Texte intégral
Mes chers compatriotes, je suis très heureux d'être avec vous aujourd'hui, entouré des parlementaires qui sont membres de la délégation qui participe à la mission que je viens de conduire à Ottawa et au Québec. Je salue aussi monsieur l'ambassadeur, monsieur le consul général, toutes les autorités et parmi les parlementaires notamment les parlementaires sénateurs représentants les Français établis hors de France, les Français de l'étranger, C. Pointat, et L. Duvernois, qui lui est un homme de Montréal. On est quand même un pays formidable. Nous, on a des parlementaires qui sont résidents à l'étranger. Et puis un mot tout particulier pour P.-A. Wiltzer, membre du gouvernement qui, pendant de nombreuses années avant d'être ministre, était le président du groupe d'amitié France - Québec au Parlement et qui aujourd'hui est en charge de la Coopération et qui apporte un concours très important à l'action de la France à l'étranger. Je suis très heureux, mes chers compatriotes, de vous retrouver ici et de pouvoir échanger un peu avec vous, le regard, parler un peu de la France, parler de ce qui nous rassemble, de ce que nous avons en commun et vous dire combien pour moi ce voyage au Québec, au Canada était important.
Je suis très attaché au Québec que je connais depuis longtemps. J'ai commencé ma vie publique comme acteur régional d'une région qui a donné beaucoup de ses enfants au Nouveau Monde et à la Belle Province. Je suis donc depuis longtemps attaché à l'histoire des relations entre la France et le Canada en général et la France et le Québec en particulier. Je suis très heureux en tant que Premier ministre de pouvoir reprendre une tradition qui avait été cinq ans abandonnée qui est la visite alternée des Premiers ministres de manière à ce qu'on puisse faire vivre concrètement cette relation importante entre la France et le Québec. Je voulais le faire notamment dans cette période où, sur le plan international, vous le savez, la situation a été particulièrement troublée et que le Président de la République s'est engagé pour défendre la source du droit à l'Onu et pour défendre la pensée de la France sur ces sujets difficiles. Nous avons beaucoup apprécié la position prise par le Canada pour la paix. C'est un sujet sur lequel nous avons été très sensibles et je tenais à dire au Premier ministre canadien la compréhension qui était celle de la France de cette position.
Je suis allé à Ottawa non seulement échanger avec le Premier ministre du Canada notre vision du monde, mais aussi préparer le grand rendez-vous très important pour nous du G8 qui va avoir lieu dans quelques jours à Evian, où la France va présider le G8 et où nous allons, non seulement recevoir les représentants des pays les plus puissants du monde mais aussi, la veille, nous avons organisé avec les pays émergents une rencontre importante. Le président de Chine sera là ; les présidents des pays qui sont dits en développement qui sont les pays émergents qui sont des pays qui veulent participer au développement du monde et la France a voulu que ce G8 soit un G8 ouvert où l'on puisse prolonger ce qui a été bâti à Kananaskis notamment vis-à-vis de l'Afrique mais au-delà pour que l'on puisse travailler sur les questions de développement. C'était un objet important de mon voyage que de pouvoir préparer avec J. Chrétien cette rencontre d'Evian que nous voulons tournée vers l'avenir et que nous voulons tout à fait ouverte aux problèmes du monde.
Avec nos amis québécois, nous avons essayé de bâtir les fondements du renforcement de nos initiatives et notamment de passer à l'organisation d'un certain nombre de projets très opérationnels. Nous avons une grande proximité culturelle. Nous avons beaucoup d'amitié mais on ne fait pas une politique avec de la nostalgie. Donc, on sait que nous avons une histoire à partager, nous avons des valeurs en commun mais il faut aussi avoir des projets. Nous avons bâti un programme d'action sur des sujets très importants avec les petites et moyennes entreprises, mais aussi avec quelques grands groupes, pour renforcer nos échanges et développer ce qui est pour nous très important, c'est-à-dire l'action économique et l'action pour l'emploi. Ainsi, avec le Québec, nous nous engagerons dans un certain nombre d'initiatives importantes notamment dans la coopération entre les entreprises et nous irons ensemble avec des réseaux d'entreprises qui se grouperont, travailler des marchés étrangers. On a commencé à se fixer un objectif en 2004 au Mexique et dans d'autres pays ensuite pour renforcer cette capacité de travailler ensemble pour ensemble nous renforcer et aller chercher des parts de marché. Nous avons travaillé sur des projets économiques, sociaux, culturels. Je crois qu'il y a des circonstances aujourd'hui qui sont réunies pour renforcer cette relation. Je crois vraiment que le Québec est pour la France un partenaire très stratégique. Je crois que notre pays n'a pas suffisamment le goût de l'international. Au fond, nos concitoyens n'ont pas une aptitude extraordinaire à parler les langues étrangères. Finalement, au moins au Québec, on arrive à faire de l'international avec des haies que l'on peut sauter. Je pense que ce qui a été très longtemps une promesse du Québec qui était de dire avec le Québec, vous avez une porte d'entrée sur l'Amérique ", moi, ça fait vingt-cinq ans que j'entends ça et je ne voyais pas toujours comment on passait vraiment de manière opérationnelle à cette étape.
