci au profit de ceux qui sont déjà les plus qualifiés : dans notre pays, un ouvrier a 4 fois moins de chances qu'un cadre de bénéficier d'une action de formation. Ce n'est pas un hasard si la négociation avec le MEDEF sur la formation professionnelle n'a pas abouti. Aucune des organisations syndicales, et c'est tant mieux, n'a voulu accepter la formule patronale reportant sur les salariés les responsabilités et surtout le prix de la formation.
Des choix politiques et sociaux qui marqueront notre société pendant les décennies à venir doivent être faits maintenant. Si tout ne relève pas de la compétence syndicale, il est clair que notre vigilance et notre action sont décisives pour que tous les débats aient lieu au grand jour, pour que chaque analyse et chaque décision prennent en compte les intérêts du monde du travail.
Ces débats appellent une franche confrontation, et celle ci a commencé.
Elle a été lancée le 3 octobre par les dizaines de milliers d'électriciens et gaziers, mobilisés dans l'unité la plus large, qui, de toute la France, sont venus manifester à Paris. D'importantes délégations d'autres entreprises publiques, SNCF, La Poste, France Télécom, RATP, Air France, sont venus affirmer leurs convergences et leur solidarité avec ceux d'EDF/GDF. Tous ensemble, ils ont exprimé le caractère d'ordre public de services vitaux pour la santé de l'économie et la cohésion de la société française.
Elle s'est poursuivie le 17 octobre avec la mobilisation des personnels de l'Education nationale et de la Recherche à l'appel de toutes les organisations syndicales du secteur et auxquels se sont joints les étudiants de l'UNEF et les parents d'élèves de la FCPE.
Le 21 octobre, ce sont les intermittents du spectacle, techniciens, acteurs, réalisateurs qui sont massivement descendus dans la rue.
Aujourd'hui même, ce sont des arrêts de travail et des manifestations unitaires à Air France pour rejeter le processus de privatisation.
Le 14 novembre, c'est une journée d'action dans la métallurgie sur l'emploi, les salaires et les retraites, de nouvelles actions unitaires chez les électriciens et gaziers.
Dans l'agro-alimentaire, l'action sera aussi à l'ordre du jour dans la semaine du 18 au 22 novembre, ceux de la construction envisagent des actions le 22 novembre.
C'est aussi une grande manifestation nationale, à l'appel de 6 fédérations de cheminots actifs et retraités, le 26 novembre à Paris.
Date également retenue dans les transports, et plus particulièrement les transports urbains, pour la défense des revendications professionnelles. Les personnels civils de la Défense sont aussi appelés à se mobiliser ce jour là, alors que le budget de leur ministère sera en débat à l'Assemblée Nationale.
La mobilisation est aussi d'actualité dans plusieurs grandes enseignes du commerce et de la distribution.
Il y a aussi le 5 décembre consacré à porter les exigences des emplois jeunes qui attendent un autre avenir qu'une lettre de remerciements pour leur dévouement de ces dernières années.
J'en oublie forcément. Que les intéressés me pardonnent, le plus significatif c'est que tout cela témoigne de prises de conscience et de mobilisations qui peuvent changer le cours des choses.
Sur la compréhension des enjeux et des convergences possibles, il y a effectivement des choses qui progressent. C'est cela le plus important et c'est ce qu'il faut cultiver, travailler, protéger pour espérer aboutir à des mouvements concertés plus amples et, pourquoi pas, qui nous réunissent ensemble pour être plus forts.
Le syndicalisme m'apparaît comme une cheville ouvrière de la remise en ordre de bataille pour la conquête du progrès social. Sa capacité d'entraînement et de mise en mouvement des salariés demeure importante : elle peut, elle doit encore se renforcer dans les semaines et les mois qui viennent.
C'est sur sa capacité à reformuler et à construire des systèmes solidaires en matière de droit au travail, de santé, de retraite, de formation mais aussi de cadre de vie que le syndicalisme sera jugé.
Le 3 octobre une double démonstration a été faite : celle de la vitalité du service public et celle de l'efficacité de l'unité. A l'appel de toutes leurs organisations syndicales, des salariés se sont mobilisés massivement pour défendre une véritable réussite économique et sociale, dont la formule n'a rien de magique, mais dont la recette est éprouvée : un service public de qualité ouvert à tous, des entreprises performantes et un statut du personnel solide.
L'été a vu s'amplifier une crise financière mondiale sans précédent au moins depuis 1929, provoquant des faillites en chaîne, déstabilisant les firmes, des banques, parfois des pays entiers.
Ne nous trompons pas, nous ne sommes pas face à la crise finale d'un capitalisme moribond, mais bien devant un formidable échec de celui-ci à affronter les problèmes nouveaux posés au développement humain. L'avenir de la planète, tout comme la sécurité des biens et des personnes sont déjà parmi les victimes de cette crise.
La réalité sociale c'est que pour des millions de femmes et d'hommes il y a urgence à sortir au plus vite des schémas dans lesquels on les enferme depuis des années.
Ils sont scandalisés de voir une oligarchie financière pourrir ou même ruiner la vie de millions de salariés et de retraités par leurs opérations calamiteuses ou frauduleuses.
Ils en ont assez des leçons de civisme alors que d'autres " jouent " avec la planète dans leurs Conseils d'administration.
Ils refusent cette société du risque que les bonimenteurs du MEDEF leur présentent tour à tour comme l'horizon radieux ou le destin inéluctable du " meilleur des mondes ", là où il n'y a qu'un OGM douteux issu de la dernière mutation génétique du capitalisme.
Cette prise de conscience peut déboucher sur le ressentiment, celui sur lequel surfe aussi bien le populisme le plus violent et le plus rétrograde que celui qui se pare abusivement des couleurs de la révolution.
L'extrême droite a montré sa capacité à réunir de nombreux suffrages en exploitant ce ressentiment. Elle l'a fait en mettant en relation, sur fond de racisme et de xénophobie, le processus de mondialisation, l'immigration et la sécurité.
Parmi les salariés sensibles à son discours, certains peuvent être syndiqués à la CGT ou lui faire confiance. Ne faisons preuve d'aucune complaisance vis-à-vis du système de pensée dans lesquels ils se sont enfermés. Il n'y a aucune place, ni dans notre point de vue ni dans notre pratique, pour le racisme, la xénophobie, l'autoritarisme, la morgue ou l'étroitesse chauvines, l'exacerbation des peurs collectives et la manipulation démagogique des désarrois sociaux.
Je le dis d'autant plus fermement que cette attitude n'est apparemment pas partagée dans une partie du mouvement syndical. On l'a bien vu à l'occasion du 1er mai lorsque certains ont cru bon de déserter les rangs des manifestants en invoquant l'argument, en l'occurrence très spécieux, de l'indépendance syndicale.
Voilà une attitude que n'auraient pas reniée les sbires de l'ancienne Confédération des Syndicats Libres, c'est-à-dire deux mensonges en trois mots. Un petit rappel s'impose car tout le monde ici ne connaît pas cette triste page écrite, il n'y a pas si longtemps, par ce que certains s'obstinent à appeler nos " partenaires sociaux ".
Payés par les directions d'entreprise, notamment chez Peugeot, Ford et Citroën, un ramassis d'individus à la fois activistes de la droite factieuse et truands du patronat, s'étaient fait une spécialité d'éliminer la CGT par la menace, les voies de fait et même le crime. Ils s'étaient ainsi constitués en une organisation qui, après s'être appelée CFT, a fini par répondre au nom usurpé de Confédération des syndicats libres. Ils ont également bénéficié, jusqu'en 2001, des avantages en nature dispensés par une très grosse municipalité qui n'est ni celle de Lyon ni celle de Marseille... Vous voyez ce que je veux dire !
Ce sont ces gens là qui viennent de céder leur fonds de commerce à Force Ouvrière ! Chaque organisation est bien sûr maître de ses alliances et de ses accointances. Mais on ne m'empêchera pas de penser que, même toilettés ou pasteurisés, il y a des gens infréquentables pour des syndicalistes attachés réellement aux valeurs de solidarité, d'indépendance et de dignité des luttes sociales.
C'est en étant à l'écoute et aux côtés de ceux qui vivent les difficultés, les humiliations, les angoisses professionnelles ou familiales, et en ayant le seul objectif de leur redonner les moyens et la volonté de se battre, que nous ferons le mieux notre travail, en toute conscience, en toute indépendance.
Le syndicalisme a une tâche immense à assumer et notre syndicalisme en particulier. C'est là notre priorité.
Nous avons fait le point récemment à la Confédération Européenne des Syndicats. Manifestement la situation sociale se dégrade partout, tant du point de vue de l'emploi que des droits des salariés en Europe qui sont l'objet de remises en cause et à l'origine de grandes mobilisations. Les approches sont similaires, qu'il s'agisse de l'indemnisation du chômage en Espagne, du Code du travail en Italie, du temps de travail en France. La mobilisation syndicale est à l'ordre du jour dans la plupart des pays européens. C'est une donnée qui sera forcément présente au Forum social européen à Florence, auquel je participerai vendredi avec d'autres camarades.
L'unanimité s'est dégagée dans toute la CES pour programmer, dans les mois qui viennent, une série d'initiatives et un programme d'actions coordonné entre les syndicats européens. Tout le monde ressent la nécessité d'articuler les mobilisations nationales et la pression internationale.
L'Europe ne deviendra jamais une véritable communauté si elle n'est qu'une zone de libre échange. L'Europe n'a pas de sens si elle ne se met pas au service de la construction d'une alternative à la version actuelle de la mondialisation : c'est à dire la conjugaison du pouvoir des multinationales avec l'hégémonie politique et militaire des Etats-Unis.
