Texte intégral
F. Laborde-. Nous allons évoquer le dossier des retraites. Ce n'est pas une surprise : hier, le Parti socialiste a pris un certain nombre de dispositions, fait un certain nombre d'annonces, à commencer par l'engagement à revenir sur le projet Fillon, une déclaration qui a été diversement appréciée à l'intérieur même du PS. On va y revenir dans quelques instants. Mais pourquoi vouloir retirer le projet Fillon ? Il n'y a vraiment rien à sauver dans cette idée de réformer les retraites ?
- "Le problème n'est pas de savoir s'il y a à sauver ou pas à sauver. Le problème est qu'aujourd'hui, ce plan est contesté. Il est contesté parce qu'il est injuste, parce que l'effort repose essentiellement sur les salariés, que ce n'est pas un effort réparti, équitable, et surtout par ailleurs, que ce plan, sur le fond, n'est même pas financé. C'est-à-dire qu'en 2007, il faudra tout reprendre à zéro. Donc nous disons, s'il y a une alternance politique, par exemple en 2007, la gauche remettra à plat et rouvrira une véritable négociation, pour arriver à une réforme des retraites qui soit une réforme équitable."
Si la gauche fait en 2007 ce qu'elle a fait avant, il ne se passera pas grand-chose, parce que la gauche au pouvoir a demandé un certain nombre de rapports sur les retraites, à commencer par le rapport Charpin, et au fond il n'y a pas eu de réforme qui a été lancée, si je puis me permettre cette pique !
- "Déjà la gauche a évité qu'on arrive à avoir un débat sur les retraites qui soit un débat totalement tronqué, c'est-à-dire qu'il y a un diagnostic qui existe. La gauche a permis de faire que cette réforme des retraites ne se fasse pas dans le catastrophisme, parce que ce n'est pas la même chose de faire une réforme des retraites quand vous avez un million d'emplois supplémentaires ou quand vous avez quatre millions de chômeurs, parce que les ressources ne sont pas les mêmes. Donc, c'est pour ça d'ailleurs que dans le débat nous disons, nous, que la priorité aujourd'hui c'est l'emploi, et que nous allons proposer dans le débat parlementaire qui vient un certain nombre de mesures qui visent à relancer l'emploi, pour permettre de trouver des ressources supplémentaires pour nos retraites. Donc la question de l'emploi n'est pas une petite affaire. Je crois deuxièmement que la gauche avait mis en place un système qui s'appelle le Fonds de réserve des retraites, qu'elle a alimenté pour 16 milliards d'euros. Et je pourrais poser la question : pourquoi avoir fait 8 milliards d'allégements sur les impôts et ne pas avoir fait que ces 8 milliards d'allégements sur les impôts, on les affecte à notre système de retraites ? On a donc baissé les impôts des riches, et on n'a pas garanti notre système de retraites. Ce n'est pas juste."
Mais l'idée selon laquelle on fait une réforme pour que tous les salariés, qu'ils travaillent dans le privé ou qu'ils travaillent dans le public, aient les mêmes cotisations, est une idée de justice, d'équité, à laquelle on pourrait imaginer que la gauche adhère ?
- "Mais justement, nous disons - c'est une des propositions que nous allons faire dans le débat parlementaire - qu'il faut que sur la durée des cotisations il y ait une négociation dans le secteur public comme dans le secteur privé, qu'on aille pas au-delà de 40 années de cotisation, mais qu'on puisse regarder dans tous ces secteurs, en fonction de la pénibilité, des ressources, du temps de formation, comment on peut arriver à un système équitable pour tout le monde. Donc nous ne disons pas qu'il ne faut pas discuter des durées de cotisation. Nous disons simplement qu'il faut que cette discussion soit juste. Or la discussion actuelle n'est pas juste puisqu'on nous dit, il faut 40 ans, mais d'ores et déjà, on nous dit aussi qu'en 2007, il faudra peut-être voir 41, 42 ans. Là-dessus, nous ne sommes pas d'accord. Nous ne disons pas qu'il faut revenir en arrière, mais qu'il faut discuter, négocier, activités par activités. Prenons un exemple : une caissière de supermarché : 40 ans, est-ce que ce n'est pas déjà terrible ?"
Oui, et c'est très fatigant d'être caissière de supermarché, c'est au moins aussi fatiguant que d'être guichetier à La Poste....
- "C'est pour ça qu'il faut introduire cette notion de pénibilité dans le temps de cotisations, pour pouvoir effectivement avoir des choses qui soient équitables."
