Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
En prenant la parole ce soir, mon intention n'est aucunement de redire avec mes mots ce que Philippe Douste-Blazy a déjà parfaitement exprimé au nom du Gouvernement. Ma première préoccupation est en effet que notre travail puisse avancer efficacement, sans répétition inutile et sans débat stérile, afin que ce projet de loi, en gestation depuis déjà trop longtemps, puisse enfin être adopté.
Je suis donc particulièrement heureux que votre noble assemblée ait pu se mobiliser, malgré un préavis assez bref, pour examiner ce texte. Je tiens à vous en remercier et à rendre hommage au Sénateur Giraud pour son excellent travail en tant que rapporteur.
Le texte qui revient ce soir devant vous vous est déjà familier, même si presque dix-sept mois se sont écoulés depuis sa première lecture au Sénat. Pour ce qui concerne la recherche, la grande majorité des points difficiles a été déjà largement discutée au sein des deux assemblées et il me paraît sage, là aussi dans un souci d'efficacité, de ne pas rouvrir de débat de fond sur les grandes options. La communauté scientifique française, mais aussi la communauté internationale, pour qui la France a toujours joué un rôle de référence en matière d'éthique, ont les yeux fixés sur nous, dans l'attente de l'adoption de ce nouveau cadre législatif, presque dix ans après les premières lois de bioéthique.
Au seuil de cette dernière lecture, je voudrais simplement attirer votre attention sur un point : les recherches sur l'embryon humain et sur les cellules souches dérivées. Votre assemblée avait adopté, à l'issue d'une difficile mais passionnante discussion, la dérogation pour une durée de cinq ans au principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon. Cette décision ardue s'est appuyée notamment sur le constat de l'important potentiel que représentent les cellules souches embryonnaires humaines pour les recherches à visée thérapeutique.
Ces recherches avancent très vite, suscitent des espoirs immenses chez les scientifiques et chez les patients, et il nous est apparu essentiel que la France participe à l'effort international visant à explorer cette voie.
Plusieurs pays européens ont déjà démarré des recherches sur des lignées de cellules souches embryonnaires humaines existantes ou sur des lignées nouvellement crées. Le Royaume-Uni vient d'annoncer le financement public de 57 projets sur les cellules souches pour un montant total de 25 millions d'euros. Le projet le plus important, en termes de budget, est la mise en place du centre de ressources de Sheffield consacré aux cellules souches embryonnaires humaines.
Parallèlement le prochain appel à projets du 6ème PCRD inclut un volet important destiné à ces recherches et sera l'occasion de financer et structurer pour les 3 ou 4 années à venir les meilleurs réseaux d'équipes européennes qui travaillent sur les cellules souches.
Il est important pour l'avenir de notre recherche que la France, qui possède des équipes expertes ayant fait leurs preuves par des travaux sur des cellules souches somatiques et des cellules souches animales, puisse dès cette année participer à part entière à l'effort international déjà largement initié, en Europe et aussi aux États-Unis, au Japon ou en Australie.
Une fois adoptée l'option de la dérogation, pour une durée de cinq ans, au principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon, il me paraît donc maintenant capital de ne pas perdre de temps. C'est pourquoi nous vous proposons, en raison des délais prévisibles pour la mise place de l'Agence de biomédecine, un dispositif transitoire qui permettra très rapidement après la promulgation de la loi de délivrer les premières autorisations d'importation, d'utilisation et de conservation de cellules souches embryonnaires humaines.
Je tiens à souligner que ce dispositif est fidèle aux exigences éthiques prévues dans le cadre de l'Agence de biomédecine. Mais ce dispositif transitoire étant destiné à traiter uniquement les autorisations relatives aux cellules souches embryonnaires humaines, il pourra être institué beaucoup plus vite que l'Agence, dont les compétences sont plus étendues et l'organisation nécessairement plus complexe.
Après plus de deux ans de navette parlementaire et bientôt cinq ans de retard par rapport au calendrier prévu dans la loi en 1994, je crois donc qu'il est indispensable, sans rien renier de notre exigence sur le plan éthique, de nous montrer le plus efficace possible dans la mise en oeuvre des nouvelles possibilités ouvertes par le texte examiné ce soir. Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 11 juin 2004)