Texte intégral
J.-P. Elkabbach-. Bonjour, J-L. Borloo !
- "Bonjour !"
Q-Bienvenue. A votre tour sur le front, il faut à l'équipe que vous avez cinq ministres - Larcher, Daubresse et N. Olin... - pour le plan de cohésion sociale. Et ce plan de cohésion, est-ce que c'est de la compassion et de la solidarité pour cacher le fait qu'on ne va pas faire de réformes ?
R - "Vous n'allez pas être déçu pour les réformes, imaginez-vous. Ca ne va pas être des réformes, cela va être un changement absolument radical. En gros, ce pays vit sur un vieux système de rustine, c'est-à-dire on avait un problème, un avait un système de chômage, puis de RMI... La réalité, aujourd'hui, c'est que le RMI ou l'assistanat, c'est 1.750.000 familles, si l'on met bout à bout, RMI, ASS. C'est-à-dire qu'il y a 1.750.000 familles qui n'ont absolument, quasiment aucun espoir de remonter dans le train économique et social..."
Q-Et vous arrivez et hop !
R - "... Le logement ! Vous savez combien de temps il faut d'attente aujourd'hui pour avoir un logement social à la mairie de Paris ? 108 ans, 108 ans la file d'attente. Ailleurs, c'est un peu moins, mais enfin cela se compte quand même en dizaine d'années. Est-ce que vous savez combien il y a aujourd'hui de procédures d'expulsion en cours dans les logements pour des raisons d'argent, pour des raisons économiques ? 260.000 contentieux de demandes d'expulsion. C'est ça un pays qui a de la cohésion sociale ?"
Q-Donc quand vous arrivez, vous êtes choqué par ce que vous découvrez. Mais maintenant, ce qu'on attend de vous et du Gouvernement auquel vous participez, ce sont des décisions, des actes. Lesquels ?
R - "C'est le moins que l'on puisse dire. Vous savez, il n'y a que deux solutions. Ce ministère, qui n'existait pas en tant que tel - la Cohésion sociale, si large, si puissant et si lourd - ou c'est un gadget, ou c'est une réalité. Vous n'allez pas être déçu, on ne passera pas l'été sans avoir la réponse la réponse à cette question. Le Président a demandé et exigé ce ministère. Je suis absolument convaincu que les trois années qui viennent - je ne suis pas convaincu, il l'a redéclaré la semaine dernière -, c'est le sujet central de ce pays avec les déficits et le premier sujet c'est la cohésion sociale. Ce qui s'est encore passé récemment sur les violences à l'école, l'antisémitisme, le racisme, l'islamophobie, tout ça c'est... Ce pays est complètement incroyable ! C'est la fille aînée de l'Eglise, premier pays laïc, première communauté protestante, première communauté arabo-musulmane, première communauté juive et on est obligé de faire une loi sur la laïcité à l'école. La France est un pays qui va vers la désintégration républicaine si on ne fait pas la cohésion sociale."
Q-Oui mais alors, justement, mais qu'est-ce que vous mettez dedans, parce que c'est bien beau de découvrir ce que vous découvrez, c'est formidable.
R - "D'abord je ne le découvre pas, parce que je me suis battu pour que..."
Q-Vous l'avez vu à Valenciennes et, au passage, il y a deux belles pages sur les visites de Valenciennes et la ville.
R - "Et au ministère de la Ville."
Q-Alors qu'est-ce qu'on met dedans ? Et puis d'ailleurs, est-ce que, toutes les promesses que vous allez faire, elles exigent des moyens. Vous les annoncez au moment où le ministre de l'Economie gèle des crédits.
R - " Oui. "
Q- Mais qui va trancher la contradiction et est-ce que vous allez être affecté ?
R - "Attendez, il y a deux sujets. Un, il y a un patron, le patron c'est le chef du Gouvernement et le chef du Gouvernement, il a lui-même un patron, pour dire les choses comme elles sont maintenant, qui s'appelle le président de la République qui, lui, a été élu démocratiquement par les Français. Le cap a été fixé, c'est la cohésion sociale, le cap de ce pays. Cela nécessitera des arbitrages. D'ailleurs le ministre des Finances a dit lui-même dans sa conférence de presse hier, il a dit : si le cap c'est la cohésion sociale, c'est la cohésion qui sera financée. Simplement, comme dans ce pays on passe son temps à annoncer des choses sans les faire, moi je n'expliquerai pas le plan de cohésion sociale qui est bouclé, tant que, administrativement il manquera un bouton de guêtre. Et comme on est dans un pays un peu compliqué, eh bien..."