Or, aujourd'hui, je vois que finalement, le Québec en général, Montréal en particulier grâce à la société de l'information, grâce à cette modernité, aujourd'hui, de la place de la création, c'est vrai que, dans la société de l'information, il y a une sorte de seconde jeunesse de Montréal, une capacité de faire de Montréal un pôle international dont la France a intérêt à le voir se développer. Je crois que c'est très important pour nous d'avoir des pôles alliés, des pôles amis et que ces pôles doivent pouvoir se développer et prendre la place importante notamment sur les secteurs de l'avenir : je pense à la société de l'information, je pense aux biotechnologies, je pense à la pharmacie et je pense à un certain nombre de secteurs qui sont des secteurs très importants pour Montréal et pour lesquels nous avons vraiment intérêt à ce développement. Et finalement, ce qui a été longtemps une promesse peut devenir aujourd'hui une réalité et c'est pour ça que je veux vraiment engager le gouvernement de la France à être partenaire du Canada et du Québec pour justement jouer cette carte, cette carte de l'ouverture, cette carte de l'échange et cette carte de la modernisation de notre propre société, en regardant ce qui se passe ailleurs et en engageant le dialogue avec ceux que nous pouvons comprendre. Nous avons suffisamment d'Histoire en commun pour nous comprendre mais suffisamment de différences pour apprendre, c'est ça je crois qui est très important et c'est pour ça que cette relation entre la France et le Canada, entre la France et le Québec est aussi importante. Je la considère stratégique et je veux m'y investir personnellement à fond. Je pense que c'est bon pour la France d'avoir une possibilité d'ouvrir ses horizons avec un pays ami, avec un pays avec lequel on peut partager et des valeurs et des perspectives. C'est un élément très important de notre orientation.
Je crois que la société française, vous la savez secouée et inquiète. Ça ne vous a pas échappé, je vois que vous êtes informés. Mais je pense qu'une des raisons, c'est qu'au fond, pendant très longtemps, on a pensé que nos frontières nous protégeaient. Et quand on regarde l'ensemble de nos professions, on a vu que finalement tout le monde se croyait un peu à l'abri. Les petites et moyennes entreprises se sentaient à l'abri. Nos médecins croyaient que la façon dont on faisait la médecine serait éternelle. Nos agriculteurs pensaient que les règles de l'agriculture resteraient les mêmes. Finalement, les enseignants ont également pensé qu'on serait toujours dans le même type de situation. Au fond, progressivement, le monde pénètre la France et progressivement, un certain nombre de mutations sont nécessaires à la société française. Et la société française sent ces mutations quelquefois comme des craintes, comme des inquiétudes. Je respecte ces craintes, ces inquiétudes mais je crois qu'il faut regarder ces mutations avec lucidité et faire en sorte que la France puisse elle-même faire preuve de cette lucidité et que les Français puissent regarder les autres sociétés pour trouver eux-mêmes les meilleures solutions aux défis qu'ils ont à affronter. De ce point de vue là, la coopération avec le Canada et le Québec est très importante pour le Canada et le Québec et pour nos activités économiques et sociales, mais aussi pour la société française, pour son ouverture au monde et pour sa capacité à voir le monde avec des yeux particulièrement lucides. C'est un élément très important de la stratégie qui me guide en renforçant les liens entre la France et le Québec et le Canada.
Notre stratégie nationale est simple, elle se résume en quelques mots. Nous voulons une société de la croissance durable. Quand on compare la France sur vingt ans et quand on compare avec les Etats-Unis ou avec un certain nombre de pays, on s'aperçoit que nous avons une moyenne de deux points de croissance par an quand les autres ont trois points de croissance par an. Il nous manque un point de croissance et un point de croissance par an, c'est 150.000 emplois. Et le problème de la société française aujourd'hui, c'est de trouver ce point de croissance et d'aller le chercher et de faire en sorte que la croissance soit durable, pas une courbe sinusoïdale qui monte et qui descend comme la marée. Quand la mer monte, ça va et quand elle descend, finalement, elle ne laisse aucune trace, la croissance s'en va sans laisser de traces. Il nous faut faire en sorte que l'on puisse installer dans notre pays une croissance durable. C'est pour ça qu'on a besoin des échanges, c'est pour ça qu'on a besoin du commerce, c'est pour ça qu'on a besoin des petites et moyennes entreprises. On a fait avec les Québécois Futurallia, une action très, très importante. Il faut penser qu'en France, 70 % des emplois sont dans les PME et donc on a besoin certes des grands contrats mais on a aussi besoin de la coopération des petites et moyennes entreprises car, derrière, en France, il y a aussi les emplois. Stratégie d'une croissance durable et il faut aller chercher partout ce point de croissance. Ce point de croissance, il faut le trouver à la fois dans l'appareil d'Etat, dans les réformes de l'Etat, il faut le trouver dans la dynamique des entreprises, il faut le trouver partout où on peut exporter davantage, inventer, innover, avoir une capacité de créativité. C'est cela la stratégie qui est la nôtre si on veut profiter de cette croissance pour avoir les moyens de moderniser notre pays et c'est ce que nous voulons faire et c'est ce sur quoi nous nous sommes engagés sous l'autorité du président de la République. Alors dans un premier temps, nous avons voulu rétablir ce qui est très important dans la société française qui était le besoin de sécurité. Au fond, pendant un certain temps, on a vu les fonctions régaliennes de l'Etat affaiblies. L'Etat voulant être présent partout finissait par avoir une efficacité insuffisante là où le citoyen l'attend quand il s'agit de sécurité, de la sécurité des biens, de la sécurité des personnes, de la police, de la gendarmerie, de la défense, de tout ce qui est nécessaire au respect de l'Etat. Je crois que c'est très important aujourd'hui de faire des efforts, y compris pour notre défense. Nous avons fait une loi de programmation militaire. Croyons-nous que la France sera capable de garder pour l'éternité son siège de membre permanent au Conseil de sécurité si nous ne nous montrons pas capables de faire nous-mêmes des efforts pour une politique de défense, capables au moins d'assurer notre propre protection. Si nous voulons avoir une voix entendue dans le monde, encore faut-il qu'on montre que nous-mêmes nous tenons à ce que cette voix soit respectée et donc investir pour la faire respecter. Donc, la première phase de notre action a été une action sur la sécurité, sur la défense, sur les fonctions, la justice évidemment, les fonctions régaliennes.