Franchement, ça veut dire quoi ? On remet tout à plat, privé, public, la réforme de 93 aussi bien que la réforme qu'a signée la CFDT là ? Et vous allez tout remettre en 2007, alors que pendant vos années de gestion gouvernementale, on n'a pas assisté à des réformes éblouissantes ?! Par exemple, la loi Balladur de 93, vous ne l'avez pas remise en question...
- "C'est justement pour ça que nous voulons remettre à plat le dispositif, pour garantir un niveau de retraites suffisant pour les retraités qui viendront, c'est-à-dire qu'ils aient une retraite décente et que la retraite soit un moment de dignité et de sécurité, que ce ne soit pas un moment de fragilité et qu'on ne retrouve pas ceux qu'on appelle les "vieux travailleurs", c'est-à-dire des gens qui soient obligés d'aller au-delà de 65, 70 ans même parfois, parce qu'ils ont rien pour vivre. Voilà pourquoi nous disons maintenant qu'il faut discuter. Discuter, dialoguer, trouver des ressources nouvelles. Nous disons par exemple que le Gouvernement, à l'étape actuelle, ne se sert que du temps de cotisations pour essayer d'équilibrer notre système de retraites, qu'il ne va pas chercher des ressources nouvelles, c'est-à-dire qu'il ne fait pas en sorte, par exemple, le fait que les revenus du capital soient mis à contribution pour financer notre système de retraites. C'est ça qui est injuste."
Mais sur les ressources nouvelles, on ne va pas pouvoir continuer à augmenter les cotisations, même si on a entendu M. Blondel le dire, de façon énorme, parce qu'il y a un moment où, effectivement, il y aura un poids sur les actifs qui sera disproportionné par rapport au nombre de retraités ?
- "On a donné plusieurs directions sur les ressources nouvelles. D'abord, on dit que c'est un choix de société. Si on veut qu'il y ait une retraite par répartition, c'est-à-dire une retraite équitable pour tout le monde, une bonne retraite pour tout le monde, il faudra faire un effort, il faudra que cet effort soit consenti par tout le monde, donc il faudra des cotisations. Maintenant, il faut que ces cotisations soient équitablement réparties, c'est-à-dire il y aura un effort des salariés - c'est ça que nous disons par le fait que nous sommes pour augmenter les cotisations sociales -, mais il y aura aussi un effort sur les revenus qui ne sont pas les revenus du travail : c'est ça la recherche d'une cotisation sociale généralisée, d'une partie de la CSG, pour financer notre système de retraites. C'est ça aussi le fait que nous disons qu'il faut que les revenus du patrimoine soient mis à contribution pour financer notre système de retraites. C'est un ensemble de leviers qui font qu'il y ait une justice à l'arrivée."
Est-ce qu'il faut que, par exemple, les retraités les plus riches cotisent eux aussi ? Parce que c'est une bizarrerie du système français qui fait que quand on est retraité, on ne cotise pas, quel que soit son niveau de revenus.
- "C'est un élément qui peut être pris en considération. C'est pour ça quand on fait la CSG, on prend en considération cette situation, ou quand on met en place une cotisation sur les revenus du patrimoine, on prend en considération cette situation de déséquilibre."
Il y a une partie quand même du Parti socialiste qui partage pas exactement cette analyse. Le premier qui avait ouvert le feu, c'était M. Rocard ; après, on a vu J. Attali, J. Delors, M. Charasse, qui ont été un peu renvoyés sévèrement dans les cordes. Vous pensez vraiment que s'ils disent tout ça, c'est parce que ce sont des vieux papis dépassés, comme dit je sais plus qui chez vous ?
- "Non, d'abord, je vais faire une distinction. Pour M. Charasse, aider le gouvernement Raffarin, ça devient une habitude. Il a déjà voté l'augmentation de 70 % des salaires des ministres. C'est une désagréable habitude pour nous, nous lui disons franchement. Maintenant, pour un certain nombre d'amis, ils ont le droit de donner leur sentiment, mais on a le droit aussi de prendre en considération ce qui s'est passé dans ce pays. Et les mêmes qui, aujourd'hui, soutiennent cette réforme, étaient ceux qui nous disaient qu'on ne prenait pas en considération la situation des gens en difficultés. Il y a eu le 21 avril et le Parti socialiste a pris en considération cette situation nouvelle. Nous sommes aux côtés des gens qui souffrent, parce qu'avoir une petite retraite, ça devient une souffrance. Nous essayons de trouver des solutions nouvelles et on nous dit maintenant : "Ah, ben non, vous n'avez pas le droit !". Vous me voyez, moi, aller dire aujourd'hui, dans mes cités, que la réforme Raffarin est une bonne réforme ?!"
