Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
Je ne cacherai pas le plaisir que j'ai aujourd'hui à être parmi vous avec Bernard Kouchner pour ouvrir vos assises de l'hospitalisation.
Ce sommet de l'hospitalisation publique, si vous me permettez ce terme, réunit en effet en un même lieu les représentants de 2 400 établissements publics, de près de 900 000 personnels médicaux, non médicaux, soignants, non soignants qui font chaque jour l'hôpital de notre pays.
Il faut saluer la réussite d'Hôpital Expo qui est devenue une rencontre de niveau international pour les milieux hospitaliers. Le programme de ces journées, le nombre des exposants, la qualité des intervenants illustrent cette réussite. Permettez-moi d'ajouter que l'édition 1998 de cette manifestation me paraît revêtir une importance particulière. Elle intervient en effet à un moment crucial.
Moment crucial, tout d'abord, Monsieur le Président, en raison du travail de rénovation en profondeur de la Fédération Hospitalière de France qui s'engage sous votre présidence. La Fédération Hospitalière de France, je tiens à la dire solennellement aujourd'hui, tient une place singulière et indispensable dans notre système hospitalier. Elle rassemble, et représente l'ensemble des établissements et des compétences hospitalières, au-delà des clivages politiques, des doctrines hospitalières, des disparités géographiques.
Lorsque nous nous sommes rencontrés, vous m'avez exposé l'esprit dans lequel vous engagiez votre présidence : votre volonté de voir la Fédération, incarner les valeurs du service public hospitalier et être un interlocuteur actif et constructif de la transformation de l'hôpital.
Important pour la FHF, ce moment l'est également pour Bernard Kouchner et moi-même qui sommes venus vous dire après neuf mois de rencontres, de concertation et d'écoute des différentes composantes du monde hospitalier, des organisations syndicales et professionnelles, quels sont les axes de notre politique hospitalière pour les années à venir.
Nous avons été frappés dès notre arrivée au Gouvernement par l'importance des traumatismes qu'a connus le secteur de la santé. Divisions et blocages en médecine de ville, doute et perte de confiance pour l'hôpital comme si, malgré la compétence de ses professionnels et la qualité de ses équipements, l'hôpital avait perdu sa foi en l'avenir. Comme si le doute s'était installé sous le coup d'une rigueur budgétaire myope et d'une gestion autoritaire de la nécessaire évolution du système hospitalier.
Nous sommes venus aujourd'hui vous dire non seulement notre confiance dans l'hospitalisation publique mais également notre volonté de construire l'hôpital du XXIe siècle avec l'ensemble des partenaires hospitaliers .
Pour cela, il nous faut tracer de nouvelles perspectives. Je crois tout d'abord indispensable que le débat porte à nouveau sur l'hôpital lui-même et le service public hospitalier.
On a trop parlé aussi de l'administration de tutelle, on a trop voulu faire croire qu'il suffisait de réformer le tuteur pour permettre à l'hôpital d'évoluer.
On a trop parlé de comptabilité et de structures. La réforme hospitalière repose d'abord sur les personnels, leurs compétences, leur engagement.
Parlons des hospitaliers, des soignants, des non-soignants, des médecins, des non-médecins, de ceux qui font l'hôpital, qui prennent en charge chaque jour les blessés, les malades, les personnes démunies qui n'ont souvent pour ultime recours que les urgences hospitalières.
On a trop parlé du passé. On a beaucoup entendu parlé de ce qui n'allait pas, de ce qui aurait pu être fait, de ce qui avait été fait à tort. L'analyse rétrospective est utile mais je crois qu'il faut aujourd'hui parler d'avenir. De l'avenir d'un hôpital qui doit s'adapter, qui doit s'ouvrir. De sa capacité à répondre aux défis fantastiques qui sont ceux de la prise en charge des maladies à l'aube du XXIe siècle.
Enfin, et surtout, je voudrais qu'en parlant de l'hôpital, nous parlions du malade. On a trop parlé de prouesses scientifiques et de technique médicale.
Revenons au malade, réfléchissons à sa prise en charge, à la façon dont l'hôpital mais également les autres acteurs du système de santé peuvent encore mieux que ce n'est fait aujourd'hui, se mettre à son service, lui éviter des démarches inutiles, lui donner le maximum de chance face à la maladie.
Cette nouvelle démarche hospitalière, nous entendons l'organiser autour de quatre grands objectifs, autour de quatre axes majeurs.
- le service public hospitalier doit être au coeur du devenir du système de santé ;
- l'hôpital public doit poursuivre son adaptation à partir des besoins de nos concitoyens.
- la réforme hospitalière doit se construire autour du malade
- la réforme hospitalière doit reposer sur un nouvel élan de la communauté hospitalière
I - Le service public hospitalier au coeur du devenir du système de santé
Il faut en premier lieu revenir sur la notion même de service public hospitalier. Elle a été trop absente des débats depuis quelques années. Le contexte dans lequel le service public hospitalier s'inscrit, a profondément changé. Les débats sur l'hospitalo-centrisme, la crainte d'un hôpital tout puissant, les conflits entre l'hospitalisation publique et l'hospitalisation privée sont pour l'essentiel derrière nous.
L'hôpital n'est plus ce lieu immobilier, ce "grand renfermement" pour reprendre l'expression de Michel Foucault. Il ne mesure plus sa réussite ou sa puissance au nombre de ses lits.
Le service public hospitalier doit être, j'en suis convaincue, au coeur du devenir du système de santé et les trois mots qui le composent sont porteurs des changements qu'il nous faut conduire aujourd'hui.
* Tout d'abord le service
Chaque jour, 200 000 personnes franchissent la porte de l'hôpital pour une urgence, une hospitalisation programmée, un traitement en alternative à l'hospitalisation, une consultation ou une exploration complémentaire.
Etre au service du malade est la vocation même de l'hôpital mais ce service doit évoluer, doit s'adapter aux progrès techniques et aux attentes des malades. Etre au service du malade, c'est aujourd'hui pour l'hôpital, aller vers le patient. Nous souhaitons donc développer des unités mobiles, nous voulons franchir une étape nouvelle dans le développement de la chirurgie ambulatoire, et garantir une offre de soins de proximité chaque fois que cela est possible.
Etre au service du malade c'est moderniser encore l'accueil des patients et la prise en charge des patients hospitalisés, adapter les horaires et personnaliser les consultations .
Cette reconnaissance par l'hôpital des droits du malade est une exigence morale et politique de cette fin de siècle. Le malade est non seulement une personne inquiète, une personne qui souffre, c'est aussi un citoyen.
Je voudrais insister sur l'apport considérable qui a été celui des associations de patients, notamment dans la lutte contre le sida. Par leur engagement et leur détermination, elles ont largement contribué à une prise de conscience renouvelée sur ces questions.
Enfin, être au service du malade, c'est pour l'hôpital s'ouvrir sur la cité, c'est être un lieu d'accueil et de solidarité pour ceux qui sont obligés d'y séjourner, mais également pour leurs familles, pour ceux qui les visitent.
* Un service public ensuite
L'hôpital, vous le savez, est un facteur essentiel de réduction des inégalités devant les soins. Et cette fonction traditionnelle des hôpitaux publics est particulièrement importante dans la lutte contre la précarité.
C'est aux urgences hospitalières que se présentent les exclus, dans des conditions sanitaires souvent graves ; plusieurs rapports l'ont récemment souligné. L'hôpital demeure l'endroit où sont le mieux pris en charge les plus démunis. Le gouvernement a décidé dans le cadre du programme de prévention et de lutte contre les exclusions de faire de l'égal accès aux soins une priorité nationale. L'institution d'une couverture maladie universelle et d'une protection complémentaire pour les plus défavorisés permettront de leur garantir la prise en charge financière des soins.
Mais l'hôpital doit également voir reconnue sa mission sociale. Cette mission indispensable mais trop souvent accomplie silencieusement et mal prise en compte dans les budgets hospitaliers. Nous avons donc décidé de l'inscrire dans la loi définissant les missions du service public hospitalier.
* Enfin, ce service public est hospitalier
Cela signifie que l'hôpital est tout d'abord le lieu des techniques médicales les plus poussées, les plus sophistiquées, les plus porteuses d'espoir.
L'hôpital est bien souvent la porte d'entrée du progrès médical dans notre société, c'est également la porte d'accès au progrès médical pour l'ensemble de la population.
L'essor des chirurgies de pointe -pensons aux transplantations ou à la chirurgie cardiaque-, le développement des thérapies cellulaires et plus récemment des thérapies géniques, l'introduction des techniques de céliochirurgie se sont faites à l'hôpital.
Le service public hospitalier est également un lieu d'innovation et de recherche. Il prépare et assure les transferts de technologies et de savoir faire. Les efforts consentis pour le développement de la recherche clinique dans les hôpitaux français sont un élément important de l'irrigation de la communauté scientifique nationale et internationale.
Mais je voudrais également souligner que contrairement à ce qui est trop souvent dit, l'hôpital public a une remarquable capacité d'adaptation.
Deux exemples seulement. L'hôpital public a pris en charge le sida dans des conditions de célérité tout à fait remarquables. Il s'est, en quelques années, réorganisé, a modifié ses pratiques pour faire face à cette nouvelle pathologie.
De même, je tiens à rappeler et à insister sur le fait que c'est le service public hospitalier qui le premier s'est engagé dans la politique de maîtrise des dépenses. Les hospitaliers dans leur ensemble, directeurs, médecins, personnels soignants, personnels administratifs ont, depuis le début des années 80, permis à l'hôpital d'assumer la contrainte financière qui pèse sur notre système de protection sociale alors que, ne l'oublions pas, les autres secteurs de la santé ne se sont soumis que récemment à cette discipline.
Les soins hospitaliers publics représentaient 41,3 % de la consommation de soins et de biens médicaux en 1980 ; en 1996 leur part n'était plus que de 37 %. Dans le même temps, la durée moyenne de séjour est passée, pour la médecine, de 17,2 jours à 6,8 jours, pour la chirurgie de 8,7 jours à 5,3 jours et pour l'obstétrique de 6,8 jours à 4,8 jours.
