Texte intégral
Avant de revenir au fond sur l'enjeu de ce mouvement des internes, je voudrais vous poser quelques questions pragmatiques et très directes.
- "J'essayerai d'y répondre."
Dans quel état d'esprit êtes-vous là, ce soir ? Etes-vous surpris, êtes-vous agacé, êtes-vous embarrassé par un mouvement de grève que vous n'attendiez plus ?
- "Ni l'un, ni l'autre. Je suis simplement soucieux d'une seule chose : la santé. La santé des Français. Toute la réforme que nous avons mise en place est pour mieux soigner. Et c'est cela que je voudrais expliquer parce que nous venons d'entendre à l'instant des choses qui sont inexactes. Ce qui prouve qu'il y a un gros travail d'explication à faire."
J'ai envie de dire qu'il s'agit de votre plan, de votre réforme. Vous vous êtes battu pour cela. Les internes, vous allez le reconnaître, sont sûrement des citoyens responsables. D'où vient alors le malentendu ? Est-ce qu'il y a malentendu ? D'où vient ce malaise ?
- "Je crois qu'il y a malentendu. J'ai beaucoup de respect pour les médecins en général qui font un beau métier, qui le font bien et que les Français aiment - on aime tous notre médecin de famille - et en particulier pour les internes parce qu'ils font des études longues et très difficiles. Je crois qu'il y a un formidable malentendu. Il ne s'agit pas de ma réforme, il s'agit de la réforme de la Sécurité sociale qui a été approuvée par le Parlement et qui a donné lieu à une convention qui vient d'être signée par plusieurs syndicats représentatifs des médecins et qui est soutenue par beaucoup de médecins. Donc, je crois qu'il ne faut pas personnaliser. C'est une réforme pour mieux soigner, pour garantir ce qui est un bien très précieux en France et dont on n'a peut-être pas conscience, à savoir que nous avons un système de santé très original, qui concilie la liberté et la solidarité. Peut-être pourra t-on en dire dans un instant."
Justement, les internes ont le sentiment qu'on remet en cause le système de santé et pour reprendre un peu une de leurs formules, ils ont l'impression qu'ils vont soigner avec une calculette dans la tête maintenant.
- "Ce qui a été dit à l'instant, à savoir qu'il y aurait des quotas d'actes ou de prescriptions par médecin, c'est-à-dire que l'on peut soigner cent personnes et pas cent dix ou que l'on peut faire, je ne sais pas, cinq cents actes et pas cinq cent dix, est totalement inexact. Cela ne repose sur strictement rien. Il y aura un objectif global d'augmentation des dépenses d'une année sur l'autre, mais absolument pas de quotas individuels et je pourrais, si vous le voulez, vous expliquer comme cela fonctionne. Donc, ce qui me chagrine un peu ce soir, c'est que se propagent des fausses nouvelles, des choses qui ne sont pas vraies. Alors il faut qu'on les explique et c'est la raison pour laquelle, je le dis tout de suite d'ailleurs, j'ai demandé à J. Barrot et H. Gaymard d'aller à la rencontre des internes, d'aller les voir dans les CHU, dans les hôpitaux, pour qu'on s'explique vraiment et pour qu'on ne continue pas ce dialogue de sourds qui fait que l'on conteste une réforme en la déformant complètement."
Justement, il y a une rencontre en ce moment entre certains des grévistes et le Gouvernement. S'agit-il de discussions, de négociations, de transactions ou c'est irrévocable comme on le dit en ce moment ?