La seconde étape a été celle des forces vives où nous avons adapté sans heurt, avec attention la société à la modernité. On a fait en sorte que les 35 heures, cette originalité française, soient assouplies et donc, nous avons fait en sorte que les petites et moyennes entreprises n'en souffrent pas, nous avons fait en sorte qu'il puisse y avoir des moyens d'assouplissement notamment avec les heures supplémentaires. Nous avons renforcé la politique de la création d'entreprise. Quand on compare la France avec d'autres pays notamment le Royaume-Uni par exemple, à population comparable, il y a un million d'entreprises en moins en France. Il manque un million d'entreprises. Et donc, la France pourrait être comparable en termes de démographie par exemple au Royaume-Uni. Il faut créer des entreprises. Il faut aussi faire aimer l'entreprise aux Français. Il faut faire en sorte qu'on comprenne bien que la création de richesse, c'est un élément très important. Je discutais avec monsieur Chrétien mais comme je l'ai fait récemment avec T. Blair de la troisième voie, ceux qui défendent cette idée, c'est-à-dire créons des richesses pour la partager. Mais il faut aussi les créer, les richesses car si on ne les crée pas, il est difficile de les partager. Et pour ça, on a besoin de créer des entreprises, de créer une capacité d'initiative.Cela a été un point très important de notre action.
Et maintenant, nous en sommes dans les réformes de structures. Nous sommes dans une réforme particulièrement difficile qu'est la réforme des retraites mais particulièrement nécessaire. Il est assez facile de comprendre qu'il y a de moins en moins de gens aujourd'hui qui vont payer et de plus en plus de gens qui vont toucher. Il y a bien un moment où ça se passera difficilement et ce moment là, c'est 2006, c'est quand la courbe démographique s'inverse, où les départs à la retraite du baby boom vont s'accélérer. Beaucoup de gens vont partir alors que la démographie de ceux qui doivent payer va naturellement devenir particulièrement difficile car le système de répartition doit être bien expliqué. Nous sommes très attentifs à défendre le système de retraite par répartition en France. Mais ça veut dire quoi la répartition ? Ca veut dire que la retraite des aînés est payée par les jeunes. Quelquefois, on dit j'ai cotisé, donc j'ai droit. Non, je cotise pour la retraite des aînés. La répartition, c'est les jeunes qui paient pour les aînés. Et s'il y a moins de jeunes et plus d'aînés, il y a un problème financier. On a là un élément très important de la nécessité de faire cette réforme. Elle est essentielle parce qu'il faut mettre de la justice dans le dispositif. Alors je comprends bien que ces mutations inquiètent un certain nombre de Français et je respecte cette inquiétude. Je suis attentif à tout ce qui est dit parce que je connais les sensibilités de la société française, je connais ses fragilités. Je suis très attentif à ce qui est dit par les Français inquiets. Et je crois que cette inquiétude est, je vous le disais tout à l'heure, respectable et je la respecte parce que, évidemment, il faut bien mesurer que le défi de la politique est toujours comment concilier un choix d'avenir avec des décisions du présent. Il est normal que les décisions du présent inquiètent. Il est normal que les réformes inquiètent. Il est normal que les mutations préoccupent. Mais moi, j'ai un devoir d'avenir. Franchement, je ne me sentirai pas digne de la mission que m'a confiée le Président de la République si je disais que sur un certain nombre de grands sujets, je laisse ma génération transférer à la génération qui vient les problèmes. Si nous abandonnons nos responsabilités aujourd'hui en disant on verra bien plus tard, on verra bien les autres comment ils traiteront le problème, c'est une génération qui se défausse. Nous ne pouvons pas accepter ça. Nous sommes déjà un pays endetté. Nous sommes déjà un pays qui a des difficultés. Nous devons assumer les responsabilités qui sont les nôtres. Alors c'est toujours un difficile équilibre entre l'inquiétude du jour et l'exigence de l'avenir. Eh bien, il faut concilier les deux. Je vais essayer de faire comprendre cela aux Français, de comprendre que nous avons un devoir d'avenir, que la société française doit regarder en face les défis et trouver elle-même ses solutions pour assumer cet avenir. Je crois vraiment que c'est très important. Je ne méprise pas du tout les inquiétudes, au contraire, j'y suis très attentif mais je souhaite qu'on ne méprise pas non plus les échéances de l'avenir et l'exigence de faire les réformes pour l'avenir. La politique est toujours en fait un équilibre : c'est la part de traditions et la part de modernité. Trop de modernité qui massacre ou qui sacrifie les traditions, on va à l'échec. Trop de traditions qui n'acceptent pas la modernité, on va aussi à l'échec. Il faut trouver les équilibres. Et bien, entre les inquiétudes du moment et les choix de l'avenir, il faut aussi trouver les équilibres. C'est ça vraiment le sens de la politique. Et on travaille pour un pays et ce pays a besoin, notre pays, la France, a besoin qu'on fasse avec lui les choix de l'avenir. C'est pour cela que je rentre à Paris ce soir confiant, attentif mais très actif et déterminé.
