Déclarations de Mme Catherine Vautrin, secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances, sur la prévention de la délinquance notamment la place de la politique de la ville et le traitement de la délinquance juvénile, Paris le 15 avril 2004 et Saumur le 29.

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Circonstance : Forum du Conseil national des villes à Paris le 15 avril 2004 et à Saumur le 29 avril 2004

Texte intégral

Madame et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Maires,
Monsieur le Procureur Général,
Mon équipe de la Délégation Interministérielle à la Ville,
Mesdames et Messieurs,
Introduction : la prévention de la délinquance, une grande cause au service de la cohésion Sociale
C'est une question importante dont vous avez allez avoir à débattre tout au long de cette rencontre organisée par le CNV en lien avec l'AMF, l'association des maires des grandes villes de France, l'association des maires de villes et banlieues de France et le forum français pour la sécurité urbaine, avec le concours de la DIV.
Cette journée d'échanges à laquelle Jean-Louis BORLOO m'a demandé de le représenter pour en ouvrir les travaux permettra d'élaborer de nouveaux éléments de réponse concrets contre la délinquance, qui est l'un des ferments d'une " désintégration républicaine " dont le Ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion Sociale a très récemment évoqué le risque lancinant pour la société française.
Je sais que cette réunion a été précédée par des ateliers de travail thématiques qui ont permis de confronter et rapprocher les points de vue. Je suivrai avec beaucoup d'attention le fruit de vos débats et réfléchirai sur vos propositions.
En ma qualité de Secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances en charge notamment de la politique de la ville, sous l'autorité de Jean-Louis Borloo, je me réjouis de la tenue de ce débat sur les stratégies locales en matière de prévention de la délinquance et sur l'évolution des moyens qui doivent lui être consacrés.
La nécessité d'une mission globale, laissant sa place à une analyse approfondie des déterminants sociaux
Combat permanent (et de longue haleine !) conjuguant la main tendue, la vision globale et la force de la loi, la prévention de la délinquance est l'une de mes priorités.
Nous savons que si l'occurrence des faits violents doit être réprimée - car il en va de la cohésion nationale et de la justice sociale dans ses déterminants les plus élémentaires -, c'est d'abord à la source, très en amont, que nous devons agir. C'est le domaine de la prévention de la délinquance, qui agit sur le long terme et travaille sur l'environnement et les déterminants sociaux.
Les responsabilités ministérielles élargies de Jean-Louis Borloo lui confèrent, à lui comme aux membres du Gouvernement qui l'accompagnent dans sa mission, une puissance d'action redoublée afin de mobiliser au mieux tous les acteurs de la prévention de la délinquance.
La conduite coordonnée des politiques de l'emploi, du travail, du logement, de la lutte contre l'exclusion, de l'insertion professionnelle des jeunes et enfin de l'intégration et de la Ville, politique que j'ai l'honneur de conduire, sous son autorité, en tant que Secrétaire d'Etat en charge de la politique de la ville, permettra de mettre en oeuvre cette politique globale et de long terme que nous appelons de nos voeux pour renforcer les dispositifs en faveur de la prévention de la délinquance, laquelle se nourrit de façon cumulative du non-emploi, de la précarité, du délitement du lien familial, de la perte des valeurs et de la rupture avec l'institution scolaire.
Il faut tarir à la source les causes multiples et complexes de la délinquance.
La place de la politique de la ville dans la prévention de la délinquance
Il faut promouvoir aussi efficacement que possible la prévention ciblée et la prévention précoce (à l'exemple de l'expérience " mission possible " dans le XIXe arrondissement à Paris), la veille éducative, le soutien à la parentalité, la médiation sociale, l'action des travailleurs sociaux dans les commissariats ou encore les projets individualisés de réinsertion, qui sont autant d'axes nourriciers d'une politique de la ville innovante et humaine. C'est dire que les responsables de la politique de la ville et du lien social auront un rôle essentiel dans la préparation des textes comme dans la mise en oeuvre des actions qui en découleront.