Au-delà de sa posture traditionnelle de défense et de résistance qui lui est reconnue, le syndicalisme est particulièrement attendu sur son aptitude à proposer des alternatives permettant au " social " de conquérir une place centrale.
Il faut renforcer la cohésion sociale autour d'un ensemble dynamique de droits collectifs, dont la satisfaction conditionne la production et la répartition des biens et services, et oriente le développement.
Il faut libérer la dimension sociale de sa soumission au critère de la rentabilité financière, et, pour y parvenir, il faut pénétrer au coeur de la gestion de l'entreprise.
Il faut des droits, attachés à la personne, transférables d'une entreprise à l'autre et opposables à chaque employeur qui permettent ainsi de toujours bénéficier de la solidarité collective du travail : c'est cela que nous appelons la " sécurité sociale professionnelle " et rien d'autre.
Des réponses efficaces et durables impliquent également des politiques publiques et des pratiques démocratiques participatives. Elles ne signifient pas une étatisation mais un immense effort de démocratie publique. C'est " dans la proximité ", en les articulant à chaque niveau territorial, que se joueront de pair le développement de l'économie et de la démocratie, à l'intérieur de chaque pays comme au sein d'un ensemble coordonné de pays comme l'Europe.
Il y a un besoin impérieux de (re)solidariser fortement territoires et entreprises dans tous les domaines et à toutes les échelles : production, emploi, activités de Recherche/développement, services, droit social, financements, fiscalités, respect de l'environnement
C'est selon ces deux axes principaux, la mise en oeuvre des politiques publiques et le resserrement des liens entre entreprises et territoires que nous jugerons le projet de décentralisation du gouvernement et que nous serons amenés à faire des propositions précises pour le combattre ou l'amender selon les cas.
L'égalité des droits, l'égalité d'accès et l'égalité de traitement demeurent des revendications modernes. Elles nécessitent un combat permanent, car chaque évolution, chaque innovation peut toujours être monopolisée, exploitée, détournée par une minorité qui s'ingénie à maintenir ses privilèges. L'égalité ne peut pas exister là où une compétition sans merci ou un rapport de domination détruisent ou étouffent les solidarités humaines.
Que les françaises et les français, les salarié(e)s en particulier attendent du changement, c'est une évidence ; mais le changement qu'ils appellent de leurs voeux, ne consiste pas à contourner ou saper le droit du travail, brader le service public, démolir les statuts, bousiller les retraites et tailler des croupières à la Sécu !
Denis KESSLER faisait récemment des confidences dans le FIGARO. Il disait être " hanté " depuis la rencontre CGT/MEDEF d'il y a une dizaine de jours, par la question de savoir si la CGT voulait vraiment négocier. Je tiens à le rassurer : le vice-président du MEDEF n'a pas rencontré des fantômes ! Nous fréquentons peu les châteaux, et les seules chaînes que nous ayons jamais agitées sont des chaînes de production ou la chaîne de la solidarité !
La délégation que je conduisais lui a très clairement proposé, ainsi qu'à son Président Monsieur SEILLIERE, l'ouverture de quatre chantiers de négociations :
o Le droit à la formation tout au long de la vie et la reconnaissance des qualifications (ce qui implique que le MEDEF révise ses positions à l'origine du blocage des dernières négociations sur le sujet).
o La revalorisation des salaires et l'évolution des qualifications (le MEDEF conteste que ces sujets puissent être traités au plan national).
o Le recul de la précarité dans l'emploi et l'insécurité sociale (l'organisation patronale estime peu probable de déboucher sur une discussion déjà qualifiée de " très complexe "...).
o Le respect du droit et des libertés syndicales dans les entreprises (il n'y a pas de problème en la matière, d'après le MEDEF...).
Autrement dit, la question n'est pas de savoir si la CGT peut s'engager dans la voie de la négociation, elle le revendique. Par contre, on peut sérieusement douter du mandat qu'a le MEDEF pour aborder, avec les confédérations de salariés, les préoccupations sociales du moment à une échelle interprofessionnelle.
En matière de retraites, les salariés ont suivi les rounds d'observation et pour l'essentiel déjoué le coup bas du patronat par la mobilisation unitaire et exemplaire du 25 janvier 2001. Le gouvernement a fixé son calendrier. Les négociations s'ouvriront après les élections prud'homales. Il n'est pas besoin d'être devin pour pronostiquer une sérieuse confrontation.
Hier, le Ministre des Affaires Sociales a affirmé que " les préretraites étaient une catastrophe pour les régimes de retraite, alors même que les salariés vont devoir, à l'avenir, cotiser plus longtemps ".
A force de multiplier à tout bout de champ les petites phrases, en pratiquant les annonces chocs sur tous les sujets, et à ne pas respecter les représentants syndicaux, le gouvernement - comme on dit chez moi - " va finir par gagner un gros canard " !
Chacun se prépare donc avec, au centre, l'avenir de notre système de retraite par répartition et donc l'avenir pour des millions de retraités d'aujourd'hui et des salariés qui le seront demain.
Alors que nous allons rentrer dans une phase active de négociations, la campagne redouble pour opposer les salariés du secteur privé aux fonctionnaires et agents publics.
Il n'est pas la peine devant vous d'argumenter sur le danger de clivage alimenté en permanence par des campagnes de presse, des déclarations patronales, de fausses informations et de vraies opérations de désinformation.
À l'opposé de tout catastrophisme, la CGT affirme qu'il est possible de construire en matière de retraite les solutions qu'attendent les salariés et les citoyens : nous misons sur la solidarité dans et entre les générations pas sur l'individualisme et la division. Et pour cela, nous n'entendons pas fuir les problèmes d'autant qu'ils intéressent tous les salariés, et les jeunes au plus haut point.
Stopper l'inégalité qui va se creuser entre les salariés du privé et les agents du secteur public est indispensable. Le débat se concentre sur les 37 années et demies de cotisations comparées aux 40 qui s'appliquent pour le secteur privé. Il est évident que les adversaires du système par répartition font tout pour limiter le débat à cette seule question. Une étude d'un organisme de prospective, publiée à l'automne 2001, parlait même de s'attaquer au " statut excessivement privilégié des fonctionnaires ". Pardonnez-moi mais, pour ce qui est des vrais privilégiés, à la CGT nous avons une toute autre grille de lecture.
N'oublions pas que l'essentiel de l'écart qui se creuse entre public et privé vient de la réforme Balladur de 1993 et des règles d'indexation, d'abord pour le calcul de la pension, ensuite pour la pension liquidée : 1 point d'écart pendant 25 ans conduit à une pension plus basse de près de 20 % à la liquidation, pension qui perdra encore un tiers de sa valeur avant le décès du retraité ! En proposant de poursuivre les orientations de 1993 et de les appliquer à tous les régimes, le MEDEF entérine un effondrement du niveau relatif des retraites de plus d'1/3. Dans vingt-cinq ans, les plus basses retraites avoisineront le seuil de pauvreté d'alors ! Le MEDEF trompe tout le monde en parlant " de garantie du pouvoir d'achat des retraites ". En paraphrasant Jacques PREVERT, je crois que nous pouvons dire que " Le monde patronal ment, monumentalement. "
Alors que l'harmonisation progressive des conditions d'acquisition et de liquidation des droits à retraite entre les différents régimes est le plus souvent présentée comme un préalable indispensable à toute réforme des retraites, nous mettons en avant les garanties communes que nous sommes en droit d'exiger. Au plan des objectifs, nous sommes au diapason de l'écrasante majorité des français. Nous avons largement diffusé nos propositions en la matière et nous allons continuer de le faire.
Nous mettons en avant la garantie pour tous du droit à la retraite à 60 ans avec un niveau de la retraite représentant au moins 75 % du salaire. Il s'agit d'assurer la continuité du niveau de vie des salariés lors du passage à la retraite : c'est la vocation du système par répartition. 60 ans et 75 %, c'est cela qui sera au cur de l'affrontement dans la négociation.
Quant à la durée de cotisation nous proposons d'ouvrir la possibilité de cotiser dès l'âge de 18 ans ou même de 16 ans pour les jeunes dans des cycles de formation, d'apprentissage et d'études.
Mettre au second plan ces objectifs en présentant l'harmonisation public/privé comme la clé de voûte de la réforme du système, c'est s'enfermer dans la logique de l'alignement vers le bas. L'égalité de traitement suppose des conditions cimentant durablement la solidarité de tous les salariés pour que tout le monde soit bien traité.
Une augmentation des contributions financières prélevées dans l'entreprise est donc nécessaire ; elle devra assujettir ses revenus financiers et tenir compte de l'ensemble de la richesse créée par le travail.
La retraite ne doit ni basculer dans le champ de la rente, ni glisser dans une logique d'allocation. Elle est une rémunération salariale socialisée. La retraite doit donc dans son montant comme dans son financement rester étroitement liée aux évolutions du travail. C'est dans ce cadre que son avenir doit être discuté et négocié. C'est clairement l'enjeu d'une solidarité actifs/jeunes/retraités que nous voulons renouveler. Ces enjeux de solidarité seront sans aucun doute le coeur du débat de l'année 2003.
La fermeté de la CGT sur ce dossier sera sans faille, mais nous allons devoir, ensemble, nous mobiliser comme jamais si nous voulons que nos revendications soient prises en compte.
Aussi, je vous donne franchement mon sentiment. A entendre les dernières déclarations gouvernementales soufflant le froid et le chaud sur ses orientations, à voir le MEDEF s'aiguiser les dents et saliver devant le fromage des retraites, je me dis qu'il ne va pas falloir perdre trop de temps avant que les salariés entrent dans la partie pour que les négociations se déroulent bien sur la base de nos besoins.