Je voudrais aussi vous dire en terminant combien je crois qu'il est important que les uns et les autres, nous participions aujourd'hui à ce qu'on pourrait appeler le retour de la France sur la scène internationale. Je crois que, pendant longtemps, notamment la cohabitation, notre système institutionnel Je ne critique personne, mais d'avoir une organisation politique un peu confuse faisait que nos interlocuteurs - et je le vois bien quand je suis à l'étranger - avaient du mal à comprendre le qui fait quoi. Aujourd'hui, nous avons un système institutionnel qui est clair avec des responsabilités qui peuvent être assumées par les uns et par les autres. Le Président de la République a réussi ces derniers mois à vraiment faire en sorte que la France soit de retour et qu'une pensée de la France pour le monde soit aujourd'hui affirmée. Il faut défendre ces idées là. Ce sont les idées de la France. La France a toujours été forte dans le monde quand elle a défendu ses idées, quand elle a cru elle-même en ses propres convictions. Aujourd'hui, la France a des idées à dire au monde et il faut pouvoir les dire avec force. Il faut dire que nous avons besoin d'un droit aujourd'hui si nous voulons la paix. Et nous n'aurons pas de paix si on laisse le plus fort pouvoir organiser l'avenir sans l'organisation du droit. Nous sommes pour qu'il y ait un droit international, que ce droit soit respecté et que la source du droit, ça soit l'ONU. C'est pour ça que nous nous sommes battus, pour que nous puissions faire en sorte que les décisions en ce qui concerne l'avenir du monde se prennent à l'ONU. Ca ne veut pas dire que la France est devenue pacifique (sic). Nous ne sommes pas pacifiques. Je vous le disais, on fait une loi de programmation militaire. Mais nous pensons que les décisions doivent se prendre par le droit, que la guerre est l'ultime décision et que c'est le droit qui doit s'imposer et donc le rôle de l'ONU, le lieu du droit. Ca ne veut pas dire que nous sommes fâchés pour l'éternité avec nos amis américains. Je peux vous dire que nous restons attentifs évidemment à ce que proposent les Américains. Et tout récemment, nous avons voté la résolution à l'Onu avec un esprit positif et constructif et nous voulons regarder l'avenir. Nous savons ce que nous devons aux Américains. Nous n'avons pas oublié qu'ils ont versé le sang pour la liberté de notre pays, pour la liberté de l'Europe aussi. Les Américains et les Canadiens ont su nous donner cette liberté de par leur sang, nous ne l'oublions pas. Mais nous voulons que le monde soit un monde qui soit ouvert à la diversité. Nous ne pensons pas que le choc des religions, le choc des richesses, le choc du Nord contre le Sud soit la solution. C'est pour ça que nous pensons qu'il faut un monde ouvert qui fasse confiance au droit et cette confiance, c'est celle de l'Onu. C'est pour ça que nous nous battons également avec le G8 pour qu'on tienne compte des problèmes de développement. Il faut poursuivre l'action en faveur de l'Afrique. Il faut poursuivre l'action en faveur d'un monde plus équilibré, revoir un certain nombre de règles à l'OMC pour participer au développement. Si nous ne nous occupons pas du développement de la planète, nous connaîtrons des difficultés majeures puisque, on le voit bien aujourd'hui, le véritable adversaire pour nous tous, le véritable adversaire commun que nous avons avec les Américains, il s'appelle le terrorisme. Et le terrorisme, on le voit, il est capable de sortir partout aujourd'hui. Et c'est donc par une coopération forte et renforcée avec l'ensemble de nos partenaires que nous pouvons lutter contre le terrorisme, notre véritable adversaire. Et cela, nous pensons que c'est possible mais aussi en faisant l'effort de travailler pour le développement, en faisant l'effort de travailler pour que les richesses soient le mieux réparties possible sur l'ensemble de la planète. Et c'est en ayant cette conscience de la planète que la France peut défendre ses idées et participer à une vision du monde qui se veut une vision de la mondialisation humanisée comme le dit le chef de l'Etat. La paix, le développement, l'OMC un meilleur équilibre et puis aussi l'environnement avec la protection de la planète. Nous sommes très heureux que le Canada ait accepté de ratifier le protocole de Kyoto. Nous militons pour une organisation mondiale de l'environnement parce que nous pensons qu'il faut une organisation, une gouvernance mondiale parce qu'un certain nombre de problèmes aujourd'hui sont posés à la planète tout entière. Et les virus comme les mafias traversent les frontières aujourd'hui. Et si nous ne créons pas des règles, si nous ne sommes pas capables d'avoir une gouvernance mondiale structurée, nous ne serons pas capables de faire face aux défis de la planète. Or, aujourd'hui, l'humanité est en mesure de se détruire elle-même. Et donc, la France veut participer sans prétention mais avec ses convictions à cette nouvelle gouvernance mondiale qui est une gouvernance partenariale, non-agressive qui respecte la diversité, qui respecte les uns et les autres mais qui fasse que la personne humaine soit le cur même de la politique et que nous ayons une vision de la planète qui dise que l'humanité doit quelquefois se protéger d'elle-même. C'est ça, le message aujourd'hui de la France et je crois que ça vaut la peine de le défendre partout dans le monde. Parce que, aujourd'hui, notre planète a besoin de cette vieille sagesse française qui fait qu'on oublie jamais que l'homme est le cur de l'humanité et que la planète aujourd'hui, c'est l'espace sur lequel cette humanité doit durablement se développer. C'est ça, notre engagement et au fond, c'est ce que nous avons au cur quand nous nous battons pour ce bleu blanc rouge, ce bleu de notre histoire, ce blanc de notre espoir et ce rouge de la mémoire du sang de nos ancêtres. Toutes ces valeurs qui ont construit la France aujourd'hui, eh bien, je vous remercie du fond du cur de les défendre loin de la mère patrie, de les défendre ici au Canada, ici à Montréal, ici au Québec. Je vous remercie de participer à cette présence de la France dans le monde. C'est ce que nous avons en commun. Chacun a son propre parcours, chacun a sa propre responsabilité mais au fond, c'est un grand bonheur que d'avoir la France en partage. Vive la République et vive la France. "
(Source : http://www.consulfrance-quebec.org, 10 juin 2003)
Je suis très attaché au Québec que je connais depuis longtemps. J'ai commencé ma vie publique comme acteur régional d'une région qui a donné beaucoup de ses enfants au Nouveau Monde et à la Belle Province. Je suis donc depuis longtemps attaché à l'histoire des relations entre la France et le Canada en général et la France et le Québec en particulier. Je suis très heureux en tant que Premier ministre de pouvoir reprendre une tradition qui avait été cinq ans abandonnée qui est la visite alternée des Premiers ministres de manière à ce qu'on puisse faire vivre concrètement cette relation importante entre la France et le Québec. Je voulais le faire notamment dans cette période où, sur le plan international, vous le savez, la situation a été particulièrement troublée et que le Président de la République s'est engagé pour défendre la source du droit à l'Onu et pour défendre la pensée de la France sur ces sujets difficiles. Nous avons beaucoup apprécié la position prise par le Canada pour la paix. C'est un sujet sur lequel nous avons été très sensibles et je tenais à dire au Premier ministre canadien la compréhension qui était celle de la France de cette position.
