Texte intégral
Un temps envisagé, la visite de Jacques Chirac sur l'île de Beauté avant le 6 juillet n'est plus à l'ordre du jour. En revanche, la vôtre est annoncée pour jeudi. Redoutez-vous de nouvelles manifestations ?
Alain Juppé : Je souhaite m'engager publiquement, au nom de l'UMP, en faveur du "oui" au référendum qui va être proposé aux 191.000 électeurs corses. Ce référendum est une des retombées positives de la réforme de la décentralisation engagée par Jean-Pierre Raffarin et ne s'inscrit nullement, contrairement à ce que certains affirment, dans le cadre du processus de Matignon de Lionel Jospin. Processus qui s'est cantonné à quelques conciliabules stériles. M. Jospin n'avait jamais prévu de référendum. Nous voulons donner la parole aux Corses: c'est un risque que nous prenons mais c'est aussi une chance pour les Corses. Nous voulons leur donner l'occasion de s'ancrer davantage dans la République Quant à Jacques Chirac, il n'a jamais été véritablement question qu'il se rende sur place maintenant. Son intervention, il y a vingt-quatre heures, dans la presse corse est sans ambiguïté, j'y souscris totalement.
Si le "non" devait l'emporter, ce serait un désaveu pour l'actuelle équipe gouvernementale et tous ceux qui ont milité pour le oui ?
Alain Juppé : Sans doute, mais je ne l'envisage pas. Depuis un an, le gouvernement a fortement démontré son attachement à la Corse par des efforts financiers sans précédent. Il a "mis le paquet" comme on dit. Je veux croire que les Corses y sont sensibles.
Demander aux Corses de revenir à une collectivité unique en pleine vague de décentralisation, c'est paradoxal ?
Alain Juppé : La décentralisation, ce n'est pas l'émiettement des compétences et des responsabilités. Avec une seule collectivité, dotée de plus de moyens, les règles du jeu seront clarifiés, le fonctionnement transparent, les responsabilités identifiées. Les Corses s'y retrouveront largement. Ce mouvement pourrait ensuite s'étendre: pourquoi pas l'Outre-Mer, ou l'Alsace, ou la Normandie ?
L'appel des nationalistes à voter "oui" ne risque-t-il pas de fausser ce référendum ?
Alain Juppé : La position des nationalistes est alambiquée. Les Corses ont du bon sens, ils sauront voir plus loin.
Vous avez qualifié de "mascarade" le débat sur les retraites au Palais Bourbon. La gauche ne fait-elle pas, aujourd'hui, ce que la droite faisait, hier, quand elle était dans l'opposition ?
Alain Juppé : Faute d'avoir des idées, le PC fait tout pour entraver le débat: à quoi sert de déposer des milliers d'amendements parfois identiques, de demander systématiquement un scrutin public, si ce n'est à empêcher toute discussion de fond et à ridiculiser l'institution parlementaire? Quand je vois un député communiste reprendre à son compte un amendement de droite uniquement pour le plaisir de voter contre, je dis, effectivement que c'est de l'obstruction. Tant pis ! Nous supporterons ce petit jeu le temps qu'il faudra. Quant à Jean-Louis Debré ,il a montré sa compréhension du rôle de l'opposition ;devant l'obstruction systématique il appliquera sans doute le règlement de l'Assemblée de façon plus stricte sans manquer à son devoir d'impartialité. C'est raisonnable.
Le vote était initialement prévu le 20 juin, nous sommes loin du but... François Fillon ne cache pas son exaspération, les députés UMP piaffent...
Alain Juppé : François Fillon travaille sur ce texte depuis six mois, il a envie d'aboutir, quoi de plus normal. Quand aux parlementaires UMP, ils se sentent pris au piège de l'obstruction, je les comprends. J'ai bon espoir malgré tout que le texte puisse être voté d'ici la fin de la semaine prochaine. Au plus tard.
Ce projet de loi a provoqué des manifestations et des grèves à répétition tout au long de ces dernières semaines. A-t-il été suffisamment expliqué ?