Il serait, je crois, judicieux et efficace que dans les semaines à venir tous les syndicats réunis réfléchissent ensemble à l'objectif d'une vaste mobilisation nationale sur les retraites, dès le début de l'année prochaine.
Le MEDEF regrettait dernièrement qu'en 95 ce qu'il appelle le " camp des conservateurs " soit entré en résistance et ait réussi finalement à l'emporter. Ce n'est ni la première ni la dernière fois que la CGT sera effectivement entrée en résistance et elle en est fière.
A entendre ces messieurs, il faudrait toujours se plier à leurs conceptions : c'est d'ailleurs ce qu'ils appellent la flexibilité ! Et bien non, la CGT ne se plie pas et elle invite les salariés à bien conserver la faculté de rester debout.
Chers camarades,
Des élections syndicales, cela sous-entend une certaine compétition entre les organisations. Nous n'avons pas l'intention, pour ce qui nous concerne, de la conduire en tirant à vue sur le voisin.
Dans toutes nos actions, nous avons présents à l'esprit que l'unité syndicale est bien la question stratégique que nous avons à résoudre et à laquelle il va falloir consacrer beaucoup d'effort dans les jours et les semaines à venir. Car, si les organisations syndicales vont à la négociation divisées, elles seront toutes en situation de faiblesse, et les salariés avec elles !
Il faut cependant que ceux-ci connaissent les raisons qui conduisent chaque organisation à défendre telle ou telle position.
Il faut que chaque salarié puisse se faire librement son propre jugement sur le comportement des uns ou des autres pendant et à la fin des négociations.
Avons-nous eu tort ou raison en refusant la dernière convention d'indemnisation du chômage qui laisse à la charge de la collectivité 60 % des chômeurs ?
Avons nous eu tort ou raison de bannir le système répressif que le patronat voulait imposer aux chômeurs avec sa version du PARE ?
Avons-nous eu tort ou raison de rejeter, après la mobilisation de janvier 2001, le texte sur les retraites complémentaires qui stipule expressément qu'il faudrait, à l'avenir, privilégier un nouvel allongement de la durée de cotisations des salariés dans la réforme des retraites ?
C'est aussi sur tout cela qu'il faudra se prononcer le 11 décembre.
Combien de négociations qui se concluent par la signature d'accords minoritaires qui ne tiennent pas compte de l'opinion des salariés ?
Le patronat a beau jeu de vouloir négocier les droits sociaux par entreprise, voire même par établissement. Lorsqu'il rencontre une présence syndicale - ce qui est malheureusement loin d'être le cas partout - il sait pouvoir contourner l'obstacle puisqu'il lui suffit d'obtenir une signature de l'une des 5 confédérations pour mettre en oeuvre un accord.
Cette situation n'est plus tenable. Il aurait été salutaire que le gouvernement précédent ait le courage et l'audace d'ouvrir le chantier de la démocratie sociale. Il est urgent que le nouveau gouvernement s'attelle à cette réforme, sinon son discours sur le dialogue social s'avérera n'être que du verbiage ou de la poudre aux yeux. !
Il faut tenir compte de ce que disent les salariés aux élections professionnelles. Ainsi, seuls doivent être mis en oeuvre les accords signés par des organisations syndicales représentant une majorité des salariés concernés par la négociation.
Chacun comprend, dans les circonstances actuelles, combien les élections prud'homales du 11 décembre représentent un rendez-vous de première importance pour notre avenir à tous.
L'enjeu est multiple, chacun doit en prendre la mesure.
Il concerne bien sûr, la qualité des juges salariés qui seront élus à l'issue de cette consultation nationale.
Je suis heureux de pouvoir vous annoncer que la CGT présentera des listes de candidats dans toutes les circonscriptions et dans toutes les sections.
Signe de notre dynamisme, 60 % des candidatures seront le fait de nouveaux candidats et près de 40 % des listes seront composées de candidates . C'est un progrès sensible sur le dernier scrutin et je veux saluer ce premier résultat qui est le fruit des efforts réels des directions syndicales et des syndiqués.
Les militantes et les militants présentés par la CGT peuvent s'appuyer sur une organisation qui a l'expérience et l'expertise nécessaires.
Dans les différentes sections, nous pouvons nous servir de notre propre bilan pour mettre en évidence que dans bien des cas, nous avons contribué à réparer des préjudices à sanctionner des employeurs voulant ignorer le droit.
Mais l'enjeu dépasse largement l'élection de conseillers prud'hommes. Il s'agit en effet du seul rendez-vous permettant aux salariés de s'exprimer ensemble sur des listes syndicales, une opération vérité, en quelque sorte, de la représentativité des uns et des autres. C'est la seule occasion, qui se renouvelle tous les 5 ans, offerte aux chômeurs, aux salariés des petites entreprises qui n'ont ni Délégué du Personnel, ni Comité d'Entreprise, d'exprimer leur opinion. Quelles que soient leur nationalité, leur branche professionnelle, leur place dans l'entreprise, tous peuvent voter.
Le 11 décembre, les salariés procéderont à des élections et, dans le même temps, ils adresseront plusieurs messages.
Par leur vote, ils apporteront indirectement leur soutien à une démarche et à des objectifs syndicaux.
En ce sens, la question que chaque salarié devra aussi se poser au moment de voter c'est : "dans les circonstances présentes, quel peut être le vote le plus efficace, quel est le syndicat qui me semble le plus pertinent, à qui dois-je donner mon soutien sachant que cela aura des conséquences pour ma situation et celle de mes proches" ?.
A cette question, il va nous falloir convaincre que c'est la CGT la bonne réponse.
Le bulletin de vote qui va porter le progrès social, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin de vote qui fera réfléchir le gouvernement et le MEDEF à deux fois, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin pour l'avenir des retraites, de la sécu, des salaires et des 35 heures, pour la démocratie sociale, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin utile pour construire un rapport de forces qui permette aux salariés d'être écoutés et respectés avant d'avoir recours aux prud'hommes, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin pour le tous ensemble, pour l'unité, pour l'efficacité, c'est le bulletin CGT.
17 millions d'électeurs, c'est une consultation sociale unique en son genre. Et pourtant les pouvoirs publics n'ont pas retenu de dispositions particulières permettant aux organisations syndicales d'avoir accès aux principaux média, pour que chacun connaisse les enjeux et ses droits pour le 11 décembre. Il n'est pas surprenant dans ces conditions qu'une enquête portant sur les intentions de vote laisse apparaître que la participation au scrutin s'annonce de nouveau trop faible.
Il faut donc d'abord compter sur nous-mêmes pour aller à la conquête de centaines de milliers de voix. Nous n'avons plus que quelques semaines devant nous pour organiser une mobilisation générale afin de contrarier ceux qui redoutent le verdict des urnes.
Chacun de vous, militant, syndiqué, sympathisant va devoir, dans son entourage familial, professionnel, aller chercher les voix une à une pour que la participation au vote progresse et que le nombre de bulletins CGT soit plus important encore.
Si les millions d'électeurs affirment leur confiance dans la CGT et confirment sa place en approuvant sa combativité et les principes de son action revendicative, le 11 décembre s'avérera, à sa manière, une des plus grandes journées d'action nationale interprofessionnelle que nous ayons construite ensemble.
Il faut que chacune de nos fédérations, chacune de nos Unions départementales, chacun de nos syndicats perçoive cette évidence de bon sens :un bon score pour la CGT et c'est un immense ballon d'oxygène pour toutes les revendications.
Le 11 décembre, c'est dès maintenant, avec votre engagement, qu'il se prépare :
- En allant largement à la rencontre des salariés de toutes catégories dans les entreprises, les zones d'activité. En allant là où il n'y a pas ou peu de syndicats implantés,
- En vérifiant que les salariés sont bien inscrits sur les bonnes listes électorales,
- En faisant respecter pour tous le droit de vote pendant le temps de travail le 11 décembre, une date que chaque salarié doit réserver pour aller voter.
Nous le ferons d'autant mieux que nous aurons la préoccupation de faire de cette campagne un tremplin pour renforcer notre organisation.
Dans ces milliers de rencontres et de contacts, nous ne devons pas hésiter à solliciter chacun pour qu'il s'engage davantage, qu'il se syndique, qu'il nous aide à implanter de nouvelles bases syndicales, qu'il participe à la construction du syndicalisme revendicatif, unitaire et démocratique dont le monde du travail a le plus grand besoin.
Il y a beaucoup d'ingrédients réunis pour nous conduire à être plus offensifs dans le renforcement de la CGT. L'écoute et les attentes à l'égard du syndicalisme sont importants. La pertinence de notre démarche est de mieux en mieux appréciée. Nous sommes sans cesse sollicités pour donner un coup de main ; malheureusement, beaucoup de salariés attendent souvent que les choses tournent mal à l'entreprise avant de s'organiser en syndicat CGT.
A nous de convaincre aussi de la nécessité d'avoir partout des forces organisées, des forces CGT plus nombreuses.
A nous d'être persuasifs, d'aider à franchir le pas de l'adhésion à la CGT, comme un autre moyen d'action pour faire face à la situation.
Je le dis très amicalement aux sympathisants qui hésitent encore. Votre soutien et votre présence nous sont précieux. Vous avez besoin de la CGT, mais la CGT a aussi besoin de vous. C'est maintenant que nous avons besoin de réunir nos forces et nos idées.
Alors,
Venez prendre part à la défense de vos intérêts.
Venez voir la CGT de l'intérieur et vous verrez, comme tant d'autres, qu'elle n'est pas ce que ses adversaires disent d'elle.