Oui, mais dans vos cités, ils ne sont pas tous dans la Fonction publique...
- "Non, ils sont dans le privé et ils nous disent aussi qu'ils ne veulent pas arriver à une situation où ils cotiseront"
Est-ce que ce n'est pas la clientèle de la Fonction publique que vous défendez essentiellement aujourd'hui, quand même ?
- "Mais non, parce que les gens du privé ont très bien compris que quand le public recule, après ça sera leur tour, c'est un système inévitable. Je ne me vois donc pas aujourd'hui aller dire que la gauche et la droite, c'est la même chose sur les retraites. Non. Nous nous ne disons pas qu'il ne faut pas de réforme. Est-ce qu'on est venu vous dire il ne faut pas de réforme, tout va bien ? Non !
Non, parce que le système ne fonctionne plus, il y a un moment où tout le monde dit il faut une réforme et personne ne veut faire d'efforts !
- "Donc, nous disons qu'il faut une réforme, mais il faut que cette réforme soit juste, qu'elle soit négociée, que l'effort soit réparti équitablement et que ce ne soit pas toujours les mêmes qui payent. Or là, dans la réforme qui nous est proposée, ce sont les salariés, point à la ligne, qui contribuent à sauver le système."
Est-ce qu'il faut que le PS se "gauchise" ?
- "Ce n'est pas de se gauchir, c'est prendre en considération la situation d'inégalités qui existent dans la société et apporter des solutions qui recréent de l'égalité."
Je vais la poser différemment. Est-ce que vous reconnaissez, au moins, à Raffarin un mérite : c'est d'avoir lancé le débat sur les retraites ?
- "Non, parce que je pense qu'il l'a mal lancé, parce qu'il a braqué la société..."
Il aurait dû ne rien faire du tout ?
- "Non, il aurait dû prendre le temps de négocier. Combien de temps a duré la négociation ? Même pas 10 heures ! Toutes les organisations syndicales étaient prêtes à bouger. Même celles qui paraissent par exemple les plus crispées, comme Force Ouvrière, puisque c'est ce qu'on nous a dit, étaient prêtes à prendre en considération des discussions sur les cotisations. Tout ça n'a pas été fait, on est passé de manière précipitée. Résultat : il faudra tout reprendre à zéro."
(Source : Premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 juin 2003)
- "Le problème n'est pas de savoir s'il y a à sauver ou pas à sauver. Le problème est qu'aujourd'hui, ce plan est contesté. Il est contesté parce qu'il est injuste, parce que l'effort repose essentiellement sur les salariés, que ce n'est pas un effort réparti, équitable, et surtout par ailleurs, que ce plan, sur le fond, n'est même pas financé. C'est-à-dire qu'en 2007, il faudra tout reprendre à zéro. Donc nous disons, s'il y a une alternance politique, par exemple en 2007, la gauche remettra à plat et rouvrira une véritable négociation, pour arriver à une réforme des retraites qui soit une réforme équitable."
Si la gauche fait en 2007 ce qu'elle a fait avant, il ne se passera pas grand-chose, parce que la gauche au pouvoir a demandé un certain nombre de rapports sur les retraites, à commencer par le rapport Charpin, et au fond il n'y a pas eu de réforme qui a été lancée, si je puis me permettre cette pique !
- "Déjà la gauche a évité qu'on arrive à avoir un débat sur les retraites qui soit un débat totalement tronqué, c'est-à-dire qu'il y a un diagnostic qui existe. La gauche a permis de faire que cette réforme des retraites ne se fasse pas dans le catastrophisme, parce que ce n'est pas la même chose de faire une réforme des retraites quand vous avez un million d'emplois supplémentaires ou quand vous avez quatre millions de chômeurs, parce que les ressources ne sont pas les mêmes. Donc, c'est pour ça d'ailleurs que dans le débat nous disons, nous, que la priorité aujourd'hui c'est l'emploi, et que nous allons proposer dans le débat parlementaire qui vient un certain nombre de mesures qui visent à relancer l'emploi, pour permettre de trouver des ressources supplémentaires pour nos retraites. Donc la question de l'emploi n'est pas une petite affaire. Je crois deuxièmement que la gauche avait mis en place un système qui s'appelle le Fonds de réserve des retraites, qu'elle a alimenté pour 16 milliards d'euros. Et je pourrais poser la question : pourquoi avoir fait 8 milliards d'allégements sur les impôts et ne pas avoir fait que ces 8 milliards d'allégements sur les impôts, on les affecte à notre système de retraites ? On a donc baissé les impôts des riches, et on n'a pas garanti notre système de retraites. Ce n'est pas juste."
