Texte intégral
Je suis d'autant plus satisfaite de participer à la conclusion de cette journée nationale, que votre manifestation me donne pour la première fois depuis ma prise de fonctions, l'occasion de préciser les objectifs du gouvernement sur un sujet qui constitue une priorité de son action dans le domaine de la politique du handicap, à savoir l'amélioration de la situation des personnes atteintes d'un syndrome autistique ou de troubles apparentés.
I - Permettez-moi, au préalable, de féliciter l'association Autisme France d'avoir organisé cette journée sur le thème de "la connaissance et des prises en charge de l'autisme à l'aube du XXIème siècle", tant il est vrai qu'il convient de poursuivre nos réflexions sur la nature de ce syndrome et sur le contenu des techniques les plus appropriées pour apporter toutes les aides nécessaires aux personnes atteintes d'autisme.
Le syndrome autistique représente en effet, ce n'est pas à la nombreuse assemblée ici présente que je l'apprendrais, une immense souffance, tant pour les personnes porteuses de ces troubles que pour leur entourage.
Un médecin, spécialiste de l'autisme, a ainsi pu parler "du paradigme de l'handicapé handicapant pour son entourage, capable de produire des plus values de souffrance autour de lui" Qui pourra effectivement dire l'angoisse, l'isolement, l'épuisement des familles face aux peurs, aux colères, aux comportements agressifs ou ritualisés et à ce qui peut apparaître à certains comme une énigme irrésolue ?
Fort heureusement l'autisme est devenu une priorité de notre politique médico-sociale grâce à l'action opiniâtre des familles et de leurs associations, dont la vôtre, qui représente plus de 2 500 familles et près de 80 associations partenaires.
C'est ainsi que votre organisation, Monsieur le Président, a pris une part déterminante dans la préparation de la loi du 11 décembre 1996 sur l'autisme qui est la résultante de deux propositions de loi, l'une initiée par Monsieur CHOSSY, l'autre par Monsieur FABIUS et qui, rappelons le, a été votée à l'unanimité par les deux assemblées.
Il convient donc aujourd'hui de rendre justice et hommage aux associations de parents de s'être battues, le terme n'est pas trop fort, et d'avoir su mobiliser des professionnels de plus en plus nombreux et convaincus, pour faire reconnaître l'autisme comme un trouble méritant l'élaboration d'une politique clairement définie et résolument appliquée dans la continuité. C'est le cas aujourd'hui.
II - Vous savez tous qu'une politique nationale réellement adaptée aux personnes autistes n'a été initiée qu'à partir de 1995, par la volonté de Simone VEIL. Depuis, des schémas régionaux sur l'autisme ont été élaborés à partir des propositions faites par des comités techniques régionaux sur l'autisme, associant ainsi étroitement les organisations de parents à la concrétisation de plans d'action adaptés aux réalités de terrain.
Au cours des cinq dernières années, plus de 260 millions de francs de crédits de l'assurance maladie ont été réservés ou redéployés pour créer près de 1 800 places pour enfants, adolescents et adultes autistes sous forme de services d'éducation et de soins spécialisés à domicile (SESSAD), instituts médico-éducatifs (IME), foyers à double tarification (FDT), maisons d'accueil spécialisées (MAS) et structures expérimentales. A ces établissements et services il convient d'ajouter la création de quatre centres de ressources spécialisés sur l'autisme, l'ouverture d'une cinquantaine de places de CAT financées sur crédits d'Etat et de plusieurs dizaines de classes intégrées ouvertes grâce à une coopération renforcée avec le ministère de l'éducation nationale en matière d'intégration scolaire des enfants handicapés.
Au titre de ce bilan provisoire, je souhaite insister sur deux éléments complémentaires importants qui ont été initiés à partir de 1998 par Martine AUBRY et Bernard KOUCHNER pour conforter la politique conduite par les pouvoirs publics sur l'autisme, à savoir la formation des personnels d'une part, les centres de ressources sur l'autisme d'autre part.
