Texte intégral
J'ai tenu à venir en Corée du Sud, au moment où la péninsule est confrontée à une situation grave. Avant d'arriver à Séoul, je me suis successivement entretenu avec mon collègue russe, M. Ivanov, et avec les dirigeants chinois. J'ai également eu l'occasion de m'entretenir à plusieurs reprises de la situation avec Colin Powell et je rencontrerai mon homologue japonaise à mon retour à Paris ainsi que M. El Baradeï, le directeur général de l'Agence internationale de l'Energie atomique. Je suis très heureux d'avoir pu m'entretenir ce matin avec mon homologue, M. Choi Sung-hong et d'être reçu par le président Kim Dae-Jung et le président élu M. Roh Moo-Hyun. Je leur ai dit mon émotion de venir sur le sol coréen à un moment important de l'histoire de votre pays. La France comprend la légitime aspiration à la paix et à la réconciliation de votre peuple. C'est le sens des messages du président de la République que j'ai remis à ses homologues et qui marquent le soutien du peuple français au peuple coréen dans sa grande entreprise. La France est convaincue que le destin qui mène la Corée à la réconciliation et à l'unité est irréversible. Comme vous le savez, elle a toujours apporté un entier soutien à la politique de rapprochement du président Kim Dae-Jung. La crise actuelle en Corée du Nord doit bien évidemment être appréciée dans ce contexte. La nécessité d'un règlement de cette crise est d'autant plus forte qu'au-delà du problème politique et de sécurité, il y a une dimension humaine essentielle. Il s'agit de l'espoir de tout un peuple. Il s'agit d'une grande ambition. La France le comprend et saura l'accompagner.
Par ailleurs nous sommes conscients de la gravité de la situation économique et sociale en Corée du Nord. C'est pourquoi nous venons d'approuver une aide humanitaire de l'Union européenne, d'un montant de 9,5 millions d'euros, pour subvenir aux besoins les plus urgents de sa population. Avec la décision nord-coréenne de se retirer du traité de non-prolifération, une nouvelle étape a été franchie. Nous condamnons la décision de Pyongyang, nous sommes gravement préoccupés par le risque de prolifération et de déstabilisation régionale qui résulte de cette décision. Dans cette crise, le Conseil de sécurité des Nations unies a des responsabilités à exercer, il doit apprécier la situation dans un esprit de concertation entre ses membres et en étroite liaison évidemment avec les états directement concernés et au premier chef la Corée, votre pays, et le Japon. A cette fin je suis en contact permanent avec Colin Powell, avec Jack Straw, avec Igor Ivanov et M. Tang. Lundi j'aurai, à Paris, des entretiens avec la ministre japonaise des Affaires étrangères, Mme Kawaguchi.
Devant la recrudescence des tensions, nous devons concentrer nos efforts sur quelques axes-clé. Et au premier chef l'application des principes et l'exigence que la Corée du Nord revienne sur sa décision, respecte ses engagements et renonce à tout programme nucléaire militaire.
L'exploration de toutes les voies d'un règlement concerté doit être poursuivi à la suite des efforts des dernières semaines, notamment l'action de l'Agence internationale de l'Energie atomique et la déclaration tripartite du Japon, des Etats-Unis et de la Corée. Les contacts bilatéraux, le dialogue régional et l'action multilatérale doivent se conjuguer pour trouver une solution pacifique par le dialogue à la crise.
Nous partageons tous sur cette question difficile une obligation de résultat. Nous y parviendrons en faisant preuve de détermination, de cohérence et de pragmatisme. Chacun doit jouer son rôle dans un esprit de responsabilité, afin d'amener la Corée du Nord à renoncer à son programme nucléaire militaire, faute de quoi la sécurité et la stabilité seront en danger dans la péninsule coréenne.
Nous le voyons bien sur ce dossier comme sur d'autres crises, le principe de la sécurité collective si important pour le monde d'aujourd'hui doit bien s'accompagner d'un principe de responsabilité, d'action collective.