Mais l'idée selon laquelle on fait une réforme pour que tous les salariés, qu'ils travaillent dans le privé ou qu'ils travaillent dans le public, aient les mêmes cotisations, est une idée de justice, d'équité, à laquelle on pourrait imaginer que la gauche adhère ?
- "Mais justement, nous disons - c'est une des propositions que nous allons faire dans le débat parlementaire - qu'il faut que sur la durée des cotisations il y ait une négociation dans le secteur public comme dans le secteur privé, qu'on aille pas au-delà de 40 années de cotisation, mais qu'on puisse regarder dans tous ces secteurs, en fonction de la pénibilité, des ressources, du temps de formation, comment on peut arriver à un système équitable pour tout le monde. Donc nous ne disons pas qu'il ne faut pas discuter des durées de cotisation. Nous disons simplement qu'il faut que cette discussion soit juste. Or la discussion actuelle n'est pas juste puisqu'on nous dit, il faut 40 ans, mais d'ores et déjà, on nous dit aussi qu'en 2007, il faudra peut-être voir 41, 42 ans. Là-dessus, nous ne sommes pas d'accord. Nous ne disons pas qu'il faut revenir en arrière, mais qu'il faut discuter, négocier, activités par activités. Prenons un exemple : une caissière de supermarché : 40 ans, est-ce que ce n'est pas déjà terrible ?"
Oui, et c'est très fatigant d'être caissière de supermarché, c'est au moins aussi fatiguant que d'être guichetier à La Poste....
- "C'est pour ça qu'il faut introduire cette notion de pénibilité dans le temps de cotisations, pour pouvoir effectivement avoir des choses qui soient équitables."
Franchement, ça veut dire quoi ? On remet tout à plat, privé, public, la réforme de 93 aussi bien que la réforme qu'a signée la CFDT là ? Et vous allez tout remettre en 2007, alors que pendant vos années de gestion gouvernementale, on n'a pas assisté à des réformes éblouissantes ?! Par exemple, la loi Balladur de 93, vous ne l'avez pas remise en question...
- "C'est justement pour ça que nous voulons remettre à plat le dispositif, pour garantir un niveau de retraites suffisant pour les retraités qui viendront, c'est-à-dire qu'ils aient une retraite décente et que la retraite soit un moment de dignité et de sécurité, que ce ne soit pas un moment de fragilité et qu'on ne retrouve pas ceux qu'on appelle les "vieux travailleurs", c'est-à-dire des gens qui soient obligés d'aller au-delà de 65, 70 ans même parfois, parce qu'ils ont rien pour vivre. Voilà pourquoi nous disons maintenant qu'il faut discuter. Discuter, dialoguer, trouver des ressources nouvelles. Nous disons par exemple que le Gouvernement, à l'étape actuelle, ne se sert que du temps de cotisations pour essayer d'équilibrer notre système de retraites, qu'il ne va pas chercher des ressources nouvelles, c'est-à-dire qu'il ne fait pas en sorte, par exemple, le fait que les revenus du capital soient mis à contribution pour financer notre système de retraites. C'est ça qui est injuste."
Mais sur les ressources nouvelles, on ne va pas pouvoir continuer à augmenter les cotisations, même si on a entendu M. Blondel le dire, de façon énorme, parce qu'il y a un moment où, effectivement, il y aura un poids sur les actifs qui sera disproportionné par rapport au nombre de retraités ?
- "On a donné plusieurs directions sur les ressources nouvelles. D'abord, on dit que c'est un choix de société. Si on veut qu'il y ait une retraite par répartition, c'est-à-dire une retraite équitable pour tout le monde, une bonne retraite pour tout le monde, il faudra faire un effort, il faudra que cet effort soit consenti par tout le monde, donc il faudra des cotisations. Maintenant, il faut que ces cotisations soient équitablement réparties, c'est-à-dire il y aura un effort des salariés - c'est ça que nous disons par le fait que nous sommes pour augmenter les cotisations sociales -, mais il y aura aussi un effort sur les revenus qui ne sont pas les revenus du travail : c'est ça la recherche d'une cotisation sociale généralisée, d'une partie de la CSG, pour financer notre système de retraites. C'est ça aussi le fait que nous disons qu'il faut que les revenus du patrimoine soient mis à contribution pour financer notre système de retraites. C'est un ensemble de leviers qui font qu'il y ait une justice à l'arrivée."
