Texte intégral
La mondialisation est de nouveau sous les feux de l'actualité, sur une double scène tout en contraste, constituée à la fois d'une station suisse et de l'ancienne Bombay, deuxième mégalopole au monde en matière de densité urbaine. La mondialisation est un enjeu politique majeur, peut-être même le premier dans les années à venir, par les changements de société qu'elle peut engendrer et les craintes qu'elle peut susciter.
Si les Français ont parfois l'impression de subir une évolution imposée, nous devons les réconcilier avec l'économie de marché. Une mondialisation, humaine et régulée, est nécessaire. C'est aussi une chance pour la France : un emploi sur quatre est lié à l'export et, depuis le traité de Rome, nous sommes devenus le quatrième exportateur mondial. A l'heure où l'emploi est affiché comme priorité nationale au plus haut niveau de l'Etat, il est nécessaire de faire avancer de paire l'économique et le social et ne pas chercher à les opposer.
Le commerce équitable est un premier exemple qui me tient à coeur. Sa finalité est de permettre à des producteurs de pays en développement de vivre décemment de leur travail en vendant leur production à un prix suffisant. Nous travaillons avec les ministères concernés à promouvoir en France ce type de commerce. Le ministère en charge de la Coopération a ainsi débloqué 5,6 millions d'euros jusqu'en 2006 pour soutenir des programmes sur différentes filières, existantes comme le café ou le cacao, mais aussi nouvelles comme le coton. Dans ce domaine, l'information du consommateur est primordiale, d'où la nécessité d'impliquer le secteur de la distribution. La Quinzaine du commerce équitable, début mai, où, pendant deux semaines, seront organisés plusieurs événements en France, sera l'occasion d'expliquer par l'exemple le commerce équitable à nos concitoyens.
La finance solidaire se trouve également à la jonction du social et de l'économie. Elle consiste à prêter de l'argent à des personnes démunies mais porteuses d'un projet, celles-ci ne trouvant pas le financement dans les circuits traditionnels. Cet argent peut provenir d'épargnants désirant investir de façon responsable. L'encours "solidaire" en France, s'il a une progression "à deux chiffres", reste modeste, environ 90 millions d'euros en 2002. Deux statistiques sont cependant intéressantes. Le taux d'incidents de remboursement est très faible et 80 % des entreprises ainsi créées existent après cinq ans, chiffre bien supérieur à la moyenne nationale pour l'ensemble des entreprises.
Ces tendances sont les mêmes au niveau mondial. De tels chiffres n'ont pas laissé indifférents les professionnels du secteur financier. Il suffit de voir comment le micro-crédit se développe dans les pays du Sud. Des institutions comme les Nations unies ou la Banque mondiale conduisent des programmes importants à cet égard.
Mon passé de responsable associatif dans le Nord - Pas-de-Calais m'a convaincue que les bons résultats des projets financés sur le mode solidaire s'expliquent par la volonté de ces entrepreneurs, décuplée par l'envie de s'en sortir et de montrer combien ils sont dignes de confiance. Nous n'avons pas le droit de négliger des possibilités de création d'emplois, ces derniers étant avant tout créés par les entreprises. Et l'économie solidaire est construite sur la base d'activités économiques.
Commerce équitable et finance solidaire sont deux des principaux thèmes de mon déplacement à Mumbai (Bombay). Ce dernier est une occasion d'échanges avec les acteurs concernés, en étant à l'écoute de solutions innovantes venant de la société civile internationale. Les chiffres suivants, impressionnants, ont été maintes fois répétés : la moitié de l'humanité vit avec moins de 2 dollars par jour et plus d'un milliard d'êtres humains n'ont pas accès à l'eau potable. Le moment est venu, et peut-être propice, de porter au niveau des gouvernements le débat sur de nouveaux moyens de financer au plan international la réduction de la pauvreté et la préservation des biens publics globaux. C'est le sens d'une mission en cours, à l'instigation du président de la République. Le premier ministre a par ailleurs confié au sénateur Lepeltier une mission pour étudier la mise en place d'un "observatoire de la mondialisation". Enfin, en vue d'améliorer la coopération internationale en matière d'environnement, nous défendons le projet d'une Organisation des Nations unies pour l'environnement (ONUE).
Nous sommes sortis aujourd'hui du diptyque "Economie-Social". L'avenir appartient peut-être à des entreprises ayant parfaitement intégré leur rôle à jouer et leur place à tenir dans la société. Nous sommes là dans l'essence même du développement durable.
Il n'est pas en effet superflu de rappeler que l'Economie et le Social sont deux des trois "piliers" cités dans la définition du développement durable. Le troisième, l'Environnement, bénéficie à juste titre d'une plus grande notoriété en raison des catastrophes écologiques et sanitaires et des menaces qui pèsent sur la biodiversité et l'avenir de la planète.