J'ai bien sûr évoqué avec mes interlocuteurs les relations franco-coréennes qui ont connu un essor remarquable pendant ces deux dernières années. Sur le plan politique, nous souhaitons approfondir notre dialogue car la Corée est un acteur de plus en plus important de la scène internationale. J'ai remis au président élu, M. Roh Moo-Hyun, une invitation du président de la République à se rendre en France.
Sur le plan économique et commercial, nous souhaitons développer nos échanges avec la Corée du Sud, qui est notre 4ème partenaire en Asie.
Forts de nos succès déjà réalisés, le TGV franco-coréen, les investissements réalisés par Renault, nous devons regarder ensemble vers l'avenir et définir de nouveaux champs de coopération.
Q - Je pense que la semaine prochaine il y aura une réunion au niveau du Conseil de sécurité à l'ONU, et je crois qu'il est très probable qu'on va demander à la Corée du Nord de bien assumer ses responsabilités en tant que membre de la communauté internationale. Si ça ne se fait pas, vous pensez qu'ils vont décider d'appliquer des sanctions économiques ?
R - Nous n'en sommes pas là. La Corée du Nord, comme vous le savez, a confirmé hier par lettre au président du Conseil de sécurité, c'est à dire la France, son retrait. Le Conseil de sécurité est donc formellement saisi - il l'était d'ailleurs depuis plusieurs années comme le montrait la résolution 825 de 1993 qui concluait par cette saisine du Conseil de sécurité - mais la concertation va bien évidemment se poursuivre entre l'ensemble des membres au cours des prochains jours pour déterminer les meilleurs façons d'agir dans l'esprit de dialogue et de coopération qui est le nôtre.
Q - Vous avez fait état de l'organisation des Nations unies ; vous allez aussi devenir président du Conseil de sécurité. Le mandat dure combien de temps ? D'après vous, quel sera le rôle que le président du Conseil de sécurité doit assumer ? Comment allez-vous le définir ?
R - Comme vous le savez, la présidence du Conseil de sécurité est mensuelle, donc la France exerce cette présidence pour le mois de janvier, c'est l'Allemagne qui l'exercera pour le mois suivant et le but est bien évidemment d'animer et de réfléchir aux initiatives qui peuvent être prises sur des questions importantes. Comme je vous l'ai dit, la concertation est engagée, elle est permanente entre les différents membres du Conseil de sécurité et nous allons analyser au cours des prochains jours les initiatives qui peuvent être prises pour avancer dans la voie qui est celle que nous souhaitons tous, c'est-à-dire la recherche d'un dialogue, la recherche d'une résolution pacifique de cette crise. Je l'ai dit : la position de la France c'est d'encourager l'ensemble des voies qui peuvent servir à avancer dans cette direction. La voie bilatérale, bien sûr, entre les Etats-Unis et la Corée du Nord, la voie régionale et la voie multilatérale dans le cadre de l'Agence internationale de l'Energie atomique, voire dans le cadre du Conseil de sécurité. Toutes ces voies doivent être encouragées pour accompagner la situation, créer le contexte favorable qui permette de sortir des ambiguïtés et véritablement de favoriser une situation où la Corée du Nord serait amenée à pleinement respecter ses engagements internationaux.
J'aurai évidemment l'occasion de m'entretenir longuement lundi avec M. El Baradeï, le directeur général de l'Agence internationale de l'Energie atomique lundi et vous savez que le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale doit se réunir mercredi prochain à Vienne.
Q - Monsieur le Ministre, avez-vous évoqué, ce matin, le dossier du refus des avions rafales par le gouvernement sud-coréen et avez-vous élaboré de nouvelles méthodes pour les futurs appels d'offres en fourniture d'armes ?
R - Nous avons bien sûr évoqué les différents aspects de la coopération civile et militaire entre la France et la Corée du Sud, cela fait partie des questions évidemment très importantes, compte tenu de l'enjeu pour nos deux pays et du développement de nos échanges. Vous connaissez la position de la France en Corée du Sud et l'ensemble des perspectives et du développement de cette coopération a bien sûr été étudié.