Est-ce qu'il faut que, par exemple, les retraités les plus riches cotisent eux aussi ? Parce que c'est une bizarrerie du système français qui fait que quand on est retraité, on ne cotise pas, quel que soit son niveau de revenus.
- "C'est un élément qui peut être pris en considération. C'est pour ça quand on fait la CSG, on prend en considération cette situation, ou quand on met en place une cotisation sur les revenus du patrimoine, on prend en considération cette situation de déséquilibre."
Il y a une partie quand même du Parti socialiste qui partage pas exactement cette analyse. Le premier qui avait ouvert le feu, c'était M. Rocard ; après, on a vu J. Attali, J. Delors, M. Charasse, qui ont été un peu renvoyés sévèrement dans les cordes. Vous pensez vraiment que s'ils disent tout ça, c'est parce que ce sont des vieux papis dépassés, comme dit je sais plus qui chez vous ?
- "Non, d'abord, je vais faire une distinction. Pour M. Charasse, aider le gouvernement Raffarin, ça devient une habitude. Il a déjà voté l'augmentation de 70 % des salaires des ministres. C'est une désagréable habitude pour nous, nous lui disons franchement. Maintenant, pour un certain nombre d'amis, ils ont le droit de donner leur sentiment, mais on a le droit aussi de prendre en considération ce qui s'est passé dans ce pays. Et les mêmes qui, aujourd'hui, soutiennent cette réforme, étaient ceux qui nous disaient qu'on ne prenait pas en considération la situation des gens en difficultés. Il y a eu le 21 avril et le Parti socialiste a pris en considération cette situation nouvelle. Nous sommes aux côtés des gens qui souffrent, parce qu'avoir une petite retraite, ça devient une souffrance. Nous essayons de trouver des solutions nouvelles et on nous dit maintenant : "Ah, ben non, vous n'avez pas le droit !". Vous me voyez, moi, aller dire aujourd'hui, dans mes cités, que la réforme Raffarin est une bonne réforme ?!"
Oui, mais dans vos cités, ils ne sont pas tous dans la Fonction publique...
- "Non, ils sont dans le privé et ils nous disent aussi qu'ils ne veulent pas arriver à une situation où ils cotiseront"
Est-ce que ce n'est pas la clientèle de la Fonction publique que vous défendez essentiellement aujourd'hui, quand même ?
- "Mais non, parce que les gens du privé ont très bien compris que quand le public recule, après ça sera leur tour, c'est un système inévitable. Je ne me vois donc pas aujourd'hui aller dire que la gauche et la droite, c'est la même chose sur les retraites. Non. Nous nous ne disons pas qu'il ne faut pas de réforme. Est-ce qu'on est venu vous dire il ne faut pas de réforme, tout va bien ? Non !
Non, parce que le système ne fonctionne plus, il y a un moment où tout le monde dit il faut une réforme et personne ne veut faire d'efforts !
- "Donc, nous disons qu'il faut une réforme, mais il faut que cette réforme soit juste, qu'elle soit négociée, que l'effort soit réparti équitablement et que ce ne soit pas toujours les mêmes qui payent. Or là, dans la réforme qui nous est proposée, ce sont les salariés, point à la ligne, qui contribuent à sauver le système."
Est-ce qu'il faut que le PS se "gauchise" ?
- "Ce n'est pas de se gauchir, c'est prendre en considération la situation d'inégalités qui existent dans la société et apporter des solutions qui recréent de l'égalité."
Je vais la poser différemment. Est-ce que vous reconnaissez, au moins, à Raffarin un mérite : c'est d'avoir lancé le débat sur les retraites ?
- "Non, parce que je pense qu'il l'a mal lancé, parce qu'il a braqué la société..."
Il aurait dû ne rien faire du tout ?
- "Non, il aurait dû prendre le temps de négocier. Combien de temps a duré la négociation ? Même pas 10 heures ! Toutes les organisations syndicales étaient prêtes à bouger. Même celles qui paraissent par exemple les plus crispées, comme Force Ouvrière, puisque c'est ce qu'on nous a dit, étaient prêtes à prendre en considération des discussions sur les cotisations. Tout ça n'a pas été fait, on est passé de manière précipitée. Résultat : il faudra tout reprendre à zéro."
(Source : Premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 juin 2003)