Si la violence et la délinquance ne sont pas - loin s'en faut - des phénomènes exclusivement urbains, il n'en reste pas moins que la ville moderne en subit la concentration maximale.
Preuve en est que les principaux crédits d'Etat spécialement dédiés à la prévention de la délinquance le sont au titre du Fonds interministériel à la Ville (FIV).
Plus que jamais, il importe de nouer un partenariat, une véritable symbiose entre les forces de sécurité, les élus locaux et les acteurs du " social " et de l' " humain ". L'action des acteurs publics dans ce domaine doit obéir, dans le respect des attributions et des méthodes de chacun, aux principes de transversalité, d'échanges de savoir-faire et de mutualisation des compétences et des moyens.
La ville, terrain privilégié de la délinquance
Le monde urbain, en particulier, doit renouer avec la notion " d'urbanité " à laquelle il semble être devenu parfois si étranger malgré l'homonymie. Urbanisme doit rimer avec humanisme. La politique de la ville doit s'employer sans relâche à faire prévaloir les relations sociales de bon voisinage sur le repli sur soi et à développer la mixité sociale contre toutes les formes de ségrégation (spatiale, économique, sociale ou culturelle). Les pouvoirs publics doivent enfin d'autant plus activement lutter contre la délinquance et contre tout ce qui en favorise la survenance, la délinquance n'est au fond que l'expression emblématique et tour à tour la cause et la conséquence de la déliquescence des règles sociales collectives.
Et c'est au premier chef en milieu urbain que nous devons agir pour garantir à chacun sa tranquillité et celle de ses proches.
Car la ville, je le répète, cristallise le problème de l'insécurité, comme l'écrivait d'ailleurs Jean-Louis BORLOO dans l'ouvrage récemment édité par la DIV : Politique de la Ville et prévention de la délinquance : " Si les problèmes d'insécurité concernent l'ensemble du territoire national, les actes de délinquance et les atteintes à la tranquillité publique accentuent le sentiment d'abandon de la population des zones urbaines sensibles, souvent fragilisée et exposée à une insécurité économique et sociale ".
Les maires, pivots et animateurs du partenariat local
Les nombreux maires ici présents savent mieux que quiconque l'importance d'une action de proximité et de long terme pour prévenir la délinquance. S'il est acquis que la commune est la cellule de base de la démocratie, les maires sont devenus les pivots et les animateurs, en lien avec les représentants de l'Etat et les acteurs spécialisés (bailleurs, transporteurs, associations d'insertion, services de médiation, représentants des habitants ) de la prévention de la délinquance. Votre rôle dans ce domaine, mesdames et messieurs les maires, est irremplaçable, notamment au travers des Conseils Locaux de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD) mis en place par le décret du 17 juillet 2002. Je crois au pragmatisme et à l'efficacité des approches locales au travers d'une contractualisation active et continue entre l'ensemble des acteurs de la prévention au plan local.
Vous avez, dans ce cadre, mis en oeuvre des initiatives souvent originales et prometteuses pour la prévention de la délinquance. Je pense à certaines démarches très ciblées telles que la création des cafés des parents dans des établissements scolaires, de chantiers d'insertion pour les jeunes, d'actions pédagogiques dans les quartiers (bus de la science), des programmes coordonnés de prévention de la toxicomanie, etc. Les exemples ne manquent pas de mesures particulièrement bienvenues qui ont donné, au cours de ces dernières années, un nouveau contenu et un nouvel espoir à la politique active de prévention de la délinquance.
Dans ce domaine, vous conviendrez que ce qui importe au plus haut point, c'est de s'attaquer à la source, en s'attachant sur le long terme, à traiter globalement l'environnement urbain et social de nos jeunes.
Du même coup, la prévention doit s'adresser de façon particulièrement privilégiée au public des très jeunes.