Q - Est-ce que l'Europe pourrait jouer un rôle de médiation ? Est-ce que la Corée du Sud vous a demandé d'intervenir en ce sens ? Est-ce qu'il y a eu des contacts ou est-ce que, avec vos collègues européens, vous avez eu des concertations pour intervenir ou pour une médiation européenne ?
R - La crise nord-coréeenne est évidemment une crise essentielle pour la stabilité de la région mais aussi pour les équilibres mondiaux. La communauté internationale a donc bien évidemment un rôle à jouer. Nos amis sud-coréens ont évoqué le rôle important que pourrait jouer l'Union européenne dans cette crise. Nous allons nous concerter avec nos différents partenaires pour voir de quelle façon l'Union européenne pourrait prendre des initiatives si besoin était.
Q - La crise doit être désamorcée dans l'immédiat, mais à plus long terme, comment traiter avec un pays comme la Corée du Nord ? Est-ce que la France est plutôt sur la ligne de Washington, puisqu'en effet, elle est pratiquement isolée dans l'Union européenne car elle n'a pas établi de relations diplomatiques avec la Corée du Nord. Pourriez-vous me dire pourquoi ?
R - Vous savez que la France suit avec beaucoup d'attention l'évolution de la situation dans la péninsule coréenne et si nous n'avons pas établi de relations avec la Corée du Nord c'est bien parce que sur les différents aspects de cette relation qu'il s'agisse du dossier intercoréen, qu'il s'agisse de la question des Droits de l'Homme ou de l'attitude de la Corée du Nord sur des questions de prolifération - nous avons estimé que la situation n'était pas mûre et nous avons en permanence maintenu l'examen de cette question. Nous avons envisagé au cours des derniers mois l'établissement de relations diplomatiques mais la crise nord-coréenne est survenue et nous sommes donc dans la situation que vous connaissez.
Q - A la première question concernant une éventuelle décision d'application de sanctions économiques qui serait éventuellement prise par le Conseil de sécurité, vous avez dit que ce n'était pas encore le cas mais j'aimerais savoir dans ce cas-là : pour vous, la crise n'est pas encore assez grave ? Pourquoi pensez-vous que cela ne sera pas le cas lors de la réunion la semaine prochaine ?
R - Notre conviction c'est que toute les chances doivent être données au dialogue et c'est dans cet esprit que la communauté internationale, dans son ensemble, veut approcher cette crise nord-coréenne compte tenu des implications et de la complexité que j'ai évoquées tout à l'heure, à la fois concernant l'importance des enjeux, tout ce qui touche à la non-prolifération mais aussi la dimension politique régionale, la dimension humaine. L'ensemble de ces facteurs nous conduit à privilégier la voie du dialogue. Ce qui n'exclut pas une politique de très grande fermeté. La communauté internationale, unie en ce qui concerne les messages adressés à la Corée du Nord, étudie et se concerte pour déterminer quelles seront les prochaines étapes en fonction de l'attitude de la Corée du Nord. Nous souhaitons que la Corée du Nord revienne sur sa décision. Nous souhaitons que les différentes approches qui sont développées aujourd'hui, régionale, bilatérale, multilatérale puissent porter leurs fruits, et nous maintenons très étroitement notre concertation pour adapter, à chaque étape, notre attitude.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dit qu'il y avait à peu près trois niveaux de concertation, c'est à dire premièrement entre les Etats-Unis et la Corée du Nord et aussi une concertation au niveau régional et aussi, troisièmement, multilatérale. Mais vous ne pensez pas que parmi ces trois étapes l'intérêt peut être différent et les opinions divergentes ? Qu'en pensez-vous ?