Sur le premier point une circulaire du 10 avril 1998 a organisé un plan de formation des personnels médico-sociaux intervenant auprès des personnes autistes. Ce plan répondait à une réelle nécessité tant il est vrai qu'il ne suffit pas d'ouvrir de nouvelles places et de nouvelles structures. Il convient en effet que les professionnels recrutés à cette occasion, ou ceux exerçant dans les institutions plus anciennes, disposent d'une formation réellement adaptée à la spécificité de l'autisme et de ses prises en charge.
Ainsi ce texte a organisé, sur la base d'un rapport d'experts, quatre modules de formation continue et d'adaptation à l'emploi au bénéfice des personnels accueillant des autistes en établissements ou services sanitaires, sociaux et médico-sociaux :
o un module "de base" de 28 heures,
o un module centré sur les interventions et pratiques éducatives de 140 heures,
o un module "d'approfondissement-études et recherche", dimensionné à 70 heures, faisant l'objet d'une production écrite soutenue devant un jury,
o un module organisant un stage pratique de 78 heures, validé par un rapport de stage et la soutenance d'une étude de cas.
Cette circulaire fixe par ailleurs l'organisation régionale de ces formation et notamment les orientations générales en la matière annexées au schéma régional sur l'autisme ; l'appel à projets par région auprès des organismes de formation, sur la base d'un cahier des charges annexé à la circulaire ; la sélection et labélisation des projets par un comité présidé par le DRASS.
Une évaluation de ce programme est en cours et j'ai demandé à mes services, à l'issue de cette évaluation, de réunir avant la fin du premier semestre de l'année prochaine le comité national consultatif de suivi de cette opération, lequel associe les organisations représentatives des familles d'autistes, afin de bien mesurer l'impact du programme et de me proposer le cas échéant les mesures complémentaires qui pourraient s'avérer utiles.
Le second point concerne les centres de ressources.
Le rapport de l'IGAS d'octobre 1994 sur l'autisme avait proposé la création de centres régionaux de dépistage précoce de l'autisme, proposition qui n'avait pas été reprise dans le cadre des directives d'avril 1995.
Par ailleurs, lors de l'élaboration des schémas régionaux sur l'autisme, bon nombre de régions avaient souhaité au plan départemental ou régional la création d'organismes ayant une compétence en matière d'information des familles et des professionnels, de repérage épidémiologique et de dépistage précoce ou d'aide au dépistage précoce.
Notons enfin que le récent livre blanc que l'UNAPEI a consacré à l'autisme, mentionnait que notre pays connaissait des retards en matière de diagnostic précoce de l'autisme.
Certes, quelques réalisations intéressantes dans ce domaine avaient vu le jour, notamment à Toulouse et dans le département des Yvelines, mais il convenait de développer un programme spécifique de création de centres de ressources.
C'est ce que le gouvernement a réalisé en finançant en 1999 quatre nouveaux centres situés à Reims, Tours, Brest et Montpellier et incluant les CHU de ces quatre localités dans un travail en réseau avec le tissu associatif.
Ces organismes sont animés par une équipe pluridisciplinaire, spécialisée et expérimentée sur le syndrome autistique, mettant en oeuvre des actions de diagnostic précoce, de recherche, d'aide, de soutien, d'information, de formation, de conseil et d'expertise auprès des familles et des professionnels médico-sociaux et de santé.
Ces centres répondent ainsi à huit principales missions :
- l'élaboration des bilans diagnostiques précoces et la formation des praticiens à de tels diagnostics.
- la contribution à la définition d'un guide de bonnes pratiques sur le dépistage du syndrome autistique, pouvant conduire à des protocoles standardisés, dans le cadre d'un réseau coordonné entre centres de ressources.
- la contribution à la formation au dépistage de l'autisme des médecins psychiatres exerçant sur l'aire de desserte du centre, tant en milieu hospitalier qu'en institutions médico-sociales.
- la recherche sur les origines des troubles autistiques et leur évolution ainsi que sur les modes les plus pertinents de leur prise en charge.
- le conseil auprès des équipes techniques des CDES et des COTOREP.
- la mise en oeuvre de prestations de conseil et d'orientation auprès des familles.