Cela est d'autant plus méritoire que l'hôpital public l'a fait sans porter atteinte à la qualité des soins, qu'il l'a fait par des gains de productivité, par un effort d'imagination et d'organisation.
C'est parce qu'il incarne ces valeurs fondamentales que le service public, je l'ai dit, doit être au coeur du devenir du système de santé. Il ne s'agit pas qu'il soit tout puissant, mais qu'il soit le socle des coopérations entre les différents acteurs de la santé.
II - L'hôpital doit poursuivre son adaptation à partir des besoins de nos concitoyens.
Pour cela le secteur hospitalier, établissements publics et privés confondus, est tenu à une adaptation permanente sous l'effet de plusieurs phénomènes convergents.
L'évolution démographique et sociale du pays fait émerger des besoins nouveaux, mal ou pas pris en charge. Je pense notamment aux soins pour personnes âgées, et à l'accompagnement des états de dépendance. Je pense également aux populations les plus démunies, pour lesquelles l'accès aux soins est malaisé. Je pense enfin aux plus jeunes, dont l'état de santé doit être encore améliorer.
L'évolution des thérapeutiques et des techniques, particulièrement rapide dans nos sociétés développées, contribue à réduire dans des proportions très importantes les durées de séjour dans les établissements. Il y a dix ans encore, nos aînés étaient hospitalisés plus d'une semaine pour une opération de la cataracte. Aujourd'hui, cette opération se fait sur le mode de la chirurgie d'un jour.
L'élévation du degré de technicité des soins : le progrès médical requiert souvent une forte mobilisation de moyens humains et matériels pour garantir la sécurité et, au-délà, la qualité des soins. Cela conduit pour certaines spécialités à concentrer l'offre sur un nombre limité de sites. Pour d'autres au contraire, il faut développer une offre de proximité.
Face à ces mutations qui sont autant d'exigences pour l'hôpital public, il nous faut dégager des perspectives pour que chacun puisse comprendre et s'approprier le sens des évolutions en cours, pour dissiper les inquiétudes qu'évoque le mot restructuration. C'est dans cet esprit que j'ai décidé d'anticiper la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire.
Les schémas régionaux de premières génération ont permis de mettre en place un certain nombre d'instruments, de réunir des données éparses et de provoquer une première réflexion méthodologique sur la planification hospitalière.
Toutefois, l'approche est restée essentiellement centrée sur l'offre de soins et non sur les besoins à satisfaire. La volonté d'être exhaustif a sans doute dilué les véritables priorités qui auraient dû être celles des schémas. Enfin, la conduite des opérations a été trop souvent administrative et a souffert d'un manque d'ouverture sur les acteurs régionaux de la santé.
Les nouveaux SROS doivent partir des besoins des populations en s'appuyant notamment sur les bassins de vie. Il faut rapprocher l'organisation sanitaire des trajets empruntés par les populations pour travailler, pour faire leurs achats ou pour leurs loisirs. Ces déplacements dessinent des bassins de vie qui ne correspondent pas toujours aux découpages administratifs traditionnels. C'est à ce niveau que peuvent s'organiser bien des services sanitaires afin de garantir un haut niveau technique, la sécurité des soins et la proximité de prise en charge. Il conviendra d'inscrire notre réflexion comme notre action dans le cadre de ces bassins de vies. C'est une autre façon de prendre en compte le malade.
La révision qui s'engage aujourd'hui permettra de recentrer les SROS sur des objectifs stratégiques qui devront être mis en oeuvre par les contrats d'objectifs et de moyens.
Il convient de placer le malade et non les structures au coeur de la réflexion, d'analyser de manière globale sa prise en charge par le système de soin dont l'hôpital est un élément majeur mais n'est qu'un élément. Aussi, je souhaite que la réflexion s'élargisse vers la médecine de ville et vers le médico-social. Si les SROS ne peuvent prescrire des évolutions que pour le champ de l'hospitalisation, leur révision doit être l'occasion d'impulser des réflexions communes, de lever les frontières traditionnelles.
La révision des SROS doit s'appuyer sur des priorités de santé publique définies au niveau régional notamment par les Conférences Régionales de Santé. Elle doit à partir d'une analyse des forces et faiblesses du dispositif hospitalier actuel, permettre une réponse mieux adaptée aux besoins des populations. Elle doit enfin, pour les spécialités et les secteurs où l'offre est excédentaire ou inadaptée, fixer le cadre et les conditions des reconversions qui s'imposent.
Ces objectifs, ces priorités seront définis au niveau régional. La région s'affirme en effet progressivement comme le cadre adapté pour définir des politiques de santé attentives aux réalités locales.
Dès 1991, la loi avait posé le principe d'une régionalisation des politiques hospitalières. Le cadre régional doit également s'imposer pour la médecin libérale et à terme pour le financement par l'assurance maladie du secteur médico-social. Dès cette année, l'approche régionale a été introduite dans l'allocation des ressources des cliniques privées. Il nous faut donc encore progresser vers la régionalisation des enveloppes. Un cadre unique pour l'appréciation des besoins comme pour l'allocation des moyens s'impose. Il facilitera les inévitables transferts et l'adaptation du système hospitalier.
Nous souhaitons donc réaffirmer la dimension régionale de la politique hospitalière.
Aussi, nous n'avons pas voulu remettre en cause le principe des agences régionales de l'hospitalisation. Pour autant, et pour répondre à une des inquiétudes que vous avez exprimée, Monsieur le Président, il n'y a dans ce pays qu'une politique hospitalière. Elle s'inscrit dans le cadre des axes stratégiques du gouvernement et d'une doctrine hospitalière précise.
Les agences ont pour charge de la mettre en oeuvre et de l'adapter aux réalités locales. Le niveau régional paraît -je l'ai dit- à cet égard pertinent. Les agences pourront articuler et mettre en cohérence les instruments de planification et les moyens budgétaires. Elles pourront exercer un contrôle et une régulation financière de proximité. La maîtrise des dépenses est une nécessité pour la collectivité mais elle doit s'exercer au plus près des réalités du terrain.
Mais parce qu'elle ont des responsabilités éminentes, les agences doivent agir dans la plus grande concertation avec l'ensemble des acteurs du système de santé régional et la plus grande transparence dans la définition des objectifs et des méthodes. Je sais qu'en ce domaine, il reste des progrès à accomplir. J'ai été amené à rappeler aux directeurs d'ARH ce devoir de concertation et de transparence. Sur ce point, nous serons intransigeants : la politique de recomposition du tissu hospitalier ne peut être faite dans le secret d'une administration.
Parce qu'elles doivent conduire des mutations importantes de notre système hospitalier, les agences doivent d'autant plus respecter l'autonomie de gestion des acteurs, faire appel à leur initiative et à leurs projets et développer avec eux une démarche fondée sur le contrat.
C'est une priorité absolue pour nous, que de développer ce que je pourrais appeler une démocratie sanitaire.
La révision des SROS qui s'engage comme les Etats généraux qui débuteront prochainement pour s'achever à la fin de l'année, seront l'occasion de mettre en pratique cette notion nouvelle. La santé mérite un large débat démocratique. Elle intéresse l'ensemble de la population. Il n'est pas de sujet qui concerne plus nos concitoyens.
C'est pourquoi, les élus et les collectivités locales, les organisations syndicales et professionnelles et dans toute la mesure du possible le public, seront associés aux travaux des Etats généraux et, à travers leurs représentants, à ceux des schémas régionaux d'organisation sanitaire.
Je vous confirme à cet égard, M. le Président, pour répondre à une de vos questions, que j'ai demandé aux A.R.H. de saisir les collectivités territoriales aux moments importants de la procédure de révision des SROS. Comme vous, j'ai la conviction que la recomposition de notre tissu hospitalier ne se fera pas sans associer les élus aux réflexions et aux décisions .
Cette expérimentation en grandeur réelle d'une démocratie sanitaire qui va être conduite en 1998, doit, dans mon esprit, s'imposer comme un mode de gestion permanent du système hospitalier et du système de santé. Les Etats généraux comme la révision des SROS, doivent préfigurer les nouvelles pratiques de concertation et d'association des professionnels et des usagers du système de santé.
Définie dans ce cadre démocratique, l'adaptation de notre tissu hospitalier doit également s'organiser autour d'une valeur centrale du service public : l'égalité des usagers, l'égalité de tous devant la maladie sur le territoire national.
Il s'agit pour cela de conjuguer, vous l'avez évoqué Monsieur le Président, proximité et qualité. La proximité d'un hôpital rassure l'immense majorité des Français, c'est bien compréhensible. Mais la proximité se maintient parfois au dépens de la qualité. C'est pourquoi, Bernard Kouchner y reviendra longuement, il est nécessaire de promouvoir les indispensables complémentarités entre les établissements, seule solution pour promouvoir des soins de qualité en tout point du territoire. C'est dans la constitution de réseaux par pathologie ou par population que pourra se refonder l'unité du système de santé. Réseaux ville/hôpital, réseaux transhospitaliers, collaborations avec le secteur médico-social, sont autant de moyens d'assurer la continuité de la prise en charge du malade.
Ces réseaux permettront au praticien de dépasser les frontières, les étiquettes hospitalières, "d'appartenir" à plusieurs hôpitaux. Ils offriront au patient la meilleure chance de rester dans son lieu habituel de vie, dans son cercle familial, tout en bénéficiant d'une prise en charge efficace.
Des évolutions considérables sont intervenues. Les exemples de coopération, d'association entre les professionnels libéraux, les établissements sanitaires privés et, dans quelques cas, les établissements médico-sociaux se développent. Ces évolutions fondées sur la bonne volonté, sur l'intelligence et l'engagement d'acteurs locaux doivent se généraliser. L'hôpital est une des composantes de la chaîne de santé, l'un des intervenants des réseaux de santé. Si les murs ne peuvent être toujours abolis, du moins les portes doivent elles être plus ouvertes entre médecins de famille, médecins spécialistes, services hospitaliers, cliniques privées et établissements médico-sociaux.
