Déclaration de Mme Marie-Josée Roig, ministre d el famille et de l'enfance, sur le projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux, au Sénat le 19 mai 2004.

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Circonstance : Examen du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux au Sénat le 19 mai 2004

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je suis heureuse d'exposer devant vous aujourd'hui les grandes lignes du projet de loi relatif aux assistants maternels et aux assistants familiaux.
Vous connaissez parfaitement, chacune et chacun d'entre vous, ces métiers dont l'utilité sociale est unanimement reconnue, qu'il s'agisse de l'accueil des enfants dont les parents travaillent dans la journée, ou de l'accueil permanent d'enfants confrontés à des difficultés sociales et placés à titre permanent, généralement par le service de l'aide sociale à l'enfance.
A ce stade, quelques chiffres suffisent à prendre la mesure de cette activité : ce sont environ 740 000 enfants de moins de six ans, dont près de 500 000 de moins de trois ans, qui sont aujourd'hui accueillis par près de 300 000 assistantes maternelles à titre non permanent. C'est plus du double par rapport à 1992, date de la dernière réforme de leur statut.
Et cette forme d'accueil est devenue indispensable dans notre société où, parmi les enfants de moins de six ans, près de six sur dix vivent dans une famille où les deux parents travaillent.
Dans le champ de la protection de l'enfance, 65 000 enfants étaient accueillis, en 2002, par environ 42 000 assistantes maternelles à titre permanent. Celles-ci demeurent le mode d'accueil privilégié des enfants séparés de leur famille, puisqu'elles représentent 55 % de l'ensemble des mesures d'hébergement.
Je voudrais aussi replacer ce projet de loi dans le cadre de la politique volontariste destinée à améliorer la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle que mène le Gouvernement depuis maintenant deux ans.
Cette politique repose sur deux piliers :
- Premier pilier : améliorer l'accès des familles aux différents modes de garde, notamment aux modes de garde individuelle, dont les familles à bas et moyens revenus étaient de fait exclues : c'est le sens de la création au 1er janvier 2004 du complément de libre choix du mode de garde de la PAJE (prestation d'accueil du jeune enfant).
Cette prestation revalorise très fortement les montants d'aide accordés aux parents qui ont recours à une assistante maternelle et permet de faire converger la participation des familles vers un taux d'effort de l'ordre de 12 % de leurs revenus, à savoir celui correspondant à l'accueil en crèche. Cela signifie concrètement, par rapport au dispositif antérieur, une aide supplémentaire de la branche famille, pour les parents ayant un revenu inférieur à 3 Smic, de 150 euros par mois, soit une augmentation de 75 %.
Cette mesure est en cours de mise en uvre. Elle témoigne de la volonté du Gouvernement de mettre en uvre, concrètement, un principe d'équité sociale pour l'ensemble des familles face aux charges générées par les contraintes matérielles de la garde des enfants.
- Deuxième pilier : améliorer et promouvoir la qualité de l'accueil des enfants et l'intégration professionnelle des accueillants.
Bien sûr, l'offre collective de garde est fondamentale et je veux rappeler ici que je viens de lancer, avec la Caisse nationale d'allocations familiales, un nouveau plan crèches financé à hauteur de 200 millions d'euros qui permettra la création de 20 000 places supplémentaires d'ici 2007.
Mais le Gouvernement a souhaité donner aussi un nouveau souffle à l'offre individuelle de garde, en permettant son développement et en améliorant la qualité de la prestation. C'est dans ce contexte que doivent être replacées les mesures que vous allez examiner.
Les qualités de coeur, de générosité, de patience des assistants maternels à l'endroit de tout-petits accueillis dans la journée ou d'enfants - souvent difficiles - intégrés durablement dans la famille sont en effet essentielles. Et je veux ici rendre solennellement hommage à ces femmes - car ce sont presque toujours des femmes - qui assument le rôle trop souvent méconnu de continuer l'amour des parents quand ceux-ci sont provisoirement absents ou d'élargir leur propre famille aux enfants qui n'en ont plus.