- l'animation de réseaux régionaux coordonnés en matière de prise en charge des autistes et la délivrance d'expertises à la demande des établissements médico-sociaux et sanitaires accueillant des personnes autistes.
- l'élaboration d'une documentation, banque de données et outils de vulgarisation sur les problèmes de l'autisme.
J'ai également demandé à mes services de mettre en place, après un an de fonctionnement de ces structures, une évaluation précise de ce dispositif expérimental afin de procéder s'il y a lieu aux ajustements nécessaires.
III - J'en viens maintenant aux objectifs et aux actions que le gouvernement entend développer à l'avenir.
Un premier chantier vise à poursuivre et amplifier le programme de création de places initié depuis 1995.
Il convient en effet de rappeler que, sur la base d'un taux de prévalence compris entre 4 et 5,6 personnes autistes pour 10 000 habitants, on peut estimer qu'environ 10 000 personnes autistes ne trouvent encore aucune solution institutionnelle en dépit de l'effort significatif déjà réalisé.
Elles restent à la charge de leurs familles dans des conditions très difficiles et souvent dramatiques, eu égard à la lourdeur de ce handicap. Ainsi le nombre de places nouvelles créées depuis 5 ans ne correspond pas encore au niveau nécessaire pour répondre aux besoins.
C'est pourquoi, dans la continuité des efforts financiers consentis en 1999, le gouvernement a inscrit une nouvelle enveloppe de 50 millions de francs de crédits de l'assurance maladie dédiés à l'accueil médico-social des personnes autistes, au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000. Nous sommes ainsi passés d'une enveloppe une année sur deux à une enveloppe chaque année.
A titre encore indicatif, cette enveloppe devrait permettre :
o en contrepoint du plan pluriannuel de places consacrées aux adultes lourdement handicapés, de poursuivre la création de sections de FDT et de MAS consacrées aux autistes ;
o de créer de nouvelles sections d'IME et de SESSAD couplés à des classes d'intégration scolaire pour les enfants et adolescents autistes ;
o d'expérimenter une structure destinée à accueillir des autistes adultes dont les troubles du comportement souvent violents nécessitent un encadrement renforcé ;
o de mettre en place, dans le cadre d'un réseau coordonné entre plusieurs établissements, un centre de ressources sur l'autisme dans la région Ile de France, en complément du dispositif existant : l'importance démographique de cette région nécessitant de concevoir un dispositif multipolaire réellement adapté aux besoins de cette région qui représente 18,5 % de la population nationale.
Je souhaite également réserver, sur les 2 000 places nouvelles de CAT qui seront financées en 2000 sur le budget de l'Etat, 5 à 10 % de ces places à la création de sections de CAT spécialement conçues pour les personnes autistes qui ont la possibilité de bénéficier d'une aide au travail.
Enfin je souhaite donner un nouveau souffle à la politique volontariste que nous menons au niveau national et local en faveur de cette catégorie très spécifique de handicap, en saisissant l'opportunité offerte par l'article 3 de la loi du 11 décembre 1996 sur l'autisme.
En effet cet article dispose que le gouvernement doit présenter au parlement avant le 31 décembre 2000, je cite, "un rapport relatif à la prise en charge des personnes atteintes du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés et à la création de places en établissement pour celles-ci".
les conclusions de ce rapport pourront être prises en compte lors de l'examen à la fin de l'année prochaine du PLFSS de 2001.
