Déclaration de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur la mise en oeuvre du développement durable, Paris le 9 octobre 2003.

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Circonstance : Rencontres parlementaires du Développement durable à Paris le 9 octobre 2003

Texte intégral

Monsieur le Président, cher Philippe,
Mesdames, messieurs,
Chers amis
Je suis heureuse de me retrouver parmi vous pour ouvrir cette journée qui, je l'espère et n'en doute pas, sera riche en échanges de qualité. Le meilleur gage en sont les intervenants dont j'ai pu consulter la liste : les fonctions éminentes qui sont les leurs et leur expérience donnent à cette journée une résonance toute particulière. Cela augure bien de la suite de vos travaux.
" Le développement durable : de l'intention aux engagements ".
De l'intention aux engagements : ce libellé pourrait résumer ce qui doit animer l'action politique que nous menons chaque jour. Le débat pour confronter les idées et les points de vue n'est pas une fin en soi, il faut savoir passer à la nécessaire étape de la mise en oeuvre
Si le développement durable est un concept qui conserve auprès de nos concitoyens une connotation relativement floue, les entreprises ont bien progressé dans ce domaine.
Cela est tout particulièrement vrai des plus grandes d'entre elles et je m'en félicite : messieurs les présidents et directeurs, vous en êtes l'expression. Il n'en reste pas moins que nous devons aider celles qui, de dimensions plus modestes, ont besoin d'être davantage accompagnées et aidées dans ce processus qui ne doit pas être regardé comme une contrainte mais, à terme, comme une plus-value apportée par le mode de production. Je suis pleinement convaincue, qu'à terme, il y aura " les entreprises durables " et les autres : le coût de mise à niveau pour les autres sera d'autant plus élevé qu'elles tarderont à s'engager dans cette voie. Elles ne s'y trompent pas et elles sont de plus en plus nombreuses à franchir le pas.
Nous avons fait rentrer le développement durable au Gouvernement, non pas par effet de mode, mais tout simplement parce que c'est la seule voie de développement de l'Homme, de son épanouissement : tout autre chemin ne serait qu'un biais qui conduirait à une impasse.
Je disais que ce concept peut demeurer flou auprès de certains. Il y a bien la définition communément admise du développement durable : " répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ". On ne sait peut être pas très bien ce qu'est une planète durable, en revanche, on sait ce qu'est une planète non durable. Il était temps d'agir et le Président de la République l'a rappelé à plusieurs reprises tant dans les enceintes internationales que dans notre pays.
" De l'intention aux engagements " : le Président de la République a montré la voie. N'a-t-il pas porté, haut et fort, cette nécessité du développement durable ? Notamment, celle d'une plus grande solidarité du Nord à l'égard du Sud ? N'a-t-il pas tenu ses engagements en faisant entrer au Gouvernement le développement durable, au sein de mon département ministériel ? N'a-t-il pas tenu ses engagements en donnant des instructions au Gouvernement afin qu'il élabore une stratégie nationale de développement durable digne de ce nom et en suivant de près
ce travail ?
En simplifiant, je pourrai dire que la stratégie nationale de développement durable est un outil qui permet l'épanouissement de l'Homme avec des perspectives de long terme. C'est en quelque sorte un outil au service de la Charte de l'environnement, ce grand texte - je voudrai renouveler ici l'expression de ma gratitude à tous ceux qui se sont impliqués, de près ou de loin, dans ce travail - voulu, là encore, par le Président de la République et qui fait de la France un précurseur dans ce domaine : les annonces et les engagements ont été tenus, il m'appartient, maintenant, de défendre ce texte devant le Parlement, me faisant ainsi le porte parole d'une ambition collective novatrice, généreuse et qui, loin de contraindre, constituera un ferment pour l'amélioration de nos comportements, de nos processus.
C'était nécessaire, nous ne sommes pas propriétaire de notre planète, " nous l'avons simplement empruntée à nos enfants ", et nous leur devons de la restituer en bon état.
Messieurs les chefs d'entreprise, vous êtes des acteurs importants du monde économique mais aussi du développement durable. Pour qu'il y ait " développement durable ", il faut qu'il y ait avant tout " développement économique " car il faut de la création de richesses pour financer le développement durable et, en particulier, son pilier social.
