Déclaration de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, sur le rôle des missions locales pour l'insertion des jeunes et sur le projet d'un contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS), Paris le 2 juin 2002.

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Circonstance : Installation du nouveau Conseil national des missions locales à Paris le 2 juin 2003

Texte intégral

Madame la Présidente,
Mesdames, Messieurs,
Je souhaite vous dire tout d'abord ma satisfaction d'installer avec vous le nouveau Conseil national des missions locales qui situe son action au coeur de l'une de mes priorités : réussir à offrir aux jeunes un travail véritable et la place qui doit être la leur dans la société conformément à l'esprit de la charte de votre conseil. Je sais que les membres de cette assemblée se sont fortement impliqués pour accompagner, avec la délégation interministérielle à l'insertion des jeunes, le développement des missions locales, toutes présidées depuis leur création par des élus locaux avec le souci d'une action concrète au quotidien. Ils sont nombreux ici dans cette salle, je les en remercie.
Ce réseau est aujourd'hui organisé, reconnu, efficace, fort de ses 387 missions locales et ses 147 paio dans lesquelles travaillent plus de 9.000 salariés. Son aménagement devrait se poursuivre au cours de cette année.
J'adresse mes remerciements aux présidents du CNML qui ont contribué avec tous les services de l'Etat concernés à donner à ce réseau une cohésion véritable. Michel Berson le fondateur du CNML, Robert Galley qui a constamment soutenu les missions locales, parfois dans des moments difficiles, Michel Destot sous la présidence duquel a été signé le protocole 2000 indispensable partenariat entre l'Etat, l'Association des régions de France et le CNML et sous la présidence duquel a également été élaborée la convention collective de février 2001 dotant ce réseau d'une véritable identité professionnelle.
Je suis heureux d'accueillir aujourd'hui Françoise de Veyrinas la nouvelle présidente dont vous connaissez tous la participation active à l'action des missions locales. Première adjointe d'une grande ville et députée européenne, vous saurez avec les deux vice-présidents Véronique Fayet et Gérard Willmann, à la fois, tenir compte des réalités locales et ouvrir la réflexion vers l'Europe.
Merci aussi à la DIIJ qui depuis près de 20 ans a largement contribué à la construction et la réussite des missions locales par son originalité à la fois d'administration centrale et de tête de réseau. Elle a pleinement rempli sa mission au terme de laquelle elle est arrivée. La gestion administrative et financière des compétences de l'Etat sera maintenant assurée par les administrations centrales du ministère. C'est dans ce contexte avec l'objectif de lui donner un nouvel élan que doit être abordée une nouvelle étape du fonctionnement de ce réseau.
Le CNML, désormais élargi aux représentants des régions, des départements et des communes qui s'ajoutent aux 33 présidents des missions locales et aux représentants des services de l'Etat dispose d'une plus grande représentativité. Il doit aussi bénéficier d'une plus grande autonomie dans ses travaux et dans son mode de fonctionnement. C'est pourquoi pour lui donner les moyens de son action, il est doté d'un secrétaire général. J'ai demandé à Jean Tulet d'en assurer la fonction. Sa connaissance de l'insertion des jeunes acquise au sein de la DIIJ depuis sa création apportera une continuité dans les relations entre le Conseil, les divers partenaires et les missions locales.
Dans cette nouvelle configuration, le CNML sera pleinement en mesure de promouvoir l'insertion sociale et professionnelle des jeunes, dans toutes ses dimensions : l'accès à l'emploi bien sûr, mais aussi l'accompagnement social, la santé, l'accès au logement. La présence des différents départements ministériels témoignent de la mobilisation du gouvernement dans son ensemble pour l'insertion des jeunes.
Dans la quasi-totalité des régions la situation des missions locales est satisfaisante. Il existe désormais des associations régionales de missions locales et des programmes régionaux d'animation. Des protocoles régionaux ont été signés dans de nombreuses régions entre l'Etat, le Conseil régional et les associations régionales constituant ainsi un solide partenariat entre les trois piliers de ce réseau.
Les résultats obtenus par les missions locales qui me parviennent, notamment au travers de la mise en place du programme TRACE sont importants, et permettent d'asseoir la crédibilité de ce réseau sur un savoir-faire en matière d'action globale auprès des jeunes, d'accompagnement personnalisé et de mobilisation des acteurs locaux.
Je souhaite donc Mme la présidente que le CNML accentue encore davantage son rôle de conseil en matière d'insertion des jeunes, avec une attention particulière pour ceux qui ont besoin d'un appui individualisé pour accéder à la vie active. Il devra pour cela appuyer le réseau des missions locales dans la mise en oeuvre des nouvelles orientations en faveur de l'emploi des jeunes et l'accompagner dans les évolutions en cours, en particulier la décentralisation.
Ces deux points sont fondamentaux dans le cadre de la politique que je mets en uvre, consistant à concentrer les efforts sur les jeunes les plus en difficulté, à la différence des emplois jeunes, à miser sur la qualité de l'insertion dans l'emploi, et à encourager tous les partenariats, avec les élus, les acteurs économiques et sociaux au service de l'emploi.
1) Améliorer la situation de l'emploi des jeunes a en effet été l'une des toutes premières préoccupations du gouvernement à son arrivée. Le contrat jeune en entreprise mis en place cet automne se place sur le double terrain de la réponse à l'urgence de la situation de l'emploi des jeunes sans qualification, et de la qualité de l'insertion. A la fin avril, plus de 70 000 jeunes sans qualification ou peu qualifiés ont ainsi pu bénéficier d'un emploi en CDI dans le cadre de ce dispositif.