Q-Il en manque combien des boutons de guêtre, aujourd'hui ?
R - "Oh, il en manque encore deux ou trois. Ce sont des problèmes administratifs. C'est un problème très très lourd qui va changer radicalement le mode de fonctionnement français."
Q-On va voir avec vous, J.-L. Borloo quelques pistes. Mais pour faire la cohésion sociale, ce qui est bien c'est qu'il y ait l'autre aspect, la deuxième jambe, c'est-à-dire le développement et la dynamique économique. Et alors ?
R - "Bien entendu. Alors deux sujets. D'abord, à cette heure-ci, vous savez que la France va de ce point de vue pas mal. Ca fait près de dix ans qu'on n'a pas eu deux trimestres de croissance de cette importante, 0,7 et 0,7, 1,4 en six mois de croissance, on est..."
Q-Cela veut dire tendance annuelle ?
R - "Alors on ne peut pas, ça serait trop simple de dire 2,8, pour l'instant on a des prévisions qui sont à 1,7, mais voyez le tableau qui est là, c'est la meilleure performance depuis 8 ans, c'est le tableau des Echos d'hier. Donc on est dans un pays qui se redresse économiquement. Cela étant dit..."
Q-Grâce à qui ?
R - "Grâce au pays, grâce aux Français qui bossent, grâce à plein de choses, grâce à un certain nombre de réformes qui ont été faites précédemment. Là, maintenant en plus on a un train de mesures économiques qui va amplifier tout ça, donc moi je ne suis pas inquiet pour le redressement de ce pays. Simplement, le cap c'est la cohésion sociale et je peux vous dire une chose, il n'y aura pas de bataille financière là-dessus. Moi je ne laisserai pas passer. Cette mission, on me l'a confiée. Pourquoi d'abord il y a eu ce ministère de la Cohésion sociale ? C'est l'enfant d'un double désastre : une humiliation des socialistes il y a deux ans, parce que ce n'est pas une défaite électorale, mais une humiliation que nous avons subie nous-mêmes il y a quelques semaines. Quand un pays, quand en gros..."
Q-Cela fait du bien l'humiliation pour de la défaite !
R - "Quand en gros, les sociaux-démocrates respectables et en gros le centre-droite ou la droite respectable est humiliée à ce point en si peu de temps, c'est que ce pays marche sur la tête sur les enjeux sociaux."
Q-Alors, J.-L. Borloo au-delà de la tchatche, parce que vous êtes tous les rois de la tchatche en ce moment, vous sortez tous, tous les ministres en même temps...
R - "Jusqu'à présent, moi j'ai sorti un truc hier ou avant hier, c'est le problème des " recalculés ". Ce n'est pas de la tchatche, excusez-moi, c'est 650.000 familles, qui a été salué par tous les syndicats."
Q-Justement, j'y arrive. La crise de l'Unedic est-elle terminée, ou est-ce qu'il faudra la sauver chaque saison ?
R - "Non, mais il n'y a pas à sauver, regardez un peu. L'Unedic a fait l'objet d'une réforme, cette réforme en profondeur est une réforme de qualité qui ramène les comptes de l'Unedic en position positive en trois ans, selon le programme prévu. Il y avait un problème de mise en route, il y avait des contrats acquis par le gens et il était assez normal que le Gouvernement intervienne à la demande des syndicats."
Q-Mais 7 à 8 milliards d'euros de dettes, comment ils seront financés, les syndicats attendent de le savoir ?
R - "Mais bien sûr que non ! Le compte de l'exploitation de l'Unedic s'améliore jour après jour, selon le plan prévu. Cette façon d'annoncer des dettes pour ne pas justifier un changement de cap, en réalité est un peu déplacé. Je rappelle néanmoins que si le gouvernement Jospin n'avait pas pris 20 milliards de francs en octobre 2000 sur le régime des salariés, il n'y aurait pas eu du tout de crise de l'Unedic."