L'essor des nouvelles technologies de l'information offre à l'hôpital un champ nouveau de modernisation. Je pense par exemple aux potentialités d'utilisation de la carte de professionnel de santé à l'intérieur des établissements, dont les expériences menées à Strasbourg et à Mâcon ont confirmé la validité.
Le réseau santé social, qui s'ouvrira dans les jours qui viennent en Bretagne permettra également aux hôpitaux de se rapprocher de la médecine de ville dans des conditions qui n'étaient pas envisageables jusqu'à présent.
Ce réseau mettra en effet en relation, dans des conditions de sécurité particulièrement rigoureuses, l'ensemble des acteurs du monde de la santé. Etablissements de santé et praticiens de ville pourront ainsi communiquer entre eux.
On devine aisément les bénéfices que tireront les patients d'une telle avancée, eux qui vont et viennent entre l'hôpital et la médecine ambulatoire.
Je demande à tous les établissements hospitaliers de rejoindre ce réseau et de développer des applications susceptibles d'y être proposées. En effet, l'hôpital est bien placé pour établir des banques de données médicales ou encore promouvoir la télémédecine. Autant d'applications fondamentales pour le développement et la réussite d'un réseau dédié à la santé.
L'hôpital saura relever le défi des nouvelles technologies de l'information, j'en suis convaincue. Il suffit de songer aux initiatives d'établissements, comme le CHU de Rouen. Je sais que de nombreux autres projets ne demandent qu'à être lancés.
Plus largement, des dispositifs permettant de mieux associer les médecins libéraux aux activités hospitalières et en retour de donner la possibilité aux médecins hospitaliers d'intervenir sur le terrain en collaboration avec les médecins libéraux, seront développés.
De même, la frontière existant entre le sanitaire et le médico-social sera adaptée, les rapprochements favorisés. La réforme de la tarification et la modification de la loi de 1975 qui sont en préparation, contribueront à cette évolution. L'unité du système sanitaire et social qui ne peut que bénéficier aux malades doit être notre objectif, dans le respect bien sûr des spécificités des populations et des conditions de prise en charge.
III - La réforme hospitalière doit être construite autour du malade.
J'ai, depuis quelques mois, beaucoup entendu parlé de restructuration, d'évaluation, de réorganisation, d'efficience.
Comment ne pas adhérer à de tels objectifs ? Mais ils ne prennent de sens qu'à condition d'être mis au service du malade, qu'à condition de se justifier par une meilleure prise en charge de ceux qui ont recours à l'hôpital.
* La sécurité sanitaire, la qualité des soins
A cet égard, la sécurité sanitaire et la qualité des soins dispensés sont une priorité absolue de la politique hospitalière.
Un travail remarquable a été accompli en la matière contre les infections nosocomiales depuis une dizaine d'années. C'est dans cet effort constant et qui doit être en permanence renouvelé que s'inscrivent les priorités affirmées récemment en matière de sécurité des naissances, de sécurité anesthésique, de développement de réseaux coordonnés des urgences ou de transports sanitaires, comme en matière de sécurité des produits de santé.
* L'évaluation des pratiques
Ce souci de sécurité, de qualité doit se traduire pour le service public hospitalier, comme d'ailleurs l'ensemble des établissements, par le développement de l'évaluation des pratiques.
La communauté scientifique doit être la garante des bonnes pratiques médicales. La transformation de l'ANDEM en agence nationale pour l'accréditation et l'évaluation en santé (ANAES), le développement de ses moyens, l'engagement d'une politique d'accréditation doivent permettre de tirer vers le haut la qualité des soins dans notre pays.
Loin de moi l'idée de penser qu'elle est, dans l'ensemble, problématique. Mais chacun reconnaîtra qu'elle peut toujours être améliorée et qu'elle doit surtout constituer un effort permanent de l'ensemble des institutions.
Cette évaluation des pratiques, cette politique d'accréditation des structures doivent être conduites avec le souci de la plus grande transparence. Transparence sur les données, transparence sur les méthodes, transparence sur les résultats.
* La transparence à l'hôpital
La transparence est en effet un impératif majeur, nous la devons à nos concitoyens. Il faut aider les patients à s'orienter au sein de l'hôpital, à accéder aux informations qui leur sont nécessaires et lorsqu'ils le souhaitent, à prendre connaissance avec un soutien médical de leur dossier personnel. Cet effort de transparence doit, comme dans tous les services publics, être accompli. Il est particulièrement fondamental à l'hôpital où il ne s'agit pas de régler des problèmes administratifs mais de questions de vie et de mort.
Il faut donner toute leur place aux dispositifs de conciliation et de prévention des contentieux médicaux. D'ici l'été sera publié le décret relatif à la commission de conciliation qui, dans chaque établissement de santé, sera chargée d'informer, d'assister et d'orienter toute personne qui s'estime victime d'un préjudice du fait de l'activité de l'établissement, et de lui indiquer les voies de conciliation et de recours dont elle dispose.
Un suivi du bon fonctionnement de ces commissions sera également mis en place. Il y a, comme l'écrivait François Ewald, un "devoir de vérité" en matière médicale.
Nous travaillons également, vous le savez, sur la prise en charge de l'aléa thérapeutique. Ces dispositifs ne doivent pas être redoutés par les médecins. Ils contribueront à préserver la relation de confiance entre le médecin et le malade.
Enfin, Bernard Kouchner et moi-même proposerons un certain nombre de mesures permettant de mieux garantir la transparence et l'équité en matière d'activité libérale des praticiens à l'hôpital. Nous sommes convaincus que des mesures telle la recomposition des commissions d'activité libérale, la prise en compte d'un quota d'activités et non d'une proportion de lits, la priorité donnée à l'activité publique peuvent répondre aux inquiétudes qui se sont exprimées sur l'usage excessif de cette exception. Nous n'entendons pas la remettre en cause mais la principale menace qui pèse sur elle réside aujourd'hui dans les abus dont elle est à l'origine.
* La qualité de vie de tous les malades
Nous sommes persuadés qu'il nous faut mieux prendre en compte la qualité de vie des malades. Le développement au sein du service public hospitalier, d'activités d'accompagnement ou de soutien du malade, trop souvent ignorées ou sous-estimées et qui pourtant doivent être une composante à part entière de la prise en charge hospitalière.
Des progrès ont été accomplis dans ce domaine, ils doivent être poursuivis et généralisés. Je parle bien évidemment de la prise en charge de la douleur, de l'attention portée à la qualité de vie dans les traitements mais aussi du développement d'activités ludiques ou de formation à l'intention par exemple des enfants hospitalisés pour une longue période. A cet égard, la création des emplois jeunes permettra de prendre en charge ces besoins qui sont à l'origine de métiers nouveaux.
Je suis convaincue que le service public hospitalier peut, au-delà des progrès médicaux qu'il apporte aux patient, leur offrir également une amélioration de la qualité de leur vie malgré la maladie.
· L'affirmation de la mission sociale de l'hôpital.
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Le service public hospitalier joue déjà un rôle fondamental pour favoriser l'accès aux soins des personnes en situation de précarité. L'hôpital est un lieu d'accueil pour les personnes en difficulté mais il est essentiel que se développe une prise en charge qui ne soit pas exclusivement sanitaire.
Pour cela les dispositifs d'accueil médico-sociaux dit P.A.S.S. (Permanence d'Accès aux Soins de Santé) seront généralisés. Il ne s'agit en aucun cas de créer au sein de l'hôpital des filières spécifiques pour les plus démunis. Ceux-ci doivent avoir accès aux soins dans les mêmes conditions que l'ensemble de la population. La vocation des permanences d'accès aux soins est de faciliter leur intégration dans le système hospitalier et plus largement dans le système de soins.
De même l'hôpital doit, au delà de ses missions de soins, contribuer au dépistage des souffrances sociales, et s'attacher à établir un premier contact médical avec des populations qui ne peuvent ni n'osent venir vers lui.
L'ouverture de l'hôpital à la cité sera ainsi une priorité ; avec d'une part, la possibilité pour les institutions sociales et les associations de malades, sociales, humanitaires, d'être plus souvent et plus systématiquement présents à l'hôpital, et d'autre part le développement de la participation de l'hôpital à des réseaux sanitaires et sociaux, y compris à titre pilote, grâce à des unités mobiles hospitalières.
Vous m'avez, M. le Président, assuré de la détermination des hospitaliers à relever ce défi de plus. Je ne doute pas de leur volonté de s'engager dans cette nouvelle mission d'intérêt général. Bien évidemment, je veillerai à ce que cette nouvelle mission soit prise en compte dans les budgets.
IV - La réforme hospitalière doit reposer sur un nouvel élan pour la communauté hospitalière.
Je l'ai dit en commençant, on a trop souvent parlé de structures et de techniques alors que l'hôpital est d'abord une collectivité de femmes et d'hommes, un lieu de compétences et souvent d'excellence, l'espace où s'expriment les solidarités les plus profondes.
Rien ne se fera à l'hôpital sans une adhésion forte de l'ensemble de ses personnels, de ses médecins, de ses infirmières, de ses soignants, de ses personnels administratifs, de son encadrement et de ses représentants institutionnels et syndicaux.
Les grandes réformes se font chaque jour, la recomposition du tissu hospitalier commence dans chaque service, les droits du malade dépendent de chaque équipe.
Pour favoriser cet indispensable élan, je voudrais évoquer quatre sujets.
* La priorité médicale
L'objectif peut paraître paradoxal, il n'en est pas moins essentiel. Certes l'activité médicale est la mission naturelle de l'hôpital. Encore faut-il que la priorité médicale, c'est-à-dire la primauté donnée à l'efficacité, à la qualité et à la sécurité des soins soit réaffirmée.
Il faut que les choix hospitaliers, qu'ils soient budgétaires ou thérapeutiques, soient faits en se fondant d'abord sur les besoins médicaux et les priorités de santé publique.
