Texte intégral
Chers Amis,
Entre la gauche française et la gauche italienne, il y a plusieurs points communs. Le premier, c'est que nous sommes les uns et les autres dans l'opposition. Nous ne l'avons pas fait exprès. Nous gagnons, depuis que nous sommes dans l'opposition, toutes les élections. Mais, il ne suffit pas de gagner les élections intermédiaires, il faut gagner l'élection principale ; la vôtre en 2006, la nôtre en 2007.
Et, si nous voulons gagner -pour rester dans le sujet de la Constitution européenne- en Italie, en France et ailleurs, ce n'est pas simplement pour nos propres pays, c'est aussi pour changer l'Europe. L'Europe, son avenir, ne dépendent pas que de la seule Constitution. L'Europe dépend d'abord et avant tout des majorités politiques dans les pays et dans le Parlement européen.
Il faut donc se garder d'une double illusion :
La première serait d'imaginer que la Constitution européenne règlerait par elle-même tous les problèmes de l'Europe. Elle ne peut régler que ce que peut produire une Constitution : des institutions, un fonctionnement démocratique, des règles sociales, des modes de gouvernement économique, la place du citoyen. Voilà ce que peut être une Constitution. Rien de plus, mais c'est déjà beaucoup ;
La deuxième illusion serait de penser qu'il n'y aurait pas besoin de Constitution et que seules compteraient les majorités politiques. Si nous voulons que l'Europe avance, il faut qu'il y ait aussi un socle institutionnel. C'est pourquoi, les socialistes européens ont considéré qu'il fallait d'abord avoir une Constitution et le meilleur texte possible.
Je me réjouis donc de notre initiative qui précède la signature par les Chefs d'Etat et de gouvernement du Traité constitutionnel. Car je considère que le Traité constitutionnel n'appartient pas aux Chefs d'Etat et de gouvernement. C'est le produit d'un travail du Parlement européen, des parlements nationaux, de tous ceux qui -dans la Convention- ont fait le texte, lequel pour l'essentiel va devenir la Constitution européenne.
Il y a un débat dans mon propre parti et qui me place aujourd'hui dans une situation ambiguë. Je suis pour la Constitution, mais vous me regardez presque comme si j'étais le " mouton noir ".
Si pour nous la Constitution européenne est forcément un progrès institutionnel, économique, social, il nous faut convaincre. Convaincre dans nos partis -dans le mien en tout cas et je m'y engage-, mais convaincre aussi les opinions publiques.
N'imaginons pas qu'il suffirait que les parlementaires européens, nationaux, que les partis politiques démocratiques s'emparent de la Constitution pour que, d'un seul coup, elle devienne le texte de référence pour nos concitoyens. Il faut donc d'abord diffuser largement le Traité constitutionnel. Et grâce au débat dans mon propre parti, chaque militant a reçu le Traité constitutionnel. C'est une épreuve pour lui ; il faut le lire, il est long. Et, en même temps, c'est un honneur que de recevoir ce texte, parce que chaque militant -et demain chaque citoyen- pourra savoir quel est le cadre dans lequel l'Europe va maintenant travailler.
Mais, il ne faut pas simplement informer ; il faut expliquer pourquoi, dans ce texte, il y a non seulement les Institutions qui sont, à l'évidence, plus démocratiques que dans les traités antérieurs, mais il y a aussi les valeurs que porte l'Europe, qui ne sont pas que les valeurs des socialistes -ce serait d'ailleurs incroyable ! Cela voudrait dire que nos valeurs auraient emporté l'ensemble de la conviction des Européens Qui peut le croire ! Ce sont des valeurs communes de l'Europe. Et ces valeurs-là, pour partie, proviennent de notre inspiration, notamment le plein emploi, le développement durable, l'égalité homme/femme, la lutte contre les discriminations Je considère que les socialistes se reconnaissent dans ces valeurs-là. Mais, la Constitution européenne, c'est aussi la somme des politiques, la somme des traités antérieurs. Et c'est là qu'il peut y avoir parfois des malentendus.