Q-Les 35 heures ont coûté 10 milliards en 2005. Est-ce que vous allez les rendre plus faciles, moins coûteuses les 35 heures ?
R - "Vous savez, il se trouve qu'on est à un moment de ce pays où on a une génération de syndicalistes exceptionnelle. On a l'habitude de dire que la France est un pays bloqué, qu'on ne peut pas faire de réformes, ça ce n'est pas vrai ! Je pense que les sujets de l'industrialisation, des délocalisations permettent d'ouvrir un débat avec les représentations syndicales à l'automne. Ce n'est pas exclu que l'on puisse avoir des conversations d'assouplissement. En tous les cas, ce n'est pas le sujet pour l'instant et ce n'est pas le sujet de celui qui bâtit le plan de Cohésion sociale."
Q-Alors je reviens au ministre Borloo. Est-ce que vous demandez à l'Unedic, est-ce que vous demandez au Medef d'arrêter tous les recours en justice, vous savez de faire appel ?
R - "Oui, oui, ça me paraît tout à fait clair. Dans la vie quand on passe un accord, on le passe et puis on le passe définitivement."
Q-Qu'est-ce qu'il y aura dans le service public de l'emploi que vous voulez créer, puisque vous dites que vous aurez les moyens ?
R - "Evidemment que j'aurais les moyens."
Q-Mais qu'est-ce que vous mettez dedans ?
R - "Le service public de l'emploi, c'est... on a regardé ce qui se faisait le mieux en Europe. On a trois soucis : un, on n'accompagne pas assez, on ne soutient pas assez, on ne dynamise pas assez le demandeur d'emploi pour qu'il retrouve tout de suite une activité. Deuxièmement, il n'y a aucune, aucune prévision des besoins de ressources humaines d'emploi, publique comme privée, dans les bassins en France. Et troisièmement il n'y a aucun rapport entre ces besoins et la formation. Il y a le marché de la formation professionnelle et continue, d'un côté, et il y a des besoins de l'identifier, ce nouveau service public cela va être ça."
Q-Par fonction, vous vous occupez avec R. Donnedieu de Vabres des intermittents, parce que cela fait partie de l'Emploi, du Travail, etc. On va aboutir à une solution avant la semaine prochaine, parce que dans une semaine c'est le festival
de Cannes ?
R - "Ecoutez, R. Donnedieu de Vabres s'occupe de ce dossier là. Au titre des rapports avec l'Unedic, je le soutiendrai."
Q-Il sera là demain matin, qu'est-ce que vous voulez comme piste pour en sortir ?
R - "Moi je pense que sur ce sujet, il va faire des annonces tout à l'heure que je ne connais pas. Moi ce qui me paraît important, c'est qu'il y a tout un monde des troubadours, des enfants de vitesse, ceux du spectacle vivant. Ceux-là, il faut qu'ils puissent Les 4.000 festivals en France, c'est 80 millions de Français qui vont les voir. On ne peut pas à la fois soutenir ces festivals et en même temps laisser les enfants ... "
Q-Alors ?
R - "Alors moi, je suis pour un soutien très fort aux spectacles vivants et à cette catégorie de troubadours extraordinaires. Je pense que R. Dutreil va leur tendre la main tout à l'heure."
Q-Oui, oui, c'est-à-dire, est-ce que l'on crée une caisse ou un fonds national de la culture ?
R - "Oh, oui, je crois qu'il va proposer un fonds, vers 11H30 ce matin, mais honnêtement les contours de sa proposition je ne les connais pas."
Q-Vous parlez tous, je le disais tout à l'heure en même temps. Demain, sur France 2, J.-P. Raffarin. Est-ce qu'il devrait transformer, comme dit Le Figaro, tous les solistes que vous êtes en choristes, comme s'il devait jouer, comme G. Jugnot dans le film " Les choristes " le chef de choeur ?
R - "Je vais vous dire Monsieur, le grand zapping qui fait que dans trois ans, on a toutes les chances de ne plus être là, ne va pas s'arrêter. Cela fait vingt ans que les équipes sont balayées à la fin de leur mandat. Donc la seule façon d'avoir une chance d'être heureux quand on s'en va, c'est d'avoir qu'un objectif : c'est laisser le pays dans un état un peu meilleur. Pour ça il faut des équipes un peu solidaires."