R - Notre conviction c'est qu'il doit y avoir évidemment convergence entre ces différentes approches sachant que la double logique, à la fois de dialogue et de fermeté, est indispensable dans la situation actuelle. Et, fort des relations privilégiées, naturellement, de la Corée du Sud et du Japon avec la Corée du Nord ; fort de la proximité géographique et des liens de la Russie et de la Chine, il faut essayer d'utiliser tous les atouts qui sont les nôtres pour bien marquer l'importance des règles auxquelles la communauté est attachée, vis-à-vis de la Corée du Nord et en même temps faire en sorte que le dialogue et la compréhension permettent de trouver un dénouement à cette crise.
Q - Avant de venir en Corée je sais que vous avez effectué une visite en Russie et aussi en Chine. Je sais que vous avez rencontré vos homologues et j'aimerais savoir quelle a été l'issue de vos entretiens avec eux concernant le dossier nord-coréen ; il est vrai que pour arriver à une solution il faut passer par le dialogue et la fermeté mais pour ce faire, on ne peut pas faire vraiment abstraction de l'attitude de la Russie et de la Chine car ils sont aussi membres du Conseil de sécurité. Mais je ne pense pas que la Russie et la Chine ont la même position que les Etats-Unis, la France ou la Grande-Bretagne. Je pense que ces pays pensent quand même qu'il est important de continuer à mener le dialogue entre la Corée du Nord et les Etats-Unis.
R - Il y a une large convergence de vues entre l'ensemble des pays que vous avez mentionnés. On peut imaginer privilégier, bien sûr, la voie du dialogue bilatéral entre les Etats-Unis et la Corée du Nord. Nous pensons tous qu'il y a là un cadre privilégié pour rechercher un dénouement à la crise. Mais la question c'est d'appuyer, d'accompagner, de permettre à d'autres cadres de jouer tout leur rôle pour encourager la voie d'un règlement. Eviter les malentendus, éviter les arrière-pensées. Faire en sorte qu'un climat de confiance permette à ce dialogue d'être véritablement fructueux et c'est bien le sens de l'utilisation de ces différents cadres, à la fois le cadre régional et en même temps le cadre multilatéral. N'oublions pas l'objectif qui est le nôtre et qui doit nous mobiliser. C'est bien d'obtenir que la Corée du Nord respecte ses engagements internationaux, respecte ses engagements en matière de non prolifération, il en va évidemment de la stabilité régionale, il en va aussi de la stabilité internationale. Donc, sur cette crise il faut que chacun se mobilise, que chacun joue son rôle. C'est une responsabilité collective, je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes dans un monde où il est difficile d'imaginer que les difficultés du monde, les crises ne soient pas liées. Il faut donc que la communauté internationale agisse ensemble, montre un visage uni face aux difficultés et c'est bien ce message là que nous voulons adresser à la Corée du Nord. Et, que l'on parle du cadre du Conseil de sécurité, que l'on parle du cadre bilatéral ou de l'action de chacun des Etats, de la région, le message est bien le même : faire en sorte que le respect des engagements puisse être total.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 janvier 2003)
Par ailleurs nous sommes conscients de la gravité de la situation économique et sociale en Corée du Nord. C'est pourquoi nous venons d'approuver une aide humanitaire de l'Union européenne, d'un montant de 9,5 millions d'euros, pour subvenir aux besoins les plus urgents de sa population. Avec la décision nord-coréenne de se retirer du traité de non-prolifération, une nouvelle étape a été franchie. Nous condamnons la décision de Pyongyang, nous sommes gravement préoccupés par le risque de prolifération et de déstabilisation régionale qui résulte de cette décision. Dans cette crise, le Conseil de sécurité des Nations unies a des responsabilités à exercer, il doit apprécier la situation dans un esprit de concertation entre ses membres et en étroite liaison évidemment avec les états directement concernés et au premier chef la Corée, votre pays, et le Japon. A cette fin je suis en contact permanent avec Colin Powell, avec Jack Straw, avec Igor Ivanov et M. Tang. Lundi j'aurai, à Paris, des entretiens avec la ministre japonaise des Affaires étrangères, Mme Kawaguchi.
Devant la recrudescence des tensions, nous devons concentrer nos efforts sur quelques axes-clé. Et au premier chef l'application des principes et l'exigence que la Corée du Nord revienne sur sa décision, respecte ses engagements et renonce à tout programme nucléaire militaire.