Beaucoup disent : " Pourquoi les politiques, pourquoi les traités antérieurs sont-ils dans la Constitution ? ". Mais, il ne s'agit de rien d'autre que de la codification de tout ce que nous avons fait ensemble. Pour les socialistes français, ce serait d'ailleurs paradoxal de rejeter ces politiques, de rejeter le titre 3 du Traité, alors même que ce sont les socialistes français avec François Mitterrand, avec Jacques Delors, avec tous les Premiers ministres qui se sont succédés qui ont fait ces traités-là. Ils ne sont pas venus de nos partenaires qui nous les auraient imposé. C'est pourquoi, il faut expliquer combien ces politiques sont utiles aujourd'hui à l'Europe.
Mais, s'il n'y a pas cet effort d'explication, cette exigence d'information et cette capacité à convaincre, alors faisons attention que notre Constitution ne soit pas celle de tous les Européens.
J'ai, dans le débat qui se déroule au sein de mon parti, un atout essentiel qui est de dire à mes camarades socialistes français que cette Constitution est approuvée par tous les socialistes européens, par les 25 partis socialistes européens, par la Confédération Européenne des Syndicats. Comment pourrions-nous alors nous distinguer de tous nos camarades. Certes, nous sommes Français, mais cela ne donne pas tous les droits. Je sens même que beaucoup d'Européens veulent que l'Europe soit européenne et pas forcément française. L'Europe, c'est merveilleux, mais il n'y a pas que les Français ! Les socialistes européens sont formidables, mais il n'y a pas que les socialistes français en leur sein ! Il y en a d'autres et tant mieux, parce que nous ne ferons rien, nous socialistes français, sans les socialistes européens. Nous ne ferons rien, nous la France, sans l'Europe.
C'est pourquoi, si aujourd'hui vous avez besoin des socialistes français pour approuver la Constitution, nous, nous avons besoin des socialistes européens pour la faire vivre.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 2 novembre 2004)
Entre la gauche française et la gauche italienne, il y a plusieurs points communs. Le premier, c'est que nous sommes les uns et les autres dans l'opposition. Nous ne l'avons pas fait exprès. Nous gagnons, depuis que nous sommes dans l'opposition, toutes les élections. Mais, il ne suffit pas de gagner les élections intermédiaires, il faut gagner l'élection principale ; la vôtre en 2006, la nôtre en 2007.
Et, si nous voulons gagner -pour rester dans le sujet de la Constitution européenne- en Italie, en France et ailleurs, ce n'est pas simplement pour nos propres pays, c'est aussi pour changer l'Europe. L'Europe, son avenir, ne dépendent pas que de la seule Constitution. L'Europe dépend d'abord et avant tout des majorités politiques dans les pays et dans le Parlement européen.
Il faut donc se garder d'une double illusion :
La première serait d'imaginer que la Constitution européenne règlerait par elle-même tous les problèmes de l'Europe. Elle ne peut régler que ce que peut produire une Constitution : des institutions, un fonctionnement démocratique, des règles sociales, des modes de gouvernement économique, la place du citoyen. Voilà ce que peut être une Constitution. Rien de plus, mais c'est déjà beaucoup ;
La deuxième illusion serait de penser qu'il n'y aurait pas besoin de Constitution et que seules compteraient les majorités politiques. Si nous voulons que l'Europe avance, il faut qu'il y ait aussi un socle institutionnel. C'est pourquoi, les socialistes européens ont considéré qu'il fallait d'abord avoir une Constitution et le meilleur texte possible.
Je me réjouis donc de notre initiative qui précède la signature par les Chefs d'Etat et de gouvernement du Traité constitutionnel. Car je considère que le Traité constitutionnel n'appartient pas aux Chefs d'Etat et de gouvernement. C'est le produit d'un travail du Parlement européen, des parlements nationaux, de tous ceux qui -dans la Convention- ont fait le texte, lequel pour l'essentiel va devenir la Constitution européenne.
