Message de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable, adressé à l'assemblée générale de France Nature Environnement le 1er mars 2003, sur les grands axes du partenariat entre l'Etat et les associations de protection de la nature et de l'environnement.

Prononcé le 1er mars 2003

Intervenant(s) : 

Circonstance : Assemblée générale de France Nature Environnement (FNE) à Paris le 1er mars 2003

Texte intégral

Je tiens, en premier lieu, à vous remercier de m'accueillir parmi vous et de m'exprimer auprès des associations de protection de la nature et de l'environnement que France Nature Environnement rassemble. Cette intervention sera pour moi l'occasion d'évoquer les rapports qu'entretient le ministère avec les associations que vous représentez.
J'aborderai également quelques propositions qui me semblent de nature à renforcer notre partenariat. Ces propos doivent être à mon sens le point de départ d'un échange franc et constructif qui doit rester notre ligne de conduite.
J'ai le sentiment que FNE et un certain nombre d'associations que vous rassemblez se sentent, ont pu se sentir en certaines occasions insuffisamment écoutées.
J'ai également conscience que certaines associations de protection de la nature et de l'environnement se sentent interpellées par la montée en puissance des thèmes du développement durable et de l'écologie humaniste qui a pour objet de réconcilier l'ensemble de la population en faisant participer chacun à la protection de l'environnement et ainsi, en changeant d'échelle, en terme d'impact sur la préservation de la nature.
Ce concept a souvent été mal interprété et ressenti comme un dévoiement de l'écologie vers un anthropocentrisme de mauvais aloi. La nature, avec l'homme en son sein, doit être préservée et la protection de la biodiversité en est un des éléments.
Un exemple d'action en ce sens : nous devons tous ensemble faire un effort particulier pour reconstituer la tradition française des naturalistes, qui font actuellement cruellement défaut. Il n'est pas possible d'agir correctement sur un milieu sans que les experts de ce milieu n'existent.
Reconnaissons, par ailleurs, que la solidarité entre les peuples qui est un des fondements du développement durable donne une dimension internationale et des angles d'approche en partie nouveaux que toutes les associations de protection de la nature doivent prendre en compte.
J'ai enfin le sentiment que vous vous inquiétez d'un lien peut-être trop exclusif avec l'Etat et plus particulièrement avec le ministère de l'Ecologie et du développement durable. Cette grande proximité a bien sûr vous le savez une dimension financière.
Le diagnostic que nous devrons faire tous ensemble doit nous permettre de clarifier nos rapports et de bâtir une relation durable, saine et constructive entre le ministère et le milieu associatif.
Je souhaite travailler et avancer avec vous dans un état d'esprit ouvert, dans le cadre d'un véritable partenariat, profitable à mon sens pour les associations que vous représentez et pour l'intérêt général que nous défendons tous dans le domaine de l'écologie et du développement durable.
Quels sont les termes de ce partenariat ?
Le premier axe, au risque de vous surprendre, c'est l'attachement, doublé d'une volonté réelle, de pouvoir compter sur les associations de protection de la nature et de l'environnement comme facteur de prise de conscience, auprès de toute la population.
J'ai d'ailleurs tenu à associer FNE aux différentes instances nationales et conseils tels que : CNFS, Observatoire National de la Faune (avec FNE et LPO).
Je suis en d'autres termes persuadée que le rassemblement des Français autour des thèmes relatifs à la nature et aux paysages, à la biodiversité, passe notamment par vous, associations de protection de la nature et de l'environnement.
Je sais que vous portez vos efforts sur la sensibilisation, l'éducation de tous les publics à ces questions : individus, entreprises, syndicats, mais aussi locaux, responsables etc et, en même temps, que vous adaptez votre discours à un public qui a quelques fois une vision très superficielle de la nature, voire, une ignorance complète lorsqu'il s'agit de populations très urbaines qui peuvent avoir perdu tout contact avec la nature.
Les Français, sont pourtant dans leur grande majorité attachés - et ils ont raison - à la richesse de leurs terroirs. A nous de leur faire comprendre que la diversité biologique en est la première ressource.
