Interview de M. Renaud Donnedieu de Vabres, porte-parole de l'UMP, accordée aux internautes sur le site de l'UMP le 18 juin 2003, sur la réforme des régimes de retraite et la proposition de l'instauration d'un service minimum pour le service public en cas de grève.

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Renaud Donnedieu de Vabres, bonjour. Vous êtes député d'Indre-et-Loire, vice-président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale et porte-parole de l'UMP. Nous allons discuter avec les internautes, notamment de la réforme des retraites, mais aussi de l'actualité en général. On commence tout de suite avec une question d'Isabelle. Voir la vidéo
Isabelle: La première grande manifestation de soutien aux réformes du gouvernement, dimanche dernier, a été un succès. L'UMP a-t-elle l'intention de s'associer à ce mouvement de soutien si les protestations devaient encore se poursuivre ?
Renaud Donnedieu de Vabres : D'abord, je crois que dans une grande démocratie comme la France, la liberté de manifestation est une très bonne chose, parce que chacun a le droit de pouvoir exprimer son avis, qu'il s'agisse de contester le gouvernement ou de soutenir la réforme. En l'occurrence, ça a été une manifestation tout à fait spontanée de soutien à cette réforme des retraites, puisque le principal slogan que l'on entendait était : tenez bon !. C'est-à-dire agissez, faites en sorte que cette réforme puisse avancer et que le pays puisse progresser. Ce n'est pas une réforme qui a été, comme ça, imaginée au hasard ou sortie d'un chapeau. Cela a été un long processus de constat de la réalité, de discussions, de négociations et puis maintenant on est dans le débat politique, parlementaire, et c'est que cela se passe ainsi. Mais les usagers sont évidemment exaspérés par un certain nombre de grèves à répétition, et d'autant plus exaspérés qu'au fond les secteurs qui se mettent en grève sont des secteurs qui ne sont pas directement concernés par la réforme des retraites. Alors il y a eu cette manifestation spontanée, que nous n'avons pas organisée nous-mêmes. Et je pense que c'était très bien qu'elle apparaisse comme ça, spontanée. Cela lui a donné plus de force et puis on ne nous a pas accusé de vouloir récupérer l'expression légitime des Français. S'il le fallait un jour, pourquoi pas faire en sorte que, tout le monde, l'UMP et ses militants, allions nous-mêmes dans la rue. Là, ce n'est pas nous qui avons organisé cette manifestation. Elle a été un grand succès, très bien, tant mieux. et on appréciera le moment venu s'il y a des initiatives complémentaires à prendre.
Jean-François : Monsieur, j'aimerais savoir pourquoi on parle de mettre tout le monde sur un pied d'égalité et on n'ose pas aller plus loin dans la réforme... 40 ans pour tous, les 20 meilleurs années pour tous, même taux de cotisation, même taux à la fin. Pourquoi le public aurait 75% des 6 derniers mois et le privé 50% des 25 meilleures années ? Qu'est-ce qui le justifie ?
Renaud Donnedieu de Vabres : C'est une réforme qui va entrer en vigueur progressivement et qui a pour objectif de parvenir à une vraie équité, c'est-à-dire qu'effectivement, le système soit le même pour l'ensemble des Français. Mais la situation d'origine n'était pas celle-là. Donc on va par étapes. L'objectif, c'est de réussir, c'est de faire en sorte qu'il y ait un mouvement commun qui concerne le plus grand nombre de Français possible. Pour autant, il ne peut pas y avoir d'uniformité, parce qu'il y a des gens qui ont un travail plus ou moins pénible que d'autres. Il y a des gens qui travaillent dans un secteur d'activité où il y a des contraintes vraiment très précises d'emploi qui légitiment des avantages supplémentaires. Donc, il ne peut pas y avoir un système totalement uniforme, cela ne sera jamais un objectif politique, mais l'équité fait qu'effectivement, le même principe s'applique au plus grand nombre. Vous savez, pour le secteur public, on fait un certain nombre d'efforts, parce que jusqu'à présent, pour certains fonctionnaires, et cela était assez injuste, leurs retraites n'étaient pas calculées sur leurs primes. Dans leur vie active, ils avaient un traitement principal et puis des primes. Tout cela était déclaré bien sûr pour l'impôt sur le revenu, mais au moment de la retraite, on ne prenait que le traitement principal et pas les primes. Il faut être juste et ne pas essayer d'opposer les catégories les unes aux autres, mais faire en sorte qu'il y ait un principe commun, applicable au plus grand nombre de Français, ce qui n'empêche pas de la souplesse. C'est-à-dire que, grande branche par grande branche, secteur par secteur, il puisse y avoir des assouplissements. Et puis il y a des Français qui veulent partir plus tôt à la retraite. Eh bien, ils n'auront pas une pension au taux plein. Ceux qui voudront plus d'argent pour leur retraite, on leur donne la liberté de travailler au-delà de 60 ans.