Une priorité : traiter la délinquance juvénile
Certains très jeunes enfants scolarisés sont en proie, du fait d'une socialisation très précoce, à des traumatismes psychiques qui, à mesure qu'ils grandissent, s'expriment de façon violente. Une scolarisation inadaptée des tous petits explique en partie dans bien des cas, à côté du décrochage scolaire qui concerne un trop grand nombre d'adolescents, la survenance de comportements violents et de conduites marginales.
C'est pourquoi je pense, comme de nombreux représentants du corps médical et de la communauté éducative, que de nouveaux dispositifs doivent être rapidement mis en place, soit pour favoriser un meilleur accueil à l'école des tous petits (surtout lorsqu'ils ont une double culture), soit pour les prendre en charge par une montée en puissance des accompagnements périscolaires. Le développement des structures d'accueil (crèches communales, crèches d'entreprise, crèches inter-entreprise, jardins d'enfants, écoles-relais), l'institution de formations dédiées à la petite enfance (développement et professionnalisation du métier d'assistante maternelle), la création de conseillers d'éducation dans le primaire, la définition d'une politique ambitieuse de l'adolescence intégrant pleinement la question de la prévention de la délinquance spécifique à cette classe d'âge, la multiplication des " maisons d'adolescents " sont autant d'orientations auxquelles il convient de réfléchir sans délai.
Victor Hugo disait : " Celui qui ouvre une école ferme une prison ". L'égalité des chances, non seulement proclamée dans son principe mais aussi et surtout garantie dans les faits, est la meilleure école de prévention de la délinquance. Et l'institution qui a vocation, en lien étroit avec les familles, à instituer l'humanité en l'homme, à savoir l'école de la République, est la première matrice capable d'endiguer la survenance de toutes les formes de délinquance, à la condition expresse qu'elle ne reproduise pas en son sein les dérives qui affectent le corps social (violence scolaire, racket ).
Telles sont quelques-unes des réflexions que m'inspire le sujet de votre colloque, que j'ai donc grand plaisir à ouvrir.
Valoriser les métiers de la prévention
De nombreuses pistes s'offrent à nous, dont vous allez avoir à débattre. Je pense en premier lieu à la mise en réseau des professionnels de la prévention et à la valorisation des métiers relatifs à la prévention.
Parce qu'ils exercent une activité difficile, parce qu'ils poursuivent une mission d'intérêt général essentielle, parce que l'environnement social dans lequel ils évoluent exige un grand sens de l'écoute et du dialogue, une profonde connaissance des publics pris en charge et des dispositifs d'accompagnement, du courage et de la persévérance, les professionnels de la prévention méritent la pleine reconnaissance des pouvoirs publics.
Croyez que je réfléchis à leurs conditions de travail, à renforcer leurs moyens d'action.
Autres pistes d'action
Je réfléchis aussi à l'établissement d'un nouveau partenariat entre les maires et les Conseils généraux au titre de leurs compétences sociales (notamment l'aide sociale à l'enfance et la prévention spécialisée), mais aussi au développement des politiques d'aide aux victimes ou d'implication des habitants, sans oublier la question, à laquelle nous serons particulièrement attentifs, des moyens financiers nécessaires pour que les acteurs de la prévention mènent à bien leurs missions.
Réaffirmer la volonté du Gouvernement d'amplifier la politique de prévention
Un vaste chantier s'ouvre devant nous. Je sais votre détermination à faire reculer la délinquance dans nos quartiers et à définir, de concert avec l'Etat, une politique globale soucieuse de faire une juste place à une prévention éclairée, résolue, autant que généreuse dans ses axes d'application. Vous savez pouvoir compter sur l'Etat pour mener à bien, avec vous, cette entreprise dont le succès décidera en partie de la pérennité du lien social dans notre pays.
Dans cette perspective, le plan national de cohésion sociale que Jean-Louis BORLOO rendra public dans les prochaines semaines ne manquera pas de prendre pleinement en compte la préoccupation qui fonde le thème du colloque de ce jour, organisé en vue de l'adoption d'une plate-forme nationale pour la prévention de la délinquance.
Je vous remercie de votre attention et souhaite un plein succès à vos travaux.