Venez vous informer chaque semaine, notre journal, la Nouvelle Vie Ouvrière, est fait pour cela.
Venez, avec nous, construire votre meilleure force pour l'avenir.
Venez et vous participerez, comme les autres syndiqués de la CGT, à la réflexion collective, aux débats, aux décisions qui seront prises lors du prochain congrès de la CGT en mars prochain.
Chers camarades et chers amis,
Je veux vous dire, pour conclure, ma conviction et plus largement celle de la direction de la CGT.
La période que nous traversons est effectivement lourde d'enjeux, lourde de défis.
Mais si nous y mettons toute notre détermination et notre confiance - je n'en manque pas et je sais que vous n'en manquez pas non plus - si, sur chaque lieu de travail nous nous engageons résolument dans la mobilisation et la campagne et bien, tous ensemble, nous gagnerons sur les revendications et aux élections du 11 décembre.
(source http://www.cgt.fr, le 14 novembre 2002)
Je vous remercie d'avoir répondu si nombreux à l'invitation de la CGT. Rhône-Alpes, c'est la deuxième région de France avec une situation géographique privilégiée qui en fait un lieu de passage et de contact, un carrefour des échanges économiques et des métissages culturels européens. Nous sommes réunis ce soir à cinq petites semaines des élections prud'homales. Cette perspective exige de conjuguer toutes nos forces : ces élections constituent un moment décisif pour affirmer la représentativité du mouvement syndical en général et celle de la CGT en particulier. Le 11 décembre, une grosse partie se jouera ici en Rhône-Alpes, et le résultat global de la CGT dépendra pour une part de votre engagement.
Défendre les droits individuels et collectifs des salariés est une des tâches fondamentales du syndicalisme. Le combat syndical est et sera toujours inspiré par le progrès du droit contre l'injustice et l'arbitraire.
Il est un homme, parmi nous ce soir, qui, plus que d'autres, envisage son avenir avec angoisse. Il a besoin de nous, de notre solidarité.
Il est chauffeur routier et syndiqué à la CGT. Il a déjà dû subir plus de 7 mois de prison alors que la procédure, qui dure maintenant depuis plus de 6 ans, ne permet aucunement de le considérer coupable des faits qui lui sont reprochés.
Lucien BERTRAND, malgré un dossier qui plaide en sa faveur, est renvoyé en Cours d'Assises où il risque 10 ans de prison et de lourdes amendes en dommages et intérêts.
Il est de notre devoir d'être vigilants, de ne pas admettre que la vindicte publique puisse s'abattre aveuglément sur n'importe quel salarié, au seul motif qu'il était présent lors de faits graves se produisant à l'occasion d'un conflit social. Il est de notre responsabilité à tous de ne pas laisser commettre une erreur judiciaire.
Je veux dire à Lucien tout notre solidarité, mais aussi notre détermination à empêcher sa condamnation qui serait une insulte à l'idée que nous nous faisons de la justice.
Chers camarades,
Chaque jour fournit son lot de motifs supplémentaires d'avoir une meilleure prise sur les événements, et le vote CGT du 11 décembre s'inscrit clairement comme un des moyens pour y parvenir.
On peut prendre la situation par tous les bouts, pour les salariés, les sources d'inquiétude sont bien plus nombreuses que les sources de satisfaction.
Que l'on se tourne du côté des stratégies des entreprises ou de l'action gouvernementale, on se heurte depuis des années aux mêmes discours obstinément rabâchés, aux mêmes mesures qui débouchent immanquablement sur de plus grandes inégalités, des gâchis et autant d'occasions manquées de façonner un univers de progrès et de justice sociale. D'autres choix, d'autres orientations sont possibles. Les salariés et le mouvement syndical doivent se mettre en capacité de les faire prévaloir.
Utopie déclareront certains ! Certes, le syndicalisme est historiquement porteur d'espoir voire d'une part de rêve, mais il est d'abord bien placé pour apprécier si les décisions qui sont prises et qui intéressent la vie de dizaines de millions de salariés et de leurs familles sont bien de nature à s'attaquer à l'insécurité sociale qui marque la société française.
La question de l'emploi reste la source d'inquiétude la plus constante des salariés de notre pays, une inquiétude que celle de l'avenir des retraites vient redoubler.
La situation est grave, ici en Rhône-Alpes comme dans les autres régions. Chacun sait bien malheureusement que, mois après mois, le chômage ne cesse d'augmenter depuis un an et demi maintenant Que cela est commun à presque tous les pays d'Europe Que personne ne voit d'amélioration prévisible avant douze ou dix-huit mois C'est une autre manière de dire qu'il faudrait encore attendre.
Le Fonds Monétaire International qui publiait la semaine dernière ses prévisions, se déclarait " déçu des performances européennes ". Venant d'un organisme financier, tristement célèbre pour sa foi inébranlable dans les vertus magiques du néolibéralisme et des remèdes de cheval qu'il a préconisés aux pays du tiers-monde, c'est à la fois inquiétant sur le fond, et " limite " provocation sur la forme !
Sa méthode c'est celle des médecins de Molière : la saignée. Quand pendant une courte période la situation s'améliore, il en attribue immédiatement le mérite à l'efficacité supposée du traitement. Quand la situation se dégrade, cela prouve la nécessité d'en accélérer le rythme ! A ce compte là, le malade risque de mourir guéri.
En quatre semaines, nous avons recensé 66 annonces de plans de suppressions d'emplois représentant plus de 37 000 postes de travail qui devraient être rayés de la carte au cours des prochains mois. Lorsque l'on égrène cette sinistre liste, cela fait penser à ces interminables appels aux morts devant les monuments des deux dernières guerres.
" Le gouvernement se mobilise " titraient les journaux ces derniers jours. Comment parler de mobilisation, lorsque dès le coup d'envoi il faut sortir le carton jaune !
Nous jugeons de l'action gouvernementale aux actes. Ainsi, les smicards n'ont pu avoir la revalorisation tant attendue de leur salaire en juillet. Dans la foulée, le gouvernement adopte une série de dispositions qui mettent fin au processus de réduction du temps de travail, en particulier pour les salariés des petites entreprises, et offrent au patronat un cadre idéal dans lequel il ne manquera pas de s'engouffrer pour généraliser les emplois à temps partiels complétés d'heures supplémentaires plus nombreuses et moins coûteuses pour les entreprises.
Volonté de revanche et manque de lucidité sur l'évolution des besoins sociaux, tout y est, mais cela n'empêchera pas que la relation entre temps de travail, temps privé et temps social doit être repensée, ni que le processus 35 heures a remis durablement l'organisation du travail au centre de l'activité revendicative. La flexibilisation, les flux tendus, l'extension du travail posté, du travail des samedis et des dimanches et du temps partiel contraint, et la mise sous tension permanente du personnel d'encadrement ne sont pas un tribut éternel à payer au nom de la concurrence et de la modernité. Les exigences et les méfaits d'une conception intensive de la productivité deviendront progressivement insupportables : si pour certains " le temps c'est de l'argent ", pour un salarié son temps c'est sa vie.
La majorité parlementaire, enivrée par un résultat qui doit plus à la providence qu'à ses mérites, brûle de profiter des commodités d'une victoire pléthorique. C'est manifestement le cas des 130 députés du groupe UMP à l'Assemblée Nationale qui ont déposé un projet de loi destiné à limiter le droit de grève dans les transports entre 10 heures et 17 heures. Le gouvernement qui, à juste titre, proscrit la conduite en état d'ivresse, a pris le parti de calmer les ardeurs de ses députés apprentis sorciers.
Je le dis tout net, si d'aventure il lui venait à l'esprit de changer d'avis, notre réaction pour défendre le droit constitutionnel qu'est le droit de grève serait immédiate.
Mercredi 30 octobre, c'est Jacques BARROT lui-même, le général et maréchal du groupe UMP à l'Assemblée, qui ne cachait pas sa vision d'avenir de la Sécurité Sociale. " Ce n'est plus la peine d'être hypocrite " - a-t-il dit - " Ce que l'on souhaite, c'est une concentration de l'assurance maladie obligatoire sur toute les maladies graves ". " Pour le maintien en santé, il faut que chaque français puisse être en mesure d'avoir une assurance complémentaire, il faut que chacun consente un petit effort supplémentaire ".
Le plus dangereux et le plus cher dans les maladies, ce sont les rechutes ! Monsieur BARROT qui était Ministre du Travail en 1995 vient, à l'évidence, de nous en faire une.
Le budget 2003 du gouvernement, tiraillé par des tactiques contradictoires et prisonnier de ses promesses, allie les ingrédients de l'inefficacité économique au parti pris de l'injustice sociale.
Pour ficeler ce mauvais budget, on a affiché l'objectif de 2,5 % de croissance pour l'année prochaine, mais les choix politiques qui l'accompagnent rendent non crédible une telle ambition. Lorsque l'on confond politique et communication, c'est le double langage qui triomphe, c'est l'austérité qui s'avance masquée derrière l'esbroufe et la manipulation.
L'injustice de ce budget transparaît dans les choix fiscaux. Tout est fait pour une clientèle politique ayant des revenus confortables. Le soi disant pouvoir d'achat redonné aux français ira en fait gonfler l'épargne des ménages aisés sans impact positif sur l'économie et l'emploi. L'Etat lui devra compenser les conséquences sur la Sécurité sociale des allégements consentis aux entreprises, au moment même où les rentrées fiscales vont diminuer : moralité ce sont les services publics, école, santé, recherche et compagnie qui paieront les pots cassés.
Mais continuons l'inventaire.