- "Il s'agit d'explication. La convention a été signée, je le répète. Elle va s'appliquer mais on peut l'expliquer. Je voudrais dire que l'une des principales revendications des internes a été satisfaite. Ils avaient demandé que quand ils vont s'installer en ville, parce que le problème d'aujourd'hui, le souci des internes, leur préoccupation essentielle, ce n'est pas ce qui se passe à l'hôpital, mais ce qui va se passer quand ils vont quitter l'hôpital pour s'installer en ville. Ils avaient demandé que pendant une certaine période, les nouvelles dispositions ne s'appliquent pas à eux. Et pourquoi ? Parce qu'ils se créent une clientèle. Quand on s'installe, il est normal que d'une année sur l'autre, on ait davantage de patients. Eh bien, nous avons prévu que pendant sept ans, ces dispositions ne s'appliqueront pas à eux. Donc, ils ont sept ans devant eux à partir du moment où ils s'installent pour monter en puissance, se faire connaître et constituer leur clientèle. J'ajoute que ... je disais tout à l'heure, liberté et solidarité. Il y a un certain nombre de principes essentiels qui seront sauvegardés grâce à la réforme. D'abord la liberté de s'installer. Ils auront, tous ces internes, la liberté de s'installer. Ils auront la liberté de prescrire. Elle ne sera pas limitée. Là aussi, on dit des choses inexactes."
Il y a quand même des pénalités !
- "Comment cela marche, les pénalités ? Parlons-en ! D'abord, ce ne sont pas des pénalités. Le mot n'est pas utilisé dans la convention. On se fixe chaque année un objectif d'augmentation des dépenses, pas de diminution. Et ces objectifs tiennent compte des priorités de santé publique qui sont déterminées par un organisme où il y a des médecins. Après, on regarde ce qui se passe. S'il intervient un événement comme par exemple une épidémie plus grave que prévu, ou une campagne de vaccination demandée par le Gouvernement, on n'en tient pas compte dans la détermination de l'objectif. Si le dépassement est un dépassement léger, il ne se passe rien. Si le dépassement est très fort, on regarde. On cherche à comprendre. Et on cherche à comprendre, non pas en comptables, je récuse totalement cela, il ne s'agit pas d'avoir une vision comptable de la médecine, mais à partir de critères médicaux. Je voudrais prendre un petit exemple."
Il y a quand même des critères économiques parce que ces pénalités, c'est pour des dépassements d'honoraires, il faut être clair.
- "Non, ce n'est pas pour des dépassements d'honoraires, c'est pour le dérapage de l'ensemble des dépenses de santé d'une année sur l'autre, parce que, je l'ai dit, il faut préserver la liberté et la solidarité, mais il faut aussi lutter contre les gaspillages et les abus. Chacun sait bien qu'il y en a, on le sait qu'il y en a. On sait bien qu'en France on prescrit trop de médicaments. Nous avons tous des exemples autour de nous. On sait bien que parfois on prescrit trop d'actes. Donc, il faut effectivement essayer de limiter ces abus. Alors, comment ça se passe ? Je le répète : pas de manière comptable ; de manière médicalisée. On va déterminer avec les médecins, ça a déjà commencé, c'est prévu dans la convention, maladie par maladie, ce que j'appellerais le juste soin. Comment est-ce que normalement, telle ou telle pathologie, telle ou telle maladie se soigne ? Un exemple : il y a une référence médicale qui traite de la grippe. On considère que pour soigner une grippe, on peut prescrire un antibiotique, deux antibiotiques mais normalement, sauf complication, pas trois ou quatre. Et donc, si on découvre en examinant la situation que dans certains cas il y a eu des abus et qu'on a prescrit quatre ou cinq antibiotiques, là, effectivement, il faut bien qu'il y ait une correction, un mécanisme régulateur. C'est ce qui est prévu par la convention. Beaucoup de médecins l'admettent parfaitement. Je le répète, ca n'est pas une maîtrise comptable, c'est une maîtrise médicalisée qui tient compte de cet objectif que j'évoquais en commençant : mieux soigner les Français."
Pour quelle raison êtes-vous si mal compris ?
