Déclaration à la presse conjointe de MM. Pierre Moscovici, ministre délégué aux affaires européennes et Ramon de Miguel, secrétaire d'Etat espagnol aux affaires européennes, sur le dossier des fruits et légumes et les dispositions prises pour éviter les conflits bilatéraux, la représentation des pays méditerranéens dans l'Union européenne et la réforme des institutions communautaires, Paris le 17 mars 1998.

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Texte intégral

Nous avons fait un tour d'horizon très large, à la fois des problèmes communautaires et aussi des problèmes bilatéraux. Sur les problèmes communautaires nous sommes très proches, extrêmement concordants, y compris sur l'Agenda 2000, sur lequel nos positions se rapprochent.
Sur la proposition de l'initiative transatlantique de M. Brittan, j'ai senti, il pourra vous le confirmer, de la part de nos amis espagnols - même si la position n'est pas la même que la nôtre et chacun a sa sensibilité par rapport à cela - une forte convergence. Ils ont certaines réserves. Quant à nous, nos réserves ont été exprimées avec beaucoup de force, c'est le moins que l'on puisse dire, par le Président de la République et le Premier ministre, à l'issue de la Conférence européenne de Londres. Sur ce sujet, nous pensons que l'initiative en question n'a pas été conduite dans de bonnes conditions. Certaines questions, notamment le problème des lois extra-territoriales américaines, doivent être réglées avant même que l'on puisse envisager des initiatives fortes dans le cadre de l'euro-atlantique.
Nous avons également balayé les questions qui concernent la Conférence de Lomé, le processus euro-méditerranéen sur lequel nous avons des approches à la fois très volontaires et très communes les uns et les autres. Je pense que l'Espagne fait partie des pays qui expriment une grande solidarité dans leur approche de la Convention de Lomé, dans leur approche du processus euro-méditerrannéen, des pays qui ont des liens privilégiés entre eux et la volonté que sur ces deux sujets-là - nous ne sommes pas si nombreux en Europe hélas - les choses avancent.
Nous avons aussi fait le point d'un certains nombre d'affaires bilatérales, comme l'affaire andorrane, comme le problème des filets maillants dérivants. Sur ces deux cas, je crois que, dans un cas, l'Espagne peut compter sur notre compréhension, dans l'autre, c'est nous qui comptons sur sa compréhension. Nous ferons les meilleurs efforts pour parvenir à une position finale commune.
Nous avons traité du dossier des fruits et légumes puisque la saison approche.
Q - Et qu'avez-vous dit, qu'avez-vous décidé ?
R - Il faut d'abord constater que le climat a résolument changé, qu'il y a un travail approfondi qui est mené par les ministres de l'Intérieur, le comité mixte qui associe professions et administrations. Ils vont se réunir dans les tous prochains jours. Cela a permis un changement d'esprit entre les professionnels et également entre les administrations.
Vous savez aussi que les unités de commandements opérationnelles, les forces de l'ordre ont été mises en place en France, tout cela étant bien sûr, à la fois pour prévenir d'éventuels troubles mais aussi, le moment venu, et réprimer, si cela devenait nécessaire. Donc, dans toute hypothèse, je crois que nous sommes persuadés que les choses ne peuvent pas se produire comme l'an passé.
Ceci dit, nous souhaitons tout faire pour éviter des troubles, nous allons tout faire pour les éviter, nous-mêmes dans nos responsabilités, les Espagnols dans les leurs. En particulier, nous sommes prêts à examiner les propositions espagnoles d'organiser des convois. Il s'agit d'organiser ces convois à la frontière espagnole : évidemment, cela est la responsabilité des Espagnols. Nous sommes tout à fait favorables à cette solution-là. C'est une position que le gouvernement dans son ensemble a adopté qui, je crois, en fait, après avis de nos amis espagnols, a eu un accueil favorable, même si les difficultés de mise en oeuvre sont sans doute importantes.
Au moment où commencent les négociations, notre souhait commun est d'éviter que la crise de l'an dernier se reproduise. Elle est très mauvaise pour l'image de la France en Espagne - nous y sommes attachés - et très mauvaise aussi pour une certaine image de ce que doit être la sécurité dans un pays, mauvaise aussi pour les relations bilatérales. Comme ces relations sont de qualité encore une fois exceptionnelles, nous allons tout faire de sorte que ce dossier soit maîtrisé.
Q - Ces convois seront-ils protégés ?
R - Evidemment, mais nous ne devons pas en arriver là.
Q - Y a-t-il des problèmes d'indemnisation ?
R - Non. Le gouvernement s'est engagé tout de suite. Les dossiers sont traités. Il n'y a pas de difficultés particulières.
Q Avez-vous discuté de la place des représentants des pays méditerranéens dans l'Union ?
R - Il y a un risque de sous-représentation des pays méditerranéens au sein des différentes instances de l'Union et nous avons exprimé une vigilance commune par rapport à cela. Il y aura toute une série de nominations importantes qui devraient intervenir dans les prochains mois. Nous allons y réfléchir ensemble : la présidence de Banque centrale européenne, le secrétaire général du Conseil, le Haut Représentant pour la PESC, des nominations importantes au sein de la Commission. Tout cela exigera une réflexion globale.
Q - Vous avez parlé probablement de l'élargissement aussi qui s'ouvre à la fin du mois. Est-ce que l'Espagne est d'accord pour accélérer les réformes des institutions européennes ? Je fais allusion très précisément au texte belgo-italo-français signé en marge du Traité d'Amsterdam, auquel l'Espagne ne s'est pas joint encore ?
R - Je pense que le texte belgo-italo-français représente un moment. Nous avons été les premiers pays à signifier, au moment de la signature du Traité lui-même, que nous souhaitions qu'il y ait des réformes institutionnelles. Nous les avions listées. Cela dit, la question institutionnelle maintenant doit être reprise éventuellement dans d'autre termes. Je pense que ce moment a été dépassé par le Conseil de Luxembourg lui-même. Les conclusions du Conseil a relevé qu'il y a un préalable institutionnel pour l'élargissement. Tenons-nous en là et reprenons le dossier de façon ouverte. Je crois que nous pourrons étudier des propositions qui seront plus fouillées, plus nouvelles. Cela ne sert à rien de reprendre dans les mêmes termes ce qui n'a pas pu être conclu à Amsterdam. J'ai toujours constaté dans les discussions avec nos amis espagnols que, sur la notion même de réforme institutionnelle, nous étions d'accord. C'est cela qui compte. Maintenant à nous de faire des propositions.
La France fera, dans les semaines qui viennent, des propositions nouvelles sur les institutions, qui iront au-delà des quelques mots généraux que nous avons dit dans la déclaration franco-italo-belge qui montrait notre préoccupation.
Nous savons que nos amis britanniques ont rejoint ce point de vue largement. Nous savons que nos amis espagnols le rejoignent, mais sans le partager complètement. Cela veut dire qu'il faut aussi dépasser le stade d'une déclaration pour aller maintenant plus dans le détail../.

(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 18 septembre 2001)