L'effort consenti par la collectivité nationale pour prendre en charge la dépense de prévention et de soins doit être réparti sur le fondement de priorités sanitaires et non de traditions, de faveurs ou d'instruments technocratiques.
Cette priorité médicale doit s'imposer dans la gestion hospitalière, dans la planification sanitaire et dans l'ensemble des politiques nationales notamment d'allocation des ressources. Elle doit constituer la charpente des projets d'établissement et des projets de service comme de leurs instruments juridiques que sont la contractualisation externe entre les hôpitaux et les agences régionales mais également la contractualisation interne qui doit être développée.
Je n'oublierai pas de balayer devant la porte de l'Etat. Cette priorité médicale doit également s'appliquer aux instances de tutelle et de contrôle, aux agences régionales, à l'administration d'Etat, à l'ensemble des partenaires administratifs de la santé. Les moyens doivent être, quelles que soient les contraintes économiques existantes, au service de la santé et non le contraire.
* La reconnaissance des hospitaliers
Je voudrais tout d'abord que soient dissipées toutes les craintes concernant l'emploi. Il n'y a pas de menaces pesant globalement sur l'emploi hospitalier. L'activité sanitaire et médico-sociale est une activité d'avenir. L'emploi ne peut qu'y croître, ou en tout cas ne pas diminuer. Bien évidemment, cela ne signifie pas que des évolutions n'auront pas lieu entre établissements ou entre activités dans le cadre des bassins de vie.
Si ces évolutions sont parfois nécessaires, elles doivent toujours être réalisées dans la plus large concertation. Elles pourront dorénavant bénéficier des instruments que nous avons mis en place à travers le fonds d'accompagnement social et le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux pour lequel 85 dossiers sont déjà à l'étude.
Mais au-delà de cette garantie sur l'emploi hospitalier, il faut, nous en sommes conscients, avoir le souci permanent de préciser, de clarifier, d'adapter les compétences de chaque catégorie professionnelle aux évolutions des techniques et des pratiques hospitalières. Les politiques de formation continue des personnels doivent largement intégrer cette volonté d'adaptation et accompagner les évolutions nécessaires.
Rien n'est plus démotivant que de voir son travail méconnu, son métier dévalorisé.
Une réflexion sur l'organisation du travail à l'hôpital et sur l'actualisation des compétences professionnelles sera entreprise avec les organisations syndicales et professionnelles. Des travaux sont en cours avec les médecins, les personnels et les directeurs pour accompagner la modernisation de l'hôpital.
L'évolution vers les 35 heures sera à cet égard un important chantier. Elle doit être l'occasion de repenser l'organisation du travail, de réduire les cloisonnements internes, de mieux valoriser l'énergie de chacun, de mieux reconnaître les compétences de tous. Les 35 heures seront un progrès pour la qualité de vie, mais elles doivent également se traduire par des progrès dans la vie interne des établissements.
· La modernisation du fonctionnement interne de l'hôpital.
·
Le fonctionnement interne de l'hôpital devient en effet le point crucial de tous les efforts à mener pour gagner le pari de la modernité et de la qualité.
L'hôpital bouge, se transforme, les comportements et les mentalités devront inévitablement évoluer au même rythme. En particulier, chacun devra s'impliquer plus volontiers dans la gestion.
Une réelle déconcentration de la gestion permettrait d'associer les médecins et les équipes soignantes aux choix économiques qui découlent des stratégies médicales. Il est temps de mettre fin à l'opposition entre gestion et soins. La démarche à laquelle je vous invite est ambitieuse. Elle suppose une modification profonde des rapports existants au sein de l'hôpital, voire du système de valeurs des différents acteurs. Elle suppose une évolution de l'organisation interne et une adaptation du système d'information sur lequel elle repose.
Elle doit aller jusqu'à la reconnaissance de formes d'organisation dans lesquelles les arbitrages sont réalisés au plus près des utilisateurs en fonction des besoins qu'ils ont eux-mêmes définis et dans une logique de responsabilitation qui suppose engagements réciproques et respect mutuel des compétences.
Vous devez donc porter ce débat car il appelle non pas de réponses toutes faites mais des échanges d'expériences au service desquels l'administration apportera son soutien.
Il reste qu'un travail important de conviction, de pédagogie devra être accompli, l'expérience prouvant que la réussite est souvent proportionnelle à l'implication personnelle de la direction et du corps médical.
Ne nous y trompons pas en effet ! L'hôpital public ne doit pas être dirigé de l'extérieur et d'ailleurs il ne saurait l'être. Disons le bien haut : c'est en son sein que la réforme de l'hôpital se gagnera.
Au-delà de la déconcentration, il faut promouvoir la participation des personnels. C'était une des ambitions de la loi de 1991.
Il fallait selon les propos du rédacteur de la loi de l'époque que "le mouvement, la responsabilité et le dialogue deviennent les maître mots de l'hôpital".
Aujourd'hui, si la vie sociale de l'hôpital est bel et bien rythmée par la réunion de multiples instances représentatives ou de concertation, sans même compter les très nombreuses réunions de travail informelles ou préparatoires, le bilan est encore mitigé. Les instances récemment créées se sont le plus souvent imposées du fait de la loi, sans pour autant affirmer une véritable autorité. L'abondance, l'éparpillement et l'empilement encouragent le doute tandis que la technicité croissante des dossiers à examiner, contribue au désenchantement des participants et à une faible efficacité des démarches.
Il faut rendre aux instances hospitalières leur vitalité ; plusieurs réflexions viennent naturellement à l'esprit qu'il conviendra de discuter.
- Renforcer le rôle des hospitaliers élus à la commission médicale d'établissement et au comité technique d'établissement, en précisant les moyens dont disposent ces instances pour remplir leurs missions, ainsi que le prévoit la loi.
- Eviter la redondance et l'excès de formalisme des instances.
- Améliorer la lisibilité de leurs attributions.
- Mieux connaître le devenir de leur avis.
En tout état de cause au cours de ces réflexions, je serai guidée par deux préoccupations qui ne sont pas contradictoires ; promouvoir la participation des personnels et favoriser l'adaptabilité de l'hôpital.
Comme je l'ai dit, le secteur hospitalier, comme le secteur de la santé dans son ensemble, n'est pas un secteur en déclin, au contraire. Les évolutions que traceront les schémas régionaux de deuxième génération, la recomposition du tissu hospitalier sont des nécessités pour répondre aux besoins de santé.
Les évolutions qui nous attendent, les transformations du système hospitalier qui sont devant nous constituent un projet formidable, elles sont un enjeu crucial pour notre société.
par la collectivité en faveur du système hospitalier mais également par une allocation des ressources plus proche du terrain, plus équitable, plus rationnelle et par conséquent plus exigeante, que nous pouvons conduire cette transformation profonde du système hospitalier.
Il est possible de concilier, compte tenu du niveau des dépenses de santé en France, la mutation dont je viens de parler et le nécessaire équilibre des finances publiques. A condition que cet effort soit accompli en concertation avec l'ensemble des acteurs grâce à un dialogue permanent sur les objectifs et avec un respect scrupuleux de l'obligation de transparence.
Afin de préparer l'avenir de l'hôpital, nous avons, Bernard Kouchner et moi-même, décidé d'installer quatre groupes de travail sur l'hôpital.
Le premier traitera des réseaux et des relations entre l'hôpital et la médecine de ville. Il tirera un bilan des expériences réalisées, analysera les obstacles à leur extension et proposera des mesures permettant d'en faire un mode de droit commun d'organisation du système de soins.
Un autre groupe, à partir d'un bilan du dispositif mis en oeuvre depuis 1991, étudiera les adaptations nécessaires à la participation du personnel aux différentes instances des établissements de santé et aux conditions d'association du corps médical à la politique de l'établissement. Il examinera aussi les mesures susceptibles d'améliorer l'organisation du travail à l'hôpital.
Le troisième groupe s'intéressera à l'évolution et aux perspectives d'évolution de l'offre hospitalière privée et élaborera des propositions permettant d'accroître la coopération entre le secteur public et le secteur privé.
Enfin, un groupe sera consacré aux moyens de parvenir à une meilleure évaluation de l'activité hospitalière pour affecter de manière plus équitable les ressources.
Ces groupes de travail viendront ainsi compléter les réflexions menées par le Professeur Nicolas sur les problèmes de démographie médicale à l'hôpital.
Je voudrais pour conclure, redire la confiance que je porte à l'hôpital.
Le monde hospitalier a montré depuis le début des années 80, sa capacité d'adaptation, sa faculté de prendre en charge de nouvelles techniques, de nouvelles pathologies, de nouvelles missions, mais également de prendre en considération les contraintes économiques et budgétaires.
De telles adaptations ne se font pas sans courage, sans détermination, ni même sans difficultés. J'en ai parfaitement conscience.
Si l'hôpital était un monde inerte, il ne se transformerait pas. Si l'hôpital était un monde insensible, il ne s'adapterait pas. Je comprends, et je trouve légitime les interrogations qui vous traversent, les impatiences manifestées, les doutes exprimées, bref tout ce qu'on appelle parfois le "malaise" hospitalier.
Ce sentiment, je l'interprête comme la traduction d'une volonté de mieux faire, la nécessité que les effets accomplis soient reconnus à leur juste valeur, l'attention portée à l'exigence de plus en forte de nos concitoyens envers leur système hospitalier. Vous ne voulez pas que l'on vous détourne du service du malade. C'est pourquoi, je tiens à vous dire ma foi dans le service public hospitalier, dans la qualité et la compétence des hommes et des femmes qui l'animent. Si nous avons ensemble à déterminer le meilleur itinéraire, le cap, lui, est connu. C'est celui que vous avez su tenir, contre vents et marées, celui du service du malade, du service du public, d'un modèle de service public.
Pour ma part, nous pouvons avec Bernard Kouchner, vous assurer de notre engagement personnel sur ce projet et vous redire l'attachement qui est le nôtre aux valeurs que vous représentez et auxquelles vous donnez chaque jour réalité.
