Déclaration de Mme Marie-Josée Roig, ministre de la famille et de l'enfance, sur le rôle des familles dans la prévention des accidents de la route et le soutien aux victimes, et sur les dispositions de la Charte d'accueil des familles des victimes de la violence routière, au Mans le 19 octobre 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Signature de la Charte d'accueil des familles de victimes de la violence routière lors de la visite du Centre hospitalier du Mans, le 19 octobre 2004

Texte intégral

Monsieur le Préfet,
Monsieur le Délégué Interministériel à la Sécurité Routière,
Monsieur le Directeur,
Mesdames et Messieurs les Chefs de service,
Mesdames, Messieurs,
Pour la première fois cette année, le Ministère de la Famille et de l'Enfance s'associe aux manifestations de la Semaine de la Sécurité Routière, qui s'est ouverte le 13 octobre dernier à Paris.
Après le colloque " vivre après l'accident ", nous voici ici, ensemble, au centre hospitalier du Mans qui reçoit de grands accidentés de la route et qui a engagé, depuis maintenant presque six ans, grâce à ses praticiens hospitaliers, une action au long cours de sensibilisation des jeunes contre la violence routière.
Vous le savez, la politique de sécurité routière, chantier prioritaire du Président de la République, mobilise les services de l'Etat, les collectivités territoriales et les associations, depuis maintenant plus de deux ans, tant dans son volet répressif que préventif.
Les sanctions ont été considérablement accrues et elles sont maintenant acceptées, et même considérées comme protectrices par la très grande majorité de nos concitoyens. En atteste la forte baisse du nombre des accidents de la route, même si des efforts restent à faire notamment chez les adolescents.
Mais cette semaine de la sécurité routière veut aussi souligner le rôle que jouent les familles tant en matière de prévention des accidents de la route que de soutien aux victimes.
Je voudrais dans mon propos insister sur deux points :
1 - En complément de l'action des Pouvoirs publics, les familles ont un rôle essentiel en matière de lutte contre la violence routière, notamment par l'entremise des mouvements familiaux.
2 - Lorsqu'elles sont confrontées à la souffrance du handicap ou de la perte d'un être cher, elles sont fragilisées et ont aussi besoin de soutien au sein même des structures de soins : c'est tout l'objet de la charte qui nous réunit aujourd'hui.
1 - La famille, lieu d'apprentissage des responsabilités, est un relais essentiel de la prévention routière
La violence routière est un problème de société qui peut trouver des solutions concrètes dans le rôle que les familles jouent en matière de pédagogie, de responsabilité individuelle, notamment à l'égard des jeunes conducteurs. La conduite accompagnée en est l'exemple le plus concret.
Le comportement des jeunes sur la route, leur rapport aux conduites à risques sont influencés par la façon dont les parents incitent les jeunes à respecter les règles et, plus spécifiquement, à faire l'apprentissage de l'autonomie. Le port du casque pour les adolescents, la conduite sans alcool, le respect des limitations de vitesse relèvent d'abord de la transmission des valeurs de respect de l'autre et de responsabilité.
Pour autant, La violence routière, on le sait, reste la première cause de mortalité chez les 15-24 ans dont les comportements à risques, dans tous les domaines, sont particulièrement accidentogènes. Les accidents de cyclomoteur représentent par exemple 60 % des accidents des 15-17 ans : ils sont à l'origine de 11 000 accidents annuels dont environ 250 morts et 1500 blessés graves. Ceci reste inacceptable.
Mais les parents doivent aussi être attentifs à leurs propres comportements et veiller aussi à la sécurité de ceux dont ils ont la responsabilité, notamment les très jeunes enfants.
Aujourd'hui, le taux d'équipement en sièges auto n'est que de 75 %, avec une protection correcte seulement dans la moitié des cas. C'est dire l'importance d'une forte sensibilisation des parents à renforcer encore les conditions de sécurité des plus petits : attacher les enfants même pour un trajet court et de changer le matériel dès que le poids de l'enfant le justifie doivent devenir des réflexes de base.
J'appelle aussi les jeunes eux-mêmes à s'investir dans l'aide, sous toutes ses formes, aux victimes d'accidents de la route :
- qu'il s'agisse de prendre des responsabilités au sein d'associations luttant contre la violence au volant ;
- ou bien de s'investir massivement dans des actions de formation de secourisme sur " les gestes qui sauvent ". Peut-être d'ailleurs faudrait-il qu'une formation aux premiers gestes de secours soit intégrée dans la formation de toute jeune conducteur, mais c'est à ce stade une simple suggestion que je soumets au délégué interministériel à la sécurité routière.