J'insiste sur le caractère durable de l'insertion que notre société doit être en mesure de proposer à ses jeunes. Il faut pour cela organiser des parcours associant actions d'orientation, de formation, expériences professionnelles et bien sûr mobiliser tous ceux qui créent des emplois, et naturellement les entreprises. C'est un défi permanent qu'ont à relever les missions locales dans ce domaine.
C'est ainsi qu'après le contrat jeune en entreprise, il nous faut mettre en place le contrat d'insertion dans la vie sociale - le CIVIS. Ce contrat s'adressera à tous les jeunes qui ont besoin d'un soutien actif pour surmonter les obstacles qu'ils rencontrent dans l'accès à l'emploi. Il s'agit d'inscrire au coeur des dispositifs d'insertion sociale et professionnelle la mise en oeuvre d'un projet d'insertion, qui fera l'objet d'un contrat entre le jeune et la collectivité. C'est l'un des moyens efficaces pour lutter contre toutes les formes d'exclusion dont trop de jeunes sont encore victimes. Cette notion d'engagements et d'obligations réciproques est un gage d'efficacité et de responsabilité dans la démarche d'insertion.
Les jeunes pourront bénéficier d'un accompagnement renforcé vers l'emploi dans la continuité du travail accompli depuis maintenant de nombreuses années par les missions locales. Mais les voies proposées notamment par le programme TRACE seront accrues et diversifiées. Un appui dans un projet de création d'activité non salariée sera ainsi proposé, de même que des emplois de trois ans dans des associations d'utilité sociale offrant une première expérience professionnelle, le cas échéant validée au titre des acquis de l'expérience, préparant ainsi le jeune à un emploi durable. Enfin, une allocation gérée selon des modalités simples assurera la sécurisation financière de ces parcours.
Les missions locales seront la cheville ouvrière de ce contrat. Il sera mis en place dans chaque région dans la plus large concertation. Le partenariat déjà opérationnel dans beaucoup de régions sera en la matière très précieux. En effet toutes les compétences seront requises pour la réussite de CIVIS : celles des services de l'Etat, celles des collectivités locales, celles des missions locales pour mobiliser les entreprises, les organismes de formation, les services sociaux et tous ceux qui pourront apporter leur contribution.
Une mission parlementaire conduite par le Sénateur Gournac doit prochainement rendre ses conclusions, sur la base desquelles le gouvernement présentera un projet qui fera naturellement l'objet de concertation. L'avis du CNML me sera très utile.
2) La politique du gouvernement s'inscrit comme vous le savez dans un contexte ambitieux de décentralisation. Permettez-moi d'insister sur ce point essentiel pour l'avenir, et sur lequel je sais que vous êtes attentifs. La décentralisation doit être un moyen de redistribuer de façon dynamique du pouvoir d'initiative, et non de le restreindre pour telle ou telle collectivité. L'Etat reste le garant de l'égalité de traitement, de la mise en oeuvre de la politique de l'emploi. Les collectivités à tous les niveaux jouent leur rôle, conformément au principe de subsidiarité. L'acteur régional se dessine comme garant de la cohérence et de l'articulation harmonieuse des interventions en faveur de la formation et du développement économique. Le renforcement des régions doit par conséquent contribuer à dynamiser le partenariat autour des missions locales, au sein desquelles, j'insiste, toutes les collectivités ont un rôle à jouer.
Dans cet esprit, visant tout à la fois à renforcer les partenariats établis et à rechercher de nouvelles cohérences au travers de la clarification des rôles et des responsabilités de chacun, il convient d'ouvrir la réflexion que je demande à votre Conseil dans deux directions :
- les conditions dans lesquelles la coordination des structures qui ont compétence en matière d'accueil, d'information et d'orientation des jeunes confiée aux Conseils régionaux pourra s'exercer ;
- les conditions dans lesquelles la gestion financière des missions locales sera transférée au Conseil régional en ce qui concerne les moyens de fonctionnement précédemment apportés par l'Etat.
L'Etat n'est plus directement co-gestionnaire des crédits. Pour autant, rien n'interdit qu'il conserve une place dans l'activité des missions locales et dans leurs instances. De même le rôle des élus locaux que sont les présidents de missions locales reste essentiel. Ils sont les animateurs et les co-financeurs des missions locales. La décentralisation c'est aussi permettre la prise de décisions au plus près des bénéficiaires ce que font les missions locales depuis leur création.
La réflexion que je vous invite à conduire pourra déboucher le moment venu sur une actualisation du protocole signé en 2000 et apportera les clarifications nécessaires pour que la décentralisation soit réussie en conservant à ce réseau son identité, et la complémentarité des divers acteurs.
Il faut en effet que dans chaque région la décentralisation permette de trouver des solutions d'insertion mieux adaptées aux réalités régionales et locales tout en respectant l'égalité de service due à ces jeunes éprouvant de difficultés particulières.
C'est pourquoi au plan national le CNML, en étroite concertation avec les organismes internes au réseau (union nationale des missions locales (UNML), association nationale des directeurs et directrices des missions locales (ANDML) doit devenir l'instance permettant de maintenir l'homogénéité, l'efficacité et la cohésion d'un réseau clairement identifié sachant tenir compte des évolutions nécessaires et inscrit désormais dans la durée.
D'ores et déjà, je vous remercie de votre engagement pour l'emploi des jeunes leur permettant ainsi d'exercer pleinement leurs droits et leurs devoirs de citoyens.
(Source http://www.travail.gouv.fr, le 4 juin 2003)