Nous savons que nous pouvons compter sur vous, sachez que vous pouvez compter sur nous.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 3 octobre 2001)
Mesdames, Messieurs,
Je ne cacherai pas le plaisir que j'ai aujourd'hui à être parmi vous avec Bernard Kouchner pour ouvrir vos assises de l'hospitalisation.
Ce sommet de l'hospitalisation publique, si vous me permettez ce terme, réunit en effet en un même lieu les représentants de 2 400 établissements publics, de près de 900 000 personnels médicaux, non médicaux, soignants, non soignants qui font chaque jour l'hôpital de notre pays.
Il faut saluer la réussite d'Hôpital Expo qui est devenue une rencontre de niveau international pour les milieux hospitaliers. Le programme de ces journées, le nombre des exposants, la qualité des intervenants illustrent cette réussite. Permettez-moi d'ajouter que l'édition 1998 de cette manifestation me paraît revêtir une importance particulière. Elle intervient en effet à un moment crucial.
Moment crucial, tout d'abord, Monsieur le Président, en raison du travail de rénovation en profondeur de la Fédération Hospitalière de France qui s'engage sous votre présidence. La Fédération Hospitalière de France, je tiens à la dire solennellement aujourd'hui, tient une place singulière et indispensable dans notre système hospitalier. Elle rassemble, et représente l'ensemble des établissements et des compétences hospitalières, au-delà des clivages politiques, des doctrines hospitalières, des disparités géographiques.
Lorsque nous nous sommes rencontrés, vous m'avez exposé l'esprit dans lequel vous engagiez votre présidence : votre volonté de voir la Fédération, incarner les valeurs du service public hospitalier et être un interlocuteur actif et constructif de la transformation de l'hôpital.
Important pour la FHF, ce moment l'est également pour Bernard Kouchner et moi-même qui sommes venus vous dire après neuf mois de rencontres, de concertation et d'écoute des différentes composantes du monde hospitalier, des organisations syndicales et professionnelles, quels sont les axes de notre politique hospitalière pour les années à venir.
Nous avons été frappés dès notre arrivée au Gouvernement par l'importance des traumatismes qu'a connus le secteur de la santé. Divisions et blocages en médecine de ville, doute et perte de confiance pour l'hôpital comme si, malgré la compétence de ses professionnels et la qualité de ses équipements, l'hôpital avait perdu sa foi en l'avenir. Comme si le doute s'était installé sous le coup d'une rigueur budgétaire myope et d'une gestion autoritaire de la nécessaire évolution du système hospitalier.
Nous sommes venus aujourd'hui vous dire non seulement notre confiance dans l'hospitalisation publique mais également notre volonté de construire l'hôpital du XXIe siècle avec l'ensemble des partenaires hospitaliers .
Pour cela, il nous faut tracer de nouvelles perspectives. Je crois tout d'abord indispensable que le débat porte à nouveau sur l'hôpital lui-même et le service public hospitalier.
On a trop parlé aussi de l'administration de tutelle, on a trop voulu faire croire qu'il suffisait de réformer le tuteur pour permettre à l'hôpital d'évoluer.
On a trop parlé de comptabilité et de structures. La réforme hospitalière repose d'abord sur les personnels, leurs compétences, leur engagement.
Parlons des hospitaliers, des soignants, des non-soignants, des médecins, des non-médecins, de ceux qui font l'hôpital, qui prennent en charge chaque jour les blessés, les malades, les personnes démunies qui n'ont souvent pour ultime recours que les urgences hospitalières.
On a trop parlé du passé. On a beaucoup entendu parlé de ce qui n'allait pas, de ce qui aurait pu être fait, de ce qui avait été fait à tort. L'analyse rétrospective est utile mais je crois qu'il faut aujourd'hui parler d'avenir. De l'avenir d'un hôpital qui doit s'adapter, qui doit s'ouvrir. De sa capacité à répondre aux défis fantastiques qui sont ceux de la prise en charge des maladies à l'aube du XXIe siècle.
Enfin, et surtout, je voudrais qu'en parlant de l'hôpital, nous parlions du malade. On a trop parlé de prouesses scientifiques et de technique médicale.
Revenons au malade, réfléchissons à sa prise en charge, à la façon dont l'hôpital mais également les autres acteurs du système de santé peuvent encore mieux que ce n'est fait aujourd'hui, se mettre à son service, lui éviter des démarches inutiles, lui donner le maximum de chance face à la maladie.
Cette nouvelle démarche hospitalière, nous entendons l'organiser autour de quatre grands objectifs, autour de quatre axes majeurs.
- le service public hospitalier doit être au coeur du devenir du système de santé ;
- l'hôpital public doit poursuivre son adaptation à partir des besoins de nos concitoyens.
- la réforme hospitalière doit se construire autour du malade
- la réforme hospitalière doit reposer sur un nouvel élan de la communauté hospitalière
I - Le service public hospitalier au coeur du devenir du système de santé
Il faut en premier lieu revenir sur la notion même de service public hospitalier. Elle a été trop absente des débats depuis quelques années. Le contexte dans lequel le service public hospitalier s'inscrit, a profondément changé. Les débats sur l'hospitalo-centrisme, la crainte d'un hôpital tout puissant, les conflits entre l'hospitalisation publique et l'hospitalisation privée sont pour l'essentiel derrière nous.
L'hôpital n'est plus ce lieu immobilier, ce "grand renfermement" pour reprendre l'expression de Michel Foucault. Il ne mesure plus sa réussite ou sa puissance au nombre de ses lits.
Le service public hospitalier doit être, j'en suis convaincue, au coeur du devenir du système de santé et les trois mots qui le composent sont porteurs des changements qu'il nous faut conduire aujourd'hui.
* Tout d'abord le service
Chaque jour, 200 000 personnes franchissent la porte de l'hôpital pour une urgence, une hospitalisation programmée, un traitement en alternative à l'hospitalisation, une consultation ou une exploration complémentaire.
Etre au service du malade est la vocation même de l'hôpital mais ce service doit évoluer, doit s'adapter aux progrès techniques et aux attentes des malades. Etre au service du malade, c'est aujourd'hui pour l'hôpital, aller vers le patient. Nous souhaitons donc développer des unités mobiles, nous voulons franchir une étape nouvelle dans le développement de la chirurgie ambulatoire, et garantir une offre de soins de proximité chaque fois que cela est possible.
Etre au service du malade c'est moderniser encore l'accueil des patients et la prise en charge des patients hospitalisés, adapter les horaires et personnaliser les consultations .
Cette reconnaissance par l'hôpital des droits du malade est une exigence morale et politique de cette fin de siècle. Le malade est non seulement une personne inquiète, une personne qui souffre, c'est aussi un citoyen.
Je voudrais insister sur l'apport considérable qui a été celui des associations de patients, notamment dans la lutte contre le sida. Par leur engagement et leur détermination, elles ont largement contribué à une prise de conscience renouvelée sur ces questions.
Enfin, être au service du malade, c'est pour l'hôpital s'ouvrir sur la cité, c'est être un lieu d'accueil et de solidarité pour ceux qui sont obligés d'y séjourner, mais également pour leurs familles, pour ceux qui les visitent.
* Un service public ensuite
L'hôpital, vous le savez, est un facteur essentiel de réduction des inégalités devant les soins. Et cette fonction traditionnelle des hôpitaux publics est particulièrement importante dans la lutte contre la précarité.
C'est aux urgences hospitalières que se présentent les exclus, dans des conditions sanitaires souvent graves ; plusieurs rapports l'ont récemment souligné. L'hôpital demeure l'endroit où sont le mieux pris en charge les plus démunis. Le gouvernement a décidé dans le cadre du programme de prévention et de lutte contre les exclusions de faire de l'égal accès aux soins une priorité nationale. L'institution d'une couverture maladie universelle et d'une protection complémentaire pour les plus défavorisés permettront de leur garantir la prise en charge financière des soins.
Mais l'hôpital doit également voir reconnue sa mission sociale. Cette mission indispensable mais trop souvent accomplie silencieusement et mal prise en compte dans les budgets hospitaliers. Nous avons donc décidé de l'inscrire dans la loi définissant les missions du service public hospitalier.
* Enfin, ce service public est hospitalier
Cela signifie que l'hôpital est tout d'abord le lieu des techniques médicales les plus poussées, les plus sophistiquées, les plus porteuses d'espoir.
L'hôpital est bien souvent la porte d'entrée du progrès médical dans notre société, c'est également la porte d'accès au progrès médical pour l'ensemble de la population.
L'essor des chirurgies de pointe -pensons aux transplantations ou à la chirurgie cardiaque-, le développement des thérapies cellulaires et plus récemment des thérapies géniques, l'introduction des techniques de céliochirurgie se sont faites à l'hôpital.
Le service public hospitalier est également un lieu d'innovation et de recherche. Il prépare et assure les transferts de technologies et de savoir faire. Les efforts consentis pour le développement de la recherche clinique dans les hôpitaux français sont un élément important de l'irrigation de la communauté scientifique nationale et internationale.
Mais je voudrais également souligner que contrairement à ce qui est trop souvent dit, l'hôpital public a une remarquable capacité d'adaptation.
Deux exemples seulement. L'hôpital public a pris en charge le sida dans des conditions de célérité tout à fait remarquables. Il s'est, en quelques années, réorganisé, a modifié ses pratiques pour faire face à cette nouvelle pathologie.
De même, je tiens à rappeler et à insister sur le fait que c'est le service public hospitalier qui le premier s'est engagé dans la politique de maîtrise des dépenses. Les hospitaliers dans leur ensemble, directeurs, médecins, personnels soignants, personnels administratifs ont, depuis le début des années 80, permis à l'hôpital d'assumer la contrainte financière qui pèse sur notre système de protection sociale alors que, ne l'oublions pas, les autres secteurs de la santé ne se sont soumis que récemment à cette discipline.
Les soins hospitaliers publics représentaient 41,3 % de la consommation de soins et de biens médicaux en 1980 ; en 1996 leur part n'était plus que de 37 %. Dans le même temps, la durée moyenne de séjour est passée, pour la médecine, de 17,2 jours à 6,8 jours, pour la chirurgie de 8,7 jours à 5,3 jours et pour l'obstétrique de 6,8 jours à 4,8 jours.