Voici deux mesures de la conférence de la famille 2004 qui correspondant bien à la fois au besoin des jeunes de s'investir dans des responsabilités effectives et dans des actions de solidarité.
Aujourd'hui, il y a heureusement une prise de conscience collective du caractère inacceptable de la violence routière. Et je voudrais ici souligner le rôle joué par les milieux associatifs, qu'il s'agisse des associations de lutte contre la violence routière, mais aussi des associations familiales qui sont de puissants vecteurs de sensibilisation des familles.
2 - Mais la famille doit aussi être aidée par les structures de soins lorsque l'un de ses membres est victime d'un accident de la route.
Des milliers de personnes de tous âges, victimes de la route deviennent handicapés à vie chaque année.
Les familles, quel que soit l'âge de la victime, ont un rôle essentiel de soutien après l'accident et elles doivent être reconnues pleinement à ce titre.
Une fois passé le choc de l'annonce, l'angoisse à laquelle elles sont confrontées persiste dans les lieux de soins : l'arrivée à l'hôpital, l'attente du diagnostic, l'incertitude et le désarroi face aux conséquences médicales de l'accident, et parfois le handicap qui s'ensuit en sont les temps douloureux.
Dans ces moments, la famille a besoin d'information, d'écoute, de compassion. Elle doit notamment être tenue informée et pouvoir être associée au projet thérapeutique à mettre en place, notamment lorsqu'il s'accompagne d'un transfert, souvent pendant de longs mois, dans un établissement de rééducation.
La famille doit aussi aider à la réinsertion sociale, scolaire ou professionnelle. Fragilisée par cette épreuve, elle doit aussi aider la victime à reconstruire sa vie.
J'ai d'ailleurs l'intention, dans le cadre de l'un des groupes de travail préparatoires de la conférence de la famille pour 2005, d'inclure la thématique de la famille face aux épreuves de la vie, notamment des accidents affectant les membres de la famille. Leurs conséquences sont parfois elles-mêmes destructrices de la cellule familiale.
J'en viens maintenant plus spécifiquement à l'accueil à l'hôpital et à l'accompagnement de la famille des victimes.
C'est l'une des déclinaisons de la politique d'humanisation des structures de soins, à laquelle les Pouvoirs publics se sont attachés depuis de nombreuses années.
Ainsi, une Charte d'accueil des familles de victimes de la violence routière a été élaborée conjointement en 2003 par les ministères chargés de la santé et de la famille : cette charte est à la fois un support d'informations pratiques pour les familles et un soutien face à des situations qui, souvent, les plongent dans le désarroi.
Mais c'est surtout l'engagement pris par les professionnels et les établissements de santé de traiter les familles avec le maximum de tact et de respect, dans des situations particulièrement angoissantes, parfois dramatiques.
Destinée aux professionnels, cette Charte contient des recommandations de bonnes pratiques pour :
- l'annonce de l'accident, de l'hospitalisation ou du décès de la victime à sa famille
Nous savons, par les témoignages des familles, que les conditions de l'annonce initiale et celles du premier entretien médical ont une grande influence pour la suite de la vie des proches.
- l'accueil des familles dans un local dédié à cet effet, confortable et apaisant, l'accueil des familles par une personne ayant cette mission particulière dès leur arrivée
Les familles doivent ainsi pouvoir identifier l'intervenant assurant la liaison permanente avec l'équipe soignante.
- la délivrance d'une information personnalisée continue des familles, expliquant avec des mots simples, le diagnostic, les soins, le cas échéant le pronostic, donnée par le médecin ou l'infirmier, si possible ensemble. Le médecin de famille peut servir de médiateur entre l'équipe soignante et la famille, si elle le souhaite
- la formation de tous les personnels, médicaux, sociaux et administratifs de l'hôpital, à l'accueil des familles de victimes, notamment pour renforcer leurs capacités de soutien et d'accompagnement psychologique
Par ailleurs, outre les professionnels formés et, naturellement, en premier lieu, les psychologues, je voudrais souligner aussi le rôle important que jouent les bénévoles, auprès des familles, qu'ils soient engagés ou non dans des associations de lutte contre la violence routière. Dûment formés à des situations de souffrance, ils renforcent encore l'approche humaine indispensable dans ces moments d'émotion et de souffrance extrêmes.
Je me réjouis que le Centre Hospitalier du Mans s'engage dans cette démarche et je souhaite vivement que tous les établissements de santé s'approprient ce document, afin d'améliorer encore davantage la qualité de l'accueil offert aux familles.
Je vous remercie.

(Source http://www.famille.gouv.fr, le 19 octobre 2004)