Ainsi, afin d'élaborer un bilan le plus détaillé possible mais aussi pour actualiser la circulaire conjointe Affaires sociales /Eduction Nationale du 27 avril 1995, laquelle a eu pour mérite de fonder les grandes lignes de force de la politique conduite mais qui reste incomplète, j'ai demandé à mes services de préparer, au cours du premier trimestre de l'année prochaine, un questionnaire détaillé aux préfets sur la politique conduite sur l'autisme dans chaque région et portant notamment sur :
o les principales caractéristiques des plans régionaux sur l'autisme : évaluation des besoins, programmation des réponses institutionnelles, bilan des formations des personnels, réunions régulières des comités techniques régionaux sur l'autisme, car j'ai bien noté comme vous, Monsieur le Président, que ces instances ne se réunissaient pas toujours
o l'opportunité d'élaborer le cas échéant des schémas régionaux de seconde génération, tant il est vrai que les besoins restant à satisfaire, vous l'avez également noté, restent importants ;
o le bilan de l'intégration scolaire des jeunes autistes, en partenariat avec les services de l'éducation nationale, car nous manquons d'éléments quantitatifs et qualitatifs sur ce point ;
o la connaissance précise des réalisations concrètes des opérations de création de places véritablement destinées aux autistes, afin d'être certains à l'avenir que les enveloppes destinées à cette catégorie de handicap ne sont pas utilisées à d'autres fins ;
o le recensement des redéploiements de crédits effectués depuis 1995 sur les enveloppes régionales, hors enveloppes ciblées, et leur traduction en terme de créations de places, ces éléments n'étant pas toujours connus de mon ministère ;
o le détail de la participation financière des conseils généraux à cette politique, notamment pour ce qui concerne les FDT ;
o une première évaluation du fonctionnement des cinq centres de ressources sur l'autisme créés en 1999 ;
o les principaux problèmes auxquels les services déconcentrés de l'Etat sont confrontés sur ce thème.
Ainsi les remontées d'information qui me parviendront au titre de ce questionnaire, dont je n'ai décrit que quelques thèmes, me permettront non seulement d'élaborer le rapport au parlement déjà cité mais aussi de redonner un second souffle à notre politique sur l'autisme en rénovant ses objectifs et en maintenant une bonne mobilisation de nos services déconcentrés sur ce thème prioritaire.
J'ajoute, en écho à une question soulevée par votre organisation, que mes services préparent actuellement un guide méthodologique définissant les référentiels de qualité que les établissements de santé, notamment en psychiatrie, devront respecter à l'occasion de leur reconversion partielle dans le champ médico-social pour personnes handicapées. Il faut en effet que les établissements de santé ne procèdent pas à des reconversions "au rabais" et respectent totalement les règles en vigueur dans le champ médico-social, sur la base d'un cahier des charges évitant toute dérive hospitalo centriste. Vous pouvez compter sur mon extrême vigilance en la matière.
Enfin, j'évoquerai pour finir une autre de vos préoccupations, relative aux modalités d'attribution du complément de 3ème catégorie de l'Allocation d'Education Spéciale. Afin d'harmoniser les pratiques des Commissions Départementales de l'Education Spéciale, une directive paraîtra prochainement. Confirmant les indications déjà apportées par de précédentes circulaires qui ont notamment assoupli la notion des soins de "haute technicité" prise en considération pour ouvrir droit à ce complément, elle précisera certains points encore inégalement traités, notamment en matière de cessation d'activité des parents, de recours à une tierce personne ou du régime applicable aux enfants hospitalisés ou placés. Si elle ne peut à elle seule régler toutes les difficultés et ne dispense pas d'une réflexion plus approfondie sur la pertinence des textes législatifs et réglementaires régissant le régime de l'Allocation d'Education Spéciale, cette instruction me paraît néanmoins nécessaire et urgente pour garantir un traitement plus équitable des situations.
En conclusion à mon intervention je voudrais réaffirmer très clairement dans cette enceinte que l'amélioration permanente des prises en charge des personnes autistes est une cause qui nécessite une mobilisation sans relâche, au regard des souffrances que suscite ce syndrome tant pour la personne qui en est directement atteinte que pour son entourage.
Il est du devoir des pouvoirs publics de rester particulièrement actifs et vigilants sur ce problème et de poursuivre une action efficace, résolue et dans la continuité, afin de mieux répondre aux besoins de ces personnes qui, jusqu'à ce jour ont été insuffisamment prises en compte. Le gouvernement et moi-même apporteront un soutien sans faille à ce programme prioritaire, qui s'inscrit, je tiens à le rappeler, en cohérence avec les deux objectifs de la politique globale en faveur des personnes handicapées que nous menons depuis deux ans : favoriser l'intégration des personnes handicapées ; développer des accompagnements adaptés pour les plus lourdement handicapées d'entre elles.