Mais je souhaite aussi que les assistants maternels soient reconnus comme des professionnels à part entière qui, aussi, délivrent un service dont la qualité doit être assurée, au bénéfice des enfants accueillis. Car c'est aussi la condition du développement de ces métiers.
Cette meilleure reconnaissance comporte deux volets :
- D'abord la professionnalisation des métiers de la garde individuelle, ce qui suppose de bien distinguer celui d'assistant maternel stricto sensu (qui correspond à la garde non permanente) de celui d'assistant familial (qui correspond à la garde permanente) d'enfants l'accès au métier d'assistant maternel. Ce qui suppose notamment de préciser les modalités d'agrément et de renforcer les exigences de formation.
- Ensuite, en revalorisant le statut des assistants maternels ; il s'agit de faire converger les droits de ces professionnels vers le droit commun chaque fois que c'est possible, tout en maintenant le caractère dérogatoire de certaines dispositions chaque fois que la spécificité du métier le rend nécessaire. De nouveaux droits leur sont ainsi reconnus, notamment en matière de rémunération du temps de travail, de congés ou de protection en cas de licenciement.
Telle est donc la logique de ce projet de loi dont je souligne qu'il a fait l'objet d'une concertation longue et approfondie et qu'il s'inspire largement des conclusions des groupes de travail réunis par les services du ministère chargé de la famille en 2002.
Ces propositions ont été discutées avec une vingtaine d'organisations syndicales ou professionnelles représentant les assistantes maternelles et leurs employeurs, la caisse nationale des allocations familiales (CNAF), l'Assemblée des Départements de France et l'Association des Maires de France.
Ce projet a, par ailleurs, reçu un avis favorable du conseil d'administration de la CNAF, ainsi que des Conseils supérieurs des fonctions publiques territoriale et hospitalière.
1 - D'abord améliorer la qualité de l'offre de garde et répondre aux besoins par des compétences mieux définies.
Actuellement l'accueil du jeune enfant ne fait pas l'objet d'une reconnaissance distincte en tant que métier, selon qu'il concerne les jeunes enfants de parents qui travaillent et gardés à la journée, ou bien qu'il constitue un mode de suppléance parentale permanente pour des jeunes en difficulté, confiés à des familles par l'aide sociale à l'enfance.
Or, il s'agit bien de deux métiers fondamentalement différents.
Désormais l'appellation d'"assistant maternel" sera réservée aux professionnels de l'accueil non permanent qui contribuent au premier chef aux politiques locales d'accueil des jeunes enfants, à côté des structures d'accueil collectif (crèches, haltes-garderies, jardins d'enfants), de la garde au domicile des parents, des centres de loisirs maternels et des accueils périscolaires après la classe.
Et sera désormais attribuée l'appellation d'"assistant familial" aux professionnels qui ont pour fonction d'intégrer, de façon permanente, dans leur propre famille, des enfants ou des adolescents - parfois au-delà de leur majorité - qui ont été séparés de leur famille pour des raisons graves, parfois de maltraitance ou parce que les parents sont dans l'incapacité de s'acquitter de leurs responsabilités éducatives. L'assistant familial doit alors répondre aux besoins psychiques, éducatifs ou sanitaires de ces jeunes. Il s'agit donc bien d'un autre métier, exercé dans le cadre d'une équipe pluridisciplinaire associant éducateurs, assistants sociaux, et psychologues.
Mieux distinguer ces deux professions répond d'ailleurs à une demande forte des professionnels concernés. Cela permet également de prendre les dispositions adaptées pour chacun de ces métiers en vue d'améliorer la qualité de l'accueil des enfants.
C'est le premier objectif de ce projet de loi.
Cette qualité de service sera améliorée par un renforcement spécifique sur quatre points essentiels :
- l'agrément des professionnels ;
- le renforcement des contrôles sur les familles d'accueil mais aussi de l'accompagnement et du soutien sur lesquels elles doivent pouvoir compter - notamment pour les assistants familiaux - en raison de la difficulté des enfants accueillis ;
- les modalités et le niveau de leur formation initiale et continue ;
- l'amélioration des relations entre les parents - s'agissant des assistants maternels - et des professionnels de l'enfance.