- "Peut-être parce que je m'explique mal et je vous remercie de me donner l'occasion de le faire. Peut-être aussi parce que certains déforment la réalité. On n'a pas réussi à mobiliser les médecins de ville, il y a quelques mois. Alors là, on essaye de faire croire des choses qui sont tout à fait fausses. Et notre devoir est de rectifier la vérité. Outre le travail que j'ai demandé à J. Barrot et à H. Gaymard, je vais réunir la semaine prochaine une trentaine de personnalités, des parlementaires, et je vais leur demander d'aller dans chaque département, dans les trois mois qui viennent, faire 100 réunions, avec des médecins, avec des internes, avec des assurés sociaux pour expliquer véritablement de quoi il retourne. Et j'ai été frappé, moi, chaque fois que ceci a été fait, quand on explique bien la réforme, vous comprendrez que malgré votre hospitalité, je ne peux pas entrer dans tous les détails maintenant, alors que quand on a une heure ou deux heures pour expliquer la réforme, en général, elle est bien comprise. Et on se dit : oui c'est peut-être la dernière chance de la médecine française de rester ce qu'elle est, c'est-à-dire une médecine qui n'est pas étatisée, contrairement à ce qui se passe dans beaucoup de pays européens et une médecine qui n'est pas non plus privatisée, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis. Moi je ne veux ni d'une médecine étatisée, ni d'une médecine privatisée."
Donc si je comprends bien, vous allez expliquer. Est-ce que pour autant vous allez négocier ?
- "On va expliquer. On a déjà négocié. Les internes nous avaient demandé sept ans."
Ca ne suffit pas, apparemment, puisque le mouvement reprend et s'étend ?
- "Mais je suis persuadé que la force de conviction permettra de bien faire comprendre la réforme. Cette réforme aussi est bonne pour les futurs médecins. Il est prévu notamment dans la réforme que nous allons permettre aux plus anciens, à leurs aînés qui veulent cesser leurs activités, de le faire avant l'âge normal. Nous avons mis en place pour cela des aides importantes. Il faut aussi réorienter une partie des médecins chevronnés vers la médecine du travail, vers la médecine préventive, scolaire, où il y a beaucoup de choses à faire. Et tout ceci va libérer des places pour ces jeunes médecins qui arrivent. C'est la raison pour laquelle la réforme est bonne pour eux, j'en suis absolument convaincu, elle sauvegarde leurs libertés fondamentales et elle donne des perspectives d'avenir. Et puis je crois aussi qu'elle est bonne pour chacun et chacune d'entre nous, parce que c'est ça qui compte. C'est la première fois qu'on a essayé de réformer la Sécurité sociale, où on n'a pas diminué les remboursements. Nous n'avons pas diminué les remboursements dont bénéficient les Français. En second lieu, nous avons maintenu le libre-choix du médecin. Il n'y a qu'en France qu'avec un remboursement à la clé, on peut choisir son médecin et en changer. Et nous n'avons pas l'intention de changer cela. Cette liberté de choix sera maintenue. Et puis, il y a le carnet de santé qui permettra de suivre comme on le fait pour nos enfants. Si vous avez des enfants, vous savez qu'ils ont un carnet de santé. Eh bien, chaque adulte en aura un et ça permettra d'éviter de refaire deux fois les mêmes examens quand on change de médecin. Je pense que ce sera une très bonne réforme. Il faut évidemment qu'elle monte en puissance. Il va falloir encore quelques mois mais on a beaucoup progressé."
Mais ce qui monte en puissance, c'est précisément le mouvement des internes : journée nationale, manifestations. Quel message clair vous leur adressez pour que cesse ce mouvement ? Faut-il négocier ?