Ahmads : Pourquoi êtes vous anti-fonctionnaire ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je ne suis pas du tout anti-fonctionnaire, mais alors vraiment pas du tout. Ca c'est une caricature, c'est la gauche qui veut nous enfermer dans ce rôle là. Nous, nous considérons qu'il y a des fonctions que remplit l'Etat, que remplissent les collectivités territoriales (la région, le département, la commune) qui sont des fonctions très importantes. Donc, nous respectons la fonction publique. Nous voulons qu'elle ait des véritables moyens pour travailler. Simplement, on dit, ce qui je crois est juste et équitable, qu'il n'y a pas de raison, là comme ailleurs, qu'il y ait deux poids et deux mesures. Donc on cherche un système le plus juste et le plus équitable possible. Les salariés du privé avaient déjà fait un effort avec la réforme d'Edouard Balladur entre 1993 et 1995. Là, on demande un effort, dans un premier temps bien sûr à la fonction publique, mais dans un deuxième temps, à tous les Français. Parce qu'au fond, c'est une vraie révolution culturelle ce qui est en train de se passer. Il y a eu la période de Jospin où c'était, d'une certaine manière, on rase gratis : on disait aux gens avec la réforme des 35 heures, " vous pourrez gagner autant en travaillant moins ". Là, on a le courage de tenir un langage de vérité, c'est-à-dire de dire que la démographie, étant ce qu'elle est, avec la durée de la vie qui augmente, on est obligé de demander à chaque Français un effort supplémentaire. Alors la gauche dit " vous allez leur demander de travailler plus pour avoir moins ". C'est faux, c'est une caricature. Faire en sorte qu'une bonne retraite soit garantie à chacun, cela suppose de faire pour chacun un effort supplémentaire, privé et public.
Peluche : Pour vous, une infirmière fait-elle un travail beaucoup moins pénible qu'un cheminot ou qu'un policier ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Peluche a raison d'insister sur l'importance du travail des infirmières qui sont aujourd'hui soumises à rude épreuve, parce que dans l'hôpital public, mais aussi dans les cliniques, l'application des 35 heures ne peut pas fonctionner à l'heure actuelle, parce il y a évidemment des urgences, des nécessités Les infirmières ont une charge de travail tout à fait considérable. Il ne faut donc pas qu'elles soient traitées injustement, parce que sinon, c'est notre système de santé qui ne fonctionnera pas bien. Donc je reconnais la pénibilité du travail des infirmières, et donc ce raisonnement de l'équité fait effectivement, qu'il faut apprécier de manière juste l'exacte pénibilité des fonctions. Il y a 50 ans, certains métiers étaient très difficiles, et aujourd'hui ils le sont moins, parce que la mécanisation et le progrès de la technologie ont fait que le métier ne s'exerce plus de la même manière. Et puis il y a des métiers qui sont de plus en plus difficiles comme le métier d'infirmière. Le métier d'enseignant n'est pas non plus un métier très facile. Autrefois, l'enseignant c'était vraiment le Dieu, il était totalement respecté, tout le monde s'inclinait devant son pouvoir. Aujourd'hui, il y a beaucoup de violence à l'école, il y a beaucoup de contestations. C'est un métier difficile, il faut savoir le reconnaître comme tel. La difficulté, c'est quand vous avez un métier qui est moins pénible, vous n'acceptez jamais de revenir en arrière sur vos avantages. Ceux qui ont un métier de plus en plus pénible, ils disent : " et nous, pourquoi on ne nous écoute pas ? " Il y un point d'équilibre à trouver.
