Déclaration de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, sur le soutien aux cultures étrangères en France, Paris le 27 septembre 2004.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Troisième édition de la semaine des cultures étrangères à Paris du 27 septembre au 3 octobre 2004

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Directeurs d'instituts et de centres culturels étrangers à Paris,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux d'ouvrir, en votre présence, Monsieur le Ministre, cher Gilberto, la Semaine des cultures étrangères à Paris, qui propose pour la troisième année consécutive, un parcours festif et riche en découvertes parmi les 35 centres et instituts culturels étrangers à Paris.
Je souhaiterais tout d'abord rendre hommage à tous les centres et instituts culturels étrangers qui ont organisé cette fête des étrangers de Paris et de leurs cultures. Je voudrais également souligner le rôle d'initiateur du Centre culturel canadien qui a été à l'origine de ce projet. Ce n'est pas un hasard si nous retrouvons toujours le Canada à nos côtés pour parler de la diversité des cultures. Cette initiative illustre une fois de plus l'attachement de ce grand pays aux valeurs et aux principes du dialogue interculturel et de la diversité culturelle. Le Canada est un exemple de tolérance et d'ouverture à autrui ; dans ce pays où plus de 200 groupes ethniques cohabitent dans le respect de leur identité, la diversité culturelle n'est pas un vain mot. Comme le Canada, la France estime que défendre l'égale dignité des cultures est une condition sine qua non de la paix. Dans ces temps troublés, le respect de l'autre est essentiel ; il est en effet primordial d'apprendre à se connaître et de s'enrichir au contact des autres cultures. Je suis convaincu que la culture est la porte qui ouvre sur la connaissance de l'autre et la connaissance du monde. Aussi ce parcours que vous nous proposez va-t-il une fois encore nous permettre de mieux connaître les centres culturels et instituts culturels étrangers à Paris et de découvrir les multiples facettes des diverses cultures qu'ils représentent.
Je tiens à saluer ici le travail accompli par le Forum des instituts culturels étrangers à Paris qui, fort du succès des deux années précédentes, a organisé une nouvelle édition de plus grande ampleur encore. Je suis heureux que le Ministère de la Culture et de la Communication soit associé à cet événement.
Cette Semaine des cultures étrangères, vous avez choisi de la décliner sous le thème de l'étranger dans la ville. L'étranger, les étrangers, c'est vous, représentants de tous ces pays que je suis heureux d'accueillir ici. La ville, comme l'a dit l'historien Emile Temine, c'est par excellence le lieu où l'on vient d'ailleurs.
Grâce à votre initiative, les Parisiens, les Parisiennes sont incités à sortir à votre rencontre, et vous leur donnez rendez-vous autour d'un art venu d'ailleurs, représenté dans toute sa diversité d'expression. Ils vont pouvoir s'émerveiller, rêver, voyager, et porter un regard différent sur l'autre, cet étranger si loin mais si étrangement proche. Ils vont ainsi découvrir l'art dans toute sa diversité d'expression, de la culture traditionnelle à la culture contemporaine, l'art exprimé à travers de multiples identités, du Mexique à la Chine, de Sanaa (Yémen) à Helsinki. Ce thème de l'étranger dans la ville nous est cher car il est au coeur des préoccupations de l'Etat. Face à une tentation communautariste fondée sur le repli identitaire, il est nécessaire de réaffirmer la richesse de l'apport des différentes composantes de notre société. La France est à la fois une terre d'immigration et le pays des droits de l'homme. Elle considère donc comme des valeurs fondamentales la tolérance et la reconnaissance de la diversité culturelle.
C'est pourquoi je suis naturellement attaché à soutenir les cultures étrangères en France et à défendre la diversité culturelle sur la scène internationale.
Le soutien des cultures étrangères en France passe d'abord par l'aide à de nombreux projets et événements culturels internationaux.
La présence à mes côtés de Gilberto Gil, Ministre brésilien de la Culture, me fournit l'excellente occasion d'évoquer la saison culturelle du Brésil, baptisée " Brésil, Brésils ", qui sera organisée à Paris et en région, de mars à décembre 2005. Cette saison du Brésil, dont le mot d'ordre sera " diversité et modernité ", mobilisera les secteurs publics et privés de nos deux pays et permettra de mieux faire connaître la vitalité et la richesse des cultures du Brésil.
Les Français apprécient tout particulièrement les manifestations des cultures étrangères, et font souvent preuve d'enthousiasme quand elles viennent à eux. J'aurai ainsi la grande joie de participer ce soir au Palais de la Découverte à l'inauguration de la Quinzaine culturelle islandaise, " Islande, de glace et de feu ", prévue en France du 27 septembre au 10 octobre prochain.