Q-Non mais attendez, vous êtes venu annoncer la défaite de votre camp et la vôtre ?
R - "Non, ce n'est pas ce que je peux vous dire. Ce que je suis en train de vous dire, c'est que penser que les ministres n'ont qu'une ambition, c'est des rivalités internes, penser qu'il n'y a pas un minimum de solidarité, penser qu'on ne s'occupe pas essentiellement des gens, est une présentation un peu de bande dessinée du boulot qu'on fait. La vérité n'est évidemment pas celle là. Moi, j'ai lu la presse récemment. Le fait d'opposer Sarkozy-Borloo... Il va vous empêcher d'avoir des sous parce que cela ne l'arrange pas, cela pourrait arranger Chirac. Enfin tout ça c'est des billevesées. La vérité, c'est que ce plan il va avoir lieu, qu'il sera financé et le ministère des Finances le soutiendra."
Q- Vous l'avez trouvé bon, hier Sarkozy ?
R - "Pour tout vous dire, je l'ai revu essentiellement sur les parties qui me concernaient directement et j'avais quelques réunions syndicales dans la journée, mais de toute façon il y a une chose que je sais, c'est qu'il est excellent dans ces exercices. Et en plus, c'est globalement quelqu'un qui est à maturité, qui est bon. Je ne crois pas qu'on ait beaucoup d'inquiétude quand il prend la parole comme ça."
Q-Demain à 8H20, invité, justement : R. Donnedieu de Vabres. Quand saura-t-on ce qu'il y a dans votre plan de cohésion sociale vraiment ?
R- "J'avais dit dix semaines, il y a trois semaines. Je crois qu'on va être un peu en avance et puis d'ici là, probablement en début de semaine prochaine, on essayera de trouver une solution pour les expulsés des logements. La situation actuelle n'est pas acceptable, surtout dans les logements sociaux. Ce sera lundi ou mardi prochain."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 5 mai 2004)
- "Bonjour !"
Q-Bienvenue. A votre tour sur le front, il faut à l'équipe que vous avez cinq ministres - Larcher, Daubresse et N. Olin... - pour le plan de cohésion sociale. Et ce plan de cohésion, est-ce que c'est de la compassion et de la solidarité pour cacher le fait qu'on ne va pas faire de réformes ?
R - "Vous n'allez pas être déçu pour les réformes, imaginez-vous. Ca ne va pas être des réformes, cela va être un changement absolument radical. En gros, ce pays vit sur un vieux système de rustine, c'est-à-dire on avait un problème, un avait un système de chômage, puis de RMI... La réalité, aujourd'hui, c'est que le RMI ou l'assistanat, c'est 1.750.000 familles, si l'on met bout à bout, RMI, ASS. C'est-à-dire qu'il y a 1.750.000 familles qui n'ont absolument, quasiment aucun espoir de remonter dans le train économique et social..."
Q-Et vous arrivez et hop !
R - "... Le logement ! Vous savez combien de temps il faut d'attente aujourd'hui pour avoir un logement social à la mairie de Paris ? 108 ans, 108 ans la file d'attente. Ailleurs, c'est un peu moins, mais enfin cela se compte quand même en dizaine d'années. Est-ce que vous savez combien il y a aujourd'hui de procédures d'expulsion en cours dans les logements pour des raisons d'argent, pour des raisons économiques ? 260.000 contentieux de demandes d'expulsion. C'est ça un pays qui a de la cohésion sociale ?"
Q-Donc quand vous arrivez, vous êtes choqué par ce que vous découvrez. Mais maintenant, ce qu'on attend de vous et du Gouvernement auquel vous participez, ce sont des décisions, des actes. Lesquels ?