L'exploration de toutes les voies d'un règlement concerté doit être poursuivi à la suite des efforts des dernières semaines, notamment l'action de l'Agence internationale de l'Energie atomique et la déclaration tripartite du Japon, des Etats-Unis et de la Corée. Les contacts bilatéraux, le dialogue régional et l'action multilatérale doivent se conjuguer pour trouver une solution pacifique par le dialogue à la crise.
Nous partageons tous sur cette question difficile une obligation de résultat. Nous y parviendrons en faisant preuve de détermination, de cohérence et de pragmatisme. Chacun doit jouer son rôle dans un esprit de responsabilité, afin d'amener la Corée du Nord à renoncer à son programme nucléaire militaire, faute de quoi la sécurité et la stabilité seront en danger dans la péninsule coréenne.
Nous le voyons bien sur ce dossier comme sur d'autres crises, le principe de la sécurité collective si important pour le monde d'aujourd'hui doit bien s'accompagner d'un principe de responsabilité, d'action collective.
J'ai bien sûr évoqué avec mes interlocuteurs les relations franco-coréennes qui ont connu un essor remarquable pendant ces deux dernières années. Sur le plan politique, nous souhaitons approfondir notre dialogue car la Corée est un acteur de plus en plus important de la scène internationale. J'ai remis au président élu, M. Roh Moo-Hyun, une invitation du président de la République à se rendre en France.
Sur le plan économique et commercial, nous souhaitons développer nos échanges avec la Corée du Sud, qui est notre 4ème partenaire en Asie.
Forts de nos succès déjà réalisés, le TGV franco-coréen, les investissements réalisés par Renault, nous devons regarder ensemble vers l'avenir et définir de nouveaux champs de coopération.
Q - Je pense que la semaine prochaine il y aura une réunion au niveau du Conseil de sécurité à l'ONU, et je crois qu'il est très probable qu'on va demander à la Corée du Nord de bien assumer ses responsabilités en tant que membre de la communauté internationale. Si ça ne se fait pas, vous pensez qu'ils vont décider d'appliquer des sanctions économiques ?
R - Nous n'en sommes pas là. La Corée du Nord, comme vous le savez, a confirmé hier par lettre au président du Conseil de sécurité, c'est à dire la France, son retrait. Le Conseil de sécurité est donc formellement saisi - il l'était d'ailleurs depuis plusieurs années comme le montrait la résolution 825 de 1993 qui concluait par cette saisine du Conseil de sécurité - mais la concertation va bien évidemment se poursuivre entre l'ensemble des membres au cours des prochains jours pour déterminer les meilleurs façons d'agir dans l'esprit de dialogue et de coopération qui est le nôtre.
Q - Vous avez fait état de l'organisation des Nations unies ; vous allez aussi devenir président du Conseil de sécurité. Le mandat dure combien de temps ? D'après vous, quel sera le rôle que le président du Conseil de sécurité doit assumer ? Comment allez-vous le définir ?
R - Comme vous le savez, la présidence du Conseil de sécurité est mensuelle, donc la France exerce cette présidence pour le mois de janvier, c'est l'Allemagne qui l'exercera pour le mois suivant et le but est bien évidemment d'animer et de réfléchir aux initiatives qui peuvent être prises sur des questions importantes. Comme je vous l'ai dit, la concertation est engagée, elle est permanente entre les différents membres du Conseil de sécurité et nous allons analyser au cours des prochains jours les initiatives qui peuvent être prises pour avancer dans la voie qui est celle que nous souhaitons tous, c'est-à-dire la recherche d'un dialogue, la recherche d'une résolution pacifique de cette crise. Je l'ai dit : la position de la France c'est d'encourager l'ensemble des voies qui peuvent servir à avancer dans cette direction. La voie bilatérale, bien sûr, entre les Etats-Unis et la Corée du Nord, la voie régionale et la voie multilatérale dans le cadre de l'Agence internationale de l'Energie atomique, voire dans le cadre du Conseil de sécurité. Toutes ces voies doivent être encouragées pour accompagner la situation, créer le contexte favorable qui permette de sortir des ambiguïtés et véritablement de favoriser une situation où la Corée du Nord serait amenée à pleinement respecter ses engagements internationaux.