Je suis allé à Ottawa non seulement échanger avec le Premier ministre du Canada notre vision du monde, mais aussi préparer le grand rendez-vous très important pour nous du G8 qui va avoir lieu dans quelques jours à Evian, où la France va présider le G8 et où nous allons, non seulement recevoir les représentants des pays les plus puissants du monde mais aussi, la veille, nous avons organisé avec les pays émergents une rencontre importante. Le président de Chine sera là ; les présidents des pays qui sont dits en développement qui sont les pays émergents qui sont des pays qui veulent participer au développement du monde et la France a voulu que ce G8 soit un G8 ouvert où l'on puisse prolonger ce qui a été bâti à Kananaskis notamment vis-à-vis de l'Afrique mais au-delà pour que l'on puisse travailler sur les questions de développement. C'était un objet important de mon voyage que de pouvoir préparer avec J. Chrétien cette rencontre d'Evian que nous voulons tournée vers l'avenir et que nous voulons tout à fait ouverte aux problèmes du monde.
Avec nos amis québécois, nous avons essayé de bâtir les fondements du renforcement de nos initiatives et notamment de passer à l'organisation d'un certain nombre de projets très opérationnels. Nous avons une grande proximité culturelle. Nous avons beaucoup d'amitié mais on ne fait pas une politique avec de la nostalgie. Donc, on sait que nous avons une histoire à partager, nous avons des valeurs en commun mais il faut aussi avoir des projets. Nous avons bâti un programme d'action sur des sujets très importants avec les petites et moyennes entreprises, mais aussi avec quelques grands groupes, pour renforcer nos échanges et développer ce qui est pour nous très important, c'est-à-dire l'action économique et l'action pour l'emploi. Ainsi, avec le Québec, nous nous engagerons dans un certain nombre d'initiatives importantes notamment dans la coopération entre les entreprises et nous irons ensemble avec des réseaux d'entreprises qui se grouperont, travailler des marchés étrangers. On a commencé à se fixer un objectif en 2004 au Mexique et dans d'autres pays ensuite pour renforcer cette capacité de travailler ensemble pour ensemble nous renforcer et aller chercher des parts de marché. Nous avons travaillé sur des projets économiques, sociaux, culturels. Je crois qu'il y a des circonstances aujourd'hui qui sont réunies pour renforcer cette relation. Je crois vraiment que le Québec est pour la France un partenaire très stratégique. Je crois que notre pays n'a pas suffisamment le goût de l'international. Au fond, nos concitoyens n'ont pas une aptitude extraordinaire à parler les langues étrangères. Finalement, au moins au Québec, on arrive à faire de l'international avec des haies que l'on peut sauter. Je pense que ce qui a été très longtemps une promesse du Québec qui était de dire avec le Québec, vous avez une porte d'entrée sur l'Amérique ", moi, ça fait vingt-cinq ans que j'entends ça et je ne voyais pas toujours comment on passait vraiment de manière opérationnelle à cette étape.
Or, aujourd'hui, je vois que finalement, le Québec en général, Montréal en particulier grâce à la société de l'information, grâce à cette modernité, aujourd'hui, de la place de la création, c'est vrai que, dans la société de l'information, il y a une sorte de seconde jeunesse de Montréal, une capacité de faire de Montréal un pôle international dont la France a intérêt à le voir se développer. Je crois que c'est très important pour nous d'avoir des pôles alliés, des pôles amis et que ces pôles doivent pouvoir se développer et prendre la place importante notamment sur les secteurs de l'avenir : je pense à la société de l'information, je pense aux biotechnologies, je pense à la pharmacie et je pense à un certain nombre de secteurs qui sont des secteurs très importants pour Montréal et pour lesquels nous avons vraiment intérêt à ce développement. Et finalement, ce qui a été longtemps une promesse peut devenir aujourd'hui une réalité et c'est pour ça que je veux vraiment engager le gouvernement de la France à être partenaire du Canada et du Québec pour justement jouer cette carte, cette carte de l'ouverture, cette carte de l'échange et cette carte de la modernisation de notre propre société, en regardant ce qui se passe ailleurs et en engageant le dialogue avec ceux que nous pouvons comprendre. Nous avons suffisamment d'Histoire en commun pour nous comprendre mais suffisamment de différences pour apprendre, c'est ça je crois qui est très important et c'est pour ça que cette relation entre la France et le Canada, entre la France et le Québec est aussi importante. Je la considère stratégique et je veux m'y investir personnellement à fond. Je pense que c'est bon pour la France d'avoir une possibilité d'ouvrir ses horizons avec un pays ami, avec un pays avec lequel on peut partager et des valeurs et des perspectives. C'est un élément très important de notre orientation.