R - "C'est le moins que l'on puisse dire. Vous savez, il n'y a que deux solutions. Ce ministère, qui n'existait pas en tant que tel - la Cohésion sociale, si large, si puissant et si lourd - ou c'est un gadget, ou c'est une réalité. Vous n'allez pas être déçu, on ne passera pas l'été sans avoir la réponse la réponse à cette question. Le Président a demandé et exigé ce ministère. Je suis absolument convaincu que les trois années qui viennent - je ne suis pas convaincu, il l'a redéclaré la semaine dernière -, c'est le sujet central de ce pays avec les déficits et le premier sujet c'est la cohésion sociale. Ce qui s'est encore passé récemment sur les violences à l'école, l'antisémitisme, le racisme, l'islamophobie, tout ça c'est... Ce pays est complètement incroyable ! C'est la fille aînée de l'Eglise, premier pays laïc, première communauté protestante, première communauté arabo-musulmane, première communauté juive et on est obligé de faire une loi sur la laïcité à l'école. La France est un pays qui va vers la désintégration républicaine si on ne fait pas la cohésion sociale."
Q-Oui mais alors, justement, mais qu'est-ce que vous mettez dedans, parce que c'est bien beau de découvrir ce que vous découvrez, c'est formidable.
R - "D'abord je ne le découvre pas, parce que je me suis battu pour que..."
Q-Vous l'avez vu à Valenciennes et, au passage, il y a deux belles pages sur les visites de Valenciennes et la ville.
R - "Et au ministère de la Ville."
Q-Alors qu'est-ce qu'on met dedans ? Et puis d'ailleurs, est-ce que, toutes les promesses que vous allez faire, elles exigent des moyens. Vous les annoncez au moment où le ministre de l'Economie gèle des crédits.
R - " Oui. "
Q- Mais qui va trancher la contradiction et est-ce que vous allez être affecté ?
R - "Attendez, il y a deux sujets. Un, il y a un patron, le patron c'est le chef du Gouvernement et le chef du Gouvernement, il a lui-même un patron, pour dire les choses comme elles sont maintenant, qui s'appelle le président de la République qui, lui, a été élu démocratiquement par les Français. Le cap a été fixé, c'est la cohésion sociale, le cap de ce pays. Cela nécessitera des arbitrages. D'ailleurs le ministre des Finances a dit lui-même dans sa conférence de presse hier, il a dit : si le cap c'est la cohésion sociale, c'est la cohésion qui sera financée. Simplement, comme dans ce pays on passe son temps à annoncer des choses sans les faire, moi je n'expliquerai pas le plan de cohésion sociale qui est bouclé, tant que, administrativement il manquera un bouton de guêtre. Et comme on est dans un pays un peu compliqué, eh bien..."
Q-Il en manque combien des boutons de guêtre, aujourd'hui ?
R - "Oh, il en manque encore deux ou trois. Ce sont des problèmes administratifs. C'est un problème très très lourd qui va changer radicalement le mode de fonctionnement français."
Q-On va voir avec vous, J.-L. Borloo quelques pistes. Mais pour faire la cohésion sociale, ce qui est bien c'est qu'il y ait l'autre aspect, la deuxième jambe, c'est-à-dire le développement et la dynamique économique. Et alors ?
R - "Bien entendu. Alors deux sujets. D'abord, à cette heure-ci, vous savez que la France va de ce point de vue pas mal. Ca fait près de dix ans qu'on n'a pas eu deux trimestres de croissance de cette importante, 0,7 et 0,7, 1,4 en six mois de croissance, on est..."
Q-Cela veut dire tendance annuelle ?
R - "Alors on ne peut pas, ça serait trop simple de dire 2,8, pour l'instant on a des prévisions qui sont à 1,7, mais voyez le tableau qui est là, c'est la meilleure performance depuis 8 ans, c'est le tableau des Echos d'hier. Donc on est dans un pays qui se redresse économiquement. Cela étant dit..."
Q-Grâce à qui ?
R - "Grâce au pays, grâce aux Français qui bossent, grâce à plein de choses, grâce à un certain nombre de réformes qui ont été faites précédemment. Là, maintenant en plus on a un train de mesures économiques qui va amplifier tout ça, donc moi je ne suis pas inquiet pour le redressement de ce pays. Simplement, le cap c'est la cohésion sociale et je peux vous dire une chose, il n'y aura pas de bataille financière là-dessus. Moi je ne laisserai pas passer. Cette mission, on me l'a confiée. Pourquoi d'abord il y a eu ce ministère de la Cohésion sociale ? C'est l'enfant d'un double désastre : une humiliation des socialistes il y a deux ans, parce que ce n'est pas une défaite électorale, mais une humiliation que nous avons subie nous-mêmes il y a quelques semaines. Quand un pays, quand en gros..."