Je vous remercie pour votre attention.
(source http://www.social.gouv.fr, le 28 décembre 1999)
I - Permettez-moi, au préalable, de féliciter l'association Autisme France d'avoir organisé cette journée sur le thème de "la connaissance et des prises en charge de l'autisme à l'aube du XXIème siècle", tant il est vrai qu'il convient de poursuivre nos réflexions sur la nature de ce syndrome et sur le contenu des techniques les plus appropriées pour apporter toutes les aides nécessaires aux personnes atteintes d'autisme.
Le syndrome autistique représente en effet, ce n'est pas à la nombreuse assemblée ici présente que je l'apprendrais, une immense souffance, tant pour les personnes porteuses de ces troubles que pour leur entourage.
Un médecin, spécialiste de l'autisme, a ainsi pu parler "du paradigme de l'handicapé handicapant pour son entourage, capable de produire des plus values de souffrance autour de lui" Qui pourra effectivement dire l'angoisse, l'isolement, l'épuisement des familles face aux peurs, aux colères, aux comportements agressifs ou ritualisés et à ce qui peut apparaître à certains comme une énigme irrésolue ?
Fort heureusement l'autisme est devenu une priorité de notre politique médico-sociale grâce à l'action opiniâtre des familles et de leurs associations, dont la vôtre, qui représente plus de 2 500 familles et près de 80 associations partenaires.
C'est ainsi que votre organisation, Monsieur le Président, a pris une part déterminante dans la préparation de la loi du 11 décembre 1996 sur l'autisme qui est la résultante de deux propositions de loi, l'une initiée par Monsieur CHOSSY, l'autre par Monsieur FABIUS et qui, rappelons le, a été votée à l'unanimité par les deux assemblées.
Il convient donc aujourd'hui de rendre justice et hommage aux associations de parents de s'être battues, le terme n'est pas trop fort, et d'avoir su mobiliser des professionnels de plus en plus nombreux et convaincus, pour faire reconnaître l'autisme comme un trouble méritant l'élaboration d'une politique clairement définie et résolument appliquée dans la continuité. C'est le cas aujourd'hui.
II - Vous savez tous qu'une politique nationale réellement adaptée aux personnes autistes n'a été initiée qu'à partir de 1995, par la volonté de Simone VEIL. Depuis, des schémas régionaux sur l'autisme ont été élaborés à partir des propositions faites par des comités techniques régionaux sur l'autisme, associant ainsi étroitement les organisations de parents à la concrétisation de plans d'action adaptés aux réalités de terrain.
Au cours des cinq dernières années, plus de 260 millions de francs de crédits de l'assurance maladie ont été réservés ou redéployés pour créer près de 1 800 places pour enfants, adolescents et adultes autistes sous forme de services d'éducation et de soins spécialisés à domicile (SESSAD), instituts médico-éducatifs (IME), foyers à double tarification (FDT), maisons d'accueil spécialisées (MAS) et structures expérimentales. A ces établissements et services il convient d'ajouter la création de quatre centres de ressources spécialisés sur l'autisme, l'ouverture d'une cinquantaine de places de CAT financées sur crédits d'Etat et de plusieurs dizaines de classes intégrées ouvertes grâce à une coopération renforcée avec le ministère de l'éducation nationale en matière d'intégration scolaire des enfants handicapés.
Au titre de ce bilan provisoire, je souhaite insister sur deux éléments complémentaires importants qui ont été initiés à partir de 1998 par Martine AUBRY et Bernard KOUCHNER pour conforter la politique conduite par les pouvoirs publics sur l'autisme, à savoir la formation des personnels d'une part, les centres de ressources sur l'autisme d'autre part.
Sur le premier point une circulaire du 10 avril 1998 a organisé un plan de formation des personnels médico-sociaux intervenant auprès des personnes autistes. Ce plan répondait à une réelle nécessité tant il est vrai qu'il ne suffit pas d'ouvrir de nouvelles places et de nouvelles structures. Il convient en effet que les professionnels recrutés à cette occasion, ou ceux exerçant dans les institutions plus anciennes, disposent d'une formation réellement adaptée à la spécificité de l'autisme et de ses prises en charge.