(source http://www.ville.gouv.fr, le 25 mai 2004)
Jeudi 29 et vendredi 30 avril 2004 - Saumur
Madame et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Maires,
Monsieur le Procureur Général,
Mon équipe de la Délégation Interministérielle à la Ville,
Mesdames et Messieurs,
Introduction : la prévention de la délinquance, une grande cause au service de la cohésion Sociale
C'est une question importante dont vous avez allez avoir à débattre tout au long de cette rencontre organisée par le CNV en lien avec l'AMF, l'association des maires des grandes villes de France, l'association des maires de villes et banlieues de France et le forum français pour la sécurité urbaine, avec le concours de la DIV.
Cette journée d'échanges à laquelle Jean-Louis BORLOO m'a demandé de le représenter pour en ouvrir les travaux permettra d'élaborer de nouveaux éléments de réponse concrets contre la délinquance, qui est l'un des ferments d'une " désintégration républicaine " dont le Ministre de l'Emploi, du Travail et de la Cohésion Sociale a très récemment évoqué le risque lancinant pour la société française.
Je sais que cette réunion a été précédée par des ateliers de travail thématiques qui ont permis de confronter et rapprocher les points de vue. Je suivrai avec beaucoup d'attention le fruit de vos débats et réfléchirai sur vos propositions.
En ma qualité de Secrétaire d'Etat à l'intégration et à l'égalité des chances en charge notamment de la politique de la ville, sous l'autorité de Jean-Louis Borloo, je me réjouis de la tenue de ce débat sur les stratégies locales en matière de prévention de la délinquance et sur l'évolution des moyens qui doivent lui être consacrés.
La nécessité d'une mission globale, laissant sa place à une analyse approfondie des déterminants sociaux
Combat permanent (et de longue haleine !) conjugant la main tendue, la vision globale et la force de la loi, la prévention de la délinquance est l'une de mes priorités.
Nous savons que si l'occurrence des faits violents doit être réprimée - car il en va de la cohésion nationale et de la justice sociale dans ses déterminants les plus élémentaires -, c'est d'abord à la source, très en amont, que nous devons agir. C'est le domaine de la prévention de la délinquance, qui agit sur le long terme et travaille sur l'environnement et les déterminants sociaux.
Les responsabilités ministérielles élargies de Jean-Louis Borloo lui confèrent, à lui comme aux membres du Gouvernement qui l'accompagnent dans sa mission, une puissance d'action redoublée afin de mobiliser au mieux tous les acteurs de la prévention de la délinquance.
La conduite coordonnée des politiques de l'emploi, du travail, du logement, de la lutte contre l'exclusion, de l'insertion professionnelle des jeunes et enfin de l'intégration et de la Ville, politique que j'ai l'honneur de conduire, sous son autorité, en tant que Secrétaire d'Etat en charge de la politique de la ville, permettra de mettre en oeuvre cette politique globale et de long terme que nous appelons de nos voeux pour renforcer les dispositifs en faveur de la prévention de la délinquance, laquelle se nourrit de façon cumulative du nonemploi, de la précarité, du délitement du lien familial, de la perte des valeurs et de la rupture avec l'institution scolaire.
Il faut tarir à la source les causes multiples et complexes de la délinquance.
La place de la politique de la ville dans la prévention de la délinquance
Il faut promouvoir aussi efficacement que possible la prévention ciblée et la prévention précoce (à l'exemple de l'expérience " mission possible " dans le XIXème arrondissement à Paris), la veille éducative, le soutien à la parentalité, la médiation sociale, l'action des travailleurs sociaux dans les commissariats ou encore les projets
individualisés de réinsertion, qui sont autant d'axes nourriciers d'une politique de la ville innovante et humaine. C'est dire que les responsables de la politique de la ville et du lien social auront un rôle essentiel dans la préparation des textes comme dans la mise en oeuvre des actions qui en découleront.