Q-Cela fait du bien l'humiliation pour de la défaite !
R - "Quand en gros, les sociaux-démocrates respectables et en gros le centre-droite ou la droite respectable est humiliée à ce point en si peu de temps, c'est que ce pays marche sur la tête sur les enjeux sociaux."
Q-Alors, J.-L. Borloo au-delà de la tchatche, parce que vous êtes tous les rois de la tchatche en ce moment, vous sortez tous, tous les ministres en même temps...
R - "Jusqu'à présent, moi j'ai sorti un truc hier ou avant hier, c'est le problème des " recalculés ". Ce n'est pas de la tchatche, excusez-moi, c'est 650.000 familles, qui a été salué par tous les syndicats."
Q-Justement, j'y arrive. La crise de l'Unedic est-elle terminée, ou est-ce qu'il faudra la sauver chaque saison ?
R - "Non, mais il n'y a pas à sauver, regardez un peu. L'Unedic a fait l'objet d'une réforme, cette réforme en profondeur est une réforme de qualité qui ramène les comptes de l'Unedic en position positive en trois ans, selon le programme prévu. Il y avait un problème de mise en route, il y avait des contrats acquis par le gens et il était assez normal que le Gouvernement intervienne à la demande des syndicats."
Q-Mais 7 à 8 milliards d'euros de dettes, comment ils seront financés, les syndicats attendent de le savoir ?
R - "Mais bien sûr que non ! Le compte de l'exploitation de l'Unedic s'améliore jour après jour, selon le plan prévu. Cette façon d'annoncer des dettes pour ne pas justifier un changement de cap, en réalité est un peu déplacé. Je rappelle néanmoins que si le gouvernement Jospin n'avait pas pris 20 milliards de francs en octobre 2000 sur le régime des salariés, il n'y aurait pas eu du tout de crise de l'Unedic."
Q-Les 35 heures ont coûté 10 milliards en 2005. Est-ce que vous allez les rendre plus faciles, moins coûteuses les 35 heures ?
R - "Vous savez, il se trouve qu'on est à un moment de ce pays où on a une génération de syndicalistes exceptionnelle. On a l'habitude de dire que la France est un pays bloqué, qu'on ne peut pas faire de réformes, ça ce n'est pas vrai ! Je pense que les sujets de l'industrialisation, des délocalisations permettent d'ouvrir un débat avec les représentations syndicales à l'automne. Ce n'est pas exclu que l'on puisse avoir des conversations d'assouplissement. En tous les cas, ce n'est pas le sujet pour l'instant et ce n'est pas le sujet de celui qui bâtit le plan de Cohésion sociale."
Q-Alors je reviens au ministre Borloo. Est-ce que vous demandez à l'Unedic, est-ce que vous demandez au Medef d'arrêter tous les recours en justice, vous savez de faire appel ?
R - "Oui, oui, ça me paraît tout à fait clair. Dans la vie quand on passe un accord, on le passe et puis on le passe définitivement."
Q-Qu'est-ce qu'il y aura dans le service public de l'emploi que vous voulez créer, puisque vous dites que vous aurez les moyens ?
R - "Evidemment que j'aurais les moyens."
Q-Mais qu'est-ce que vous mettez dedans ?
R - "Le service public de l'emploi, c'est... on a regardé ce qui se faisait le mieux en Europe. On a trois soucis : un, on n'accompagne pas assez, on ne soutient pas assez, on ne dynamise pas assez le demandeur d'emploi pour qu'il retrouve tout de suite une activité. Deuxièmement, il n'y a aucune, aucune prévision des besoins de ressources humaines d'emploi, publique comme privée, dans les bassins en France. Et troisièmement il n'y a aucun rapport entre ces besoins et la formation. Il y a le marché de la formation professionnelle et continue, d'un côté, et il y a des besoins de l'identifier, ce nouveau service public cela va être ça."