Guillaume : Je vis à Marseille, et depuis quelques jours, les grévistes demandent à ce que les jours de grève soient rémunérés. Ces grévistes qui ont pris en otage la population ces dernières semaines (éducation, transports, ordures) devraient, il me semble, assumer leur mouvement. Comptez-vous résister à cette requête incompréhensible ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Cela serait illégal. De toute façon, le paiement des jours de grève est tout à fait illégal. La loi reconnaît un droit : celui de faire grève. Mais ensuite, évidemment, la loi, la négociation sociale ou les conventions collectives qui prévoient la manière dont sont étalées les baisses de revenus en fonction des jours de grève constatés. Il n'y a donc aucune probabilité que tous les jours de grève soient payés.
Cb : Pourquoi passer par des accords d'entreprise pour les régimes spéciaux et pas par la loi, comme pour le régime général ?
Renaud Donnedieu de Vabres : A chaque heure suffit sa peine. Déjà, unifier un système qui concernera 95 % des Français, c'est déjà un immense travail. C'est ce que nous faisons aujourd'hui, heure par heure, 24 heures sur 24 quasiment, à l'Assemblée nationale. Donc le jour où l'on aura terminé cette réforme qui concernera 95 % des Français, je peux vous dire que l'on aura le sentiment d'avoir fait un travail très utile. Il faut voir d'où on vient. Pour le moment, les régimes spéciaux ne sont pas concernés par cette réforme, notamment à la SNCF. C'est la raison pour laquelle, nous demandons aux personnels de la SNCF et d'un certain nombre d'entreprises de transport public d'avoir vraiment le sens des responsabilités. La grève paralyse l'économie de la France, cela fait perdre de la croissance, ça coûte cher à l'emploi. Ceux qui ne sont pas directement concernés par la réforme des retraites, vraiment, on leur demande le maximum de responsabilités, parce que sinon, ils vont s'attirer les foudres de nos concitoyens.
Jean-François : Quel avenir dans le dossier des retraites pour les professions libérales et les commerçants qui semblent un peu oubliés ?... Les uns font de longues études, d'autres travaillent en couple et ont de plus en plus de mal à valoriser leur commerce pour compenser la baisse des retraites.
Renaud Donnedieu de Vabres : Alors là, il faut être franc. On a bien sûr parfois le sentiment d'une France à deux vitesses et l'application des 35 heures n'a fait que renforcer cette France à deux vitesses. Il y a des grandes entreprises dans lesquelles il a été possible de faire assez facilement la réduction du temps de travail. Et puis pour toutes les entreprises artisanales ou commerciales, on sait très bien que quand le magasin ferme, c'est le moment où l'on commence à faire le point de la journée, on fait la caisse, on fait les stocks, on fait les papiers... Donc les 35 heures, c'est comme pour les élus, ça s'applique et ça se fait tous les deux ou trois jours ! Cette France qui bosse énormément, elle mérite d'être soutenue et entendue. C'est la raison pour laquelle nous avons fait une première étape de baisse de l'impôt sur le revenu, pour qu'il y ait une juste rémunération du travail et de l'effort. Des dispositions doivent encore être adoptées, notamment pour faire progresser la retraite du conjoint, parce que dans ces petites entreprises, on sait très bien comment cela fonctionne : vous avez parfois des conjoints qui ne sont pas directement rémunérés, mais qui aident au fonctionnement du commerce ou de l'entreprise artisanale, et sans eux, cela ne serait possible. C'est d'ailleurs vrai aussi dans le domaine de l'agriculture pour un certain nombre d'exploitations agricoles. Là, il y a des efforts à faire, qui ne sont pas faciles. Parce nous, nous avons la franchise de dire que l'on ne peut pas raser gratis et qu'on essaie d'améliorer la situation. Mais c'est déjà très difficile de faire fonctionner l'existant, à cause de la pyramide des âges et de l'allongement de la durée de la vie. Garantir le niveau de retraite tel qu'il est aujourd'hui suppose déjà de faire un effort supplémentaire. Alors il y a des domaines et des gens qui méritent plus. On a entendu leur appel, mais je ne peux pas comme ça du jour au lendemain dire qu'on va leur donner immédiatement satisfaction, même si leur cause est légitime.
Ahmads : Le boulot de prof est très dur. Comment comptez-vous faire pour améliorer leurs conditions de travail car en début ou en fin de carrière, les salaires ne sont pas mirobolants. Ce que je conteste, c'est la décote. Pouvez-vous faire un effort avec un amendement convenable pour diminuer cette décote ? Le rachat des annuités est le bienvenue mais il est exorbitant. Un autre amendement pourrait permettre de rabaisser considérablement ce coût.
