Déclaration de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, en réponse à une question à l'Assemblée nationale le 13 mai 1998 et point de presse sur les relations franco-irakiennes et sur l'avancement du processus de désarmement en Irak.

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Circonstance : Entretien de M. Védrine avec M. Tarek Aziz, vice-premier ministre irakien à Paris le 13 mai 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs, j'ai reçu ce soir, au ministère des Affaires étrangères, M. Tarek Aziz, le vice-Premier ministre iraquien. Nous nous étions déjà rencontrés, ici et à New York, mais plus brièvement. Cette fois-ci, nous avons eu un temps beaucoup plus long pendant l'entretien, puis durant le dîner, pour passer en revue tous les aspects de la situation actuelle.
J'ai rappelé à M. Tarek Aziz la position constante de la France que vous connaissez bien et qui est fondée sur l'espoir et le désir de voir l'Iraq se réinsérer dans la communauté internationale, à commencer par sa région, ce qui passe bien entendu par l'application des résolutions du Conseil de sécurité. J'ai souligné qu'à nos yeux, depuis l'accord très important du 23 février dernier, entre lui-même et le Secrétaire général des Nations unies, un nouvel esprit de coopération était né entre l'Iraq et les Nations unies. M. Kofi Annan, ici même à Paris hier, s'en déclarait satisfait. Nous aussi, nous en sommes satisfaits. Chacun sait, d'ailleurs, la part que la France a pris à ce dénouement qui constitue une base à partir de laquelle il faut travailler en persévérant pour se rapprocher de la situation que nous souhaitons vivement, c'est-à-dire le moment où l'on pourra constater que les conditions posées par les résolutions pertinentes pour lever l'embargo sont réunies.
Nous avons parlé franchement et sans détour de tous ces aspects et de tous les volets du désarmement, aussi bien le nucléaire que le balistique, le chimique ou le biologique. J'ai écouté avec beaucoup d'attention l'analyse, les argumentations, les demandes de M. Tarek Aziz. Je crois que c'est une rencontre qui aura été utile à la consolidation de ce nouvel état d'esprit qui date de février dernier et à la recherche d'une solution la plus proche possible.
Q - C'est la première fois que M; Aziz est reçu à l'Elysée. S'agit-il d'un pas dans la normalisation des relations ?
R - Je réponds en ce qui me concerne. Oui, c'est un pas et c'est un pas qui a été favorisé par l'accord du 23 février, même si les relations entre la France et l'Iraq - je le rappelle-, ont toujours été maintenues puisqu'il y avait des rencontres régulières entre le vice-Premier ministre iraquien et le ministre des Affaires étrangères français.
Q - Irez-vous jusqu'à la reprise des relations diplomatiques ?
R - Il est trop tôt pour répondre à la question mais il n'est pas trop tôt pour la poser. Nous réfléchissons.
Q - L'Iraq et l'UNSCOM semblent se renvoyer la balle en ce qui concerne la mauvaise coopération qui existe entre eux. Qu'en pensez-vous ?
R - Il me semble que nous sommes, depuis le 23 février, dans une situation nouvelle qui a créé le nouvel esprit de coopération dont je viend de vous parler. J'ai rappelé que le Secrétaire général des Nations unies s'était réjoui de cette nouvelle situation. Il jugeait satisfaisante l'application de l'accord dont l'interprétation n'est pas toujours la même. Nous en avons parlé tout à l'heure, longuement, notamment sur les sujets sensibles tels que le chimique et le biologique. Non seulement, cette interprétation n'est toujours pas la même entre l'Iraq et l'UNSCOM, mais elle n'est toujours pas la même entre l'Iraq et plusieurs membres du Conseil de sécurité. Les choses s'améliorent : l'incompréhension est moins systématique, moins générale. J'ai bon espoir, sur le dossier nucléaire en particulier, que le Conseil de sécurité, pas immédiatement mais dans les mois qui viennent, aboutisse à un avis unanime. En tout cas, notre conviction est qu'il devrait pouvoir y arriver. Le problème que vous citez reste posé, mais il présente des conditions moins insolubles et moins négatives qu'il y a quelques mois. Il faut donc persévérer dans la voie créée par l'accord de février.
Q - M; Tarek Aziz a-t-il proposé une formule pour définir des critères de désarmement ?
R - C'est plutôt à lui qu'il faut le demander. Je l'ai écouté attentivement m'exposer la demande iraquienne de définition de critères plus précis et plus vérifiables, l'Iraq voulant savoir à quoi s'en tenir. Mais, je n'ai fait qu'écouter sur ce plan. C'est donc plutôt à lui de vous le dire./.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 2 octobre 2001)