Ainsi ce texte a organisé, sur la base d'un rapport d'experts, quatre modules de formation continue et d'adaptation à l'emploi au bénéfice des personnels accueillant des autistes en établissements ou services sanitaires, sociaux et médico-sociaux :
o un module "de base" de 28 heures,
o un module centré sur les interventions et pratiques éducatives de 140 heures,
o un module "d'approfondissement-études et recherche", dimensionné à 70 heures, faisant l'objet d'une production écrite soutenue devant un jury,
o un module organisant un stage pratique de 78 heures, validé par un rapport de stage et la soutenance d'une étude de cas.
Cette circulaire fixe par ailleurs l'organisation régionale de ces formation et notamment les orientations générales en la matière annexées au schéma régional sur l'autisme ; l'appel à projets par région auprès des organismes de formation, sur la base d'un cahier des charges annexé à la circulaire ; la sélection et labélisation des projets par un comité présidé par le DRASS.
Une évaluation de ce programme est en cours et j'ai demandé à mes services, à l'issue de cette évaluation, de réunir avant la fin du premier semestre de l'année prochaine le comité national consultatif de suivi de cette opération, lequel associe les organisations représentatives des familles d'autistes, afin de bien mesurer l'impact du programme et de me proposer le cas échéant les mesures complémentaires qui pourraient s'avérer utiles.
Le second point concerne les centres de ressources.
Le rapport de l'IGAS d'octobre 1994 sur l'autisme avait proposé la création de centres régionaux de dépistage précoce de l'autisme, proposition qui n'avait pas été reprise dans le cadre des directives d'avril 1995.
Par ailleurs, lors de l'élaboration des schémas régionaux sur l'autisme, bon nombre de régions avaient souhaité au plan départemental ou régional la création d'organismes ayant une compétence en matière d'information des familles et des professionnels, de repérage épidémiologique et de dépistage précoce ou d'aide au dépistage précoce.
Notons enfin que le récent livre blanc que l'UNAPEI a consacré à l'autisme, mentionnait que notre pays connaissait des retards en matière de diagnostic précoce de l'autisme.
Certes, quelques réalisations intéressantes dans ce domaine avaient vu le jour, notamment à Toulouse et dans le département des Yvelines, mais il convenait de développer un programme spécifique de création de centres de ressources.
C'est ce que le gouvernement a réalisé en finançant en 1999 quatre nouveaux centres situés à Reims, Tours, Brest et Montpellier et incluant les CHU de ces quatre localités dans un travail en réseau avec le tissu associatif.
Ces organismes sont animés par une équipe pluridisciplinaire, spécialisée et expérimentée sur le syndrome autistique, mettant en oeuvre des actions de diagnostic précoce, de recherche, d'aide, de soutien, d'information, de formation, de conseil et d'expertise auprès des familles et des professionnels médico-sociaux et de santé.
Ces centres répondent ainsi à huit principales missions :
- l'élaboration des bilans diagnostiques précoces et la formation des praticiens à de tels diagnostics.
- la contribution à la définition d'un guide de bonnes pratiques sur le dépistage du syndrome autistique, pouvant conduire à des protocoles standardisés, dans le cadre d'un réseau coordonné entre centres de ressources.
- la contribution à la formation au dépistage de l'autisme des médecins psychiatres exerçant sur l'aire de desserte du centre, tant en milieu hospitalier qu'en institutions médico-sociales.
- la recherche sur les origines des troubles autistiques et leur évolution ainsi que sur les modes les plus pertinents de leur prise en charge.
- le conseil auprès des équipes techniques des CDES et des COTOREP.
- la mise en oeuvre de prestations de conseil et d'orientation auprès des familles.
- l'animation de réseaux régionaux coordonnés en matière de prise en charge des autistes et la délivrance d'expertises à la demande des établissements médico-sociaux et sanitaires accueillant des personnes autistes.