Renaud Donnedieu de Vabres : D'abord, je lui dis qu'il y a eu de la désinformation et de la caricature à ce sujet. Moi j'ai reçu dans ma ville, à Tours, toute une série de délégation d'enseignants qui sont venus avec des calculs de décote et donc de pension issus du projet gouvernemental. Ces calculs étaient faux, car ils avaient le sentiment que cela allait s'appliquer dès demain matin, et que donc on allait leur piquer 10, 15 ou 20 % de leur retraite, tel qu'il pouvait l'estimer avec le nouveau système. C'est faux. Il faut que cela soit entendu une fois pour toutes. Ce qui est vrai, c'est que l'on demande à chacun un effort supplémentaire. Non pas pour qu'il voit sa retraite baisser, mais pour qu'elle lui soit garantie au niveau où elle est aujourd'hui. Alors certains disent, compte tenu des études que l'on a fait, vous allez me faire travailler jusqu'à 68, 70 ou 75 ans. Que l'on arrête la caricature, tout cela est faux. Simplement, cela se véhicule et je comprends que cela fasse peur. Parce qu'il y a un droit légitime des Français : ils veulent savoir exactement ce à quoi ils auront droit, au terme du nouveau système. Le paradoxe, c'est qu'avant que la loi soit définitivement adoptée, il faudrait qu'il y ait une sorte de logiciel où les gens pourraient taper leur situation, ce qu'ils ont fait, pas fait, les années où ils ont été au chômage, les années où ils ont travaillé, travaillé dans le secteur public, dans le secteur privé... Comme ça, ils auraient immédiatement l'information. Ce logiciel n'existe pas encore alors cela permet toutes les rumeurs, toutes les caricatures. Le tract fait aujourd'hui par le parti socialiste et tiré à trois millions d'exemplaires ? Il est faux ! C'est un tissu de contre-vérités qu'ils diffusent pour essayer de créer la peur et le fantasme. Pour nous, il est très difficile de répondre. Ce qui est certain, c'est qu'on tient un langage de vérité. On ne dit pas aux gens " vous pouvez continuer à faire autant et vous gagnerez plus. " Non, on dit l'inverse, on dit : " Pour arriver à maintenir le niveau actuel des retraites, et pour augmenter les plus basses (la retraite la plus basse garantie à chaque Français représentera 85 % du SMIC), eh bien il faut faire un peu plus, c'est-à-dire travailler un peu plus longtemps. Voilà, c'est la réalité de ce qu'on dit, pour le reste, il y a beaucoup de caricature. On parle aussi de liberté. Si des gens veulent partir plus tôt à la retraite, leur pension sera moins élevée. S'ils veulent gagner davantage, il faut qu'ils travaillent un peu plus longtemps. C'est l'équilibre que l'on propose. Les chiffres et la programmation dans le temps de ce qui est dit pour la décote des enseignants, c'est faux car cela ne rentrera pas en vigueur dans les jours, semaines et mois qui viennent.
Jo : Est-ce que des mesures seront prises pour encourager les entreprises à garder les plus de 55 ans ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Ca, c'est une très bonne question. Parce qu'effectivement, là, il y a un vrai souci. D'abord en soi, on en peut pas considérer qu'une personne qui a 50 ans ne soit plus utile au fonctionnement économique du pays. On est encore jeune à 50 ans. A une époque, les entreprises, pour s'adapter, mettaient en préretraite les gens dès 50 ou 55 ans. C'est un gâchis humain considérable, avant toute autre considération. On a besoin de l'expérience d'un certain nombre de gens, et cela ne doit pas être contradictoire avec le souhait légitime des jeunes d'arriver sur le marché du travail et de trouver un emploi. De toute façon, avec les pyramides d'âge telles qu'elles vont évoluer dans les années qui viennent, il risque d'y avoir dans certains secteurs des pénuries de main-d'oeuvre. Il faut donc trouver une solution pour les personnes de 50 ou 55 ans. Elles ne sont pas à mettre au placard. Je trouve cette idée très choquante. En plus, pour financer le système de retraite, à partir du moment où l'on allonge la durée de cotisation et la durée du travail nécessaires pour avoir une retraite au taux plein, il faut que l'on se préoccupe du fait que les entreprises ne licencient pas prioritairement les personnes âgées. C'est un vrai souci. Cela veut dire que les systèmes de préretraite qui ont fonctionné jusqu'à aujourd'hui vont disparaître, sinon nous serions totalement illogiques. Les retraites anticipées à 50 ou 55 ans, qui étaient en fait des licenciements un peu déguisés, eh bien, tout cela ne pourra plus avoir cours. C'est un nouvel état d'esprit qui doit prévaloir dans les entreprises.