Du côté du monde économique, la dynamique de développement durable existe aujourd'hui de façon indéniable. Il faut s'en réjouir et dépasser la thèse simpliste de la récupération. Le développement durable n'est pas une contrainte pour les entreprises, c'est une réalité. Celles qui l'intègrent sont gagnantes économiquement sur le long terme, connaissant mieux la société qui les entoure, maîtrisant leurs dépenses et leurs risques, ayant une meilleure image de marque, motivant leurs salariés, actuels et à venir, autour de valeurs.
Le gouvernement français a, dans sa stratégie nationale de développement durable, adoptée le 3 juin dernier, mis l'accent sur des leviers économiques comme la certification ou les labels. La récente adoption du nouveau Code des marchés publics permettra désormais aux acheteurs d'intégrer pleinement des considérations environnementales dans leurs commandes. Le pilier social du développement durable a dans notre stratégie une importance toute particulière. Nous sommes en ce moment en plein débat européen sur la "responsabilité sociale et environnementale" des entreprises, les conclusions étant attendues avant l'été. Nous nous y attachons à défendre nos valeurs, notamment en matière de gouvernance et de transparence. L'enjeu est d'avoir des référentiels au niveau européen et mondial. L'initiative "Global Compact" de l'ONU peut être une tribune intéressante en raison de la récente adhésion en nombre des entreprises françaises. Enfin, nous prévoyons de mettre en oeuvre pour 2005, en faveur du développement durable, un véritable dispositif incitatif, fiscalité comprise, lisible pour les bénéficiaires. Nous pourrions travailler sur un volet social, comprenant par exemple des mesures en faveur de l'épargne solidaire et de l'investissement socialement responsable.
Le juste équilibre entre les trois piliers du développement durable est sûrement le moyen d'aller de l'avant dans notre société face aux craintes soulevées par la mondialisation, en dépassant tout blocage, au niveau international ou local, et en touchant toutes les générations. En outre, et je le constate tous les jours, une telle approche réussit à fédérer les "acteurs" de notre société : citoyens, collectivités locales, associations, administrations et entreprises.
Un véritable travail de fond a été entrepris depuis plusieurs mois pour sensibiliser nos concitoyens à des problématiques mondiales, comme celles du développement durable. Nous devons répondre au double défi d'expliquer celles-ci continuellement, et non pas seulement lors de grandes conférences mondiales ou suite à des dérèglements climatiques manifestes, et de démontrer comment les réponses passent par l'accumulation d'actions réalisées au quotidien par tous les citoyens de notre planète.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 janvier 2004)
Si les Français ont parfois l'impression de subir une évolution imposée, nous devons les réconcilier avec l'économie de marché. Une mondialisation, humaine et régulée, est nécessaire. C'est aussi une chance pour la France : un emploi sur quatre est lié à l'export et, depuis le traité de Rome, nous sommes devenus le quatrième exportateur mondial. A l'heure où l'emploi est affiché comme priorité nationale au plus haut niveau de l'Etat, il est nécessaire de faire avancer de paire l'économique et le social et ne pas chercher à les opposer.
Le commerce équitable est un premier exemple qui me tient à coeur. Sa finalité est de permettre à des producteurs de pays en développement de vivre décemment de leur travail en vendant leur production à un prix suffisant. Nous travaillons avec les ministères concernés à promouvoir en France ce type de commerce. Le ministère en charge de la Coopération a ainsi débloqué 5,6 millions d'euros jusqu'en 2006 pour soutenir des programmes sur différentes filières, existantes comme le café ou le cacao, mais aussi nouvelles comme le coton. Dans ce domaine, l'information du consommateur est primordiale, d'où la nécessité d'impliquer le secteur de la distribution. La Quinzaine du commerce équitable, début mai, où, pendant deux semaines, seront organisés plusieurs événements en France, sera l'occasion d'expliquer par l'exemple le commerce équitable à nos concitoyens.
La finance solidaire se trouve également à la jonction du social et de l'économie. Elle consiste à prêter de l'argent à des personnes démunies mais porteuses d'un projet, celles-ci ne trouvant pas le financement dans les circuits traditionnels. Cet argent peut provenir d'épargnants désirant investir de façon responsable. L'encours "solidaire" en France, s'il a une progression "à deux chiffres", reste modeste, environ 90 millions d'euros en 2002. Deux statistiques sont cependant intéressantes. Le taux d'incidents de remboursement est très faible et 80 % des entreprises ainsi créées existent après cinq ans, chiffre bien supérieur à la moyenne nationale pour l'ensemble des entreprises.
Ces tendances sont les mêmes au niveau mondial. De tels chiffres n'ont pas laissé indifférents les professionnels du secteur financier. Il suffit de voir comment le micro-crédit se développe dans les pays du Sud. Des institutions comme les Nations unies ou la Banque mondiale conduisent des programmes importants à cet égard.