- l'élaboration d'une documentation, banque de données et outils de vulgarisation sur les problèmes de l'autisme.
J'ai également demandé à mes services de mettre en place, après un an de fonctionnement de ces structures, une évaluation précise de ce dispositif expérimental afin de procéder s'il y a lieu aux ajustements nécessaires.
III - J'en viens maintenant aux objectifs et aux actions que le gouvernement entend développer à l'avenir.
Un premier chantier vise à poursuivre et amplifier le programme de création de places initié depuis 1995.
Il convient en effet de rappeler que, sur la base d'un taux de prévalence compris entre 4 et 5,6 personnes autistes pour 10 000 habitants, on peut estimer qu'environ 10 000 personnes autistes ne trouvent encore aucune solution institutionnelle en dépit de l'effort significatif déjà réalisé.
Elles restent à la charge de leurs familles dans des conditions très difficiles et souvent dramatiques, eu égard à la lourdeur de ce handicap. Ainsi le nombre de places nouvelles créées depuis 5 ans ne correspond pas encore au niveau nécessaire pour répondre aux besoins.
C'est pourquoi, dans la continuité des efforts financiers consentis en 1999, le gouvernement a inscrit une nouvelle enveloppe de 50 millions de francs de crédits de l'assurance maladie dédiés à l'accueil médico-social des personnes autistes, au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2000. Nous sommes ainsi passés d'une enveloppe une année sur deux à une enveloppe chaque année.
A titre encore indicatif, cette enveloppe devrait permettre :
o en contrepoint du plan pluriannuel de places consacrées aux adultes lourdement handicapés, de poursuivre la création de sections de FDT et de MAS consacrées aux autistes ;
o de créer de nouvelles sections d'IME et de SESSAD couplés à des classes d'intégration scolaire pour les enfants et adolescents autistes ;
o d'expérimenter une structure destinée à accueillir des autistes adultes dont les troubles du comportement souvent violents nécessitent un encadrement renforcé ;
o de mettre en place, dans le cadre d'un réseau coordonné entre plusieurs établissements, un centre de ressources sur l'autisme dans la région Ile de France, en complément du dispositif existant : l'importance démographique de cette région nécessitant de concevoir un dispositif multipolaire réellement adapté aux besoins de cette région qui représente 18,5 % de la population nationale.
Je souhaite également réserver, sur les 2 000 places nouvelles de CAT qui seront financées en 2000 sur le budget de l'Etat, 5 à 10 % de ces places à la création de sections de CAT spécialement conçues pour les personnes autistes qui ont la possibilité de bénéficier d'une aide au travail.
Enfin je souhaite donner un nouveau souffle à la politique volontariste que nous menons au niveau national et local en faveur de cette catégorie très spécifique de handicap, en saisissant l'opportunité offerte par l'article 3 de la loi du 11 décembre 1996 sur l'autisme.
En effet cet article dispose que le gouvernement doit présenter au parlement avant le 31 décembre 2000, je cite, "un rapport relatif à la prise en charge des personnes atteintes du syndrome autistique et des troubles qui lui sont apparentés et à la création de places en établissement pour celles-ci".
les conclusions de ce rapport pourront être prises en compte lors de l'examen à la fin de l'année prochaine du PLFSS de 2001.
