Déclaration de M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur, sur les conditions nécessaires à la croissance des échanges internationaux, notamment la solidarité avec les pays pauvres, la confiance dans la marche vers la libéralisation, la sécurité assurée par les règles de l'OMC et visant à stabiliser l'ordre international, à Paris le 30 avril 2003.

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Circonstance : Conseil des ministres de l'OCDE, session consacrée aux questions commerciales à Paris le 30 avril 2003

Texte intégral

Solidarité, foi dans la croissance économique que nous apporte le commerce, sécurité : ces trois motifs nous ont réunis à Doha et nous ont décidés à lancer un nouveau cycle de négociations.
Plus que jamais, ces trois objectifs nous imposent de réussir ce cycle.
1°) La solidarité avec les pays pauvres est le premier moteur de notre engagement. Nombre de ces pays sont restés en dehors de la croissance mondiale en dépit, voire à cause, de libéralisations commerciales réalisées dans le cycle d'Uruguay. Les études de l'OMC le montrent : les parts de marché perdues par l'Union européenne dans le domaine agricole ont bénéficié essentiellement à des puissances agricoles exportatrices déjà bien établies.
Faire prendre le train de la croissance aux pays dont la part dans le commerce mondial s'est réduite est crucial. Car beaucoup de pays pauvres peuvent se demander si être à l'OMC leur rapporte autre chose que des contraintes.
La réunion sous présidence française du G8 sera une occasion importante de donner une nouvelle impulsion aux négociations multilatérales concernant l'accès aux médicaments des pays en développement. Nous devons répondre à ce drame humanitaire.
C'est la solidarité également qui guide la proposition de la France au sommet Afrique/France en vue du G8. Depuis deux ans, cette enceinte fait une priorité de l'action en faveur de l'Afrique subsaharienne. Notre proposition se veut efficace et utilisable dès Cancún : elle pourra y constituer une première manifestation de solidarité avec le continent le plus déshérité du monde et en particulier dans le domaine agricole. Il y a trois axes dans cette proposition, qui a été reprise à son compte par la Commission européenne :
- harmoniser les préférences commerciales sur la base la plus généreuse offerte par les pays développés,
- suspendre dès Cancún et pendant la durée de négociation du cycle de l'OMC toutes les formes d'aide aux exportations agricoles, lorsqu'elles sont déstabilisantes pour les économies d'Afrique.
- réfléchir aux modes de soutien envisageables des cours des matières premières de ces pays, associant assurance et système équitable de prix.
Rendre le commerce plus équitable avec ces pays d'Afrique dès Cancún pourrait constituer une contribution déterminante à l'entrée de nouveaux pays en développement dans la croissance. Je reconnais qu'il s'agit là d'innovations profondes par rapport aux modalités actuelles de traitement des pays africains. Peut-être est-ce un domaine dans lequel une contribution de l'OCDE serait utile à notre réflexion, notamment sur l'harmonisation vers le haut des différents systèmes de préférence. Il me paraît nécessaire, en tout cas, d'aller dans cette direction.
2°) La confiance est en effet indispensable pour atteindre l'objectif, essentiel pour nous, de nouvelles libéralisations dans de nombreux domaines.
Le commerce des produits industriels représente 80 % des échanges de marchandises, à comparer à la part de 10 % de produits agricoles, le reste étant constitué d'énergie.
75 % des échanges des pays en développement portent sur les produits industriels. La France et l'Union européenne sont des exportateurs majeurs de produits industriels mais aussi de services.
Dans tous ces domaines, nous sommes ambitieux. Nous voulons que tous les pays, notamment ceux où le niveau de vie est élevé, consolident la totalité de leurs droits de douanes à l'OMC. Nous voulons une formule qui réalise la moyenne entre les attentes. Et dans le domaine des services, qui représente une part très majoritaire de la constitution du produit intérieur brut dans les économies développées, nous voulons que ces pays rejoignent l'Union européenne dans son niveau de libéralisation très élevé, dans les domaines tels que les services financiers, énergétiques, postaux ou environnementaux.
Voilà les gisements de la croissance future de l'économie mondiale. Et nous avons la ferme volonté de les exploiter, dans un processus que nous voulons gagnant-gagnant.
3°) La sécurité est le troisième moteur de notre action à l'OMC. Les règles de l'Organisation mondiale du commerce apportent la prévisibilité dont nos entreprises ont besoin. Elles fixent le droit, qui est le meilleur garant de la stabilité de l'ordre international.
Notre objectif à tous est de renforcer cet aspect majeur des négociations multilatérales. Mais aujourd'hui, il nous faut trouver un équilibre dans la prise en compte du risque, et notamment du risque sanitaire.
On le sait, les principaux obstacles aux échanges se situent désormais plus dans les règles, notamment sanitaires et phytosanitaires, que dans les droits de douane. Nos sociétés exigent un niveau élevé de sécurité sanitaire des aliments. Les règles du commerce l'autorisent.
Mais il ne faut pas confondre la nécessaire précaution face à un risque avéré avec l'arrêt ou l'impossibilité de tout commerce provoqué par un risque hypothétique. Au moment où une partie du monde découvre une nouvelle maladie, il faut que des régulations scientifiques internationales existent. Compte tenu des implications de ces nouveaux risques sur l'économie mondiale, il serait utile que l'OCDE utilise ses capacités d'expertise à faire un bilan des mécanismes existants de gestion du risque et, le cas échéant, fasse des propositions dans ce domaine.
Ce serait, je pense, une contribution utile à la stabilité et à la prévisibilité de notre environnement économique, qui est l'une des conditions essentielles de la croissance des échanges internationaux.


(source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 15 mai 2003)