Texte intégral
Un nouveau tournant dans la coopération européenne de défense
Il y a dix ans la défense européenne était, aux yeux du monde, une utopie. Il y a cinq ans, elle était un beau discours. Aujourd'hui, elle est une réalité.
Durant les deux dernières années, des progrès considérables ont permis cette réalisation. Dans un monde en crise, elle agit efficacement parallèlement à la mission de l'OTAN. L'année 2004 aura été marquée par un tournant important dans trois domaines concrets : l'Agence européenne de défense, les groupements tactiques interarmées, et la gendarmerie européenne.
Créée en juillet dernier, l'Agence européenne de défense - qui réunit pour la première fois son comité directeur aujourd'hui à Noordwijk sous la présidence néerlandaise, dans le cadre de la réunion informelle des ministres de la défense de l'Union européenne - a vocation à devenir l'instrument clef de la politique européenne de l'armement, au service de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Tout en étant autonome, l'Agence européenne, dont le chef désigné est le Britannique Nick Witney, sera pleinement intégrée dans le cadre institutionnel de l'UE. La rencontre de Noordwijk permettra d'affiner les contours de l'agence, et de définir son programme de travail.
Nous lui avons fixé comme objectifs, dans les domaines industriel et technologique, de rationaliser nos efforts, de concevoir en commun nos besoins, de conforter la base industrielle en Europe et de préparer l'avenir à travers la recherche. Car l'émergence d'une véritable industrie européenne de défense est aussi une condition de l'autonomie compétitive de l'UE. C'est dans ce sens que nous devons assurer l'adéquation entre les ambitions européennes et les moyens nationaux disponibles. Avec la rencontre d'aujourd'hui, je me réjouis que les conditions soient réunies pour la montée en puissance rapide de l'Agence, laquelle permettra d'harmoniser les besoins des membres de l'UE, en rationalisant leurs achats et en développant encore davantage de projets communs. L'avion de transport A400M est un excellent exemple de ce dont l'Europe est capable.
Le contexte stratégique a beaucoup changé au cours des dernières années. Le besoin s'est fait sentir de disposer d'éléments légers, aptes à être engagés très rapidement en gestion de crise. Fruit d'une initiative lancée en commun avec le Royaume-Uni et l'Allemagne, ces groupements permettront à l'Union européenne de déployer 1 500 soldats en quinze jours sur un théâtre pouvant se situer jusqu'à 5 000 kilomètres. La création d'un réservoir coordonné (" coordinated pool ") devrait ouvrir la voie à une gestion transparente et prévisionnelle des engagements multinationaux pour les trois années à venir. Preuve que l'Europe opérationnelle de la défense est en marche : parmi les Vingt-Cinq, plusieurs pays ont déjà manifesté leur volonté de participer aux GT (" battle groups ") en adaptant leur contribution à leurs capacités. La France sera bien sûr très active dans ce domaine.
Un autre volet important de notre réunion concerne la concrétisation du projet de Force de gendarmerie européenne (FGE). Face à la montée des crises, devant le besoin de passer du militaire au civil, il faut pouvoir disposer d'éléments susceptibles d'intervenir sur l'ensemble du spectre de gestion de crise, de la phase initiale jusqu'à la phase de désengagement, en facilitant le passage de relais des responsabilités vers une autorité civile.
Certains pays, dont la France, disposent d'une force de police dotée d'un statut militaire. J'avais proposé la création à l'échelon européen, en octobre 2003, d'une force de ce type. La quasi-totalité des membres de l'Union s'est déclarée favorable à cette initiative. Nous signerons une déclaration d'intention, donnant le coup d'envoi - avec mes homologues néerlandais, italien, espagnol et portugais - de cette force de gendarmerie européenne. Elle sera composée d'un petit état-major permanent de planification et de conduite implanté à Vincenza (Italie), et d'unités de police à statut militaire. Les premiers éléments d'état-major seront mis en place dès octobre 2004.
L'Agence européenne, les groupements tactiques et la gendarmerie européenne sont des projets forts pour l'Europe de la défense. Toutes ces actions participent de l'approche cohérente et concrète de l'UE. Les avancées de l'Europe de la défense démontrent la volonté des Européens de mieux assumer leurs responsabilités en matière de sécurité. Nous avons désormais à notre disposition une large gamme de moyens pour agir sous des formes diverses : interventions militaires ; missions de police ; assistance via des instruments civils ; aide humanitaire ou encore aide à la reconstruction. Ce savoir-faire de sortie de crise est une caractéristique de l'UE que nous devons continuer à cultiver.
Face à des situations internationales d'instabilité, l'UE comme l'OTAN doivent s'adapter dans la complémentarité de leurs fonctions et de leurs moyens. Comme on le voit actuellement dans les Balkans, en Afrique ou encore en Afghanistan, l'Europe de la défense n'avance pas " contre " l'OTAN mais à ses côtés (y compris dans le domaine opérationnel), dans le cadre d'un partenariat plus équilibré favorisant la pérennité de l'Alliance atlantique. La multiplicité des crises interdit toute idée de concurrence et impose une étroite collaboration entre les deux organisations. En effet, aucune des menaces actuelles ne peut être contrée par des moyens purement militaires. L'Union européenne est à même de répondre à des situations de crise et doit, dès lors, aborder son rapport à l'OTAN de façon décomplexée. C'est en tout cas notre vision à nous, Français.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 20 septembre 2004)
Il y a dix ans la défense européenne était, aux yeux du monde, une utopie. Il y a cinq ans, elle était un beau discours. Aujourd'hui, elle est une réalité.