Non seulement vous êtes des acteurs du développement durable mais vous êtes également des témoins. Si j'en juge de par les fonctions que vous occupez actuellement, votre parcours dans l'entreprise, j'ose le dire, ne date pas d'hier et la vie des entreprises a radicalement changé par rapport à ce qu'elle était il y a quelques années.
Ma méthode pour uvrer dans le développement durable est simple : elle est celle d'un travail en commun. Certes, la responsabilité politique m'impose de faire des choix mais cela n'empêche pas, au contraire, de consulter en amont et d'accompagner en aval, voire d'adapter en prenant en compte les réalités qui s'imposent à tous. Cette concertation fait partie des quatre temps d'une stratégie telle que vous allez l'évoquer ce matin.
La concertation : quand je suis entrée dans ce ministère, j'ai eu à cur de discuter avec tout le monde : associations, entreprises, chasseurs, non chasseurs, les collectivités locales, , mes collègues - auparavant, le ministère se plaçait en opposition frontale face aux autres -. On ne peut rien faire en tournant le dos aux acteurs d'un domaine. Il eut été illusoire de prétendre mener une bonne politique en restant dans une tour d'ivoire. Cela est particulièrement vrai du développement durable. On rejoint là l'équilibre entre l'Etat régulateur et l'Etat partenaire que vous allez aborder dans l'après-midi. Qui, mieux que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'Energie, l'ADEME - dont je salue la présidente, Michèle Pappalardo -, peut représenter pleinement cette collaboration entre l'Etat et d'autres acteurs comme les entreprises ou les collectivités ? La compétence et l'expertise technique de l'ADEME nous sont précieuses dans la mise en uvre de cette politique. La meilleure illustration en sont les demandes, de plus en plus nombreuses, qui lui sont faites. Je citerai simplement à cet égard les demandes concernant l'Etat, ce qui est relativement nouveau. Vous avez pu voir que la stratégie nationale de développement durable comporte des objectifs précis et ambitieux en matière d'Eco-responsabilité de l'Etat. Je compte sur l'ADEME pour nous aider dans cette vaste entreprise, étant parfaitement consciente que cet établissement public ne pourra pas tout faire - et par ailleurs, il a d'autres champs de compétences en matière de développement durable -. Ce n'est d'ailleurs pas son rôle que de se substituer à l'acteur principal. Pour cet objectif, je compte sur mes collègues qui, je peux en témoigner, sont très motivés et, en particulier, sur Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire.
Le ministère de l'écologie et du développement durable dont j'ai la responsabilité a donc changé sa manière d'aborder les sujets qui sont les siens : finies les exclusives, finis les combats d'arrière-garde, fini le temps où, d'emblée, les entreprises étaient conspuées par le ministère, fini le temps où bâtisseur et urbaniste étaient synonymes d'ennemi de l'environnement, fini le temps où il n'y avait que le ministère " en charge du développement durable " qui était autorisé à parler, de façon plus ou moins savante, de ce qu'il fallait faire pour avoir une planète durable, bref, finis les procès d'intention.
Vous le savez comme moi, l'ampleur de la tâche est considérable, nous ne serons pas de trop à nous y mettre tous dans un esprit constructif, en laissant à chacun la possibilité de s'exprimer et de tenir le rôle qui lui revient. C'est une uvre de longue haleine qui, évidemment, ne sera jamais achevée et qu'il faudra remettre sans cesse sur le métier. Je compte sur vous tous et sur les groupements ou corporations que vous représentez pour uvrer dans le sens que le Président de la République a défini pour que l'Homme puisse continuer à s'épanouir et à se développer dans un environnement de qualité et préservé. Les difficultés et les obstacles sont, et seront, nombreux mais ils ne doivent, en aucun cas, être des prétextes pour renoncer car, d'une part, nous n'avons pas le choix et, d'autre part, nos fonctions politiques, nos fonctions de dirigeant d'entreprise, nos fonctions d'acteurs économiques ou autres nous donnent des responsabilités toutes particulières vis à vis de nos concitoyens, des générations à venir ou des autres peuples.
Je vous remercie par avance de votre engagement dans ce sens, sachez que je suis disponible pour vous y aider, pour travailler ensemble.
Je vous remercie.
(Source http://www.environnement.gouv.fr, 10 octobre 2003)