- "Je me souviens d'une grande querelle, il y a quelques mois, sur : négociez, expliquez, concertez. Je suis prêt à parler. Parlons et essayons de nous comprendre. Le message que je veux délivrer, adresser ce soir aux Français, c'est que cette réforme est faite pour améliorer la manière dont ils sont soignés et pour assurer à l'avenir la médecine à la française avec à la fois la liberté, la solidarité et la responsabilité. Une médecine pour tous car la réforme prévoit aussi l'assurance maladie universelle, c'est-à-dire la possibilité pour tous les Français, tous ceux qui n'y ont pas encore accès, d'avoir accès à l'assurance-maladie. Donc, c'est une réforme positive, ce n'est pas une réforme de rationnement, il n'est pas vrai que les soins seraient rationnés. En 1996, nous avons atteint nos objectifs et on n'a pas refusé de soigner les Français. C'est simplement une réforme qui vise à donner plus d'efficacité à notre système et à donner aux médecins toute la place qui leur revient parce qu'on n'aura pas de bonne médecine si on n'a pas des médecins à l'aise et heureux d'exercer leur métier. J'espère que nous arriverons à les convaincre que c'est bien ça l'objectif et que c'est bien ça la philosophie de la réforme."
Sur cette affaire Renault, le Pdg a donc dit que cette décision de fermeture de l'usine de Vilvorde est irrévocable. Vous aviez condamné la méthode ?
- "J'avais demandé que des négociations s'engagent, elles sont engagées et vous avez observé que l'entreprise a prévu 2,4 milliards de francs, c'est-à-dire 800 000 francs par salarié, pour des mesures de reconversion ou d'accompagnement. Mais, empêcher une entreprise comme Renault de fermer une usine qui ne correspond plus aux conditions modernes de la compétition, ça serait compromettre l'ensemble du groupe et des dizaines de milliers d'emplois. Alors je demande qu'on y réfléchisse."
Renault a annoncé une suppression de près de 3 000 emplois pour 1997. D'autres vont sans doute suivre. Comment voyez-vous l'avenir ? Est-ce que pour tenir, Renault ne doit pas s'allier avec d'autres groupes industriels ?
- "C'est une question à laquelle nous travaillons. Il faut que nous regardions quels regroupements entre groupes français ou entre groupes européens sont maintenant indispensables parce que, à la fin de ce siècle, dans deux ou trois ans, les voitures extérieures à la communauté, japonaises et coréennes, vont arriver librement. Et si nous ne sommes pas prêts à soutenir ce choc, alors c'est l'ensemble du dispositif qui serait fragilisé.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 13 mai 2002)
- "J'essayerai d'y répondre."
Dans quel état d'esprit êtes-vous là, ce soir ? Etes-vous surpris, êtes-vous agacé, êtes-vous embarrassé par un mouvement de grève que vous n'attendiez plus ?
- "Ni l'un, ni l'autre. Je suis simplement soucieux d'une seule chose : la santé. La santé des Français. Toute la réforme que nous avons mise en place est pour mieux soigner. Et c'est cela que je voudrais expliquer parce que nous venons d'entendre à l'instant des choses qui sont inexactes. Ce qui prouve qu'il y a un gros travail d'explication à faire."
J'ai envie de dire qu'il s'agit de votre plan, de votre réforme. Vous vous êtes battu pour cela. Les internes, vous allez le reconnaître, sont sûrement des citoyens responsables. D'où vient alors le malentendu ? Est-ce qu'il y a malentendu ? D'où vient ce malaise ?
- "Je crois qu'il y a malentendu. J'ai beaucoup de respect pour les médecins en général qui font un beau métier, qui le font bien et que les Français aiment - on aime tous notre médecin de famille - et en particulier pour les internes parce qu'ils font des études longues et très difficiles. Je crois qu'il y a un formidable malentendu. Il ne s'agit pas de ma réforme, il s'agit de la réforme de la Sécurité sociale qui a été approuvée par le Parlement et qui a donné lieu à une convention qui vient d'être signée par plusieurs syndicats représentatifs des médecins et qui est soutenue par beaucoup de médecins. Donc, je crois qu'il ne faut pas personnaliser. C'est une réforme pour mieux soigner, pour garantir ce qui est un bien très précieux en France et dont on n'a peut-être pas conscience, à savoir que nous avons un système de santé très original, qui concilie la liberté et la solidarité. Peut-être pourra t-on en dire dans un instant."