Je crois que la société française, vous la savez secouée et inquiète. Ça ne vous a pas échappé, je vois que vous êtes informés. Mais je pense qu'une des raisons, c'est qu'au fond, pendant très longtemps, on a pensé que nos frontières nous protégeaient. Et quand on regarde l'ensemble de nos professions, on a vu que finalement tout le monde se croyait un peu à l'abri. Les petites et moyennes entreprises se sentaient à l'abri. Nos médecins croyaient que la façon dont on faisait la médecine serait éternelle. Nos agriculteurs pensaient que les règles de l'agriculture resteraient les mêmes. Finalement, les enseignants ont également pensé qu'on serait toujours dans le même type de situation. Au fond, progressivement, le monde pénètre la France et progressivement, un certain nombre de mutations sont nécessaires à la société française. Et la société française sent ces mutations quelquefois comme des craintes, comme des inquiétudes. Je respecte ces craintes, ces inquiétudes mais je crois qu'il faut regarder ces mutations avec lucidité et faire en sorte que la France puisse elle-même faire preuve de cette lucidité et que les Français puissent regarder les autres sociétés pour trouver eux-mêmes les meilleures solutions aux défis qu'ils ont à affronter. De ce point de vue là, la coopération avec le Canada et le Québec est très importante pour le Canada et le Québec et pour nos activités économiques et sociales, mais aussi pour la société française, pour son ouverture au monde et pour sa capacité à voir le monde avec des yeux particulièrement lucides. C'est un élément très important de la stratégie qui me guide en renforçant les liens entre la France et le Québec et le Canada.
Notre stratégie nationale est simple, elle se résume en quelques mots. Nous voulons une société de la croissance durable. Quand on compare la France sur vingt ans et quand on compare avec les Etats-Unis ou avec un certain nombre de pays, on s'aperçoit que nous avons une moyenne de deux points de croissance par an quand les autres ont trois points de croissance par an. Il nous manque un point de croissance et un point de croissance par an, c'est 150.000 emplois. Et le problème de la société française aujourd'hui, c'est de trouver ce point de croissance et d'aller le chercher et de faire en sorte que la croissance soit durable, pas une courbe sinusoïdale qui monte et qui descend comme la marée. Quand la mer monte, ça va et quand elle descend, finalement, elle ne laisse aucune trace, la croissance s'en va sans laisser de traces. Il nous faut faire en sorte que l'on puisse installer dans notre pays une croissance durable. C'est pour ça qu'on a besoin des échanges, c'est pour ça qu'on a besoin du commerce, c'est pour ça qu'on a besoin des petites et moyennes entreprises. On a fait avec les Québécois Futurallia, une action très, très importante. Il faut penser qu'en France, 70 % des emplois sont dans les PME et donc on a besoin certes des grands contrats mais on a aussi besoin de la coopération des petites et moyennes entreprises car, derrière, en France, il y a aussi les emplois. Stratégie d'une croissance durable et il faut aller chercher partout ce point de croissance. Ce point de croissance, il faut le trouver à la fois dans l'appareil d'Etat, dans les réformes de l'Etat, il faut le trouver dans la dynamique des entreprises, il faut le trouver partout où on peut exporter davantage, inventer, innover, avoir une capacité de créativité. C'est cela la stratégie qui est la nôtre si on veut profiter de cette croissance pour avoir les moyens de moderniser notre pays et c'est ce que nous voulons faire et c'est ce sur quoi nous nous sommes engagés sous l'autorité du président de la République. Alors dans un premier temps, nous avons voulu rétablir ce qui est très important dans la société française qui était le besoin de sécurité. Au fond, pendant un certain temps, on a vu les fonctions régaliennes de l'Etat affaiblies. L'Etat voulant être présent partout finissait par avoir une efficacité insuffisante là où le citoyen l'attend quand il s'agit de sécurité, de la sécurité des biens, de la sécurité des personnes, de la police, de la gendarmerie, de la défense, de tout ce qui est nécessaire au respect de l'Etat. Je crois que c'est très important aujourd'hui de faire des efforts, y compris pour notre défense. Nous avons fait une loi de programmation militaire. Croyons-nous que la France sera capable de garder pour l'éternité son siège de membre permanent au Conseil de sécurité si nous ne nous montrons pas capables de faire nous-mêmes des efforts pour une politique de défense, capables au moins d'assurer notre propre protection. Si nous voulons avoir une voix entendue dans le monde, encore faut-il qu'on montre que nous-mêmes nous tenons à ce que cette voix soit respectée et donc investir pour la faire respecter. Donc, la première phase de notre action a été une action sur la sécurité, sur la défense, sur les fonctions, la justice évidemment, les fonctions régaliennes.