Premier point : l'agrément.
C'est la porte d'entrée aux métiers d'assistant maternel et d'assistant familial. L'attribution de l'agrément par le Président du Conseil général doit constituer un cahier des charges précis et adapté à chaque profession.
Pour les assistants maternels, l'agrément doit constituer, aux yeux des parents, qui confient, souvent avec inquiétude, et à un âge très jeune, ce qu'ils ont de plus précieux, une garantie de sérieux et de transparence.
De la même manière que les crèches doivent depuis 2000 élaborer un projet éducatif, les candidats au métier d'assistant maternel seront agréés aussi au vu de leurs capacités éducatives. C'est une précision utile de la loi.
Cet agrément continuera à être limité dans le temps, d'une durée qui sera fixée réglementairement à 5 ans. Il définira précisément le nombre et l'âge des mineurs que l'assistant maternel sera autorisé à accueillir.
Le Gouvernement souhaite limiter à trois le nombre d'enfants pris en charge simultanément, et je verrai, à la lumière des propositions d'amendements que vous ferez, le cas échéant, sur ce point, s'il y a lieu de fixer une limite supplémentaire : car il faut éviter que ce mode de garde ne se transforme, pour les assistants maternels, en une forme de babby-sitting à temps très partiel, ou, pour les assistants familiaux, en un simple mode de surveillance, ce qui n'est pas l'objet de ces métiers.
Je précise que les assistants familiaux feront l'objet d'un agrément plafonnant également le nombre d'enfants accueillis. En ce qui les concerne, l'agrément sera à durée non limitée dans la mesure où ils auront satisfait à un certificat d'aptitude prévu à l'issue de leur formation initiale.
Pour ces deux professions, le Président du Conseil général aura cependant la possibilité de déroger à cette règle lorsqu'il lui apparaîtra qu'elle doit être adaptée à des besoins spécifiques, notamment l'accueil de fratries ou l'accueil intermittent d'enfants confiés à d'autres assistants familiaux pendant les périodes de congés.
J'ajoute enfin que les conditions d'octroi de l'agrément seront rendues plus objectives : un formulaire unique sera défini au niveau national, afin d'harmoniser les exigences des départements en direction des candidats et de limiter l'intrusion dans la vie privée des personnes sans lien avec les exigences de la profession.
Deuxième point : un meilleur contrôle des conditions de prise en charge et un meilleur accompagnement des accueillants.
Agréés suivant des critères plus adaptés à leur responsabilité réelle, tant les assistants maternels que les assistants familiaux devront aussi être mieux contrôlés.
Le projet de loi pose le principe d'un contrôle administratif par les conseils généraux des assistants maternels dont les modalités seront définies par voie réglementaire. Il s'agira par exemple de l'obligation pour l'assistant maternel d'envoyer certaines informations au service de protection maternelle et infantile, ou de tenir à jour des planning d'accueil pouvant être mis à sa disposition.
Il en va de même pour les assistants familiaux à qui les enfants sont généralement confiés par le service départemental de l'aide sociale à l'enfance, pour s'assurer des conditions matérielles et morales du placement de ce mineur. Le projet de service de l'aide sociale à l'enfance qu'il vous est proposé d'inscrire dans la loi permettra de préciser les conditions du placement familial et d'intégration des assistants familiaux dans l'équipe chargée du suivi du jeune.
Troisième point : l'amélioration de la formation.
C'est un élément essentiel de la revalorisation de ces professions.
Plus personne ne considère qu'être mère suffise à conférer les compétences nécessaires pour assurer l'accueil, les soins et les activités éducatives ou d'éveil des enfants d'autres parents. L'instauration d'une obligation de formation de 60 heures dans un délai de cinq ans suivant l'attribution de l'agrément avait constitué, en 1992, une avancée certaine.