Quelle est la crédibilité de la nouvelle cellule de prévention des suppressions d'emplois dont le ministre du Travail a annoncé la mise en place ? Quelle est la crédibilité du renvoi à la négociation avec le patronat des mesures à prendre pour éviter les licenciements lorsque l'on a entendu, comme nous l'avons entendu le 24 octobre dernier, le MEDEF dire " qu'il n'y avait pas grande chance d'aboutir " sur ce sujet ?
Tout cela ressemble au mieux à un cautère sur une jambe de bois, au pire à une tentative d'esquive visant à rejeter sur les organisations syndicales tout ou partie de la responsabilité des difficultés de l'emploi qui ont pour cause la gestion des entreprises et les politiques économiques du gouvernement.
Sortir de cette logique implique la capacité à impulser une dynamique de développement et d'emploi. L'échec de la politique d'exonérations des cotisations sociales menée depuis dix ans est évident. Il ne sert à rien d'octroyer des aides, sans contrôle ni contreparties à des entreprises qui avouent que leur première préoccupation c'est la rémunération de leurs actionnaires. Il y a là 19 milliards d'euros, 120 milliards de francs de crédits publics gâchés qu'il vaudrait mieux utiliser pour un vaste plan de formation et de qualification de tous les salariés.
La CGT avance l'idée d'une " sécurité sociale professionnelle ". C'est le moment de discuter de cette proposition qui vise à bâtir une alternative au licenciement et à garantir une formation et un emploi à chacun.
C'est ce que nous vous proposons de faire au cours des prochaines semaines avec les salariés des entreprises où s'annoncent des suppressions d'emplois, avec les autres salariés du privé, mais aussi avec les personnels du secteur public et des administrations. Nous avons un véritable intérêt commun à défendre : c'est l'emploi et la qualification contre le chômage et la précarité.
Nous en avons d'autant plus besoin que s'agissant de l'indemnisation du chômage, le MEDEF annonce la couleur et en appelle à des décisions " courageuses " pour la fin de l'année : un peu plus de sacrifices, toujours pour les mêmes !
Lors du lancement de la " refondation " sociale, dont il est un des brillants promoteurs, Denis KESSLER, qui était le n° 2 du MEDEF jusqu'à ce matin - nous avons appris sa démission dans la journée - expliquait, je le cite : " Les impératifs de l'économie moderne sont incompatibles avec les exigences de sécurité et de protection qu'attendent les salariés des entreprises ".
Cet homme qui, comme dirait un prof de maths, ne se prend pas pour son logarithme, croit en permanence qu'il a un message révolutionnaire à donner au monde alors que tout ça se résume au catéchisme de sa classe d'adoption : " laissez nous les mains libres pour faire des salariés flexibles, ne nous soumettez pas à des obligations pour les rémunérations et délivrez nous des cotisations sociales en abaissant les charges patronales. Ainsi soit il ! "
A gauche, beaucoup d'analystes politiques et économiques ont cru à ce catéchisme ou se sont résignés à n'y voir qu'un regrettable mais inéluctable tribut à payer au nom de la sacro-sainte efficacité de l'économie concurrentielle de marché.
On a renâclé à mettre en cause le développement de l'emploi précaire. On a trop facilement accepté le principe de l'irresponsabilité des entreprises vis-à-vis des dégâts sociaux provoqués par leurs objectifs, leurs critères ou leurs erreurs de gestion. On en est même venu à prôner la réduction des prélèvements fiscaux et sociaux indispensables tant à la justice sociale qu'à l'efficacité de l'économie.
Comment s'imaginer qu'à partir de tels présupposés on soit en capacité de proposer une véritable alternative à la dérive dangereuse dans laquelle s'engage le monde capitaliste, c'est-à-dire le monde entier, à travers la domination des logiques de rentabilité financière ? Si les opinions, les analyses, les propositions formulées par la CGT sur de nombreux plans avaient été plus souvent prises en considération, alors, alors peut-être, les choses auraient été différentes.
On ne refait pas l'histoire, mais ce n'est pas une raison pour ne pas nous soucier de celle qui est à faire maintenant. Et cette histoire nouvelle, comme l'aurait certainement dit Monsieur de la PALLICE, c'est bien les jeunes qui vont la faire !
Et les jeunes bougent en Europe. J'en veux pour preuve une grande initiative récente qui associe des belges, des allemands, des espagnols et des français, en l'occurrence la CGT. Ils ont conçu ensemble un projet de charte européenne des garanties collectives pour les jeunes des secteurs de la restauration rapide et des parcs de loisirs. La précarité n'a pas de frontières, le syndicalisme doit savoir dépasser les siennes.
Aujourd'hui, un jeune qui veut prendre l'ascenseur social doit commencer par descendre au sous sol.
Aujourd'hui plus d'un jeune sur deux est en intérim ou dans un dispositif d'aide à l'emploi, à moins qu'il ne soit tout simplement au chômage : 75 % des moins de trente ans connaissent la précarité de l'emploi.. Comment espérer, dans de telles conditions, pouvoir construire un projet personnel et familial ?
L'angoisse et la désillusion sont énormes pour beaucoup de parents qui voient ou redoutent de voir leurs enfants " galérer " pour s'insérer dans le monde du travail. Au bout de l'allongement des scolarités, les débouchés ne sont pas toujours au rendez-vous ou sans rapport avec les efforts consentis. Malgré la démocratisation de l'enseignement, de nombreux jeunes sortent encore sans diplôme et surtout sont marqués durablement par le traumatisme de l'échec scolaire qui vient trop souvent confirmer et redoubler les difficultés liées à leur origine sociale.
Il faut s'appliquer à réduire les inégalités de conditions de vie entre les familles au sein desquelles les enfants grandissent et aussi favoriser davantage la mixité sociale par des politiques publiques d'urbanisme et d'emploi.
Bien sûr cette revendication ne nous dispense pas d'essayer de mieux comprendre la relation entre formation et emploi. Cette relation est au centre d'un champ revendicatif très important et qui le deviendra de plus en plus, en raison de la tendance lourde au développement de l'économie fondée sur la connaissance. Il faut bannir les processus de production qui confinent ouvriers et employés dans des zones de faible qualification, tout au long de leur vie et parfois de génération en génération.
Il s'agit d'une politique publique très importante qui concerne directement la jeunesse, car c'est dès cette période, brève mais intense de la vie, qu'un destin social peut être scellé ou une trajectoire professionnelle être dangereusement compromise.
Trop de gouvernements ont privilégié depuis 15 ans le développement de l'emploi peu qualifié. Résultat : nous sommes un des pays d'Europe où les inégalités de salaires sont les plus importantes et où la concentration des salariés est la plus forte en bas de la hiérarchie, tout en conservant un taux de chômage très élevé.
Beaucoup de nos interlocuteurs ne sont d'ailleurs jamais à une contradiction près. Il y a peu, lorsque la reprise était là et que le mirage ou l'escroquerie de la " nouvelle économie " faisait encore recette, la mode était au discours alarmé sur la pénurie de main d'oeuvre qualifiée qui n'allait pas tarder à s'abattre sur les entreprises. Cet argument hâtivement exhibé faisait bien sûr partie de l'arsenal anti 35 heures. Il nourrissait à nouveau la mise en cause de l'école déclarée incapable de s'adapter aux exigences du marché et de fournir à l'activité économique les compétences dont elle a besoin. Bref l'école était réputée produire des ânes, une façon originale de lui faire jouer le rôle du bouc émissaire !
On ferait mieux d'interroger le phénoménal gaspillage de compétences professionnelles au sein de l'entreprise dont font état les jeunes ouvriers et plus largement l'ensemble des jeunes sortis depuis quelques années de la formation initiale à tous les niveaux du système scolaire. Le sentiment de n'être pas employé à la mesure de ses compétences est si largement diffusé qu'il faudrait être gonflé pour l'attribuer à leur impatience ou à leurs illusions.
De façon générale les politiques jeunes se succèdent avec des incohérences redoutables. Le dispositif " emploi jeunes " concerne 220 000 salariés dont 80 % sont diplômés. Le gouvernement a décidé de sa suppression pour le remplacer par le contrat d'insertion dans la vie sociale, le CIVIS, qui lui devrait s'adresser à des jeunes possédant au plus le bac. Résultat, beaucoup d'espoirs déçus, de nombreux jeunes seront de la revue !
Les directions d'entreprise offrent peu de perspectives de progrès, la plupart des parcours professionnels sont étriqués, notamment pour la plupart des jeunes ouvriers.
La France se singularise, en Europe, par le peu de moyens que les entreprises consacrent à la formation continue, ainsi que par l'inégale répartition de celle ci au profit de ceux qui sont déjà les plus qualifiés : dans notre pays, un ouvrier a 4 fois moins de chances qu'un cadre de bénéficier d'une action de formation. Ce n'est pas un hasard si la négociation avec le MEDEF sur la formation professionnelle n'a pas abouti. Aucune des organisations syndicales, et c'est tant mieux, n'a voulu accepter la formule patronale reportant sur les salariés les responsabilités et surtout le prix de la formation.
Des choix politiques et sociaux qui marqueront notre société pendant les décennies à venir doivent être faits maintenant. Si tout ne relève pas de la compétence syndicale, il est clair que notre vigilance et notre action sont décisives pour que tous les débats aient lieu au grand jour, pour que chaque analyse et chaque décision prennent en compte les intérêts du monde du travail.
Ces débats appellent une franche confrontation, et celle ci a commencé.