La seconde étape a été celle des forces vives où nous avons adapté sans heurt, avec attention la société à la modernité. On a fait en sorte que les 35 heures, cette originalité française, soient assouplies et donc, nous avons fait en sorte que les petites et moyennes entreprises n'en souffrent pas, nous avons fait en sorte qu'il puisse y avoir des moyens d'assouplissement notamment avec les heures supplémentaires. Nous avons renforcé la politique de la création d'entreprise. Quand on compare la France avec d'autres pays notamment le Royaume-Uni par exemple, à population comparable, il y a un million d'entreprises en moins en France. Il manque un million d'entreprises. Et donc, la France pourrait être comparable en termes de démographie par exemple au Royaume-Uni. Il faut créer des entreprises. Il faut aussi faire aimer l'entreprise aux Français. Il faut faire en sorte qu'on comprenne bien que la création de richesse, c'est un élément très important. Je discutais avec monsieur Chrétien mais comme je l'ai fait récemment avec T. Blair de la troisième voie, ceux qui défendent cette idée, c'est-à-dire créons des richesses pour la partager. Mais il faut aussi les créer, les richesses car si on ne les crée pas, il est difficile de les partager. Et pour ça, on a besoin de créer des entreprises, de créer une capacité d'initiative.Cela a été un point très important de notre action.
Et maintenant, nous en sommes dans les réformes de structures. Nous sommes dans une réforme particulièrement difficile qu'est la réforme des retraites mais particulièrement nécessaire. Il est assez facile de comprendre qu'il y a de moins en moins de gens aujourd'hui qui vont payer et de plus en plus de gens qui vont toucher. Il y a bien un moment où ça se passera difficilement et ce moment là, c'est 2006, c'est quand la courbe démographique s'inverse, où les départs à la retraite du baby boom vont s'accélérer. Beaucoup de gens vont partir alors que la démographie de ceux qui doivent payer va naturellement devenir particulièrement difficile car le système de répartition doit être bien expliqué. Nous sommes très attentifs à défendre le système de retraite par répartition en France. Mais ça veut dire quoi la répartition ? Ca veut dire que la retraite des aînés est payée par les jeunes. Quelquefois, on dit j'ai cotisé, donc j'ai droit. Non, je cotise pour la retraite des aînés. La répartition, c'est les jeunes qui paient pour les aînés. Et s'il y a moins de jeunes et plus d'aînés, il y a un problème financier. On a là un élément très important de la nécessité de faire cette réforme. Elle est essentielle parce qu'il faut mettre de la justice dans le dispositif. Alors je comprends bien que ces mutations inquiètent un certain nombre de Français et je respecte cette inquiétude. Je suis attentif à tout ce qui est dit parce que je connais les sensibilités de la société française, je connais ses fragilités. Je suis très attentif à ce qui est dit par les Français inquiets. Et je crois que cette inquiétude est, je vous le disais tout à l'heure, respectable et je la respecte parce que, évidemment, il faut bien mesurer que le défi de la politique est toujours comment concilier un choix d'avenir avec des décisions du présent. Il est normal que les décisions du présent inquiètent. Il est normal que les réformes inquiètent. Il est normal que les mutations préoccupent. Mais moi, j'ai un devoir d'avenir. Franchement, je ne me sentirai pas digne de la mission que m'a confiée le Président de la République si je disais que sur un certain nombre de grands sujets, je laisse ma génération transférer à la génération qui vient les problèmes. Si nous abandonnons nos responsabilités aujourd'hui en disant on verra bien plus tard, on verra bien les autres comment ils traiteront le problème, c'est une génération qui se défausse. Nous ne pouvons pas accepter ça. Nous sommes déjà un pays endetté. Nous sommes déjà un pays qui a des difficultés. Nous devons assumer les responsabilités qui sont les nôtres. Alors c'est toujours un difficile équilibre entre l'inquiétude du jour et l'exigence de l'avenir. Eh bien, il faut concilier les deux. Je vais essayer de faire comprendre cela aux Français, de comprendre que nous avons un devoir d'avenir, que la société française doit regarder en face les défis et trouver elle-même ses solutions pour assumer cet avenir. Je crois vraiment que c'est très important. Je ne méprise pas du tout les inquiétudes, au contraire, j'y suis très attentif mais je souhaite qu'on ne méprise pas non plus les échéances de l'avenir et l'exigence de faire les réformes pour l'avenir. La politique est toujours en fait un équilibre : c'est la part de traditions et la part de modernité. Trop de modernité qui massacre ou qui sacrifie les traditions, on va à l'échec. Trop de traditions qui n'acceptent pas la modernité, on va aussi à l'échec. Il faut trouver les équilibres. Et bien, entre les inquiétudes du moment et les choix de l'avenir, il faut aussi trouver les équilibres. C'est ça vraiment le sens de la politique. Et on travaille pour un pays et ce pays a besoin, notre pays, la France, a besoin qu'on fasse avec lui les choix de l'avenir. C'est pour cela que je rentre à Paris ce soir confiant, attentif mais très actif et déterminé.
