Déclaration de Mme Claudie Haigneré, ministre déléguée à la recherche et aux nouvelles technologies, sur les mesures destinées à soutenir la recherche et l'innovation, et notamment les incubateurs dans le domaine des biotechnologies, Paris le 5 juin 2003.

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Circonstance : Inauguration des nouveaux locaux de l'incubateur Paris Biotech, à l'Hôpital Cochin, Paris le 5 juin 2003

Texte intégral

Monsieur le Président,
Messieurs les Doyens,
Monsieur le Professeur,
Mesdames, Messieurs,
C'est une grande joie pour moi d'inaugurer aujourd'hui les nouveaux locaux de l'incubateur Paris Biotech à l'invitation de Messieurs Dhainaut et Amédée-Manesmes que je remercie vivement de leur accueil.
Avant de saluer les actions exemplaires conduites par Paris Biotech, je suis heureuse de saisir cette occasion pour partager avec vous les priorités gouvernementales dans le champ de l'innovation et des biotechnologies.
En elles-mêmes, la Recherche et l'Innovation sont des priorités du Gouvernement et de l'Union européenne.
Notre politique est au service d'une recherche d'excellence, d'une recherche ambitieuse dans ses objectifs, reconnue internationalement, gratifiante pour les chercheurs qui la réalisent, et au service de notre croissance économique. "La recherche et l'innovation, c'est créer de la Valeur, créer des Valeurs, à partir des Savoirs".
Conscients du rôle de la Recherche et de l'Innovation pour notre compétitivité, les pays européens se sont fixés pour objectif d'atteindre 3% du PIB en dépenses de R D à l'horizon 2010.
Or, nous sommes en retard en France, avec des dépenses de R D équivalentes à 2,2% du PIB, et une participation faible du secteur privé.
Les entreprises françaises investissent en moyenne de 25 à 40% moins en R D que leurs homologues européennes ; elles sont souvent plus petites et ont plus de difficultés à grandir. C'est en particulier le cas pour les entreprises de biotechnologies que vous connaissez bien.
Pour pallier ce retard, le Gouvernement a proposé un ensemble de mesures concrètes et que nous espérons efficaces.
J'ai ainsi présenté, en décembre dernier, avec Nicole Fontaine, Ministre déléguée à l'industrie, un plan en faveur de la recherche et de l'innovation qui a été largement affiné et complété au vu des résultats d'une consultation nationale. La commission européenne a, de son côté, souligné la pertinence et l'exemplarité de ce plan.
Ses mesures concernent tous les secteurs de la recherche et donc le secteur des biotechnologies.
Elles seront applicables au 1er janvier 2004, certaines après publication de décret en cours de rédaction, d'autres après adoption d'un projet de loi qui sera présenté à l'automne au Parlement.
Ces mesures s'articulent autour de 4 axes majeurs.
- Le premier vise à mieux valoriser les résultats de la recherche en encourageant trois attitudes : le partenariat entre recherche publique et privée ; le dépôt et l'exploitation de brevets ; la création de jeunes entreprises innovantes à partir des résultats de la recherche.
Pour favoriser le partenariat, nous allons créer davantage de passerelles entre la recherche publique et privée en augmentant régulièrement le nombre de bourses CIFRE, en instaurant un stage d'initiation à l'entreprise de 4 à 6 mois pour les doctorants et une incitation financière pour les chercheurs qui travailleront en collaboration avec l'entreprise.
Les services de valorisation des organismes publics de recherche seront incités à mieux transférer les connaissances vers l'entreprise, à se renforcer et à se professionnaliser.
Le partenariat sera également favorisé par l'adoption d'un langage commun basé sur la gestion de projets, l'évaluation et la reconnaissance du chercheur et les brevets.
Une charte d'évaluation des chercheurs est en cours de rédaction. Nous voulons instaurer le "réflexe brevets" en organisant une campagne de sensibilisation des chercheurs du secteur public aux brevets et en instaurant une prime au brevet pour les chercheurs et les services de valorisation : 20% de son montant au dépôt et 80% à la licence.
La création d'entreprises innovantes et leur accompagnement seront aussi renforcés en permettant aux chercheurs des EPIC de participer à ces jeunes entreprises comme le peuvent déjà les chercheurs des EPST, mais aussi en améliorant les conditions du concours national dès cette année, en re-finançant les incubateurs publics après évaluation de leurs performances et en consacrant une enveloppe de 30 M d'euros pour renforcer les moyens en amorçage des fonds existants.
- Le deuxième axe de mesures vise à insuffler l'esprit d'entreprendre auprès d'un large public.
Nous travaillons en particulier à définir des Maisons de l'Entrepreneuriat, à la fois lieux de rencontre et de partage d'expériences entre chercheurs, étudiants, enseignants et industriels et lieux d'enseignement à travers des modules d'initiation à l'entreprise et à l'entrepreneuriat.
- Le troisième axe de mesures vise à faire croître les dépenses de recherche des entreprises via des incitations fiscales : toutes les entreprises pourront bénéficier d'un nouveau crédit d'impôt recherche 'dopé' sur lequel nous travaillons et d'autres avantages fiscaux.
Les jeunes entreprises de moins de 8 ans actives en recherche bénéficieront en plus d'un nouveau statut social et fiscal, complété par un nouveau statut pour les business angels. Nous voulons que la France soit aussi attractive que possible pour les entrepreneurs et les investisseurs.
- Enfin, le quatrième axe de mesures vise à donner la priorité à l'Europe. La France participe activement à la construction de l'espace européen de la recherche et de l'innovation. Elle montre l'exemple avec son Plan Innovation et constitue une force de propositions pour progresser.