Le projet de loi pose le principe de l'obligation de formation des assistantes maternelles pour partie avant tout accueil d'enfant. C'était une attente légitime des parents et c'est un besoin lui aussi légitimement exprimé des assistants maternels.
Pour les nouveaux professionnels, il est en effet indispensable que cette formation vienne plus tôt dans l'exercice de leur profession. Les premiers enfants accueillis auront ainsi les mêmes garanties que les autres en termes de sécurité et de qualité minimales d'accueil.
Des travaux sont en cours sous l'égide du ministère de l'éducation nationale afin d'articuler cette formation obligatoire, dont la durée sera par ailleurs augmentée, avec un " CAP petite enfance " réformé.
Mieux formés pour mieux accueillir, les assistants maternels pourront ainsi être aussi mieux reconnus et évoluer plus tard plus facilement, s'ils le souhaitent, vers d'autres qualifications et secteurs d'activité, comme l'accueil collectif ou l'école maternelle.
Je souligne également que, depuis l'adoption définitive il y a quelques semaines de la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, les assistants maternels employés par des particuliers ont désormais accès à la formation professionnelle continue, alors qu'ils en étaient préalablement exclus. Par ailleurs, l'ouverture progressive des diplômes et des qualifications à la validation des acquis de l'expérience, favoriseront la professionnalisation en cours d'activité de cette profession.
En ce qui concerne les assistants familiaux, ils ont actuellement l'obligation de suivre une formation minimale d'une durée de 120 heures dans les 3 ans suivant le premier contrat de travail consécutif à l'agrément.
Désormais, ils bénéficieront d'une formation en deux temps, plus cohérente avec les fortes exigences des enfants souvent psychologiquement déstabilisés qu'ils accueillent :
- dans les 2 mois qui précèdent l'accueil du premier enfant au titre du premier contrat de travail, ils bénéficieront d'un stage préparatoire à l'accueil d'enfants, organisé par leur employeur : ils seront indemnisés pendant ce temps obligatoire de formation ;
- ensuite, dans les 3 ans après le premier contrat de travail, ils devront suivre une formation adaptée aux besoins spécifiques des enfants accueillis. Cette formation devrait déboucher sur un diplôme accessible soit par les épreuves de certification soit, notamment pour les personnes en activité depuis longtemps et ayant suivi la formation de 120 heures instituée par le loi de 1992, par la voie de la validation des acquis de l'expérience.
Là encore, il me paraît absolument indispensable que les accueillants de jeunes ayant vécu des situations difficiles soient pleinement formés à l'exercice au quotidien de leurs responsabilités de parents.
Quatrième point : réguler les relations des assistants maternels et familiaux avec leurs employeurs.
L'activité au quotidien des assistants maternels confrontera nécessairement à des difficultés imprévues, à des interrogations sur leur pratiques et dans leur relations avec les familles. Les commissions départementales de l'accueil des jeunes enfants (CDAJE), qui réunissent l'ensemble des acteurs concernés, ont tout à fait vocation à réfléchir et organiser les modalités d'accompagnement des assistants maternels, auquel peuvent contribuer aussi bien les relais assistants maternels (les RAM), que les services de protection maternelle et infantile, les communes, les associations. Tout assistant maternel, où qu'il se trouve, doit pouvoir bénéficier du soutien d'une équipe, sans jugement a priori dans son travail.
Toutes ces mesures ont donc pour objet de donner des garanties supplémentaires aux parents qui font appel à une offre familiale de garde ainsi qu'aux départements qui ont la responsabilité de trouver des familles d'accueil pour des enfants ou adolescents en souffrance. Elles ont aussi pour objet de donner un cadre plus professionnel à une activité caractérisée par les exigences croissantes des parents et les besoins de plus en plus complexes des enfants accueillis.
Le deuxième volet de ce projet de loi est d'apporter parallèlement à ces professionnels des améliorations à leurs conditions matérielles en dépit du caractère très particulier de leur activité.