Jean-François : Dans de nombreux pays européens, les fonctionnaires n'ont pas le droit de grève... Est-ce à l'étude en France ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Non, non. Je crois que son information est fausse. Dans l'ensemble des pays européens, le droit de grève existe, il est garanti par la constitution. Par contre, dans la plupart des pays, et c'est la raison pour laquelle on est en retard, il y a une sorte de service garanti ou de service minimum qui existe légalement. Ca veut dire quoi ? Cela veut dire qu'à l'UMP, on n'est évidemment pas des briseurs de grève, on reconnaît la liberté de manifestation et la liberté de faire grève. Mais on dit aussi il doit y avoir une sorte de continuité du service public, notamment pour les entreprises de transport, parce que la liberté d'aller et de venir, c'est aussi une liberté constitutionnelle. D'un côté, on a le droit de grève, de l'autre, il doit y avoir la liberté de circulation et la continuité du service public. Il faut mettre sur la table cette question, dans un cadre global puis entreprise par entreprise. Il faut que s'ouvrent des négociations pour qu'il y ait un service minimum garanti. Ce n'est pas facile, car il ne faut pas que l'on nous caricature. Nous ne sommes pas des briseurs de grève, nous voulons simplement que le service public soit assuré de manière continue.
Guillaume : Quelle serait, selon vous, la démarche la plus efficace pour affirmer son soutient à cette réforme (tracts, manifestations, pétitions...) ? Comment lutter contre la désinformation, les caricatures que vous avez mentionnées ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Tous les citoyens qui veulent s'engager sont les bienvenus. A l'UMP, nous avons été les premiers à aller au contact direct de nos concitoyens, pour diffuser l'information et diffuser des questionnaires pour savoir à quoi tenaient nos concitoyens. Tous ceux qui ont envie de s'engager peuvent aller rencontrer leurs députés UMP ou pousser la porte des permanences du parti où nous pouvons leur confier un vrai travail, de contact, d'écoute et de dialogue. Il faut diffuser l'information, aller sur le terrain, pour répondre à la désinformation et à la caricature. Nous sommes des gens de terrain et nous aimons le dialogue : Nous vous attendons dans les permanences, cela sera très utile.
Jacqueline : Après la réforme des modes de scrutin, la gauche nous ressort le scénario de l'obstruction d'amendements à l'Assemblée sur la réforme des retraites. Existe-t-il un moyen pour éviter de tels blocages ?
Renaud Donnedieu de Vabres : A l'Assemblée nationale, l'expression est libre, et cela est bon. C'est le moment où s'expriment les critiques et les propositions. Cette réforme, ce n'est pas la gauche contre la droite. C'est un sujet fondamental, et l'attitude du PS est lamentable : car ils ne font pas de vraies propositions et ils ne reconnaissent pas qu'ils n'ont rien fait lorsqu'ils étaient au pouvoir. Ils ont déposé des milliers et des milliers d'amendements. C'est fait uniquement pour faire de l'obstruction et paralyser la réforme. A l'UMP, nous sommes au boulot, presque tout le temps, et nous avons la certitude que cette réforme est juste et nécessaire. Nous ferons face à un certain nombre de manoeuvres de la gauche. Cela ne nous fait pas peur. Par contre, ils serait bon que nos concitoyens demandent des comptes à leurs parlementaires de gauche en leur disant : " Pourquoi avoir déposé 8 000 amendements ? Existe-t-il 8 000 alternatives à cette réforme ? "
On voudrait nous faire tomber dans le piège de la brutalité mais ce n'est pas notre attitude, car le Parlement est le lieu du débat. J'attends que les responsables du PS nous disent ce qu'ils pensent des propos de M. Delors ou de M. Rocard. Ils ont eu le courage de dire que cette réforme était juste. Cela les honore.
Paul : Ma fille, 11 ans, m'a apporté un tract de son école qui précise que les enfants auront des enseignants de 68 ans voir plus. Sur ce tract est précisé la source, un forum intitulé " no raffaran ". Je suis surpris de voir que des enseignants distribuent des tracts à la sortie de l'école avec comme référence un forum ou n'importe qui peut lancer de fausses accusations. Est-ce normal de laisser dire ce genre d'ineptie ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Non ce n'est pas normal. Que ce père de famille rejoigne l'UMP pour nous aider à répondre à ce genre de tracts honteux. Nous avons vu ce tract et nous sommes sur le terrain pour contrer cette désinformation tout à fait honteuse.