Ainsi, afin d'élaborer un bilan le plus détaillé possible mais aussi pour actualiser la circulaire conjointe Affaires sociales /Eduction Nationale du 27 avril 1995, laquelle a eu pour mérite de fonder les grandes lignes de force de la politique conduite mais qui reste incomplète, j'ai demandé à mes services de préparer, au cours du premier trimestre de l'année prochaine, un questionnaire détaillé aux préfets sur la politique conduite sur l'autisme dans chaque région et portant notamment sur :
o les principales caractéristiques des plans régionaux sur l'autisme : évaluation des besoins, programmation des réponses institutionnelles, bilan des formations des personnels, réunions régulières des comités techniques régionaux sur l'autisme, car j'ai bien noté comme vous, Monsieur le Président, que ces instances ne se réunissaient pas toujours
o l'opportunité d'élaborer le cas échéant des schémas régionaux de seconde génération, tant il est vrai que les besoins restant à satisfaire, vous l'avez également noté, restent importants ;
o le bilan de l'intégration scolaire des jeunes autistes, en partenariat avec les services de l'éducation nationale, car nous manquons d'éléments quantitatifs et qualitatifs sur ce point ;
o la connaissance précise des réalisations concrètes des opérations de création de places véritablement destinées aux autistes, afin d'être certains à l'avenir que les enveloppes destinées à cette catégorie de handicap ne sont pas utilisées à d'autres fins ;
o le recensement des redéploiements de crédits effectués depuis 1995 sur les enveloppes régionales, hors enveloppes ciblées, et leur traduction en terme de créations de places, ces éléments n'étant pas toujours connus de mon ministère ;
o le détail de la participation financière des conseils généraux à cette politique, notamment pour ce qui concerne les FDT ;
o une première évaluation du fonctionnement des cinq centres de ressources sur l'autisme créés en 1999 ;
o les principaux problèmes auxquels les services déconcentrés de l'Etat sont confrontés sur ce thème.
Ainsi les remontées d'information qui me parviendront au titre de ce questionnaire, dont je n'ai décrit que quelques thèmes, me permettront non seulement d'élaborer le rapport au parlement déjà cité mais aussi de redonner un second souffle à notre politique sur l'autisme en rénovant ses objectifs et en maintenant une bonne mobilisation de nos services déconcentrés sur ce thème prioritaire.
J'ajoute, en écho à une question soulevée par votre organisation, que mes services préparent actuellement un guide méthodologique définissant les référentiels de qualité que les établissements de santé, notamment en psychiatrie, devront respecter à l'occasion de leur reconversion partielle dans le champ médico-social pour personnes handicapées. Il faut en effet que les établissements de santé ne procèdent pas à des reconversions "au rabais" et respectent totalement les règles en vigueur dans le champ médico-social, sur la base d'un cahier des charges évitant toute dérive hospitalo centriste. Vous pouvez compter sur mon extrême vigilance en la matière.
Enfin, j'évoquerai pour finir une autre de vos préoccupations, relative aux modalités d'attribution du complément de 3ème catégorie de l'Allocation d'Education Spéciale. Afin d'harmoniser les pratiques des Commissions Départementales de l'Education Spéciale, une directive paraîtra prochainement. Confirmant les indications déjà apportées par de précédentes circulaires qui ont notamment assoupli la notion des soins de "haute technicité" prise en considération pour ouvrir droit à ce complément, elle précisera certains points encore inégalement traités, notamment en matière de cessation d'activité des parents, de recours à une tierce personne ou du régime applicable aux enfants hospitalisés ou placés. Si elle ne peut à elle seule régler toutes les difficultés et ne dispense pas d'une réflexion plus approfondie sur la pertinence des textes législatifs et réglementaires régissant le régime de l'Allocation d'Education Spéciale, cette instruction me paraît néanmoins nécessaire et urgente pour garantir un traitement plus équitable des situations.
En conclusion à mon intervention je voudrais réaffirmer très clairement dans cette enceinte que l'amélioration permanente des prises en charge des personnes autistes est une cause qui nécessite une mobilisation sans relâche, au regard des souffrances que suscite ce syndrome tant pour la personne qui en est directement atteinte que pour son entourage.
Il est du devoir des pouvoirs publics de rester particulièrement actifs et vigilants sur ce problème et de poursuivre une action efficace, résolue et dans la continuité, afin de mieux répondre aux besoins de ces personnes qui, jusqu'à ce jour ont été insuffisamment prises en compte. Le gouvernement et moi-même apporteront un soutien sans faille à ce programme prioritaire, qui s'inscrit, je tiens à le rappeler, en cohérence avec les deux objectifs de la politique globale en faveur des personnes handicapées que nous menons depuis deux ans : favoriser l'intégration des personnes handicapées ; développer des accompagnements adaptés pour les plus lourdement handicapées d'entre elles.
Je vous remercie pour votre attention.
(source http://www.social.gouv.fr, le 28 décembre 1999)