Il y a un débat dans mon propre parti et qui me place aujourd'hui dans une situation ambiguë. Je suis pour la Constitution, mais vous me regardez presque comme si j'étais le " mouton noir ".
Si pour nous la Constitution européenne est forcément un progrès institutionnel, économique, social, il nous faut convaincre. Convaincre dans nos partis -dans le mien en tout cas et je m'y engage-, mais convaincre aussi les opinions publiques.
N'imaginons pas qu'il suffirait que les parlementaires européens, nationaux, que les partis politiques démocratiques s'emparent de la Constitution pour que, d'un seul coup, elle devienne le texte de référence pour nos concitoyens. Il faut donc d'abord diffuser largement le Traité constitutionnel. Et grâce au débat dans mon propre parti, chaque militant a reçu le Traité constitutionnel. C'est une épreuve pour lui ; il faut le lire, il est long. Et, en même temps, c'est un honneur que de recevoir ce texte, parce que chaque militant -et demain chaque citoyen- pourra savoir quel est le cadre dans lequel l'Europe va maintenant travailler.
Mais, il ne faut pas simplement informer ; il faut expliquer pourquoi, dans ce texte, il y a non seulement les Institutions qui sont, à l'évidence, plus démocratiques que dans les traités antérieurs, mais il y a aussi les valeurs que porte l'Europe, qui ne sont pas que les valeurs des socialistes -ce serait d'ailleurs incroyable ! Cela voudrait dire que nos valeurs auraient emporté l'ensemble de la conviction des Européens Qui peut le croire ! Ce sont des valeurs communes de l'Europe. Et ces valeurs-là, pour partie, proviennent de notre inspiration, notamment le plein emploi, le développement durable, l'égalité homme/femme, la lutte contre les discriminations Je considère que les socialistes se reconnaissent dans ces valeurs-là. Mais, la Constitution européenne, c'est aussi la somme des politiques, la somme des traités antérieurs. Et c'est là qu'il peut y avoir parfois des malentendus.
Beaucoup disent : " Pourquoi les politiques, pourquoi les traités antérieurs sont-ils dans la Constitution ? ". Mais, il ne s'agit de rien d'autre que de la codification de tout ce que nous avons fait ensemble. Pour les socialistes français, ce serait d'ailleurs paradoxal de rejeter ces politiques, de rejeter le titre 3 du Traité, alors même que ce sont les socialistes français avec François Mitterrand, avec Jacques Delors, avec tous les Premiers ministres qui se sont succédés qui ont fait ces traités-là. Ils ne sont pas venus de nos partenaires qui nous les auraient imposé. C'est pourquoi, il faut expliquer combien ces politiques sont utiles aujourd'hui à l'Europe.
Mais, s'il n'y a pas cet effort d'explication, cette exigence d'information et cette capacité à convaincre, alors faisons attention que notre Constitution ne soit pas celle de tous les Européens.
J'ai, dans le débat qui se déroule au sein de mon parti, un atout essentiel qui est de dire à mes camarades socialistes français que cette Constitution est approuvée par tous les socialistes européens, par les 25 partis socialistes européens, par la Confédération Européenne des Syndicats. Comment pourrions-nous alors nous distinguer de tous nos camarades. Certes, nous sommes Français, mais cela ne donne pas tous les droits. Je sens même que beaucoup d'Européens veulent que l'Europe soit européenne et pas forcément française. L'Europe, c'est merveilleux, mais il n'y a pas que les Français ! Les socialistes européens sont formidables, mais il n'y a pas que les socialistes français en leur sein ! Il y en a d'autres et tant mieux, parce que nous ne ferons rien, nous socialistes français, sans les socialistes européens. Nous ne ferons rien, nous la France, sans l'Europe.
C'est pourquoi, si aujourd'hui vous avez besoin des socialistes français pour approuver la Constitution, nous, nous avons besoin des socialistes européens pour la faire vivre.
(Source http://www.parti-socialiste.fr, le 2 novembre 2004)