Déclaration de M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé, sur le passage à l'euro, l'information des citoyens en particulier les personnes défavorisées, et la mise en place d'un numéro vert par les organismes de protection sociale, Paris le 25 juin 1998.

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Circonstance : Colloque "Rendez-vous avec l'euro", première partie : "Maîtriser le passage à l'euro", à Paris le 25 juin 1998

Texte intégral

La mise en place de l'euro sera un processus lourd mais relativement simple. Il suffit de voir combien les enfants manient déjà avec facilité la nouvelle monnaie pour se rendre compte que nous parviendrons assez aisément à la mettre en place.
I . L'euro : un grand chantier pour l'avenir
Mais il ne faut pas oublier pour autant que les personnes les plus démunies risquent de rester en arrière, simplement parce qu'elles sont déjà fragilisées sur le plan économique, psychologique ou familial. Ces personnes doivent être l'objet de nos attentions et de nos efforts, ainsi que vous le verrez durant cette matinée.
En ce qui concerne la santé, nous nous trouvions déjà face à un gigantesque chantier visant à mieux maîtriser les dépenses de l'assurance maladie. Le remboursement des prestations en euros ne fera que compliquer un système déjà très lourd. Bien sûr, cette transformation a été préparée à la fois par le travail de l'Etat, des entreprises et des journalistes. Mais la difficulté reste grande, particulièrement en France.
Il serait intéressant de voir comment les autres pays se préparent au passage à l'euro. Même la Grande-Bretagne, qui n'adoptera pas cette monnaie dès 1999 mais sans doute plus tard, calcule déjà dans cette unité un certain nombre de dépenses. Cela prouve combien la zone euro assurera une plus grande stabilité économique et sociale.
II . Les personnes défavorisées face à l'euro
Je rappelle que la situation difficile de certaines personnes défavorisées ne tient pas au passage à l'euro mais bien à des situations particulières. Des mesures exceptionnelles ont été votées au Parlement pour assurer un meilleur accès de ces personnes au logement et à la santé. Ces mesures n'ont pas pour vocation d'être permanentes : au contraire, nous les souhaitons les plus courtes possibles. Mais il est nécessaire d'assurer, par exemple, des consultations médicales permanentes pour les exclus qui, trop souvent, n'ont pas accès aux soins et aux hôpitaux. 300 consultations de ce type devraient être mises en place et intégrées au fonctionnement normal de ces hôpitaux.
En ce qui concerne le passage à l'euro, il est nécessaire d'accompagner les personnes défavorisées, sans pour autant les stigmatiser ou leur faire sentir leur différence. Le rapport annuel 1998 de l'IGAS souligne par exemple que les personnes exclues considèrent le système d'assurance maladie comme très complexe. Il ne faudrait pas que l'euro ajoute à cette complexité.
Je pense qu'il nous faut nous inspirer de l'exemple de certains magasins qui commencent déjà à sensibiliser leurs clientèles à l'euro. Il faut familiariser les gens avec une nouvelle échelle de valeur pour assurer une transition douce. C'est le but poursuivi par le numéro vert mis en place par les organismes de protection sociale.
Mais il ne faudrait pas tomber dans une nouvelle complexité en multipliant ces actions. Le plus important est de convaincre chacun que l'Europe est une opportunité économique et sociale sans précédent. Le passage à l'euro est une formidable aventure qui verra sans doute une redéfinition de notre rapport à l'argent. Une réflexion est à ce titre nécessaire et je suis heureux qu'elle puisse avoir lieu aujourd'hui.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 24 octobre 2001)