Elle a été lancée le 3 octobre par les dizaines de milliers d'électriciens et gaziers, mobilisés dans l'unité la plus large, qui, de toute la France, sont venus manifester à Paris. D'importantes délégations d'autres entreprises publiques, SNCF, La Poste, France Télécom, RATP, Air France, sont venus affirmer leurs convergences et leur solidarité avec ceux d'EDF/GDF. Tous ensemble, ils ont exprimé le caractère d'ordre public de services vitaux pour la santé de l'économie et la cohésion de la société française.
Elle s'est poursuivie le 17 octobre avec la mobilisation des personnels de l'Education nationale et de la Recherche à l'appel de toutes les organisations syndicales du secteur et auxquels se sont joints les étudiants de l'UNEF et les parents d'élèves de la FCPE.
Le 21 octobre, ce sont les intermittents du spectacle, techniciens, acteurs, réalisateurs qui sont massivement descendus dans la rue.
Aujourd'hui même, ce sont des arrêts de travail et des manifestations unitaires à Air France pour rejeter le processus de privatisation.
Le 14 novembre, c'est une journée d'action dans la métallurgie sur l'emploi, les salaires et les retraites, de nouvelles actions unitaires chez les électriciens et gaziers.
Dans l'agro-alimentaire, l'action sera aussi à l'ordre du jour dans la semaine du 18 au 22 novembre, ceux de la construction envisagent des actions le 22 novembre.
C'est aussi une grande manifestation nationale, à l'appel de 6 fédérations de cheminots actifs et retraités, le 26 novembre à Paris.
Date également retenue dans les transports, et plus particulièrement les transports urbains, pour la défense des revendications professionnelles. Les personnels civils de la Défense sont aussi appelés à se mobiliser ce jour là, alors que le budget de leur ministère sera en débat à l'Assemblée Nationale.
La mobilisation est aussi d'actualité dans plusieurs grandes enseignes du commerce et de la distribution.
Il y a aussi le 5 décembre consacré à porter les exigences des emplois jeunes qui attendent un autre avenir qu'une lettre de remerciements pour leur dévouement de ces dernières années.
J'en oublie forcément. Que les intéressés me pardonnent, le plus significatif c'est que tout cela témoigne de prises de conscience et de mobilisations qui peuvent changer le cours des choses.
Sur la compréhension des enjeux et des convergences possibles, il y a effectivement des choses qui progressent. C'est cela le plus important et c'est ce qu'il faut cultiver, travailler, protéger pour espérer aboutir à des mouvements concertés plus amples et, pourquoi pas, qui nous réunissent ensemble pour être plus forts.
Le syndicalisme m'apparaît comme une cheville ouvrière de la remise en ordre de bataille pour la conquête du progrès social. Sa capacité d'entraînement et de mise en mouvement des salariés demeure importante : elle peut, elle doit encore se renforcer dans les semaines et les mois qui viennent.
C'est sur sa capacité à reformuler et à construire des systèmes solidaires en matière de droit au travail, de santé, de retraite, de formation mais aussi de cadre de vie que le syndicalisme sera jugé.
Le 3 octobre une double démonstration a été faite : celle de la vitalité du service public et celle de l'efficacité de l'unité. A l'appel de toutes leurs organisations syndicales, des salariés se sont mobilisés massivement pour défendre une véritable réussite économique et sociale, dont la formule n'a rien de magique, mais dont la recette est éprouvée : un service public de qualité ouvert à tous, des entreprises performantes et un statut du personnel solide.
L'été a vu s'amplifier une crise financière mondiale sans précédent au moins depuis 1929, provoquant des faillites en chaîne, déstabilisant les firmes, des banques, parfois des pays entiers.
Ne nous trompons pas, nous ne sommes pas face à la crise finale d'un capitalisme moribond, mais bien devant un formidable échec de celui-ci à affronter les problèmes nouveaux posés au développement humain. L'avenir de la planète, tout comme la sécurité des biens et des personnes sont déjà parmi les victimes de cette crise.
La réalité sociale c'est que pour des millions de femmes et d'hommes il y a urgence à sortir au plus vite des schémas dans lesquels on les enferme depuis des années.
Ils sont scandalisés de voir une oligarchie financière pourrir ou même ruiner la vie de millions de salariés et de retraités par leurs opérations calamiteuses ou frauduleuses.
Ils en ont assez des leçons de civisme alors que d'autres " jouent " avec la planète dans leurs Conseils d'administration.
Ils refusent cette société du risque que les bonimenteurs du MEDEF leur présentent tour à tour comme l'horizon radieux ou le destin inéluctable du " meilleur des mondes ", là où il n'y a qu'un OGM douteux issu de la dernière mutation génétique du capitalisme.
Cette prise de conscience peut déboucher sur le ressentiment, celui sur lequel surfe aussi bien le populisme le plus violent et le plus rétrograde que celui qui se pare abusivement des couleurs de la révolution.
L'extrême droite a montré sa capacité à réunir de nombreux suffrages en exploitant ce ressentiment. Elle l'a fait en mettant en relation, sur fond de racisme et de xénophobie, le processus de mondialisation, l'immigration et la sécurité.
Parmi les salariés sensibles à son discours, certains peuvent être syndiqués à la CGT ou lui faire confiance. Ne faisons preuve d'aucune complaisance vis-à-vis du système de pensée dans lesquels ils se sont enfermés. Il n'y a aucune place, ni dans notre point de vue ni dans notre pratique, pour le racisme, la xénophobie, l'autoritarisme, la morgue ou l'étroitesse chauvines, l'exacerbation des peurs collectives et la manipulation démagogique des désarrois sociaux.
Je le dis d'autant plus fermement que cette attitude n'est apparemment pas partagée dans une partie du mouvement syndical. On l'a bien vu à l'occasion du 1er mai lorsque certains ont cru bon de déserter les rangs des manifestants en invoquant l'argument, en l'occurrence très spécieux, de l'indépendance syndicale.
Voilà une attitude que n'auraient pas reniée les sbires de l'ancienne Confédération des Syndicats Libres, c'est-à-dire deux mensonges en trois mots. Un petit rappel s'impose car tout le monde ici ne connaît pas cette triste page écrite, il n'y a pas si longtemps, par ce que certains s'obstinent à appeler nos " partenaires sociaux ".
Payés par les directions d'entreprise, notamment chez Peugeot, Ford et Citroën, un ramassis d'individus à la fois activistes de la droite factieuse et truands du patronat, s'étaient fait une spécialité d'éliminer la CGT par la menace, les voies de fait et même le crime. Ils s'étaient ainsi constitués en une organisation qui, après s'être appelée CFT, a fini par répondre au nom usurpé de Confédération des syndicats libres. Ils ont également bénéficié, jusqu'en 2001, des avantages en nature dispensés par une très grosse municipalité qui n'est ni celle de Lyon ni celle de Marseille... Vous voyez ce que je veux dire !
Ce sont ces gens là qui viennent de céder leur fonds de commerce à Force Ouvrière ! Chaque organisation est bien sûr maître de ses alliances et de ses accointances. Mais on ne m'empêchera pas de penser que, même toilettés ou pasteurisés, il y a des gens infréquentables pour des syndicalistes attachés réellement aux valeurs de solidarité, d'indépendance et de dignité des luttes sociales.
C'est en étant à l'écoute et aux côtés de ceux qui vivent les difficultés, les humiliations, les angoisses professionnelles ou familiales, et en ayant le seul objectif de leur redonner les moyens et la volonté de se battre, que nous ferons le mieux notre travail, en toute conscience, en toute indépendance.
Le syndicalisme a une tâche immense à assumer et notre syndicalisme en particulier. C'est là notre priorité.
Nous avons fait le point récemment à la Confédération Européenne des Syndicats. Manifestement la situation sociale se dégrade partout, tant du point de vue de l'emploi que des droits des salariés en Europe qui sont l'objet de remises en cause et à l'origine de grandes mobilisations. Les approches sont similaires, qu'il s'agisse de l'indemnisation du chômage en Espagne, du Code du travail en Italie, du temps de travail en France. La mobilisation syndicale est à l'ordre du jour dans la plupart des pays européens. C'est une donnée qui sera forcément présente au Forum social européen à Florence, auquel je participerai vendredi avec d'autres camarades.
L'unanimité s'est dégagée dans toute la CES pour programmer, dans les mois qui viennent, une série d'initiatives et un programme d'actions coordonné entre les syndicats européens. Tout le monde ressent la nécessité d'articuler les mobilisations nationales et la pression internationale.
L'Europe ne deviendra jamais une véritable communauté si elle n'est qu'une zone de libre échange. L'Europe n'a pas de sens si elle ne se met pas au service de la construction d'une alternative à la version actuelle de la mondialisation : c'est à dire la conjugaison du pouvoir des multinationales avec l'hégémonie politique et militaire des Etats-Unis.
Au-delà de sa posture traditionnelle de défense et de résistance qui lui est reconnue, le syndicalisme est particulièrement attendu sur son aptitude à proposer des alternatives permettant au " social " de conquérir une place centrale.
Il faut renforcer la cohésion sociale autour d'un ensemble dynamique de droits collectifs, dont la satisfaction conditionne la production et la répartition des biens et services, et oriente le développement.
Il faut libérer la dimension sociale de sa soumission au critère de la rentabilité financière, et, pour y parvenir, il faut pénétrer au coeur de la gestion de l'entreprise.
Il faut des droits, attachés à la personne, transférables d'une entreprise à l'autre et opposables à chaque employeur qui permettent ainsi de toujours bénéficier de la solidarité collective du travail : c'est cela que nous appelons la " sécurité sociale professionnelle " et rien d'autre.