Si la violence et la délinquance ne sont pas - loin s'en faut - des phénomènes exclusivement urbains, il n'en reste pas moins que la ville moderne en subit la concentration maximale.
Preuve en est que les principaux crédits d'Etat spécialement dédiés à la prévention de la délinquance le sont au titre du Fonds interministériel à la Ville (FIV).
Plus que jamais, il importe de nouer un partenariat, une véritable symbiose entre les forces de sécurité, les élus locaux et les acteurs du " social " et de l' " humain ". L'action des acteurs publics dans ce domaine doit obéir, dans le respect des attributions et des méthodes de chacun, aux principes de transversalité, d'échanges de savoir-faire et de mutualisation des compétences et des moyens.
La ville, terrain privilégié de la délinquance
Le monde urbain, en particulier, doit renouer avec la notion " d'urbanité " à laquelle il semble être devenu parfois si étranger malgré l'homonymie. Urbanisme doit rimer avec humanisme. La politique de la ville doit s'employer sans relâche à faire prévaloir les relations sociales de bon voisinage sur le repli sur soi et à développer la mixité sociale contre toutes les formes de ségrégation (spatiale, économique, sociale ou culturelle). Les pouvoirs publics doivent enfin d'autant plus activement lutter contre la délinquance et contre tout ce qui en favorise la survenance, la délinquance n'est au fond que l'expression emblématique et tour à tour la cause et la conséquence de la déliquescence des règles sociales collectives.
Et c'est au premier chef en milieu urbain que nous devons agir pour garantir à chacun sa tranquillité et celle de ses proches.
Car la ville, je le répète, cristallise le problème de l'insécurité, comme l'écrivait d'ailleurs Jean-Louis BORLOO dans l'ouvrage récemment édité par la DIV : Politique de la Ville et prévention de la délinquance : " Si les problèmes d'insécurité concernent l'ensemble du territoire national, les actes de délinquance et les atteintes à la tranquillité publique accentuent le sentiment d'abandon de la population des zones urbaines sensibles, souvent fragilisée et exposée à une insécurité économique et sociale ".
Les maires, pivots et animateurs du partenariat local
Les nombreux maires ici présents savent mieux que quiconque l'importance d'une action de proximité et de long terme pour prévenir la délinquance. S'il est acquis que la commune est la cellule de base de la démocratie, les maires sont devenus les pivots et les animateurs, en lien avec les représentants de l'Etat et les acteurs spécialisés (bailleurs, transporteurs, associations d'insertion, services de médiation, représentants des habitants ) de la prévention de la délinquance. Votre rôle dans ce domaine, mesdames et messieurs les maires, est irremplaçable, notamment au travers des Conseils Locaux de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD) mis en place par le décret du 17 juillet 2002. Je crois au pragmatisme et à l'efficacité des approches locales au travers d'une contractualisation active et continue entre l'ensemble des acteurs de la prévention au plan local.
Vous avez, dans ce cadre, mis en oeuvre des initiatives souvent originales et prometteuses pour la prévention de la délinquance. Je pense à certaines démarches très ciblées telles que la création des cafés des parents dans des établissements scolaires, de chantiers d'insertion pour les jeunes, d'actions pédagogiques dans les quartiers (bus de la science), des programmes coordonnés de prévention de la toxicomanie, etc. Les exemples ne manquent pas de mesures particulièrement bienvenues qui ont donné, au cours de ces dernières années, un nouveau contenu et un nouvel espoir à la politique active de prévention de la délinquance.
Dans ce domaine, vous conviendrez que ce qui importe au plus haut point, c'est de s'attaquer à la source, en s'attachant sur le long terme, à traiter globalement l'environnement urbain et social de nos jeunes.
Du même coup, la prévention doit s'adresser de façon particulièrement privilégiée au public des très jeunes.
Une priorité : traiter la délinquance juvénile
Certains très jeunes enfants scolarisés sont en proie, du fait d'une socialisation très précoce, à des traumatismes psychiques qui, à mesure qu'ils grandissent, s'expriment de façon violente. Une scolarisation inadaptée des tous petits explique en partie dans bien des cas, à côté du décrochage scolaire qui concerne un trop grand nombre d'adolescents, la survenance de comportements violents et de conduites marginales.