Jean-françois : Pourquoi ne demandez-vous pas ouvertement au PS pourquoi il n'a pas remis en cause la réforme Balladur ; et si ils s'engagent à revenir à 37,5 ans pour tous si ils reviennent [au pouvoir] ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je ne veux pas me mettre dans la peau d'un futur battu...On ne sait pas ce que veut le PS. J'ai posé tout à l'heure cette question à Jean Glavany. Il n'a pas vraiment répondu.
Sandrine : Un peu de politique internationale : Pensez-vous que la feuille de route va aboutir au Moyen-Orient ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je suis très inquiet. Je reviens d'Israël et des territoires palestiniens, il y a à peu près trois semaines, au moment de la recrudescence des attentats. J'en suis revenu très pessimiste mais très volontaire. Nous n'avons pas le droit de rester les bras croisés face à cette situation très inquiétante. Les terroristes ont encore une influence considérable. Je ne veux pas que s'installe un sentiment de " deux poids deux mesures " pour la communauté internationale. Personnellement, je souhaite qu'une force internationale garantisse la pacification du Moyen-Orient : Pour garantir la sécurité d'Israël et permettre l'émergence d'un Etat palestinien viable. Je ne comprends pas qu'on envoie des centaines de milliers de soldats en Irak, et très peu de monde dans cette région du monde. Dans Proche-Orient, il y a le mot proche. Nous sommes proches les uns des autres.
Pierre : Pourquoi ne pas demander aux Français, par voie de référendum, s'ils seraient favorables à l'instauration d'un service minimum pour le service public ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je pense que les Français répondraient massivement oui Ensuite, le problème, c'est de mettre en oeuvre un service minimum, entreprise par entreprise. S'il est légitime que le droit de grève soit garanti, il faut aussi que la liberté de circulation soit aussi garanti. Il faut regarder cas par cas : cela n'est pas pareil dans un hôpital, où en cas de grève il y a des réquisitions, et une entreprise où ce droit n'existe pas. Cela ne serait pas inutile qu'il y ait un débat sur ce point au Parlement. Peut-être cela fera-t-il l'objet d'une pétition sur le site de l'UMP ? Ecrivez-nous si vous partagez ce point de vue. Alain Juppé recevra votre message et avec votre soutien nous pourrons faire changer les choses.
Mr Du Chemin: J'ai été particulièrement affligé par l'internationale chantée à l'Assemblée nationale. Ne pensez-vous pas qu'il serait souhaitable qu'une législation mette un terme à ce genre de pratiques ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Il ne s'agit pas de législation, mais du comportement des parlementaires ! Nous avons été choqué par le fait que les parlementaires communistes se mettent à chanter l'internationale ! Ces chants n'étaient pas dignes. C'est le degré zéro de la politique. Un député doit respecter sa fonction, qui est un très beau mandat. On a pas à faire la mariole à l'assemblée lorsqu'on a été élu.
Jean-françois : Ne pensez vous pas que, si plus de députés et de ministres étaient issus de la société civile (aient exercé une activité privée réelle) les projets de retraites seraient un peu plus justes pour le privé qui est si peu représenté ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Ce qui compte c'est le suffrage du peuple. Les députés ont été élu grâce au suffrage universel, quel que soit leur âge, leur profession ou leur religion. Je souhaite qu'il y ait le maximum de candidats aux élections. Evidemment, nous souffrons le mépris dans lequel nous tiennent un certain nombre de gens. C'est un métier qui n'attire pas beaucoup de gens car c'est parfois dur. S'il y a des techniciens, des ingénieurs, des commerçants qui veulent s'engager dans la vie publique, alors je leur dis bienvenue à bord !