Des réponses efficaces et durables impliquent également des politiques publiques et des pratiques démocratiques participatives. Elles ne signifient pas une étatisation mais un immense effort de démocratie publique. C'est " dans la proximité ", en les articulant à chaque niveau territorial, que se joueront de pair le développement de l'économie et de la démocratie, à l'intérieur de chaque pays comme au sein d'un ensemble coordonné de pays comme l'Europe.
Il y a un besoin impérieux de (re)solidariser fortement territoires et entreprises dans tous les domaines et à toutes les échelles : production, emploi, activités de Recherche/développement, services, droit social, financements, fiscalités, respect de l'environnement
C'est selon ces deux axes principaux, la mise en oeuvre des politiques publiques et le resserrement des liens entre entreprises et territoires que nous jugerons le projet de décentralisation du gouvernement et que nous serons amenés à faire des propositions précises pour le combattre ou l'amender selon les cas.
L'égalité des droits, l'égalité d'accès et l'égalité de traitement demeurent des revendications modernes. Elles nécessitent un combat permanent, car chaque évolution, chaque innovation peut toujours être monopolisée, exploitée, détournée par une minorité qui s'ingénie à maintenir ses privilèges. L'égalité ne peut pas exister là où une compétition sans merci ou un rapport de domination détruisent ou étouffent les solidarités humaines.
Que les françaises et les français, les salarié(e)s en particulier attendent du changement, c'est une évidence ; mais le changement qu'ils appellent de leurs voeux, ne consiste pas à contourner ou saper le droit du travail, brader le service public, démolir les statuts, bousiller les retraites et tailler des croupières à la Sécu !
Denis KESSLER faisait récemment des confidences dans le FIGARO. Il disait être " hanté " depuis la rencontre CGT/MEDEF d'il y a une dizaine de jours, par la question de savoir si la CGT voulait vraiment négocier. Je tiens à le rassurer : le vice-président du MEDEF n'a pas rencontré des fantômes ! Nous fréquentons peu les châteaux, et les seules chaînes que nous ayons jamais agitées sont des chaînes de production ou la chaîne de la solidarité !
La délégation que je conduisais lui a très clairement proposé, ainsi qu'à son Président Monsieur SEILLIERE, l'ouverture de quatre chantiers de négociations :
o Le droit à la formation tout au long de la vie et la reconnaissance des qualifications (ce qui implique que le MEDEF révise ses positions à l'origine du blocage des dernières négociations sur le sujet).
o La revalorisation des salaires et l'évolution des qualifications (le MEDEF conteste que ces sujets puissent être traités au plan national).
o Le recul de la précarité dans l'emploi et l'insécurité sociale (l'organisation patronale estime peu probable de déboucher sur une discussion déjà qualifiée de " très complexe "...).
o Le respect du droit et des libertés syndicales dans les entreprises (il n'y a pas de problème en la matière, d'après le MEDEF...).
Autrement dit, la question n'est pas de savoir si la CGT peut s'engager dans la voie de la négociation, elle le revendique. Par contre, on peut sérieusement douter du mandat qu'a le MEDEF pour aborder, avec les confédérations de salariés, les préoccupations sociales du moment à une échelle interprofessionnelle.
En matière de retraites, les salariés ont suivi les rounds d'observation et pour l'essentiel déjoué le coup bas du patronat par la mobilisation unitaire et exemplaire du 25 janvier 2001. Le gouvernement a fixé son calendrier. Les négociations s'ouvriront après les élections prud'homales. Il n'est pas besoin d'être devin pour pronostiquer une sérieuse confrontation.
Hier, le Ministre des Affaires Sociales a affirmé que " les préretraites étaient une catastrophe pour les régimes de retraite, alors même que les salariés vont devoir, à l'avenir, cotiser plus longtemps ".
A force de multiplier à tout bout de champ les petites phrases, en pratiquant les annonces chocs sur tous les sujets, et à ne pas respecter les représentants syndicaux, le gouvernement - comme on dit chez moi - " va finir par gagner un gros canard " !
Chacun se prépare donc avec, au centre, l'avenir de notre système de retraite par répartition et donc l'avenir pour des millions de retraités d'aujourd'hui et des salariés qui le seront demain.
Alors que nous allons rentrer dans une phase active de négociations, la campagne redouble pour opposer les salariés du secteur privé aux fonctionnaires et agents publics.
Il n'est pas la peine devant vous d'argumenter sur le danger de clivage alimenté en permanence par des campagnes de presse, des déclarations patronales, de fausses informations et de vraies opérations de désinformation.
À l'opposé de tout catastrophisme, la CGT affirme qu'il est possible de construire en matière de retraite les solutions qu'attendent les salariés et les citoyens : nous misons sur la solidarité dans et entre les générations pas sur l'individualisme et la division. Et pour cela, nous n'entendons pas fuir les problèmes d'autant qu'ils intéressent tous les salariés, et les jeunes au plus haut point.
Stopper l'inégalité qui va se creuser entre les salariés du privé et les agents du secteur public est indispensable. Le débat se concentre sur les 37 années et demies de cotisations comparées aux 40 qui s'appliquent pour le secteur privé. Il est évident que les adversaires du système par répartition font tout pour limiter le débat à cette seule question. Une étude d'un organisme de prospective, publiée à l'automne 2001, parlait même de s'attaquer au " statut excessivement privilégié des fonctionnaires ". Pardonnez-moi mais, pour ce qui est des vrais privilégiés, à la CGT nous avons une toute autre grille de lecture.
N'oublions pas que l'essentiel de l'écart qui se creuse entre public et privé vient de la réforme Balladur de 1993 et des règles d'indexation, d'abord pour le calcul de la pension, ensuite pour la pension liquidée : 1 point d'écart pendant 25 ans conduit à une pension plus basse de près de 20 % à la liquidation, pension qui perdra encore un tiers de sa valeur avant le décès du retraité ! En proposant de poursuivre les orientations de 1993 et de les appliquer à tous les régimes, le MEDEF entérine un effondrement du niveau relatif des retraites de plus d'1/3. Dans vingt-cinq ans, les plus basses retraites avoisineront le seuil de pauvreté d'alors ! Le MEDEF trompe tout le monde en parlant " de garantie du pouvoir d'achat des retraites ". En paraphrasant Jacques PREVERT, je crois que nous pouvons dire que " Le monde patronal ment, monumentalement. "
Alors que l'harmonisation progressive des conditions d'acquisition et de liquidation des droits à retraite entre les différents régimes est le plus souvent présentée comme un préalable indispensable à toute réforme des retraites, nous mettons en avant les garanties communes que nous sommes en droit d'exiger. Au plan des objectifs, nous sommes au diapason de l'écrasante majorité des français. Nous avons largement diffusé nos propositions en la matière et nous allons continuer de le faire.
Nous mettons en avant la garantie pour tous du droit à la retraite à 60 ans avec un niveau de la retraite représentant au moins 75 % du salaire. Il s'agit d'assurer la continuité du niveau de vie des salariés lors du passage à la retraite : c'est la vocation du système par répartition. 60 ans et 75 %, c'est cela qui sera au cur de l'affrontement dans la négociation.
Quant à la durée de cotisation nous proposons d'ouvrir la possibilité de cotiser dès l'âge de 18 ans ou même de 16 ans pour les jeunes dans des cycles de formation, d'apprentissage et d'études.
Mettre au second plan ces objectifs en présentant l'harmonisation public/privé comme la clé de voûte de la réforme du système, c'est s'enfermer dans la logique de l'alignement vers le bas. L'égalité de traitement suppose des conditions cimentant durablement la solidarité de tous les salariés pour que tout le monde soit bien traité.
Une augmentation des contributions financières prélevées dans l'entreprise est donc nécessaire ; elle devra assujettir ses revenus financiers et tenir compte de l'ensemble de la richesse créée par le travail.
La retraite ne doit ni basculer dans le champ de la rente, ni glisser dans une logique d'allocation. Elle est une rémunération salariale socialisée. La retraite doit donc dans son montant comme dans son financement rester étroitement liée aux évolutions du travail. C'est dans ce cadre que son avenir doit être discuté et négocié. C'est clairement l'enjeu d'une solidarité actifs/jeunes/retraités que nous voulons renouveler. Ces enjeux de solidarité seront sans aucun doute le coeur du débat de l'année 2003.
La fermeté de la CGT sur ce dossier sera sans faille, mais nous allons devoir, ensemble, nous mobiliser comme jamais si nous voulons que nos revendications soient prises en compte.
Aussi, je vous donne franchement mon sentiment. A entendre les dernières déclarations gouvernementales soufflant le froid et le chaud sur ses orientations, à voir le MEDEF s'aiguiser les dents et saliver devant le fromage des retraites, je me dis qu'il ne va pas falloir perdre trop de temps avant que les salariés entrent dans la partie pour que les négociations se déroulent bien sur la base de nos besoins.
Il serait, je crois, judicieux et efficace que dans les semaines à venir tous les syndicats réunis réfléchissent ensemble à l'objectif d'une vaste mobilisation nationale sur les retraites, dès le début de l'année prochaine.
Le MEDEF regrettait dernièrement qu'en 95 ce qu'il appelle le " camp des conservateurs " soit entré en résistance et ait réussi finalement à l'emporter. Ce n'est ni la première ni la dernière fois que la CGT sera effectivement entrée en résistance et elle en est fière.
A entendre ces messieurs, il faudrait toujours se plier à leurs conceptions : c'est d'ailleurs ce qu'ils appellent la flexibilité ! Et bien non, la CGT ne se plie pas et elle invite les salariés à bien conserver la faculté de rester debout.
Chers camarades,
Des élections syndicales, cela sous-entend une certaine compétition entre les organisations. Nous n'avons pas l'intention, pour ce qui nous concerne, de la conduire en tirant à vue sur le voisin.