Alain Juppé: Il est paradoxal de voir que ceux qui manifestaient leur opposition n'étaient pas toujours concernés par la réforme proposée. Il y a eu une gigantesque désinformation, une politisation outrancière -l'effet extrême gauche a joué à plein-; je ne crois pas que l'opinion publique ait été insuffisamment préparée: à l'UMP nous avons fait, en amont, un travail considérable. Jean-Paul Delevoye , François Fillon, Jean-Pierre Raffarin ou moi-même et beaucoup d'autres avons animé de multiples débats depuis six mois; des milliers de tracts ont été distribués. Au final, le projet de loi contient des améliorations considérables pour de nombreuses catégories de salariés (les smicards, les longues carrières, les parents d'enfants handicapés, les fonctionnaires mêmes, qui verront une partie de leurs primes intégrée dans le calcul de leur retraite....)Je crois que toutes ces améliorations sont aujourd'hui comprises.
La place de José Bové est-elle en prison ?
Alain Juppé : Cette affaire me sidère! Voilà quelqu'un qui fait un bras d'honneur à la justice depuis des mois au su et au vu de tout le monde et qui se présente maintenant avec la complicité la gauche comme une victime. Dire qu'il y a là une remise en cause du droit syndical c'est de l'exploitation politicienne pure et simple. Il y a eu une décision de justice. Un gouvernement, quel qu'il soit, se doit de l'appliquer. Que dirait-on s'il ne le faisait pas !
Sera-t-il être gracié le 14 juillet ?
Alain Juppé : Je n'en sais rien, la décision ne me revient pas. Ne confondons pas le décret de grâce classique qui s'applique chaque 14 juillet et qui, dans son cas, lui permettrait d'obtenir une remise de peine et le délai de grâce individuel qui aboutirait à une remise en liberté immédiate. Je crois comprendre qu'avec une remise de peine il pourrait rester en prison jusqu'en septembre. Est-ce si inconcevable pour quelqu'un qui a détruit, à plusieurs reprises, le bien d'autrui?Là encore,ne nous trompons pas,José Bové défend une position qui mérite débat,cela ne l'autorise pas à commettre des actions violentes !
Le projet de réforme du statut du président de la République, encore à l'arbitrage, ne semble pas vous satisfaire. Quelles "précisions" demandez-vous ?
Alain Juppé : Cette réforme se propose de confirmer l'immunité et inviolabilité pénale du chef de l'Etat pendant le durée de son mandat. Elle confirme ainsi la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la Cour de Cassation. Mais elle suggère également une procédure d'"empêchement" du président de la République, devant le Parlement, en cas de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de sa charge". La formulation me parait devoir être précisée afin de permettre une plus grande clarté.
Ne redoutez-vous pas que les exaspérations sociales ne ressurgissent à la rentrée à l'occasion, par exemple, de la réforme de l'assurance maladie ?
On verra... Je ne le crois pas. Le gouvernement fait ce qu'il s'était engagé à faire. Il tient parole et les français lui en savent gré. La loi de financement de la sécurité sociale arrive à l'automne. Ce sera le moment de lancer la réforme de l'assurance maladie. Nous devrons également boucler le budget 2004, ce ne sera pas facile mais nous le ferons. Le gouvernement n'est pas pressé, il a quatre ans devant lui pour faire tranquillement avancer les choses. Nous disposons de la majorité absolue à l'Assemblée nationale et au Sénat, c'est un atout précieux.
Vous sentez-vous bien à la tête de l'UMP ? Aucune frustration de ne pas être au gouvernement ?
Alain Juppé: Aucune. J'ai choisi d'être là où je suis et quand je regarde le travail accompli depuis un an, je n'ai franchement pas à rougir.
Vous êtes aujourd'hui fixé sur votre calendrier judiciaire dans le cadre de l'affaire des emplois présumés fictifs du RPR ?
Alain Juppé: Effectivement. Le procès devant le tribunal correctionnel de Nanterre a été fixé du 29 septembre au 17 Octobre. Je m'y prépare , calmement.