Je voudrais aussi vous dire en terminant combien je crois qu'il est important que les uns et les autres, nous participions aujourd'hui à ce qu'on pourrait appeler le retour de la France sur la scène internationale. Je crois que, pendant longtemps, notamment la cohabitation, notre système institutionnel Je ne critique personne, mais d'avoir une organisation politique un peu confuse faisait que nos interlocuteurs - et je le vois bien quand je suis à l'étranger - avaient du mal à comprendre le qui fait quoi. Aujourd'hui, nous avons un système institutionnel qui est clair avec des responsabilités qui peuvent être assumées par les uns et par les autres. Le Président de la République a réussi ces derniers mois à vraiment faire en sorte que la France soit de retour et qu'une pensée de la France pour le monde soit aujourd'hui affirmée. Il faut défendre ces idées là. Ce sont les idées de la France. La France a toujours été forte dans le monde quand elle a défendu ses idées, quand elle a cru elle-même en ses propres convictions. Aujourd'hui, la France a des idées à dire au monde et il faut pouvoir les dire avec force. Il faut dire que nous avons besoin d'un droit aujourd'hui si nous voulons la paix. Et nous n'aurons pas de paix si on laisse le plus fort pouvoir organiser l'avenir sans l'organisation du droit. Nous sommes pour qu'il y ait un droit international, que ce droit soit respecté et que la source du droit, ça soit l'ONU. C'est pour ça que nous nous sommes battus, pour que nous puissions faire en sorte que les décisions en ce qui concerne l'avenir du monde se prennent à l'ONU. Ca ne veut pas dire que la France est devenue pacifique (sic). Nous ne sommes pas pacifiques. Je vous le disais, on fait une loi de programmation militaire. Mais nous pensons que les décisions doivent se prendre par le droit, que la guerre est l'ultime décision et que c'est le droit qui doit s'imposer et donc le rôle de l'ONU, le lieu du droit. Ca ne veut pas dire que nous sommes fâchés pour l'éternité avec nos amis américains. Je peux vous dire que nous restons attentifs évidemment à ce que proposent les Américains. Et tout récemment, nous avons voté la résolution à l'Onu avec un esprit positif et constructif et nous voulons regarder l'avenir. Nous savons ce que nous devons aux Américains. Nous n'avons pas oublié qu'ils ont versé le sang pour la liberté de notre pays, pour la liberté de l'Europe aussi. Les Américains et les Canadiens ont su nous donner cette liberté de par leur sang, nous ne l'oublions pas. Mais nous voulons que le monde soit un monde qui soit ouvert à la diversité. Nous ne pensons pas que le choc des religions, le choc des richesses, le choc du Nord contre le Sud soit la solution. C'est pour ça que nous pensons qu'il faut un monde ouvert qui fasse confiance au droit et cette confiance, c'est celle de l'Onu. C'est pour ça que nous nous battons également avec le G8 pour qu'on tienne compte des problèmes de développement. Il faut poursuivre l'action en faveur de l'Afrique. Il faut poursuivre l'action en faveur d'un monde plus équilibré, revoir un certain nombre de règles à l'OMC pour participer au développement. Si nous ne nous occupons pas du développement de la planète, nous connaîtrons des difficultés majeures puisque, on le voit bien aujourd'hui, le véritable adversaire pour nous tous, le véritable adversaire commun que nous avons avec les Américains, il s'appelle le terrorisme. Et le terrorisme, on le voit, il est capable de sortir partout aujourd'hui. Et c'est donc par une coopération forte et renforcée avec l'ensemble de nos partenaires que nous pouvons lutter contre le terrorisme, notre véritable adversaire. Et cela, nous pensons que c'est possible mais aussi en faisant l'effort de travailler pour le développement, en faisant l'effort de travailler pour que les richesses soient le mieux réparties possible sur l'ensemble de la planète. Et c'est en ayant cette conscience de la planète que la France peut défendre ses idées et participer à une vision du monde qui se veut une vision de la mondialisation humanisée comme le dit le chef de l'Etat. La paix, le développement, l'OMC un meilleur équilibre et puis aussi l'environnement avec la protection de la planète. Nous sommes très heureux que le Canada ait accepté de ratifier le protocole de Kyoto. Nous militons pour une organisation mondiale de l'environnement parce que nous pensons qu'il faut une organisation, une gouvernance mondiale parce qu'un certain nombre de problèmes aujourd'hui sont posés à la planète tout entière. Et les virus comme les mafias traversent les frontières aujourd'hui. Et si nous ne créons pas des règles, si nous ne sommes pas capables d'avoir une gouvernance mondiale structurée, nous ne serons pas capables de faire face aux défis de la planète. Or, aujourd'hui, l'humanité est en mesure de se détruire elle-même. Et donc, la France veut participer sans prétention mais avec ses convictions à cette nouvelle gouvernance mondiale qui est une gouvernance partenariale, non-agressive qui respecte la diversité, qui respecte les uns et les autres mais qui fasse que la personne humaine soit le cur même de la politique et que nous ayons une vision de la planète qui dise que l'humanité doit quelquefois se protéger d'elle-même. C'est ça, le message aujourd'hui de la France et je crois que ça vaut la peine de le défendre partout dans le monde. Parce que, aujourd'hui, notre planète a besoin de cette vieille sagesse française qui fait qu'on oublie jamais que l'homme est le cur de l'humanité et que la planète aujourd'hui, c'est l'espace sur lequel cette humanité doit durablement se développer. C'est ça, notre engagement et au fond, c'est ce que nous avons au cur quand nous nous battons pour ce bleu blanc rouge, ce bleu de notre histoire, ce blanc de notre espoir et ce rouge de la mémoire du sang de nos ancêtres. Toutes ces valeurs qui ont construit la France aujourd'hui, eh bien, je vous remercie du fond du cur de les défendre loin de la mère patrie, de les défendre ici au Canada, ici à Montréal, ici au Québec. Je vous remercie de participer à cette présence de la France dans le monde. C'est ce que nous avons en commun. Chacun a son propre parcours, chacun a sa propre responsabilité mais au fond, c'est un grand bonheur que d'avoir la France en partage. Vive la République et vive la France. "
(Source : http://www.consulfrance-quebec.org, 10 juin 2003)