J'aurai évidemment l'occasion de m'entretenir longuement lundi avec M. El Baradeï, le directeur général de l'Agence internationale de l'Energie atomique lundi et vous savez que le Conseil des gouverneurs de l'Agence internationale doit se réunir mercredi prochain à Vienne.
Q - Monsieur le Ministre, avez-vous évoqué, ce matin, le dossier du refus des avions rafales par le gouvernement sud-coréen et avez-vous élaboré de nouvelles méthodes pour les futurs appels d'offres en fourniture d'armes ?
R - Nous avons bien sûr évoqué les différents aspects de la coopération civile et militaire entre la France et la Corée du Sud, cela fait partie des questions évidemment très importantes, compte tenu de l'enjeu pour nos deux pays et du développement de nos échanges. Vous connaissez la position de la France en Corée du Sud et l'ensemble des perspectives et du développement de cette coopération a bien sûr été étudié.
Q - Est-ce que l'Europe pourrait jouer un rôle de médiation ? Est-ce que la Corée du Sud vous a demandé d'intervenir en ce sens ? Est-ce qu'il y a eu des contacts ou est-ce que, avec vos collègues européens, vous avez eu des concertations pour intervenir ou pour une médiation européenne ?
R - La crise nord-coréeenne est évidemment une crise essentielle pour la stabilité de la région mais aussi pour les équilibres mondiaux. La communauté internationale a donc bien évidemment un rôle à jouer. Nos amis sud-coréens ont évoqué le rôle important que pourrait jouer l'Union européenne dans cette crise. Nous allons nous concerter avec nos différents partenaires pour voir de quelle façon l'Union européenne pourrait prendre des initiatives si besoin était.
Q - La crise doit être désamorcée dans l'immédiat, mais à plus long terme, comment traiter avec un pays comme la Corée du Nord ? Est-ce que la France est plutôt sur la ligne de Washington, puisqu'en effet, elle est pratiquement isolée dans l'Union européenne car elle n'a pas établi de relations diplomatiques avec la Corée du Nord. Pourriez-vous me dire pourquoi ?
R - Vous savez que la France suit avec beaucoup d'attention l'évolution de la situation dans la péninsule coréenne et si nous n'avons pas établi de relations avec la Corée du Nord c'est bien parce que sur les différents aspects de cette relation qu'il s'agisse du dossier intercoréen, qu'il s'agisse de la question des Droits de l'Homme ou de l'attitude de la Corée du Nord sur des questions de prolifération - nous avons estimé que la situation n'était pas mûre et nous avons en permanence maintenu l'examen de cette question. Nous avons envisagé au cours des derniers mois l'établissement de relations diplomatiques mais la crise nord-coréenne est survenue et nous sommes donc dans la situation que vous connaissez.
Q - A la première question concernant une éventuelle décision d'application de sanctions économiques qui serait éventuellement prise par le Conseil de sécurité, vous avez dit que ce n'était pas encore le cas mais j'aimerais savoir dans ce cas-là : pour vous, la crise n'est pas encore assez grave ? Pourquoi pensez-vous que cela ne sera pas le cas lors de la réunion la semaine prochaine ?
R - Notre conviction c'est que toute les chances doivent être données au dialogue et c'est dans cet esprit que la communauté internationale, dans son ensemble, veut approcher cette crise nord-coréenne compte tenu des implications et de la complexité que j'ai évoquées tout à l'heure, à la fois concernant l'importance des enjeux, tout ce qui touche à la non-prolifération mais aussi la dimension politique régionale, la dimension humaine. L'ensemble de ces facteurs nous conduit à privilégier la voie du dialogue. Ce qui n'exclut pas une politique de très grande fermeté. La communauté internationale, unie en ce qui concerne les messages adressés à la Corée du Nord, étudie et se concerte pour déterminer quelles seront les prochaines étapes en fonction de l'attitude de la Corée du Nord. Nous souhaitons que la Corée du Nord revienne sur sa décision. Nous souhaitons que les différentes approches qui sont développées aujourd'hui, régionale, bilatérale, multilatérale puissent porter leurs fruits, et nous maintenons très étroitement notre concertation pour adapter, à chaque étape, notre attitude.