Justement, les internes ont le sentiment qu'on remet en cause le système de santé et pour reprendre un peu une de leurs formules, ils ont l'impression qu'ils vont soigner avec une calculette dans la tête maintenant.
- "Ce qui a été dit à l'instant, à savoir qu'il y aurait des quotas d'actes ou de prescriptions par médecin, c'est-à-dire que l'on peut soigner cent personnes et pas cent dix ou que l'on peut faire, je ne sais pas, cinq cents actes et pas cinq cent dix, est totalement inexact. Cela ne repose sur strictement rien. Il y aura un objectif global d'augmentation des dépenses d'une année sur l'autre, mais absolument pas de quotas individuels et je pourrais, si vous le voulez, vous expliquer comme cela fonctionne. Donc, ce qui me chagrine un peu ce soir, c'est que se propagent des fausses nouvelles, des choses qui ne sont pas vraies. Alors il faut qu'on les explique et c'est la raison pour laquelle, je le dis tout de suite d'ailleurs, j'ai demandé à J. Barrot et H. Gaymard d'aller à la rencontre des internes, d'aller les voir dans les CHU, dans les hôpitaux, pour qu'on s'explique vraiment et pour qu'on ne continue pas ce dialogue de sourds qui fait que l'on conteste une réforme en la déformant complètement."
Justement, il y a une rencontre en ce moment entre certains des grévistes et le Gouvernement. S'agit-il de discussions, de négociations, de transactions ou c'est irrévocable comme on le dit en ce moment ?
- "Il s'agit d'explication. La convention a été signée, je le répète. Elle va s'appliquer mais on peut l'expliquer. Je voudrais dire que l'une des principales revendications des internes a été satisfaite. Ils avaient demandé que quand ils vont s'installer en ville, parce que le problème d'aujourd'hui, le souci des internes, leur préoccupation essentielle, ce n'est pas ce qui se passe à l'hôpital, mais ce qui va se passer quand ils vont quitter l'hôpital pour s'installer en ville. Ils avaient demandé que pendant une certaine période, les nouvelles dispositions ne s'appliquent pas à eux. Et pourquoi ? Parce qu'ils se créent une clientèle. Quand on s'installe, il est normal que d'une année sur l'autre, on ait davantage de patients. Eh bien, nous avons prévu que pendant sept ans, ces dispositions ne s'appliqueront pas à eux. Donc, ils ont sept ans devant eux à partir du moment où ils s'installent pour monter en puissance, se faire connaître et constituer leur clientèle. J'ajoute que ... je disais tout à l'heure, liberté et solidarité. Il y a un certain nombre de principes essentiels qui seront sauvegardés grâce à la réforme. D'abord la liberté de s'installer. Ils auront, tous ces internes, la liberté de s'installer. Ils auront la liberté de prescrire. Elle ne sera pas limitée. Là aussi, on dit des choses inexactes."
Il y a quand même des pénalités !
- "Comment cela marche, les pénalités ? Parlons-en ! D'abord, ce ne sont pas des pénalités. Le mot n'est pas utilisé dans la convention. On se fixe chaque année un objectif d'augmentation des dépenses, pas de diminution. Et ces objectifs tiennent compte des priorités de santé publique qui sont déterminées par un organisme où il y a des médecins. Après, on regarde ce qui se passe. S'il intervient un événement comme par exemple une épidémie plus grave que prévu, ou une campagne de vaccination demandée par le Gouvernement, on n'en tient pas compte dans la détermination de l'objectif. Si le dépassement est un dépassement léger, il ne se passe rien. Si le dépassement est très fort, on regarde. On cherche à comprendre. Et on cherche à comprendre, non pas en comptables, je récuse totalement cela, il ne s'agit pas d'avoir une vision comptable de la médecine, mais à partir de critères médicaux. Je voudrais prendre un petit exemple."
Il y a quand même des critères économiques parce que ces pénalités, c'est pour des dépassements d'honoraires, il faut être clair.