Cela est d'autant plus méritoire que l'hôpital public l'a fait sans porter atteinte à la qualité des soins, qu'il l'a fait par des gains de productivité, par un effort d'imagination et d'organisation.
C'est parce qu'il incarne ces valeurs fondamentales que le service public, je l'ai dit, doit être au coeur du devenir du système de santé. Il ne s'agit pas qu'il soit tout puissant, mais qu'il soit le socle des coopérations entre les différents acteurs de la santé.
II - L'hôpital doit poursuivre son adaptation à partir des besoins de nos concitoyens.
Pour cela le secteur hospitalier, établissements publics et privés confondus, est tenu à une adaptation permanente sous l'effet de plusieurs phénomènes convergents.
L'évolution démographique et sociale du pays fait émerger des besoins nouveaux, mal ou pas pris en charge. Je pense notamment aux soins pour personnes âgées, et à l'accompagnement des états de dépendance. Je pense également aux populations les plus démunies, pour lesquelles l'accès aux soins est malaisé. Je pense enfin aux plus jeunes, dont l'état de santé doit être encore améliorer.
L'évolution des thérapeutiques et des techniques, particulièrement rapide dans nos sociétés développées, contribue à réduire dans des proportions très importantes les durées de séjour dans les établissements. Il y a dix ans encore, nos aînés étaient hospitalisés plus d'une semaine pour une opération de la cataracte. Aujourd'hui, cette opération se fait sur le mode de la chirurgie d'un jour.
L'élévation du degré de technicité des soins : le progrès médical requiert souvent une forte mobilisation de moyens humains et matériels pour garantir la sécurité et, au-délà, la qualité des soins. Cela conduit pour certaines spécialités à concentrer l'offre sur un nombre limité de sites. Pour d'autres au contraire, il faut développer une offre de proximité.
Face à ces mutations qui sont autant d'exigences pour l'hôpital public, il nous faut dégager des perspectives pour que chacun puisse comprendre et s'approprier le sens des évolutions en cours, pour dissiper les inquiétudes qu'évoque le mot restructuration. C'est dans cet esprit que j'ai décidé d'anticiper la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire.
Les schémas régionaux de premières génération ont permis de mettre en place un certain nombre d'instruments, de réunir des données éparses et de provoquer une première réflexion méthodologique sur la planification hospitalière.
Toutefois, l'approche est restée essentiellement centrée sur l'offre de soins et non sur les besoins à satisfaire. La volonté d'être exhaustif a sans doute dilué les véritables priorités qui auraient dû être celles des schémas. Enfin, la conduite des opérations a été trop souvent administrative et a souffert d'un manque d'ouverture sur les acteurs régionaux de la santé.
Les nouveaux SROS doivent partir des besoins des populations en s'appuyant notamment sur les bassins de vie. Il faut rapprocher l'organisation sanitaire des trajets empruntés par les populations pour travailler, pour faire leurs achats ou pour leurs loisirs. Ces déplacements dessinent des bassins de vie qui ne correspondent pas toujours aux découpages administratifs traditionnels. C'est à ce niveau que peuvent s'organiser bien des services sanitaires afin de garantir un haut niveau technique, la sécurité des soins et la proximité de prise en charge. Il conviendra d'inscrire notre réflexion comme notre action dans le cadre de ces bassins de vies. C'est une autre façon de prendre en compte le malade.
La révision qui s'engage aujourd'hui permettra de recentrer les SROS sur des objectifs stratégiques qui devront être mis en oeuvre par les contrats d'objectifs et de moyens.
Il convient de placer le malade et non les structures au coeur de la réflexion, d'analyser de manière globale sa prise en charge par le système de soin dont l'hôpital est un élément majeur mais n'est qu'un élément. Aussi, je souhaite que la réflexion s'élargisse vers la médecine de ville et vers le médico-social. Si les SROS ne peuvent prescrire des évolutions que pour le champ de l'hospitalisation, leur révision doit être l'occasion d'impulser des réflexions communes, de lever les frontières traditionnelles.
La révision des SROS doit s'appuyer sur des priorités de santé publique définies au niveau régional notamment par les Conférences Régionales de Santé. Elle doit à partir d'une analyse des forces et faiblesses du dispositif hospitalier actuel, permettre une réponse mieux adaptée aux besoins des populations. Elle doit enfin, pour les spécialités et les secteurs où l'offre est excédentaire ou inadaptée, fixer le cadre et les conditions des reconversions qui s'imposent.
Ces objectifs, ces priorités seront définis au niveau régional. La région s'affirme en effet progressivement comme le cadre adapté pour définir des politiques de santé attentives aux réalités locales.
Dès 1991, la loi avait posé le principe d'une régionalisation des politiques hospitalières. Le cadre régional doit également s'imposer pour la médecin libérale et à terme pour le financement par l'assurance maladie du secteur médico-social. Dès cette année, l'approche régionale a été introduite dans l'allocation des ressources des cliniques privées. Il nous faut donc encore progresser vers la régionalisation des enveloppes. Un cadre unique pour l'appréciation des besoins comme pour l'allocation des moyens s'impose. Il facilitera les inévitables transferts et l'adaptation du système hospitalier.
Nous souhaitons donc réaffirmer la dimension régionale de la politique hospitalière.
Aussi, nous n'avons pas voulu remettre en cause le principe des agences régionales de l'hospitalisation. Pour autant, et pour répondre à une des inquiétudes que vous avez exprimée, Monsieur le Président, il n'y a dans ce pays qu'une politique hospitalière. Elle s'inscrit dans le cadre des axes stratégiques du gouvernement et d'une doctrine hospitalière précise.
Les agences ont pour charge de la mettre en oeuvre et de l'adapter aux réalités locales. Le niveau régional paraît -je l'ai dit- à cet égard pertinent. Les agences pourront articuler et mettre en cohérence les instruments de planification et les moyens budgétaires. Elles pourront exercer un contrôle et une régulation financière de proximité. La maîtrise des dépenses est une nécessité pour la collectivité mais elle doit s'exercer au plus près des réalités du terrain.
Mais parce qu'elle ont des responsabilités éminentes, les agences doivent agir dans la plus grande concertation avec l'ensemble des acteurs du système de santé régional et la plus grande transparence dans la définition des objectifs et des méthodes. Je sais qu'en ce domaine, il reste des progrès à accomplir. J'ai été amené à rappeler aux directeurs d'ARH ce devoir de concertation et de transparence. Sur ce point, nous serons intransigeants : la politique de recomposition du tissu hospitalier ne peut être faite dans le secret d'une administration.
Parce qu'elles doivent conduire des mutations importantes de notre système hospitalier, les agences doivent d'autant plus respecter l'autonomie de gestion des acteurs, faire appel à leur initiative et à leurs projets et développer avec eux une démarche fondée sur le contrat.
C'est une priorité absolue pour nous, que de développer ce que je pourrais appeler une démocratie sanitaire.
La révision des SROS qui s'engage comme les Etats généraux qui débuteront prochainement pour s'achever à la fin de l'année, seront l'occasion de mettre en pratique cette notion nouvelle. La santé mérite un large débat démocratique. Elle intéresse l'ensemble de la population. Il n'est pas de sujet qui concerne plus nos concitoyens.
C'est pourquoi, les élus et les collectivités locales, les organisations syndicales et professionnelles et dans toute la mesure du possible le public, seront associés aux travaux des Etats généraux et, à travers leurs représentants, à ceux des schémas régionaux d'organisation sanitaire.
Je vous confirme à cet égard, M. le Président, pour répondre à une de vos questions, que j'ai demandé aux A.R.H. de saisir les collectivités territoriales aux moments importants de la procédure de révision des SROS. Comme vous, j'ai la conviction que la recomposition de notre tissu hospitalier ne se fera pas sans associer les élus aux réflexions et aux décisions .
Cette expérimentation en grandeur réelle d'une démocratie sanitaire qui va être conduite en 1998, doit, dans mon esprit, s'imposer comme un mode de gestion permanent du système hospitalier et du système de santé. Les Etats généraux comme la révision des SROS, doivent préfigurer les nouvelles pratiques de concertation et d'association des professionnels et des usagers du système de santé.
Définie dans ce cadre démocratique, l'adaptation de notre tissu hospitalier doit également s'organiser autour d'une valeur centrale du service public : l'égalité des usagers, l'égalité de tous devant la maladie sur le territoire national.
Il s'agit pour cela de conjuguer, vous l'avez évoqué Monsieur le Président, proximité et qualité. La proximité d'un hôpital rassure l'immense majorité des Français, c'est bien compréhensible. Mais la proximité se maintient parfois au dépens de la qualité. C'est pourquoi, Bernard Kouchner y reviendra longuement, il est nécessaire de promouvoir les indispensables complémentarités entre les établissements, seule solution pour promouvoir des soins de qualité en tout point du territoire. C'est dans la constitution de réseaux par pathologie ou par population que pourra se refonder l'unité du système de santé. Réseaux ville/hôpital, réseaux transhospitaliers, collaborations avec le secteur médico-social, sont autant de moyens d'assurer la continuité de la prise en charge du malade.
Ces réseaux permettront au praticien de dépasser les frontières, les étiquettes hospitalières, "d'appartenir" à plusieurs hôpitaux. Ils offriront au patient la meilleure chance de rester dans son lieu habituel de vie, dans son cercle familial, tout en bénéficiant d'une prise en charge efficace.
Des évolutions considérables sont intervenues. Les exemples de coopération, d'association entre les professionnels libéraux, les établissements sanitaires privés et, dans quelques cas, les établissements médico-sociaux se développent. Ces évolutions fondées sur la bonne volonté, sur l'intelligence et l'engagement d'acteurs locaux doivent se généraliser. L'hôpital est une des composantes de la chaîne de santé, l'un des intervenants des réseaux de santé. Si les murs ne peuvent être toujours abolis, du moins les portes doivent elles être plus ouvertes entre médecins de famille, médecins spécialistes, services hospitaliers, cliniques privées et établissements médico-sociaux.