Q - Monsieur le Ministre, vous avez dit qu'il y avait à peu près trois niveaux de concertation, c'est à dire premièrement entre les Etats-Unis et la Corée du Nord et aussi une concertation au niveau régional et aussi, troisièmement, multilatérale. Mais vous ne pensez pas que parmi ces trois étapes l'intérêt peut être différent et les opinions divergentes ? Qu'en pensez-vous ?
R - Notre conviction c'est qu'il doit y avoir évidemment convergence entre ces différentes approches sachant que la double logique, à la fois de dialogue et de fermeté, est indispensable dans la situation actuelle. Et, fort des relations privilégiées, naturellement, de la Corée du Sud et du Japon avec la Corée du Nord ; fort de la proximité géographique et des liens de la Russie et de la Chine, il faut essayer d'utiliser tous les atouts qui sont les nôtres pour bien marquer l'importance des règles auxquelles la communauté est attachée, vis-à-vis de la Corée du Nord et en même temps faire en sorte que le dialogue et la compréhension permettent de trouver un dénouement à cette crise.
Q - Avant de venir en Corée je sais que vous avez effectué une visite en Russie et aussi en Chine. Je sais que vous avez rencontré vos homologues et j'aimerais savoir quelle a été l'issue de vos entretiens avec eux concernant le dossier nord-coréen ; il est vrai que pour arriver à une solution il faut passer par le dialogue et la fermeté mais pour ce faire, on ne peut pas faire vraiment abstraction de l'attitude de la Russie et de la Chine car ils sont aussi membres du Conseil de sécurité. Mais je ne pense pas que la Russie et la Chine ont la même position que les Etats-Unis, la France ou la Grande-Bretagne. Je pense que ces pays pensent quand même qu'il est important de continuer à mener le dialogue entre la Corée du Nord et les Etats-Unis.
R - Il y a une large convergence de vues entre l'ensemble des pays que vous avez mentionnés. On peut imaginer privilégier, bien sûr, la voie du dialogue bilatéral entre les Etats-Unis et la Corée du Nord. Nous pensons tous qu'il y a là un cadre privilégié pour rechercher un dénouement à la crise. Mais la question c'est d'appuyer, d'accompagner, de permettre à d'autres cadres de jouer tout leur rôle pour encourager la voie d'un règlement. Eviter les malentendus, éviter les arrière-pensées. Faire en sorte qu'un climat de confiance permette à ce dialogue d'être véritablement fructueux et c'est bien le sens de l'utilisation de ces différents cadres, à la fois le cadre régional et en même temps le cadre multilatéral. N'oublions pas l'objectif qui est le nôtre et qui doit nous mobiliser. C'est bien d'obtenir que la Corée du Nord respecte ses engagements internationaux, respecte ses engagements en matière de non prolifération, il en va évidemment de la stabilité régionale, il en va aussi de la stabilité internationale. Donc, sur cette crise il faut que chacun se mobilise, que chacun joue son rôle. C'est une responsabilité collective, je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes dans un monde où il est difficile d'imaginer que les difficultés du monde, les crises ne soient pas liées. Il faut donc que la communauté internationale agisse ensemble, montre un visage uni face aux difficultés et c'est bien ce message là que nous voulons adresser à la Corée du Nord. Et, que l'on parle du cadre du Conseil de sécurité, que l'on parle du cadre bilatéral ou de l'action de chacun des Etats, de la région, le message est bien le même : faire en sorte que le respect des engagements puisse être total.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 14 janvier 2003)