Mon passé de responsable associatif dans le Nord - Pas-de-Calais m'a convaincue que les bons résultats des projets financés sur le mode solidaire s'expliquent par la volonté de ces entrepreneurs, décuplée par l'envie de s'en sortir et de montrer combien ils sont dignes de confiance. Nous n'avons pas le droit de négliger des possibilités de création d'emplois, ces derniers étant avant tout créés par les entreprises. Et l'économie solidaire est construite sur la base d'activités économiques.
Commerce équitable et finance solidaire sont deux des principaux thèmes de mon déplacement à Mumbai (Bombay). Ce dernier est une occasion d'échanges avec les acteurs concernés, en étant à l'écoute de solutions innovantes venant de la société civile internationale. Les chiffres suivants, impressionnants, ont été maintes fois répétés : la moitié de l'humanité vit avec moins de 2 dollars par jour et plus d'un milliard d'êtres humains n'ont pas accès à l'eau potable. Le moment est venu, et peut-être propice, de porter au niveau des gouvernements le débat sur de nouveaux moyens de financer au plan international la réduction de la pauvreté et la préservation des biens publics globaux. C'est le sens d'une mission en cours, à l'instigation du président de la République. Le premier ministre a par ailleurs confié au sénateur Lepeltier une mission pour étudier la mise en place d'un "observatoire de la mondialisation". Enfin, en vue d'améliorer la coopération internationale en matière d'environnement, nous défendons le projet d'une Organisation des Nations unies pour l'environnement (ONUE).
Nous sommes sortis aujourd'hui du diptyque "Economie-Social". L'avenir appartient peut-être à des entreprises ayant parfaitement intégré leur rôle à jouer et leur place à tenir dans la société. Nous sommes là dans l'essence même du développement durable.
Il n'est pas en effet superflu de rappeler que l'Economie et le Social sont deux des trois "piliers" cités dans la définition du développement durable. Le troisième, l'Environnement, bénéficie à juste titre d'une plus grande notoriété en raison des catastrophes écologiques et sanitaires et des menaces qui pèsent sur la biodiversité et l'avenir de la planète.
Du côté du monde économique, la dynamique de développement durable existe aujourd'hui de façon indéniable. Il faut s'en réjouir et dépasser la thèse simpliste de la récupération. Le développement durable n'est pas une contrainte pour les entreprises, c'est une réalité. Celles qui l'intègrent sont gagnantes économiquement sur le long terme, connaissant mieux la société qui les entoure, maîtrisant leurs dépenses et leurs risques, ayant une meilleure image de marque, motivant leurs salariés, actuels et à venir, autour de valeurs.
Le gouvernement français a, dans sa stratégie nationale de développement durable, adoptée le 3 juin dernier, mis l'accent sur des leviers économiques comme la certification ou les labels. La récente adoption du nouveau Code des marchés publics permettra désormais aux acheteurs d'intégrer pleinement des considérations environnementales dans leurs commandes. Le pilier social du développement durable a dans notre stratégie une importance toute particulière. Nous sommes en ce moment en plein débat européen sur la "responsabilité sociale et environnementale" des entreprises, les conclusions étant attendues avant l'été. Nous nous y attachons à défendre nos valeurs, notamment en matière de gouvernance et de transparence. L'enjeu est d'avoir des référentiels au niveau européen et mondial. L'initiative "Global Compact" de l'ONU peut être une tribune intéressante en raison de la récente adhésion en nombre des entreprises françaises. Enfin, nous prévoyons de mettre en oeuvre pour 2005, en faveur du développement durable, un véritable dispositif incitatif, fiscalité comprise, lisible pour les bénéficiaires. Nous pourrions travailler sur un volet social, comprenant par exemple des mesures en faveur de l'épargne solidaire et de l'investissement socialement responsable.
Le juste équilibre entre les trois piliers du développement durable est sûrement le moyen d'aller de l'avant dans notre société face aux craintes soulevées par la mondialisation, en dépassant tout blocage, au niveau international ou local, et en touchant toutes les générations. En outre, et je le constate tous les jours, une telle approche réussit à fédérer les "acteurs" de notre société : citoyens, collectivités locales, associations, administrations et entreprises.
Un véritable travail de fond a été entrepris depuis plusieurs mois pour sensibiliser nos concitoyens à des problématiques mondiales, comme celles du développement durable. Nous devons répondre au double défi d'expliquer celles-ci continuellement, et non pas seulement lors de grandes conférences mondiales ou suite à des dérèglements climatiques manifestes, et de démontrer comment les réponses passent par l'accumulation d'actions réalisées au quotidien par tous les citoyens de notre planète.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 janvier 2004)