2 - Donner un cadre juridique et statutaire à la fois souple et plus protecteur aux assistants maternels et familiaux.
Le droit du travail qui leur est applicable est aujourd'hui largement dérogatoire au droit commun.
Le Gouvernement est animé par le souci d'apporter des améliorations concrètes à leur situation professionnelle sans pour autant porter atteinte au maintien de la spécificité de ces formes d'accueil. Elles donnent lieu à des dispositions qui peuvent se traduire, soit par un rapprochement avec le droit commun, chaque fois que c'est pertinent, soit par des dérogations au droit commun lorsque celui-ci est insuffisant.
S'agissant des assistants maternels, les améliorations du droit du travail portent sur trois axes : le contrat de travail; la rémunération ; la durée du travail et les congés.
Premier axe : L'obligation d'un contrat de travail écrit.
C'est une nouveauté. Pour la première fois, les assistants maternels disposeront d'un document juridiquement opposable, précisant leurs droits et devoirs respectifs vis à vis des employeurs. Cette formalisation sera un instrument de transparence qui permettra de mieux prévenir d'éventuels conflits.
Ses caractéristiques minimales seront fixées par décret.
S'agissant des assistants maternels et de leurs employeurs lorsqu'il s'agit de particuliers, le projet de loi prévoit également qu'en cas de rupture du contrat de travail par l'une ou l'autre partie, la durée du préavis sera augmentée. S'agissant des assistants maternels des crèches familiales, la procédure de licenciement sera calquée sur celle du droit commun.
Par ailleurs, en cas de retrait de l'agrément et, pour les assistantes maternelles employées par des particuliers, en cas de suspension de celui-ci, le contrat de travail sera rompu, ce qui permettra de mettre fin à des situations de non droit.
Deuxième axe : sécuriser la rémunération.
De ce point de vue, le projet de loi apporte aussi des améliorations substantielles.
Les assistants maternels souffrent aujourd'hui de ne pas avoir de visibilité sur leur niveau de rémunération : actuellement une rémunération n'est due que lorsque l'enfant est effectivement présent, et non pas dès que l'assistant maternel s'est rendu disponible pour l'accueillir. Elle n'existe pas lorsque l'enfant est absent pour raison médicale ; elle est réduite de moitié lorsque l'absence est occasionnée par un autre motif. Avec le projet de loi, toutes les heures prévues sont rémunérées, quel que soit le motif de l'absence : seule l'absence pour raison médicale est rémunérée à mi-taux. Il s'ensuit que la rémunération des assistants maternels sera beaucoup plus régulière qu'aujourd'hui.
La rémunération des assistants maternels se trouvera également définie en référence à une unité de temps au lieu de la journée, de manière à pouvoir facilement, dans un second temps et par voie réglementaire, évoluer d'une rémunération journalière à une rémunération horaire qui assurera une plus juste reconnaissance du travail effectif.
J'en profite d'ailleurs pour rappeler que les assistants maternels bénéficient d'une hausse mécanique de plus de 11 % de celle-ci entre juillet 2003 et juillet 2005, au titre de l'harmonisation des SMIC.
S'agissant des assistants familiaux, la structure de leur rémunération est redéfinie, afin qu'elle ne soit plus uniquement liée au nombre d'enfants accueillis. Il s'agit d'une évolution importante dans l'évolution du métier. La rémunération sera en effet construite en deux parties :
- d'une part la rémunération de la fonction globale d'accueil, c'est-à-dire de la disponibilité requise indépendamment du nombre et des jours de présence des enfants ;
- d'autre part, la rémunération liée à l'accueil de chaque enfant.
Une autre disposition entièrement nouvelle, applicable aux assistants familiaux et aux assistants maternels employés par des personnes morales, vise à résoudre le devenir du contrat de travail en cas de suspension d'agrément. En pratique, un certain nombre de suspensions d'agrément interviennent dans des situations où sont suspectés, mais non avérés, des faits de maltraitance à l'égard des enfants accueillis.