- "Non, ce n'est pas pour des dépassements d'honoraires, c'est pour le dérapage de l'ensemble des dépenses de santé d'une année sur l'autre, parce que, je l'ai dit, il faut préserver la liberté et la solidarité, mais il faut aussi lutter contre les gaspillages et les abus. Chacun sait bien qu'il y en a, on le sait qu'il y en a. On sait bien qu'en France on prescrit trop de médicaments. Nous avons tous des exemples autour de nous. On sait bien que parfois on prescrit trop d'actes. Donc, il faut effectivement essayer de limiter ces abus. Alors, comment ça se passe ? Je le répète : pas de manière comptable ; de manière médicalisée. On va déterminer avec les médecins, ça a déjà commencé, c'est prévu dans la convention, maladie par maladie, ce que j'appellerais le juste soin. Comment est-ce que normalement, telle ou telle pathologie, telle ou telle maladie se soigne ? Un exemple : il y a une référence médicale qui traite de la grippe. On considère que pour soigner une grippe, on peut prescrire un antibiotique, deux antibiotiques mais normalement, sauf complication, pas trois ou quatre. Et donc, si on découvre en examinant la situation que dans certains cas il y a eu des abus et qu'on a prescrit quatre ou cinq antibiotiques, là, effectivement, il faut bien qu'il y ait une correction, un mécanisme régulateur. C'est ce qui est prévu par la convention. Beaucoup de médecins l'admettent parfaitement. Je le répète, ca n'est pas une maîtrise comptable, c'est une maîtrise médicalisée qui tient compte de cet objectif que j'évoquais en commençant : mieux soigner les Français."
Pour quelle raison êtes-vous si mal compris ?
- "Peut-être parce que je m'explique mal et je vous remercie de me donner l'occasion de le faire. Peut-être aussi parce que certains déforment la réalité. On n'a pas réussi à mobiliser les médecins de ville, il y a quelques mois. Alors là, on essaye de faire croire des choses qui sont tout à fait fausses. Et notre devoir est de rectifier la vérité. Outre le travail que j'ai demandé à J. Barrot et à H. Gaymard, je vais réunir la semaine prochaine une trentaine de personnalités, des parlementaires, et je vais leur demander d'aller dans chaque département, dans les trois mois qui viennent, faire 100 réunions, avec des médecins, avec des internes, avec des assurés sociaux pour expliquer véritablement de quoi il retourne. Et j'ai été frappé, moi, chaque fois que ceci a été fait, quand on explique bien la réforme, vous comprendrez que malgré votre hospitalité, je ne peux pas entrer dans tous les détails maintenant, alors que quand on a une heure ou deux heures pour expliquer la réforme, en général, elle est bien comprise. Et on se dit : oui c'est peut-être la dernière chance de la médecine française de rester ce qu'elle est, c'est-à-dire une médecine qui n'est pas étatisée, contrairement à ce qui se passe dans beaucoup de pays européens et une médecine qui n'est pas non plus privatisée, contrairement à ce qui se passe aux Etats-Unis. Moi je ne veux ni d'une médecine étatisée, ni d'une médecine privatisée."
Donc si je comprends bien, vous allez expliquer. Est-ce que pour autant vous allez négocier ?
- "On va expliquer. On a déjà négocié. Les internes nous avaient demandé sept ans."
Ca ne suffit pas, apparemment, puisque le mouvement reprend et s'étend ?