L'essor des nouvelles technologies de l'information offre à l'hôpital un champ nouveau de modernisation. Je pense par exemple aux potentialités d'utilisation de la carte de professionnel de santé à l'intérieur des établissements, dont les expériences menées à Strasbourg et à Mâcon ont confirmé la validité.
Le réseau santé social, qui s'ouvrira dans les jours qui viennent en Bretagne permettra également aux hôpitaux de se rapprocher de la médecine de ville dans des conditions qui n'étaient pas envisageables jusqu'à présent.
Ce réseau mettra en effet en relation, dans des conditions de sécurité particulièrement rigoureuses, l'ensemble des acteurs du monde de la santé. Etablissements de santé et praticiens de ville pourront ainsi communiquer entre eux.
On devine aisément les bénéfices que tireront les patients d'une telle avancée, eux qui vont et viennent entre l'hôpital et la médecine ambulatoire.
Je demande à tous les établissements hospitaliers de rejoindre ce réseau et de développer des applications susceptibles d'y être proposées. En effet, l'hôpital est bien placé pour établir des banques de données médicales ou encore promouvoir la télémédecine. Autant d'applications fondamentales pour le développement et la réussite d'un réseau dédié à la santé.
L'hôpital saura relever le défi des nouvelles technologies de l'information, j'en suis convaincue. Il suffit de songer aux initiatives d'établissements, comme le CHU de Rouen. Je sais que de nombreux autres projets ne demandent qu'à être lancés.
Plus largement, des dispositifs permettant de mieux associer les médecins libéraux aux activités hospitalières et en retour de donner la possibilité aux médecins hospitaliers d'intervenir sur le terrain en collaboration avec les médecins libéraux, seront développés.
De même, la frontière existant entre le sanitaire et le médico-social sera adaptée, les rapprochements favorisés. La réforme de la tarification et la modification de la loi de 1975 qui sont en préparation, contribueront à cette évolution. L'unité du système sanitaire et social qui ne peut que bénéficier aux malades doit être notre objectif, dans le respect bien sûr des spécificités des populations et des conditions de prise en charge.
III - La réforme hospitalière doit être construite autour du malade.
J'ai, depuis quelques mois, beaucoup entendu parlé de restructuration, d'évaluation, de réorganisation, d'efficience.
Comment ne pas adhérer à de tels objectifs ? Mais ils ne prennent de sens qu'à condition d'être mis au service du malade, qu'à condition de se justifier par une meilleure prise en charge de ceux qui ont recours à l'hôpital.
* La sécurité sanitaire, la qualité des soins
A cet égard, la sécurité sanitaire et la qualité des soins dispensés sont une priorité absolue de la politique hospitalière.
Un travail remarquable a été accompli en la matière contre les infections nosocomiales depuis une dizaine d'années. C'est dans cet effort constant et qui doit être en permanence renouvelé que s'inscrivent les priorités affirmées récemment en matière de sécurité des naissances, de sécurité anesthésique, de développement de réseaux coordonnés des urgences ou de transports sanitaires, comme en matière de sécurité des produits de santé.
* L'évaluation des pratiques
Ce souci de sécurité, de qualité doit se traduire pour le service public hospitalier, comme d'ailleurs l'ensemble des établissements, par le développement de l'évaluation des pratiques.
La communauté scientifique doit être la garante des bonnes pratiques médicales. La transformation de l'ANDEM en agence nationale pour l'accréditation et l'évaluation en santé (ANAES), le développement de ses moyens, l'engagement d'une politique d'accréditation doivent permettre de tirer vers le haut la qualité des soins dans notre pays.
Loin de moi l'idée de penser qu'elle est, dans l'ensemble, problématique. Mais chacun reconnaîtra qu'elle peut toujours être améliorée et qu'elle doit surtout constituer un effort permanent de l'ensemble des institutions.
Cette évaluation des pratiques, cette politique d'accréditation des structures doivent être conduites avec le souci de la plus grande transparence. Transparence sur les données, transparence sur les méthodes, transparence sur les résultats.
* La transparence à l'hôpital
La transparence est en effet un impératif majeur, nous la devons à nos concitoyens. Il faut aider les patients à s'orienter au sein de l'hôpital, à accéder aux informations qui leur sont nécessaires et lorsqu'ils le souhaitent, à prendre connaissance avec un soutien médical de leur dossier personnel. Cet effort de transparence doit, comme dans tous les services publics, être accompli. Il est particulièrement fondamental à l'hôpital où il ne s'agit pas de régler des problèmes administratifs mais de questions de vie et de mort.
Il faut donner toute leur place aux dispositifs de conciliation et de prévention des contentieux médicaux. D'ici l'été sera publié le décret relatif à la commission de conciliation qui, dans chaque établissement de santé, sera chargée d'informer, d'assister et d'orienter toute personne qui s'estime victime d'un préjudice du fait de l'activité de l'établissement, et de lui indiquer les voies de conciliation et de recours dont elle dispose.
Un suivi du bon fonctionnement de ces commissions sera également mis en place. Il y a, comme l'écrivait François Ewald, un "devoir de vérité" en matière médicale.
Nous travaillons également, vous le savez, sur la prise en charge de l'aléa thérapeutique. Ces dispositifs ne doivent pas être redoutés par les médecins. Ils contribueront à préserver la relation de confiance entre le médecin et le malade.
Enfin, Bernard Kouchner et moi-même proposerons un certain nombre de mesures permettant de mieux garantir la transparence et l'équité en matière d'activité libérale des praticiens à l'hôpital. Nous sommes convaincus que des mesures telle la recomposition des commissions d'activité libérale, la prise en compte d'un quota d'activités et non d'une proportion de lits, la priorité donnée à l'activité publique peuvent répondre aux inquiétudes qui se sont exprimées sur l'usage excessif de cette exception. Nous n'entendons pas la remettre en cause mais la principale menace qui pèse sur elle réside aujourd'hui dans les abus dont elle est à l'origine.
* La qualité de vie de tous les malades
Nous sommes persuadés qu'il nous faut mieux prendre en compte la qualité de vie des malades. Le développement au sein du service public hospitalier, d'activités d'accompagnement ou de soutien du malade, trop souvent ignorées ou sous-estimées et qui pourtant doivent être une composante à part entière de la prise en charge hospitalière.
Des progrès ont été accomplis dans ce domaine, ils doivent être poursuivis et généralisés. Je parle bien évidemment de la prise en charge de la douleur, de l'attention portée à la qualité de vie dans les traitements mais aussi du développement d'activités ludiques ou de formation à l'intention par exemple des enfants hospitalisés pour une longue période. A cet égard, la création des emplois jeunes permettra de prendre en charge ces besoins qui sont à l'origine de métiers nouveaux.
Je suis convaincue que le service public hospitalier peut, au-delà des progrès médicaux qu'il apporte aux patient, leur offrir également une amélioration de la qualité de leur vie malgré la maladie.
· L'affirmation de la mission sociale de l'hôpital.
·
Le service public hospitalier joue déjà un rôle fondamental pour favoriser l'accès aux soins des personnes en situation de précarité. L'hôpital est un lieu d'accueil pour les personnes en difficulté mais il est essentiel que se développe une prise en charge qui ne soit pas exclusivement sanitaire.
Pour cela les dispositifs d'accueil médico-sociaux dit P.A.S.S. (Permanence d'Accès aux Soins de Santé) seront généralisés. Il ne s'agit en aucun cas de créer au sein de l'hôpital des filières spécifiques pour les plus démunis. Ceux-ci doivent avoir accès aux soins dans les mêmes conditions que l'ensemble de la population. La vocation des permanences d'accès aux soins est de faciliter leur intégration dans le système hospitalier et plus largement dans le système de soins.
De même l'hôpital doit, au delà de ses missions de soins, contribuer au dépistage des souffrances sociales, et s'attacher à établir un premier contact médical avec des populations qui ne peuvent ni n'osent venir vers lui.
L'ouverture de l'hôpital à la cité sera ainsi une priorité ; avec d'une part, la possibilité pour les institutions sociales et les associations de malades, sociales, humanitaires, d'être plus souvent et plus systématiquement présents à l'hôpital, et d'autre part le développement de la participation de l'hôpital à des réseaux sanitaires et sociaux, y compris à titre pilote, grâce à des unités mobiles hospitalières.
Vous m'avez, M. le Président, assuré de la détermination des hospitaliers à relever ce défi de plus. Je ne doute pas de leur volonté de s'engager dans cette nouvelle mission d'intérêt général. Bien évidemment, je veillerai à ce que cette nouvelle mission soit prise en compte dans les budgets.
IV - La réforme hospitalière doit reposer sur un nouvel élan pour la communauté hospitalière.
Je l'ai dit en commençant, on a trop souvent parlé de structures et de techniques alors que l'hôpital est d'abord une collectivité de femmes et d'hommes, un lieu de compétences et souvent d'excellence, l'espace où s'expriment les solidarités les plus profondes.
Rien ne se fera à l'hôpital sans une adhésion forte de l'ensemble de ses personnels, de ses médecins, de ses infirmières, de ses soignants, de ses personnels administratifs, de son encadrement et de ses représentants institutionnels et syndicaux.
Les grandes réformes se font chaque jour, la recomposition du tissu hospitalier commence dans chaque service, les droits du malade dépendent de chaque équipe.
Pour favoriser cet indispensable élan, je voudrais évoquer quatre sujets.
* La priorité médicale
L'objectif peut paraître paradoxal, il n'en est pas moins essentiel. Certes l'activité médicale est la mission naturelle de l'hôpital. Encore faut-il que la priorité médicale, c'est-à-dire la primauté donnée à l'efficacité, à la qualité et à la sécurité des soins soit réaffirmée.
Il faut que les choix hospitaliers, qu'ils soient budgétaires ou thérapeutiques, soient faits en se fondant d'abord sur les besoins médicaux et les priorités de santé publique.