Q-Par fonction, vous vous occupez avec R. Donnedieu de Vabres des intermittents, parce que cela fait partie de l'Emploi, du Travail, etc. On va aboutir à une solution avant la semaine prochaine, parce que dans une semaine c'est le festival
de Cannes ?
R - "Ecoutez, R. Donnedieu de Vabres s'occupe de ce dossier là. Au titre des rapports avec l'Unedic, je le soutiendrai."
Q-Il sera là demain matin, qu'est-ce que vous voulez comme piste pour en sortir ?
R - "Moi je pense que sur ce sujet, il va faire des annonces tout à l'heure que je ne connais pas. Moi ce qui me paraît important, c'est qu'il y a tout un monde des troubadours, des enfants de vitesse, ceux du spectacle vivant. Ceux-là, il faut qu'ils puissent Les 4.000 festivals en France, c'est 80 millions de Français qui vont les voir. On ne peut pas à la fois soutenir ces festivals et en même temps laisser les enfants ... "
Q-Alors ?
R - "Alors moi, je suis pour un soutien très fort aux spectacles vivants et à cette catégorie de troubadours extraordinaires. Je pense que R. Dutreil va leur tendre la main tout à l'heure."
Q-Oui, oui, c'est-à-dire, est-ce que l'on crée une caisse ou un fonds national de la culture ?
R - "Oh, oui, je crois qu'il va proposer un fonds, vers 11H30 ce matin, mais honnêtement les contours de sa proposition je ne les connais pas."
Q-Vous parlez tous, je le disais tout à l'heure en même temps. Demain, sur France 2, J.-P. Raffarin. Est-ce qu'il devrait transformer, comme dit Le Figaro, tous les solistes que vous êtes en choristes, comme s'il devait jouer, comme G. Jugnot dans le film " Les choristes " le chef de choeur ?
R - "Je vais vous dire Monsieur, le grand zapping qui fait que dans trois ans, on a toutes les chances de ne plus être là, ne va pas s'arrêter. Cela fait vingt ans que les équipes sont balayées à la fin de leur mandat. Donc la seule façon d'avoir une chance d'être heureux quand on s'en va, c'est d'avoir qu'un objectif : c'est laisser le pays dans un état un peu meilleur. Pour ça il faut des équipes un peu solidaires."
Q-Non mais attendez, vous êtes venu annoncer la défaite de votre camp et la vôtre ?
R - "Non, ce n'est pas ce que je peux vous dire. Ce que je suis en train de vous dire, c'est que penser que les ministres n'ont qu'une ambition, c'est des rivalités internes, penser qu'il n'y a pas un minimum de solidarité, penser qu'on ne s'occupe pas essentiellement des gens, est une présentation un peu de bande dessinée du boulot qu'on fait. La vérité n'est évidemment pas celle là. Moi, j'ai lu la presse récemment. Le fait d'opposer Sarkozy-Borloo... Il va vous empêcher d'avoir des sous parce que cela ne l'arrange pas, cela pourrait arranger Chirac. Enfin tout ça c'est des billevesées. La vérité, c'est que ce plan il va avoir lieu, qu'il sera financé et le ministère des Finances le soutiendra."
Q- Vous l'avez trouvé bon, hier Sarkozy ?
R - "Pour tout vous dire, je l'ai revu essentiellement sur les parties qui me concernaient directement et j'avais quelques réunions syndicales dans la journée, mais de toute façon il y a une chose que je sais, c'est qu'il est excellent dans ces exercices. Et en plus, c'est globalement quelqu'un qui est à maturité, qui est bon. Je ne crois pas qu'on ait beaucoup d'inquiétude quand il prend la parole comme ça."
Q-Demain à 8H20, invité, justement : R. Donnedieu de Vabres. Quand saura-t-on ce qu'il y a dans votre plan de cohésion sociale vraiment ?
R- "J'avais dit dix semaines, il y a trois semaines. Je crois qu'on va être un peu en avance et puis d'ici là, probablement en début de semaine prochaine, on essayera de trouver une solution pour les expulsés des logements. La situation actuelle n'est pas acceptable, surtout dans les logements sociaux. Ce sera lundi ou mardi prochain."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 5 mai 2004)