Dans toutes nos actions, nous avons présents à l'esprit que l'unité syndicale est bien la question stratégique que nous avons à résoudre et à laquelle il va falloir consacrer beaucoup d'effort dans les jours et les semaines à venir. Car, si les organisations syndicales vont à la négociation divisées, elles seront toutes en situation de faiblesse, et les salariés avec elles !
Il faut cependant que ceux-ci connaissent les raisons qui conduisent chaque organisation à défendre telle ou telle position.
Il faut que chaque salarié puisse se faire librement son propre jugement sur le comportement des uns ou des autres pendant et à la fin des négociations.
Avons-nous eu tort ou raison en refusant la dernière convention d'indemnisation du chômage qui laisse à la charge de la collectivité 60 % des chômeurs ?
Avons nous eu tort ou raison de bannir le système répressif que le patronat voulait imposer aux chômeurs avec sa version du PARE ?
Avons-nous eu tort ou raison de rejeter, après la mobilisation de janvier 2001, le texte sur les retraites complémentaires qui stipule expressément qu'il faudrait, à l'avenir, privilégier un nouvel allongement de la durée de cotisations des salariés dans la réforme des retraites ?
C'est aussi sur tout cela qu'il faudra se prononcer le 11 décembre.
Combien de négociations qui se concluent par la signature d'accords minoritaires qui ne tiennent pas compte de l'opinion des salariés ?
Le patronat a beau jeu de vouloir négocier les droits sociaux par entreprise, voire même par établissement. Lorsqu'il rencontre une présence syndicale - ce qui est malheureusement loin d'être le cas partout - il sait pouvoir contourner l'obstacle puisqu'il lui suffit d'obtenir une signature de l'une des 5 confédérations pour mettre en oeuvre un accord.
Cette situation n'est plus tenable. Il aurait été salutaire que le gouvernement précédent ait le courage et l'audace d'ouvrir le chantier de la démocratie sociale. Il est urgent que le nouveau gouvernement s'attelle à cette réforme, sinon son discours sur le dialogue social s'avérera n'être que du verbiage ou de la poudre aux yeux. !
Il faut tenir compte de ce que disent les salariés aux élections professionnelles. Ainsi, seuls doivent être mis en oeuvre les accords signés par des organisations syndicales représentant une majorité des salariés concernés par la négociation.
Chacun comprend, dans les circonstances actuelles, combien les élections prud'homales du 11 décembre représentent un rendez-vous de première importance pour notre avenir à tous.
L'enjeu est multiple, chacun doit en prendre la mesure.
Il concerne bien sûr, la qualité des juges salariés qui seront élus à l'issue de cette consultation nationale.
Je suis heureux de pouvoir vous annoncer que la CGT présentera des listes de candidats dans toutes les circonscriptions et dans toutes les sections.
Signe de notre dynamisme, 60 % des candidatures seront le fait de nouveaux candidats et près de 40 % des listes seront composées de candidates . C'est un progrès sensible sur le dernier scrutin et je veux saluer ce premier résultat qui est le fruit des efforts réels des directions syndicales et des syndiqués.
Les militantes et les militants présentés par la CGT peuvent s'appuyer sur une organisation qui a l'expérience et l'expertise nécessaires.
Dans les différentes sections, nous pouvons nous servir de notre propre bilan pour mettre en évidence que dans bien des cas, nous avons contribué à réparer des préjudices à sanctionner des employeurs voulant ignorer le droit.
Mais l'enjeu dépasse largement l'élection de conseillers prud'hommes. Il s'agit en effet du seul rendez-vous permettant aux salariés de s'exprimer ensemble sur des listes syndicales, une opération vérité, en quelque sorte, de la représentativité des uns et des autres. C'est la seule occasion, qui se renouvelle tous les 5 ans, offerte aux chômeurs, aux salariés des petites entreprises qui n'ont ni Délégué du Personnel, ni Comité d'Entreprise, d'exprimer leur opinion. Quelles que soient leur nationalité, leur branche professionnelle, leur place dans l'entreprise, tous peuvent voter.
Le 11 décembre, les salariés procéderont à des élections et, dans le même temps, ils adresseront plusieurs messages.
Par leur vote, ils apporteront indirectement leur soutien à une démarche et à des objectifs syndicaux.
En ce sens, la question que chaque salarié devra aussi se poser au moment de voter c'est : "dans les circonstances présentes, quel peut être le vote le plus efficace, quel est le syndicat qui me semble le plus pertinent, à qui dois-je donner mon soutien sachant que cela aura des conséquences pour ma situation et celle de mes proches" ?.
A cette question, il va nous falloir convaincre que c'est la CGT la bonne réponse.
Le bulletin de vote qui va porter le progrès social, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin de vote qui fera réfléchir le gouvernement et le MEDEF à deux fois, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin pour l'avenir des retraites, de la sécu, des salaires et des 35 heures, pour la démocratie sociale, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin utile pour construire un rapport de forces qui permette aux salariés d'être écoutés et respectés avant d'avoir recours aux prud'hommes, c'est le bulletin CGT.
Le bulletin pour le tous ensemble, pour l'unité, pour l'efficacité, c'est le bulletin CGT.
17 millions d'électeurs, c'est une consultation sociale unique en son genre. Et pourtant les pouvoirs publics n'ont pas retenu de dispositions particulières permettant aux organisations syndicales d'avoir accès aux principaux média, pour que chacun connaisse les enjeux et ses droits pour le 11 décembre. Il n'est pas surprenant dans ces conditions qu'une enquête portant sur les intentions de vote laisse apparaître que la participation au scrutin s'annonce de nouveau trop faible.
Il faut donc d'abord compter sur nous-mêmes pour aller à la conquête de centaines de milliers de voix. Nous n'avons plus que quelques semaines devant nous pour organiser une mobilisation générale afin de contrarier ceux qui redoutent le verdict des urnes.
Chacun de vous, militant, syndiqué, sympathisant va devoir, dans son entourage familial, professionnel, aller chercher les voix une à une pour que la participation au vote progresse et que le nombre de bulletins CGT soit plus important encore.
Si les millions d'électeurs affirment leur confiance dans la CGT et confirment sa place en approuvant sa combativité et les principes de son action revendicative, le 11 décembre s'avérera, à sa manière, une des plus grandes journées d'action nationale interprofessionnelle que nous ayons construite ensemble.
Il faut que chacune de nos fédérations, chacune de nos Unions départementales, chacun de nos syndicats perçoive cette évidence de bon sens :un bon score pour la CGT et c'est un immense ballon d'oxygène pour toutes les revendications.
Le 11 décembre, c'est dès maintenant, avec votre engagement, qu'il se prépare :
- En allant largement à la rencontre des salariés de toutes catégories dans les entreprises, les zones d'activité. En allant là où il n'y a pas ou peu de syndicats implantés,
- En vérifiant que les salariés sont bien inscrits sur les bonnes listes électorales,
- En faisant respecter pour tous le droit de vote pendant le temps de travail le 11 décembre, une date que chaque salarié doit réserver pour aller voter.
Nous le ferons d'autant mieux que nous aurons la préoccupation de faire de cette campagne un tremplin pour renforcer notre organisation.
Dans ces milliers de rencontres et de contacts, nous ne devons pas hésiter à solliciter chacun pour qu'il s'engage davantage, qu'il se syndique, qu'il nous aide à implanter de nouvelles bases syndicales, qu'il participe à la construction du syndicalisme revendicatif, unitaire et démocratique dont le monde du travail a le plus grand besoin.
Il y a beaucoup d'ingrédients réunis pour nous conduire à être plus offensifs dans le renforcement de la CGT. L'écoute et les attentes à l'égard du syndicalisme sont importants. La pertinence de notre démarche est de mieux en mieux appréciée. Nous sommes sans cesse sollicités pour donner un coup de main ; malheureusement, beaucoup de salariés attendent souvent que les choses tournent mal à l'entreprise avant de s'organiser en syndicat CGT.
A nous de convaincre aussi de la nécessité d'avoir partout des forces organisées, des forces CGT plus nombreuses.
A nous d'être persuasifs, d'aider à franchir le pas de l'adhésion à la CGT, comme un autre moyen d'action pour faire face à la situation.
Je le dis très amicalement aux sympathisants qui hésitent encore. Votre soutien et votre présence nous sont précieux. Vous avez besoin de la CGT, mais la CGT a aussi besoin de vous. C'est maintenant que nous avons besoin de réunir nos forces et nos idées.
Alors,
Venez prendre part à la défense de vos intérêts.
Venez voir la CGT de l'intérieur et vous verrez, comme tant d'autres, qu'elle n'est pas ce que ses adversaires disent d'elle.
Venez vous informer chaque semaine, notre journal, la Nouvelle Vie Ouvrière, est fait pour cela.
Venez, avec nous, construire votre meilleure force pour l'avenir.
Venez et vous participerez, comme les autres syndiqués de la CGT, à la réflexion collective, aux débats, aux décisions qui seront prises lors du prochain congrès de la CGT en mars prochain.
Chers camarades et chers amis,
Je veux vous dire, pour conclure, ma conviction et plus largement celle de la direction de la CGT.
La période que nous traversons est effectivement lourde d'enjeux, lourde de défis.
Mais si nous y mettons toute notre détermination et notre confiance - je n'en manque pas et je sais que vous n'en manquez pas non plus - si, sur chaque lieu de travail nous nous engageons résolument dans la mobilisation et la campagne et bien, tous ensemble, nous gagnerons sur les revendications et aux élections du 11 décembre.
(source http://www.cgt.fr, le 14 novembre 2002)