L'effort consenti par la collectivité nationale pour prendre en charge la dépense de prévention et de soins doit être réparti sur le fondement de priorités sanitaires et non de traditions, de faveurs ou d'instruments technocratiques.
Cette priorité médicale doit s'imposer dans la gestion hospitalière, dans la planification sanitaire et dans l'ensemble des politiques nationales notamment d'allocation des ressources. Elle doit constituer la charpente des projets d'établissement et des projets de service comme de leurs instruments juridiques que sont la contractualisation externe entre les hôpitaux et les agences régionales mais également la contractualisation interne qui doit être développée.
Je n'oublierai pas de balayer devant la porte de l'Etat. Cette priorité médicale doit également s'appliquer aux instances de tutelle et de contrôle, aux agences régionales, à l'administration d'Etat, à l'ensemble des partenaires administratifs de la santé. Les moyens doivent être, quelles que soient les contraintes économiques existantes, au service de la santé et non le contraire.
* La reconnaissance des hospitaliers
Je voudrais tout d'abord que soient dissipées toutes les craintes concernant l'emploi. Il n'y a pas de menaces pesant globalement sur l'emploi hospitalier. L'activité sanitaire et médico-sociale est une activité d'avenir. L'emploi ne peut qu'y croître, ou en tout cas ne pas diminuer. Bien évidemment, cela ne signifie pas que des évolutions n'auront pas lieu entre établissements ou entre activités dans le cadre des bassins de vie.
Si ces évolutions sont parfois nécessaires, elles doivent toujours être réalisées dans la plus large concertation. Elles pourront dorénavant bénéficier des instruments que nous avons mis en place à travers le fonds d'accompagnement social et le fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux pour lequel 85 dossiers sont déjà à l'étude.
Mais au-delà de cette garantie sur l'emploi hospitalier, il faut, nous en sommes conscients, avoir le souci permanent de préciser, de clarifier, d'adapter les compétences de chaque catégorie professionnelle aux évolutions des techniques et des pratiques hospitalières. Les politiques de formation continue des personnels doivent largement intégrer cette volonté d'adaptation et accompagner les évolutions nécessaires.
Rien n'est plus démotivant que de voir son travail méconnu, son métier dévalorisé.
Une réflexion sur l'organisation du travail à l'hôpital et sur l'actualisation des compétences professionnelles sera entreprise avec les organisations syndicales et professionnelles. Des travaux sont en cours avec les médecins, les personnels et les directeurs pour accompagner la modernisation de l'hôpital.
L'évolution vers les 35 heures sera à cet égard un important chantier. Elle doit être l'occasion de repenser l'organisation du travail, de réduire les cloisonnements internes, de mieux valoriser l'énergie de chacun, de mieux reconnaître les compétences de tous. Les 35 heures seront un progrès pour la qualité de vie, mais elles doivent également se traduire par des progrès dans la vie interne des établissements.
· La modernisation du fonctionnement interne de l'hôpital.
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Le fonctionnement interne de l'hôpital devient en effet le point crucial de tous les efforts à mener pour gagner le pari de la modernité et de la qualité.
L'hôpital bouge, se transforme, les comportements et les mentalités devront inévitablement évoluer au même rythme. En particulier, chacun devra s'impliquer plus volontiers dans la gestion.
Une réelle déconcentration de la gestion permettrait d'associer les médecins et les équipes soignantes aux choix économiques qui découlent des stratégies médicales. Il est temps de mettre fin à l'opposition entre gestion et soins. La démarche à laquelle je vous invite est ambitieuse. Elle suppose une modification profonde des rapports existants au sein de l'hôpital, voire du système de valeurs des différents acteurs. Elle suppose une évolution de l'organisation interne et une adaptation du système d'information sur lequel elle repose.
Elle doit aller jusqu'à la reconnaissance de formes d'organisation dans lesquelles les arbitrages sont réalisés au plus près des utilisateurs en fonction des besoins qu'ils ont eux-mêmes définis et dans une logique de responsabilitation qui suppose engagements réciproques et respect mutuel des compétences.
Vous devez donc porter ce débat car il appelle non pas de réponses toutes faites mais des échanges d'expériences au service desquels l'administration apportera son soutien.
Il reste qu'un travail important de conviction, de pédagogie devra être accompli, l'expérience prouvant que la réussite est souvent proportionnelle à l'implication personnelle de la direction et du corps médical.
Ne nous y trompons pas en effet ! L'hôpital public ne doit pas être dirigé de l'extérieur et d'ailleurs il ne saurait l'être. Disons le bien haut : c'est en son sein que la réforme de l'hôpital se gagnera.
Au-delà de la déconcentration, il faut promouvoir la participation des personnels. C'était une des ambitions de la loi de 1991.
Il fallait selon les propos du rédacteur de la loi de l'époque que "le mouvement, la responsabilité et le dialogue deviennent les maître mots de l'hôpital".
Aujourd'hui, si la vie sociale de l'hôpital est bel et bien rythmée par la réunion de multiples instances représentatives ou de concertation, sans même compter les très nombreuses réunions de travail informelles ou préparatoires, le bilan est encore mitigé. Les instances récemment créées se sont le plus souvent imposées du fait de la loi, sans pour autant affirmer une véritable autorité. L'abondance, l'éparpillement et l'empilement encouragent le doute tandis que la technicité croissante des dossiers à examiner, contribue au désenchantement des participants et à une faible efficacité des démarches.
Il faut rendre aux instances hospitalières leur vitalité ; plusieurs réflexions viennent naturellement à l'esprit qu'il conviendra de discuter.
- Renforcer le rôle des hospitaliers élus à la commission médicale d'établissement et au comité technique d'établissement, en précisant les moyens dont disposent ces instances pour remplir leurs missions, ainsi que le prévoit la loi.
- Eviter la redondance et l'excès de formalisme des instances.
- Améliorer la lisibilité de leurs attributions.
- Mieux connaître le devenir de leur avis.
En tout état de cause au cours de ces réflexions, je serai guidée par deux préoccupations qui ne sont pas contradictoires ; promouvoir la participation des personnels et favoriser l'adaptabilité de l'hôpital.
Comme je l'ai dit, le secteur hospitalier, comme le secteur de la santé dans son ensemble, n'est pas un secteur en déclin, au contraire. Les évolutions que traceront les schémas régionaux de deuxième génération, la recomposition du tissu hospitalier sont des nécessités pour répondre aux besoins de santé.
Les évolutions qui nous attendent, les transformations du système hospitalier qui sont devant nous constituent un projet formidable, elles sont un enjeu crucial pour notre société.
par la collectivité en faveur du système hospitalier mais également par une allocation des ressources plus proche du terrain, plus équitable, plus rationnelle et par conséquent plus exigeante, que nous pouvons conduire cette transformation profonde du système hospitalier.
Il est possible de concilier, compte tenu du niveau des dépenses de santé en France, la mutation dont je viens de parler et le nécessaire équilibre des finances publiques. A condition que cet effort soit accompli en concertation avec l'ensemble des acteurs grâce à un dialogue permanent sur les objectifs et avec un respect scrupuleux de l'obligation de transparence.
Afin de préparer l'avenir de l'hôpital, nous avons, Bernard Kouchner et moi-même, décidé d'installer quatre groupes de travail sur l'hôpital.
Le premier traitera des réseaux et des relations entre l'hôpital et la médecine de ville. Il tirera un bilan des expériences réalisées, analysera les obstacles à leur extension et proposera des mesures permettant d'en faire un mode de droit commun d'organisation du système de soins.
Un autre groupe, à partir d'un bilan du dispositif mis en oeuvre depuis 1991, étudiera les adaptations nécessaires à la participation du personnel aux différentes instances des établissements de santé et aux conditions d'association du corps médical à la politique de l'établissement. Il examinera aussi les mesures susceptibles d'améliorer l'organisation du travail à l'hôpital.
Le troisième groupe s'intéressera à l'évolution et aux perspectives d'évolution de l'offre hospitalière privée et élaborera des propositions permettant d'accroître la coopération entre le secteur public et le secteur privé.
Enfin, un groupe sera consacré aux moyens de parvenir à une meilleure évaluation de l'activité hospitalière pour affecter de manière plus équitable les ressources.
Ces groupes de travail viendront ainsi compléter les réflexions menées par le Professeur Nicolas sur les problèmes de démographie médicale à l'hôpital.
Je voudrais pour conclure, redire la confiance que je porte à l'hôpital.
Le monde hospitalier a montré depuis le début des années 80, sa capacité d'adaptation, sa faculté de prendre en charge de nouvelles techniques, de nouvelles pathologies, de nouvelles missions, mais également de prendre en considération les contraintes économiques et budgétaires.
De telles adaptations ne se font pas sans courage, sans détermination, ni même sans difficultés. J'en ai parfaitement conscience.
Si l'hôpital était un monde inerte, il ne se transformerait pas. Si l'hôpital était un monde insensible, il ne s'adapterait pas. Je comprends, et je trouve légitime les interrogations qui vous traversent, les impatiences manifestées, les doutes exprimées, bref tout ce qu'on appelle parfois le "malaise" hospitalier.
Ce sentiment, je l'interprête comme la traduction d'une volonté de mieux faire, la nécessité que les effets accomplis soient reconnus à leur juste valeur, l'attention portée à l'exigence de plus en forte de nos concitoyens envers leur système hospitalier. Vous ne voulez pas que l'on vous détourne du service du malade. C'est pourquoi, je tiens à vous dire ma foi dans le service public hospitalier, dans la qualité et la compétence des hommes et des femmes qui l'animent. Si nous avons ensemble à déterminer le meilleur itinéraire, le cap, lui, est connu. C'est celui que vous avez su tenir, contre vents et marées, celui du service du malade, du service du public, d'un modèle de service public.
Pour ma part, nous pouvons avec Bernard Kouchner, vous assurer de notre engagement personnel sur ce projet et vous redire l'attachement qui est le nôtre aux valeurs que vous représentez et auxquelles vous donnez chaque jour réalité.
Nous savons que nous pouvons compter sur vous, sachez que vous pouvez compter sur nous.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 3 octobre 2001)