Est ainsi créé un régime de suspension des fonctions d'accueil pendant le temps de la suspension d'agrément, pour une durée maximale de quatre mois. Pendant cette période, le professionnel percevra un minimum de rémunération. Il est ainsi mis fin à un vide juridique qui conduisait à une absence totale de protection des salariés dans des situations humainement très difficiles.
Dans le droit applicable aux assistants familiaux, existe également un dispositif dit "d'attente" permettant de maintenir le contrat de travail d'un assistant familial qui n'accueille plus d'enfants moyennant le versement d'une indemnité et dans l'attente de la réalisation d'un nouveau placement. Ce dispositif permet de tenir compte du caractère aléatoire des besoins d'accueil d'enfants et de la nécessité de respecter une adéquation entre le profil d'un enfant et celui de l'assistant familial qui le prendra en charge.
L'organisation actuelle de ce dispositif est source de précarité pour les assistants familiaux, en raison en particulier du faible niveau auquel est fixé le plancher de l'indemnité ; il est prévu de revaloriser ce plancher de manière à inciter les employeurs à mieux réguler l'activité de leurs assistants familiaux. Les conditions de licenciement à l'issue de la période d'attente, prolongée d'un mois pour mieux répondre aux aléas des besoins d'accueil, sont également clarifiées.
Troisième axe de l'amélioration des conditions de travail des assistants maternels : celui du temps de travail.
Aujourd'hui, les assistants maternels ne sont soumis à aucune disposition limitant leur durée de travail, et leur garantissant un repos hebdomadaire et quotidien. Or, si les caractéristiques de leur activité et les besoins auxquels elles répondent rendent impossible un alignement complet sur le droit commun du travail, elles ne justifient pas pour autant l'absence de toute règle, source d'abus possibles de certains employeurs et de conflits avec les assistants maternels.
Le présent projet de loi permet de faire bénéficier les assistants maternels, comme tous les salariés, de durées minimales de repos quotidien et hebdomadaire, celles du droit commun du travail, ainsi que d'une durée maximale du travail ne pouvant être dépassée sans leur consentement.
Ainsi les assistants maternels pourront bénéficier d'un repos quotidien de onze heures par jour et d'un repos hebdomadaire de trente-cinq heures, comme le prévoit le droit commun. Par ailleurs, ils ne pourront être employés plus de quarante-huit heures par semaine sans leur accord. Ces dispositions permettront de concilier la nécessité d'une amplitude élargie pour répondre aux besoins d'accueil des parents et celle de protéger les professionnels et les enfants qui leurs sont confiés du risque d'une exigence d'horaires d'accueil excessifs.
Ces seuils et les modalités retenus tiennent compte des obligations européennes et du souci de préserver à ce mode la souplesse qui lui vaut la faveur des parents. Je ne suis pas opposée, sur le principe, à ce que puisse être utilisée une formule plus souple de comptabilisation du temps de travail, notamment sur la base d'une annualisation du nombre d'heures, si les parties contractantes s'accordent pour préférer un dispositif de ce type.
S'agissant des congés, il a fallu au contraire s'éloigner du droit commun pour tenir compte de la situation spécifique dans laquelle des assistants maternels sont salariés de plusieurs particuliers. Désormais, à défaut d'accord avec les parents, les assistants maternels pourront fixer eux-mêmes la date de leurs congés. Là encore, au-delà de l'amélioration légitime des conditions de vie des professionnels, ce temps de repos ne peut qu'être favorable à une meilleure qualité d'accueil.
Le financement du remplacement des assistants maternels employés par des personnes morales et des assistants familiaux sera assuré en cas de mandat syndical ou de représentant du personnel. Enfin, une disposition commune aux deux professions leur rend applicables les textes du code du travail sur la protection contre le harcèlement et les discriminations.