Je me félicite de ce que les orientations données dans ce plan recueillent l'assentiment de la majorité des acteurs. Car pour réussir, nous devons agir ensemble, unis dans une même vision.
Mais revenons au sujet qui nous réunit aujourd'hui.
Les biotechnologies sont essentielles pour l'amélioration de notre santé et de notre environnement ; elles sont essentielles pour notre croissance économique.
Pourtant, la France souffre d'un retard significatif dans ce secteur.
Les acteurs des biotechnologies m'ont déjà dit que les mesures du plan Innovation constituent une première étape pour leur secteur.
Mais nous devons aller plus loin, avec l'élaboration de mesures spécifiques aux biotechnologies.
Nous avons déjà élaboré une première trame et nous avons lancé une consultation auprès des acteurs de la biotechnologie pour la conformer davantage aux besoins du terrain.
Ce Plan aura plusieurs objectifs : identifier des secteurs prioritaires pour la France en biotechnologies, aider à la création et à la maturation de jeunes entreprises, privilégier le partenariat entre recherche publique et privée, services cliniques, enseignement et investisseurs avec la mise en place de pôles ou de campus des biotechnologies.
Ce plan visera aussi à renforcer la formation et rétablir l'image et la place des biotechnologies auprès du grand public.
Parmi les outils qui favorisent l'innovation, les incubateurs jouent un rôle important pour aider à la création de jeunes entreprises innovantes, tous secteurs confondus, et, en particulier, en biotechnologies.
En effet, ils accompagnent les porteurs de projets jusqu'à la création d'entreprise. Ils ont déjà, au 31 août 2002, permis la création de plus de 250 entreprises et de plus de mille emplois.
Le gouvernement souhaite tirer le meilleur parti possible de cet outil.
Le re-financement de 16 incubateurs pour l'année 2003 a été estimé précisément en fonction des objectifs atteints. Les incubateurs en seront informés dans les prochains jours.
En parallèle, une évaluation complète des 31 incubateurs publics a été lancée. Les résultats, dont nous disposerons début juillet, permettront de dresser un bilan général de leur action et de prévoir de re-financer les plus performants après 2003.
Il importe aussi que les incubateurs, par une mutualisation de leur expérience, progressent encore en professionnalisme et en efficacité dans une logique de qualité, dans un esprit d'ouverture au secteur privé, en recherchant une meilleure articulation avec leurs partenaires, qui seront autant de conditions de leur pérennité.
Un groupe de travail piloté par le Ministère travaille à définir ces objectifs pour les incubateurs re-financés dans le cadre d'une nouvelle convention.
Un besoin important a, d'ores et déjà, été identifié : il s'agit de la nécessité de couvrir plus efficacement le développement technologique expérimental d'un projet pour obtenir la preuve du concept avant la création de l'entreprise.
Cette période de couverture, indispensable en biotechnologie, nécessite des laboratoires. Or le manque d'accueil frappe durement les porteurs de projets, en particulier ceux qui ont démissionné du secteur privé, et ne sont accueillis ni dans les laboratoires de leur entreprise d'origine, ni dans ceux des organismes de recherche.
Dans ce contexte, Paris Biotech représente un des incubateurs les plus actifs et performants, un incubateur spécialisé dans le secteur des biotechnologies, ce qui fait de lui un authentique bio-incubateur, ou encore "l'incubateur santé de Paris".
Je suis particulièrement heureuse d'inaugurer ses nouveaux locaux car son action est en forte cohérence avec la politique de recherche et d'innovation que je soutiens.
Je salue, en particulier, la qualité de l'organisation, de la sélection des projets entrants et des compétences mises au service des porteurs de projets. Sa stratégie d'accompagnement est celle que je souhaite voir se développer pour l'évolution des incubateurs.
Son implantation directe dans l'hôpital, au chevet des patients, est un témoignage fort du partenariat que je souhaite encourager. Ce partenariat avec les services cliniques est, en effet, essentiel pour consolider les biotechnologies, à l'image de celui qui existe entre la recherche publique et la recherche privée pharmaceutique.
Paris Biotech offre également, dans un esprit pionnier, des laboratoires et des paillasses pour le développement technologique expérimental des projets - cette période de développement expérimental étant, je le rappelle, peu ou pas couverte. Nous avons pu voir dans le film combien ces laboratoires seront précieux pour faire naître des projets mûrs, dont la faisabilité technologique pourra être démontrée et dans lesquels les investisseurs pourront investir avec confiance.
A côté de ce laboratoire d'accueil, une pépinière d'entreprise devrait voir le jour. J'encourage cette démarche qui va dans le sens des pôles de biotechnologie.
Nous souhaitons aller plus loin avec la création d'un campus de biotechnologies qui regrouperait géographiquement tous les acteurs des biotechnologies : recherche publique, incubateurs, pépinières, entreprises pharmaceutiques, investisseurs, services cliniques, enseignement - un site de visibilité européenne pour le développement des biotechnologies et l'attractivité de la France.
Aujourd'hui plusieurs initiatives sont lancées sur Paris et sa région dans ce sens. Je ne peux que m'en réjouir. Mais il faudra les rationaliser pour accorder notre ambition et nos moyens.
Je souhaite vous remercier, vous tous, responsables et membres de Paris Biotech, pour votre action et vous encourager à poursuivre.
Soyez assurés de l'engagement du Gouvernement à vos côtés et de sa mobilisation pour que Paris devienne l'un des sites d'Europe les plus attractifs et compétitifs en biotech.
Je vous remercie de votre attention
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 10 juin 2003)