- "Mais je suis persuadé que la force de conviction permettra de bien faire comprendre la réforme. Cette réforme aussi est bonne pour les futurs médecins. Il est prévu notamment dans la réforme que nous allons permettre aux plus anciens, à leurs aînés qui veulent cesser leurs activités, de le faire avant l'âge normal. Nous avons mis en place pour cela des aides importantes. Il faut aussi réorienter une partie des médecins chevronnés vers la médecine du travail, vers la médecine préventive, scolaire, où il y a beaucoup de choses à faire. Et tout ceci va libérer des places pour ces jeunes médecins qui arrivent. C'est la raison pour laquelle la réforme est bonne pour eux, j'en suis absolument convaincu, elle sauvegarde leurs libertés fondamentales et elle donne des perspectives d'avenir. Et puis je crois aussi qu'elle est bonne pour chacun et chacune d'entre nous, parce que c'est ça qui compte. C'est la première fois qu'on a essayé de réformer la Sécurité sociale, où on n'a pas diminué les remboursements. Nous n'avons pas diminué les remboursements dont bénéficient les Français. En second lieu, nous avons maintenu le libre-choix du médecin. Il n'y a qu'en France qu'avec un remboursement à la clé, on peut choisir son médecin et en changer. Et nous n'avons pas l'intention de changer cela. Cette liberté de choix sera maintenue. Et puis, il y a le carnet de santé qui permettra de suivre comme on le fait pour nos enfants. Si vous avez des enfants, vous savez qu'ils ont un carnet de santé. Eh bien, chaque adulte en aura un et ça permettra d'éviter de refaire deux fois les mêmes examens quand on change de médecin. Je pense que ce sera une très bonne réforme. Il faut évidemment qu'elle monte en puissance. Il va falloir encore quelques mois mais on a beaucoup progressé."
Mais ce qui monte en puissance, c'est précisément le mouvement des internes : journée nationale, manifestations. Quel message clair vous leur adressez pour que cesse ce mouvement ? Faut-il négocier ?
- "Je me souviens d'une grande querelle, il y a quelques mois, sur : négociez, expliquez, concertez. Je suis prêt à parler. Parlons et essayons de nous comprendre. Le message que je veux délivrer, adresser ce soir aux Français, c'est que cette réforme est faite pour améliorer la manière dont ils sont soignés et pour assurer à l'avenir la médecine à la française avec à la fois la liberté, la solidarité et la responsabilité. Une médecine pour tous car la réforme prévoit aussi l'assurance maladie universelle, c'est-à-dire la possibilité pour tous les Français, tous ceux qui n'y ont pas encore accès, d'avoir accès à l'assurance-maladie. Donc, c'est une réforme positive, ce n'est pas une réforme de rationnement, il n'est pas vrai que les soins seraient rationnés. En 1996, nous avons atteint nos objectifs et on n'a pas refusé de soigner les Français. C'est simplement une réforme qui vise à donner plus d'efficacité à notre système et à donner aux médecins toute la place qui leur revient parce qu'on n'aura pas de bonne médecine si on n'a pas des médecins à l'aise et heureux d'exercer leur métier. J'espère que nous arriverons à les convaincre que c'est bien ça l'objectif et que c'est bien ça la philosophie de la réforme."
Sur cette affaire Renault, le Pdg a donc dit que cette décision de fermeture de l'usine de Vilvorde est irrévocable. Vous aviez condamné la méthode ?
- "J'avais demandé que des négociations s'engagent, elles sont engagées et vous avez observé que l'entreprise a prévu 2,4 milliards de francs, c'est-à-dire 800 000 francs par salarié, pour des mesures de reconversion ou d'accompagnement. Mais, empêcher une entreprise comme Renault de fermer une usine qui ne correspond plus aux conditions modernes de la compétition, ça serait compromettre l'ensemble du groupe et des dizaines de milliers d'emplois. Alors je demande qu'on y réfléchisse."
Renault a annoncé une suppression de près de 3 000 emplois pour 1997. D'autres vont sans doute suivre. Comment voyez-vous l'avenir ? Est-ce que pour tenir, Renault ne doit pas s'allier avec d'autres groupes industriels ?
- "C'est une question à laquelle nous travaillons. Il faut que nous regardions quels regroupements entre groupes français ou entre groupes européens sont maintenant indispensables parce que, à la fin de ce siècle, dans deux ou trois ans, les voitures extérieures à la communauté, japonaises et coréennes, vont arriver librement. Et si nous ne sommes pas prêts à soutenir ce choc, alors c'est l'ensemble du dispositif qui serait fragilisé.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 13 mai 2002)