C'est pourquoi je pense, comme de nombreux représentants du corps médical et de la communauté éducative, que de nouveaux dispositifs doivent être rapidement mis en place, soit pour favoriser un meilleur accueil à l'école des tous petits (surtout lorsqu'ils ont une double culture), soit pour les prendre en charge par une montée en puissance des accompagnements périscolaires. Le développement des structures d'accueil (crèches communales, crèches d'entreprise, crèches inter-entreprise, jardins d'enfants, écoles-relais), l'institution de formations dédiées à la petite enfance (développement et professionnalisation du métier d'assistante maternelle), la création de conseillers d'éducation dans le primaire, la définition d'une politique ambitieuse de l'adolescence intégrant pleinement la question de la prévention de la délinquance spécifique à cette classe d'âge, la multiplication des " maisons d'adolescents " sont autant d'orientations auxquelles il convient de réfléchir sans délai.
Victor Hugo disait : " Celui qui ouvre une école ferme une prison ". L'égalité des chances, non seulement proclamée dans son principe mais aussi et surtout garantie dans les faits, est la meilleure école de prévention de la délinquance. Et l'institution qui a vocation, en lien étroit avec les familles, à instituer l'humanité en l'homme, à savoir l'école de la République, est la première matrice capable d'endiguer la survenance de toutes les formes de délinquance, à la condition expresse qu'elle ne reproduise pas en son sein les dérives qui affectent le corps social (violence scolaire, racket ).
Telles sont quelques-unes des réflexions que m'inspire le sujet de votre colloque, que j'ai donc grand plaisir à ouvrir.
Valoriser les métiers de la prévention
De nombreuses pistes s'offrent à nous, dont vous allez avoir à débattre. Je pense en premier lieu à la mise en réseau des professionnels de la prévention et à la valorisation des métiers relatifs à la prévention.
Parce qu'ils exercent une activité difficile, parce qu'ils poursuivent une mission d'intérêt général essentielle, parce que l'environnement social dans lequel ils évoluent exige un grand sens de l'écoute et du dialogue, une profonde connaissance des publics pris en charge et des dispositifs d'accompagnement, du courage et de la persévérance, les professionnels de la prévention méritent la pleine reconnaissance des pouvoirs publics.
Croyez que je réfléchis à leurs conditions de travail, à renforcer leurs moyens d'action.
Autres pistes d'action
Je réfléchis aussi à l'établissement d'un nouveau partenariat entre les maires et les Conseils généraux au titre de leurs compétences sociales (notamment l'aide sociale à l'enfance et la prévention spécialisée), mais aussi au développement des politiques d'aide aux victimes ou d'implication des habitants, sans oublier la question, à laquelle nous serons particulièrement attentifs, des moyens financiers nécessaires pour que les acteurs de la prévention mènent à bien leurs missions.
Réaffirmer la volonté du Gouvernement d'amplifier la politique de prévention
Un vaste chantier s'ouvre devant nous. Je sais votre détermination à faire reculer la délinquance dans nos quartiers et à définir, de concert avec l'Etat, une politique globale soucieuse de faire une juste place à une prévention éclairée, résolue, autant que généreuse dans ses axes d'application. Vous savez pouvoir compter sur l'Etat pour mener à bien, avec vous, cette entreprise dont le succès décidera en partie de la pérennité du lien social dans notre pays.
Dans cette perspective, le plan national de cohésion sociale que Jean-Louis BORLOO rendra public dans les prochaines semaines ne manquera pas de prendre pleinement en compte la préoccupation qui fonde le thème du colloque de ce jour, organisé en vue de l'adoption d'une plate-forme nationale pour la prévention de la délinquance.
Je vous remercie de votre attention et souhaite un plein succès à vos travaux.
(Source http://www.ville.gouv.fr, le 19 mai 2004)