Je sais qu'un certain nombre d'associations n'ont pas attendu ces propos pour prendre "leur bâton de pèlerin ". Je les en félicite. Je souhaite que ce mouvement, qui s'inscrit parfaitement dans une démarche de développement durable, s'amplifie.
C'est aussi une façon très concrète de construire des projets capables d'intéresser des partenaires, y compris financiers.
C'est ainsi une façon de mettre en évidence, auprès de l'ensemble de nos concitoyens, l'excellence technique et scientifique de vos réseaux d'acteurs, sur le terrain.
Il vous appartient de faire valoir de tels atouts.
Les associations qui se sont engagées dans cette voie, souvent avec succès réussissent à mobiliser des milliers d'adhérents et à intéresser les collectivités territoriales, leurs élus et des entreprises pour le développement de leurs programmes. Il faut développer cette approche, qui présente de surcroît l'avantage de diversifier vos sources de financement.
Le deuxième axe du partenariat équilibré que j'appelle de mes vux porte sur votre participation, celle des associations, des ONG et plus largement de la société civile, aux multiples instances de concertation et de débat auxquelles, je sais, beaucoup d'entre vous s'expriment déjà.
Je pense à votre participation actuelle et très active au processus d'élaboration de la charte de l'Environnement dont les enjeux me tiennent tant à cur. En effet cette charte qui sera adossée à la Constitution, élèvera au rang des droits de l'homme, les droits et les devoirs en matière d'environnement. Mais la charte c'est aussi cette immense démarche participative qui n'a cessé des s'exprimer tout au long des 14 Assises nationales. Je voudrais également souligner votre participation au Conseil National du Développement durable, mais je sais qu'il existe, tant au niveau national que local, d'autres lieux qui favorisent cette " perméabilité " indispensable entre la société civile et les autorités publiques.
Un partenariat équilibré avec d'autres acteurs est également important. Je pense notamment aux propriétaires, aux gestionnaires et aménageurs des territoires (collectivités territoriales, agriculture et forestier), aux chasseurs,
Ils jouent un rôle déterminant dans l'évolution en les préservant dans leur biodiversité.
Je sais qu'au-delà des conflits qui peuvent naître au plan national par exemple Natura 2000, me reviennent de nombreuses expériences positives de collaboration sur le terrain.
On peut simplement regretter que certaines de ces confrontations cristallisent aujourd'hui des oppositions. Elles contribuent à radicaliser les débats et à mettre sur le devant de la scène les positions les plus extr. C'est d'autant plus regrettable que pendant le même temps notre énergie, nos moyens se détournent des vraies questions, des vrais enjeux.
Je sais que vous êtes prêts à vous investir sur de vrais débats - j'en parlais tout à l'heure pour la Charte - et je souhaite à cet égard valoriser les contributions constructives des associations qui donnent ainsi une réalité concrète à cette " démocratie participative " qui est le complément indispensable aujourd'hui, de notre démocratie représentative.
J'y serai d'autant plus encline que, dans la perspective des réformes portant sur la décentralisation, partenariat et contractualisation vont devenir une des clefs de voûte des rapports entre les acteurs intervenant suer le patrimoine naturel. Je sais que l'Etat, ses services déconcentrés, les collectivités territoriales peuvent s'appuyer, dans cet esprit, sur des associations sérieuses, professionnelles dans leur démarche et leurs propositions.
FNE, sur des questions d'eau notamment, a déjà prouvé son professionnalisme.
Le mouvement de décentralisation nous invite à travailler ensemble. Le Premier Ministre, lui-même, a d'ailleurs annoncé récemment son souhait de rencontrer et d'écouter les représentants du milieu associatif.
Je souhaite en conclusion vous dire mon attachement à la poursuite de votre action telle que vous la concevez. Comme toute structure fédérative, vous parvenez à faire que 1+1=3 ! ou de façon plus claire, que vous dépassez l'addition arithmétique de toutes les associations qui vous composent.
En vous regroupant, vous parvenez non seulement à acquérir la dimension suffisante pour être pour l'Etat un interlocuteur reconnu et légitime, au plan national, mais aussi à obtenir la capacité de synthèse, la vision, le recul, la technicité, l'expertise que seule peut créer la confrontation des idées.
Je vous remercie.

(Source http://www.environnement.gouv.fr, le 7 mars 2003)