Cependant, le soutien aux cultures étrangères passe également par l'accueil des artistes et des professionnels de la culture.
L'ouverture aux créateurs du monde entier est l'une des qualités les plus constantes de la culture française. L'un des facteurs principaux du dynamisme et du rayonnement de la culture française, c'est précisément la présence de quelque 25 000 artistes et professionnels de la culture, de nationalité étrangère, qui viennent travailler aujourd'hui dans notre pays. Ces artistes et ces professionnels nous apportent partage et enrichissement ; ils sont pour nous de merveilleux révélateurs, parce que " les yeux de l'étranger voient plus clair ", comme le dit Charles Reade dans " The Cloister and the Hearth ".
Cette tradition vivace de " xénophilie " reflète exactement notre conception de l'ouverture à l'altérité et de la promotion de la diversité culturelle. Cette conception, si fortement ancrée dans notre histoire, et constitutive de notre patrimoine artistique et culturel, trouve aujourd'hui une pertinence et une force particulières. Il nous appartient dès lors de la réaffirmer, de la renforcer et de la promouvoir, tant au niveau européen qu'international.
Pour cette raison, la promotion de la diversité culturelle guidant l'action internationale de ce ministère, notre dispositif d'incitation et d'accueil des artistes et professionnels étrangers en France a été largement conforté.
Deux séries d'actions prioritaires visent d'une part à améliorer les conditions d'accueil et d'exercice en France des artistes et des professionnels étrangers, d'autre part, à accroître et mieux faire connaître notre offre de formation des professionnels étrangers.
Nos établissements publics accueillent désormais des professionnels de la culture étrangers pour des stages de longue durée. La présence des artistes étrangers dans les centres culturels de rencontre a été renforcée.
Enfin, je voudrais tout particulièrement insister sur la promotion de la diversité culturelle sur la scène internationale.
La Semaine des cultures étrangères fait suite, de façon tout à fait symbolique, à la semaine durant laquelle les experts gouvernementaux ont débattu à l'UNESCO de l'avant-projet de convention internationale " sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques ". Il s'agissait là de la première étape de la négociation. Près de 600 délégués représentant plus de 130 pays ont fait le déplacement à Paris pour participer à cette réunion et signifier ainsi l'importance et l'urgence d'une telle convention. Un tel taux de participation est historique.
Il m'a été rapporté que la majorité des Etats membres ont reconnu la qualité du travail réalisé par les experts indépendants en qualifiant leur avant-projet d'excellente base de départ. De ce premier échange de vue gouvernemental s'est dégagé un consensus général sur la nécessité :
- de mieux promouvoir et protéger les expressions culturelles,
- de reconnaître la spécificité des biens et services culturels qui, " parce qu'ils sont porteurs d'identités, de valeurs et de sens, ne doivent pas être considérés comme des marchandises ou des biens de consommation comme les autres ",
- enfin de reconnaître le droit souverain des Etats de mener des politiques culturelles.
Je sais que les débats ont été riches et je partage l'avis de nombreuses délégations qui se sont exprimées pour rappeler la primauté des Droits de l'homme. En effet en aucun cas la promotion des cultures nationales ne saurait justifier une atteinte aux droits et libertés fondamentales.
Cette convention en introduisant la richesse des cultures dans l'ordre juridique international participe du progrès de ces valeurs universelles. Pour qu'elle devienne vraiment cet instrument efficace que nous appelons de nos voeux cette convention ne doit pas se contenter d'ajouter une déclaration de plus sur la diversité culturelle mais doit créer un texte normatif fondateur du dialogue des cultures.
Je me félicite que cet instrument soit élaboré à l'UNESCO, seule organisation des Nations Unies à avoir un mandat culturel. C'est une garantie de l'universalité de la convention.
La négociation se poursuivra l'année prochaine et devrait se conclure, nous le souhaitons tous, par l'adoption de cette convention à la prochaine Conférence générale de l'UNESCO, à l'automne 2005.
L'enjeu est fondamental. C'est pourquoi je serais heureux que vous, Mesdames et Messieurs, chers amis, puissiez continuer de témoigner concrètement de l'importance de la diversité culturelle auprès de vos publics.
La Semaine des cultures étrangères à Paris est par essence une grande fête de la diversité culturelle. Je remercie très sincèrement le FICEP pour son initiative et lui souhaite le meilleur succès pour cette troisième édition.
(Source http://www.culture.gouv.fr, le 28 septembre 2004)