Titi : Certaines piscines sont réservées aux femmes à certaines heures. Ne pensez-vous pas que la décision prises par certaines municipalités pourraient favoriser le développement du communautarisme ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Absolument. C'est effrayant. Nous avons vu cela à Lille. C'est le début d'un engrenage quoi contribue à la ségrégation et au communautarisme. En France, la liberté religieuse existe bien, mais au niveau de la personne. Dans les lieux publics, au delà des principes personnels, il faut respecter l'égalité homme-femme et les droits de l'homme et du citoyen. Idem à l'école. Il ne faut pas céder aux pressions : Je ne veux pas entendre parler d'une contre-indication religieuse pour l'éducation physique en France. Les lois s'appliquent à chacun. Ensuite, dans un lieu de culte, chacun est libre d'exercer sa croyance en un Dieu. C'est une liberté individuelle que je respecte. A l'école, je souhaiterai une sorte de blouse grise pour tout le monde. Comme cela, tout le monde serait sur un pied d'égalité, quel que soit son origine sociale ou sa religion.
Daniel : Pensez-vous qu'il faut légiférer sur le respect de la laïcité à l'école et dans notre société ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Il existe une vieille et bonne loi, la loi de 1905, qui garantit la laïcité en France. Aujourd'hui, nous avons à faire face à des violences, parfois racistes. Rappelons certaines règles et disciplines, notamment à l'école, pour soulager le corps enseignants. Il faut un débat au parlement. Faut-il de nouvelles règles ? Il faut en parler.
Daniel : C'est pas un peu ringard l'uniforme à l'école ?
Renaud Donnedieu de Vabres : C'était une image. Ce n'est pas ringard de traiter les élèves sur un pied d'égalité, d'interdire les propos racistes et de refuser l'inégalité sociale.
Vincent : Que pensez-vous de la fracture grandissante entre le privé et le public ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je ne veux pas de guerre civile. Je suis pour la réconciliation privé-public. Si on fait le même boulot, avec la même pénibilité, et pendant la même durée, je veux qu'on ait la même rémunération, quelle que soit la structure juridique de l'entreprise pour laquelle on travaille.
Jo : Combien de temps va durer le débat sur tous les amendements de l'opposition ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Je ne peux pas encore le dire. Les députés de gauche vont finir par se lasser et finir par devenir responsables. Nous travaillerons le temps nécessaire. C'est un engagement pris par le Président lors de sa campagne présidentielle, que nous avons repris. Nous irons jusqu'au bout de nos engagements.
papyk : bravo monsieur le député j'aime votre ton !
Renaud Donnedieu de Vabres : Merci ! Venez à Tours, prenez contact avec moi... Venez sur mon site personnel : www.rddv.com. Vous pouvez m'écrire !
William60 : Que pensez vous de la victoire des radicaux au tout nouveau conseil du culte musulman ?
Renaud Donnedieu de Vabres : C'est très inquiétant. Cela veut dire que des Français, de religion musulmane, se sentent en rupture ou en décalage avec des principes en vigueur dans notre pays. Il ne faut pas cependant caricaturer. Les membres de l'UOIF ne sont pas par définition des gens intégristes ou fondamentalistes. Je partage le point de vue de Nicolas Sarkozy : Il faut un Islam de France. Il n'est pas forcément le même qu'en Egypte ou en Arabie Saoudite, et c'est normal. Soyons vigilants et refusons toute dérive fondamentaliste.
Autre nécessité, représenter les identités des personnes originaires de l'immigration dans des instances laïques, pour représenter les cultures et traditions du sud de la Méditerranée.
Francois : Ne faut il pas avant d'élargir l'Europe a 25, finir de construire celle à 15 : faire adhérer l'Angleterre à l'euro ou construire l'Europe de la défense ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Bonne question. Nous avons cette responsabilité d'intégrer à l'UE les démocraties des pays de l'Est qui nous rejoignent. Il ne faut pas les laisser au bord du chemin. Mais l'Europe à 25, ce n'est pas facile. Saluons le travail de la Convention européenne sur ce plan. On peut avancer plus vite sur certains points comme ce fut le cas pour l'euro. Cela vaut pour la Défense entre la France et la Grande Bretagne par exemple, deux grandes puissances militaires qui coopèrent. L'Europe doit être le respect du pluralisme.
Peluche : Un référendum sur les retraites ? Pourquoi avoir refusé ? Par peur du résultat ?
Renaud Donnedieu de Vabres : Non, pas du tout. C'est un dossier complexe, difficile, avec 80 articles. Dans quelques jours ou quelques semaines, cette réforme sera adoptée. Nous serons très fiers de réussir cette réforme au nom des Français qui nous ont élus.
Renaud Donnedieu de Vabres : Merci à vous.

(Source http://www.u-m-p.org, le 23 juin 2003)