Le droit aux congés des assistants familiaux est lui aussi modifié afin de leur permettre de bénéficier d'un minimum effectif de jours de congé annuel et de journées à répartir dans l'année, ce qui n'est pas actuellement le cas. Obligation sera donc faite aux employeurs d'organiser des accueils de remplacement pour les enfants, pendant les temps correspondant à des congés de leurs assistants familiaux, et ce en veillant à ce que ces solutions de remplacement soient de qualité.
Ces importantes améliorations proposées devraient par ailleurs être complétées, pour les assistants maternelles employés par des particuliers, par de nouveaux droits dans le cadre d'une convention collective nationale en cours de négociation par les partenaires sociaux. J'ajoute que cette convention collective pourra également comporter des dispositions supérieures à ce que la loi prévoit de faire fixer par voie réglementaire.
Seront en effet créés un fonds commun d'aide au fonctionnement du paritarisme visant à assurer la gestion de la future convention collective des assistants maternelles et ses modalités d'évolution et un fonds de prévoyance santé et accidents du travail. Le premier sera financé par une contribution des employeurs et le second par une cotisation pesant à la fois sur les employeurs et les assistants maternels.
La création des fonds relève entièrement de la future négociation collective.
Vous le voyez, Mesdames et Messieurs les sénateurs, le Gouvernement a cherché à apporter des réponses visibles, concrètes et justes, aux attentes des professionnels et aussi des parents qui financent les prestations des assistantes maternelles. Il l'a fait aussi avec le souci du réalisme : celui de ne pas alourdir exagérément les coûts pour les familles ou les conseils généraux. C'est notamment la raison pour laquelle il a renvoyé à des textes réglementaires certaines dispositions comme les rémunérations plancher des assistants maternels et familiaux.
Bien entendu, cette réforme a un coût et il est légitime que chacun y prenne sa part.
S'agissant de la formation continue des assistantes maternelles employées par des particuliers, elle sera financée par une contribution des particuliers employeurs. La charge de cette contribution, dont le coût est évalué entre 4 et 5 millions d'euros en année pleine, sera intégralement pris en charge par la branche famille de la sécurité sociale, dans le cadre de l'aide à la famille pour l'emploi d'une assistante maternelle agréée (AFEAMA) et du complément mode de garde de la prestation d'accueil du jeune enfant (PAJE).
Ceux qui sont employés par des personnes morales occupant moins de 10 salariés vont bénéficier, grâce à la réforme effectuée par la loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie, de la formation professionnelle continue. La contribution due par les employeurs sera partiellement prise en charge par la CNAF sur son fonds d'action sociale et par les communes en tant qu'employeur ou financeur de ces crèches.
Toutes ces nouvelles cotisations seront prises en charge intégralement par l'AFEAMA et la PAJE, dès 2004 pour les 2 premières, en 2005 pour les cotisation prévoyance. Au total, la branche famille participera à hauteur de plus de 50 millions d'euros au financement de ces mesures.
Les départements aussi devront faire un effort, s'agissant notamment des mesures visant à améliorer la formation des assistants maternels et familiaux. Cependant, les dispositions transitoires prévues permettent d'alléger les obligations de formation pour les professionnels déjà agréés : ainsi, pour les assistants maternels agréés avant la mise en oeuvre du décret fixant les nouvelles modalités de formation, les conseils généraux devront assurer seulement 60 heures de formation dans un délai de cinq ans suivant l'attribution de l'agrément dont 20 au cours des deux premières années ; quant aux assistants familiaux en cours de formation à la date de publication de la loi, ils seront simplement tenus de suivre une formation minimale de 120 heures.
Voilà pour les principaux axes de ce projet de loi très attendu par les professionnels concernés et dont je pense qu'il marquera, après les lois de 1977 et de 1992, une étape très importante dans la promotion des métiers de l'enfance.
En donnant à ces professions la reconnaissance et la crédibilité qu'elles méritent, vous ne ferez pas seulement droit à de légitimes attentes ; vous allez également contribuer à structurer un secteur de services devenu indispensable pour un grand nombre de jeunes couples.
Je vous remercie.



(source http://www.famille.gouv.fr, le 24 mai 2004)