Propos recueillis par Virginie Le Guay
(Source http://www.u-m-p.org, le 01 juillet 2003)
Alain Juppé : Je souhaite m'engager publiquement, au nom de l'UMP, en faveur du "oui" au référendum qui va être proposé aux 191.000 électeurs corses. Ce référendum est une des retombées positives de la réforme de la décentralisation engagée par Jean-Pierre Raffarin et ne s'inscrit nullement, contrairement à ce que certains affirment, dans le cadre du processus de Matignon de Lionel Jospin. Processus qui s'est cantonné à quelques conciliabules stériles. M. Jospin n'avait jamais prévu de référendum. Nous voulons donner la parole aux Corses: c'est un risque que nous prenons mais c'est aussi une chance pour les Corses. Nous voulons leur donner l'occasion de s'ancrer davantage dans la République Quant à Jacques Chirac, il n'a jamais été véritablement question qu'il se rende sur place maintenant. Son intervention, il y a vingt-quatre heures, dans la presse corse est sans ambiguïté, j'y souscris totalement.
Si le "non" devait l'emporter, ce serait un désaveu pour l'actuelle équipe gouvernementale et tous ceux qui ont milité pour le oui ?
Alain Juppé : Sans doute, mais je ne l'envisage pas. Depuis un an, le gouvernement a fortement démontré son attachement à la Corse par des efforts financiers sans précédent. Il a "mis le paquet" comme on dit. Je veux croire que les Corses y sont sensibles.
Demander aux Corses de revenir à une collectivité unique en pleine vague de décentralisation, c'est paradoxal ?
Alain Juppé : La décentralisation, ce n'est pas l'émiettement des compétences et des responsabilités. Avec une seule collectivité, dotée de plus de moyens, les règles du jeu seront clarifiés, le fonctionnement transparent, les responsabilités identifiées. Les Corses s'y retrouveront largement. Ce mouvement pourrait ensuite s'étendre: pourquoi pas l'Outre-Mer, ou l'Alsace, ou la Normandie ?
L'appel des nationalistes à voter "oui" ne risque-t-il pas de fausser ce référendum ?
Alain Juppé : La position des nationalistes est alambiquée. Les Corses ont du bon sens, ils sauront voir plus loin.
Vous avez qualifié de "mascarade" le débat sur les retraites au Palais Bourbon. La gauche ne fait-elle pas, aujourd'hui, ce que la droite faisait, hier, quand elle était dans l'opposition ?
Alain Juppé : Faute d'avoir des idées, le PC fait tout pour entraver le débat: à quoi sert de déposer des milliers d'amendements parfois identiques, de demander systématiquement un scrutin public, si ce n'est à empêcher toute discussion de fond et à ridiculiser l'institution parlementaire? Quand je vois un député communiste reprendre à son compte un amendement de droite uniquement pour le plaisir de voter contre, je dis, effectivement que c'est de l'obstruction. Tant pis ! Nous supporterons ce petit jeu le temps qu'il faudra. Quant à Jean-Louis Debré ,il a montré sa compréhension du rôle de l'opposition ;devant l'obstruction systématique il appliquera sans doute le règlement de l'Assemblée de façon plus stricte sans manquer à son devoir d'impartialité. C'est raisonnable.
Le vote était initialement prévu le 20 juin, nous sommes loin du but... François Fillon ne cache pas son exaspération, les députés UMP piaffent...
Alain Juppé : François Fillon travaille sur ce texte depuis six mois, il a envie d'aboutir, quoi de plus normal. Quand aux parlementaires UMP, ils se sentent pris au piège de l'obstruction, je les comprends. J'ai bon espoir malgré tout que le texte puisse être voté d'ici la fin de la semaine prochaine. Au plus tard.
Ce projet de loi a provoqué des manifestations et des grèves à répétition tout au long de ces dernières semaines. A-t-il été suffisamment expliqué ?