Durant les deux dernières années, des progrès considérables ont permis cette réalisation. Dans un monde en crise, elle agit efficacement parallèlement à la mission de l'OTAN. L'année 2004 aura été marquée par un tournant important dans trois domaines concrets : l'Agence européenne de défense, les groupements tactiques interarmées, et la gendarmerie européenne.
Créée en juillet dernier, l'Agence européenne de défense - qui réunit pour la première fois son comité directeur aujourd'hui à Noordwijk sous la présidence néerlandaise, dans le cadre de la réunion informelle des ministres de la défense de l'Union européenne - a vocation à devenir l'instrument clef de la politique européenne de l'armement, au service de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Tout en étant autonome, l'Agence européenne, dont le chef désigné est le Britannique Nick Witney, sera pleinement intégrée dans le cadre institutionnel de l'UE. La rencontre de Noordwijk permettra d'affiner les contours de l'agence, et de définir son programme de travail.
Nous lui avons fixé comme objectifs, dans les domaines industriel et technologique, de rationaliser nos efforts, de concevoir en commun nos besoins, de conforter la base industrielle en Europe et de préparer l'avenir à travers la recherche. Car l'émergence d'une véritable industrie européenne de défense est aussi une condition de l'autonomie compétitive de l'UE. C'est dans ce sens que nous devons assurer l'adéquation entre les ambitions européennes et les moyens nationaux disponibles. Avec la rencontre d'aujourd'hui, je me réjouis que les conditions soient réunies pour la montée en puissance rapide de l'Agence, laquelle permettra d'harmoniser les besoins des membres de l'UE, en rationalisant leurs achats et en développant encore davantage de projets communs. L'avion de transport A400M est un excellent exemple de ce dont l'Europe est capable.
Le contexte stratégique a beaucoup changé au cours des dernières années. Le besoin s'est fait sentir de disposer d'éléments légers, aptes à être engagés très rapidement en gestion de crise. Fruit d'une initiative lancée en commun avec le Royaume-Uni et l'Allemagne, ces groupements permettront à l'Union européenne de déployer 1 500 soldats en quinze jours sur un théâtre pouvant se situer jusqu'à 5 000 kilomètres. La création d'un réservoir coordonné (" coordinated pool ") devrait ouvrir la voie à une gestion transparente et prévisionnelle des engagements multinationaux pour les trois années à venir. Preuve que l'Europe opérationnelle de la défense est en marche : parmi les Vingt-Cinq, plusieurs pays ont déjà manifesté leur volonté de participer aux GT (" battle groups ") en adaptant leur contribution à leurs capacités. La France sera bien sûr très active dans ce domaine.
Un autre volet important de notre réunion concerne la concrétisation du projet de Force de gendarmerie européenne (FGE). Face à la montée des crises, devant le besoin de passer du militaire au civil, il faut pouvoir disposer d'éléments susceptibles d'intervenir sur l'ensemble du spectre de gestion de crise, de la phase initiale jusqu'à la phase de désengagement, en facilitant le passage de relais des responsabilités vers une autorité civile.
Certains pays, dont la France, disposent d'une force de police dotée d'un statut militaire. J'avais proposé la création à l'échelon européen, en octobre 2003, d'une force de ce type. La quasi-totalité des membres de l'Union s'est déclarée favorable à cette initiative. Nous signerons une déclaration d'intention, donnant le coup d'envoi - avec mes homologues néerlandais, italien, espagnol et portugais - de cette force de gendarmerie européenne. Elle sera composée d'un petit état-major permanent de planification et de conduite implanté à Vincenza (Italie), et d'unités de police à statut militaire. Les premiers éléments d'état-major seront mis en place dès octobre 2004.
L'Agence européenne, les groupements tactiques et la gendarmerie européenne sont des projets forts pour l'Europe de la défense. Toutes ces actions participent de l'approche cohérente et concrète de l'UE. Les avancées de l'Europe de la défense démontrent la volonté des Européens de mieux assumer leurs responsabilités en matière de sécurité. Nous avons désormais à notre disposition une large gamme de moyens pour agir sous des formes diverses : interventions militaires ; missions de police ; assistance via des instruments civils ; aide humanitaire ou encore aide à la reconstruction. Ce savoir-faire de sortie de crise est une caractéristique de l'UE que nous devons continuer à cultiver.
Face à des situations internationales d'instabilité, l'UE comme l'OTAN doivent s'adapter dans la complémentarité de leurs fonctions et de leurs moyens. Comme on le voit actuellement dans les Balkans, en Afrique ou encore en Afghanistan, l'Europe de la défense n'avance pas " contre " l'OTAN mais à ses côtés (y compris dans le domaine opérationnel), dans le cadre d'un partenariat plus équilibré favorisant la pérennité de l'Alliance atlantique. La multiplicité des crises interdit toute idée de concurrence et impose une étroite collaboration entre les deux organisations. En effet, aucune des menaces actuelles ne peut être contrée par des moyens purement militaires. L'Union européenne est à même de répondre à des situations de crise et doit, dès lors, aborder son rapport à l'OTAN de façon décomplexée. C'est en tout cas notre vision à nous, Français.
(Source http://www.defense.gouv.fr, le 20 septembre 2004)