Alain Juppé: Il est paradoxal de voir que ceux qui manifestaient leur opposition n'étaient pas toujours concernés par la réforme proposée. Il y a eu une gigantesque désinformation, une politisation outrancière -l'effet extrême gauche a joué à plein-; je ne crois pas que l'opinion publique ait été insuffisamment préparée: à l'UMP nous avons fait, en amont, un travail considérable. Jean-Paul Delevoye , François Fillon, Jean-Pierre Raffarin ou moi-même et beaucoup d'autres avons animé de multiples débats depuis six mois; des milliers de tracts ont été distribués. Au final, le projet de loi contient des améliorations considérables pour de nombreuses catégories de salariés (les smicards, les longues carrières, les parents d'enfants handicapés, les fonctionnaires mêmes, qui verront une partie de leurs primes intégrée dans le calcul de leur retraite....)Je crois que toutes ces améliorations sont aujourd'hui comprises.
La place de José Bové est-elle en prison ?
Alain Juppé : Cette affaire me sidère! Voilà quelqu'un qui fait un bras d'honneur à la justice depuis des mois au su et au vu de tout le monde et qui se présente maintenant avec la complicité la gauche comme une victime. Dire qu'il y a là une remise en cause du droit syndical c'est de l'exploitation politicienne pure et simple. Il y a eu une décision de justice. Un gouvernement, quel qu'il soit, se doit de l'appliquer. Que dirait-on s'il ne le faisait pas !
Sera-t-il être gracié le 14 juillet ?
Alain Juppé : Je n'en sais rien, la décision ne me revient pas. Ne confondons pas le décret de grâce classique qui s'applique chaque 14 juillet et qui, dans son cas, lui permettrait d'obtenir une remise de peine et le délai de grâce individuel qui aboutirait à une remise en liberté immédiate. Je crois comprendre qu'avec une remise de peine il pourrait rester en prison jusqu'en septembre. Est-ce si inconcevable pour quelqu'un qui a détruit, à plusieurs reprises, le bien d'autrui?Là encore,ne nous trompons pas,José Bové défend une position qui mérite débat,cela ne l'autorise pas à commettre des actions violentes !
Le projet de réforme du statut du président de la République, encore à l'arbitrage, ne semble pas vous satisfaire. Quelles "précisions" demandez-vous ?
Alain Juppé : Cette réforme se propose de confirmer l'immunité et inviolabilité pénale du chef de l'Etat pendant le durée de son mandat. Elle confirme ainsi la jurisprudence du Conseil constitutionnel et de la Cour de Cassation. Mais elle suggère également une procédure d'"empêchement" du président de la République, devant le Parlement, en cas de "manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l'exercice de sa charge". La formulation me parait devoir être précisée afin de permettre une plus grande clarté.
Ne redoutez-vous pas que les exaspérations sociales ne ressurgissent à la rentrée à l'occasion, par exemple, de la réforme de l'assurance maladie ?
On verra... Je ne le crois pas. Le gouvernement fait ce qu'il s'était engagé à faire. Il tient parole et les français lui en savent gré. La loi de financement de la sécurité sociale arrive à l'automne. Ce sera le moment de lancer la réforme de l'assurance maladie. Nous devrons également boucler le budget 2004, ce ne sera pas facile mais nous le ferons. Le gouvernement n'est pas pressé, il a quatre ans devant lui pour faire tranquillement avancer les choses. Nous disposons de la majorité absolue à l'Assemblée nationale et au Sénat, c'est un atout précieux.
Vous sentez-vous bien à la tête de l'UMP ? Aucune frustration de ne pas être au gouvernement ?
Alain Juppé: Aucune. J'ai choisi d'être là où je suis et quand je regarde le travail accompli depuis un an, je n'ai franchement pas à rougir.
Vous êtes aujourd'hui fixé sur votre calendrier judiciaire dans le cadre de l'affaire des emplois présumés fictifs du RPR ?
Alain Juppé: Effectivement. Le procès devant le tribunal correctionnel de Nanterre a été fixé du 29 septembre au 17 Octobre. Je m'y prépare , calmement.
Propos recueillis par Virginie Le Guay
(Source http://www.u-m-p.org, le 01 juillet 2003)