Texte intégral
Etre capable d'une part de comptabiliser, avec plus de précision et plus de célérité qu'aujourd'hui, les agents publics, et d'autre part d'anticiper l'évolution des emplois et des effectifs dans les fonctions publiques pour en déduire les compétences, et donc les recrutements et les formations dont nous aurons besoin à l'avenir sont deux impératifs qui ont, il faut bien l'avouer, été souvent évoqués dans le passé : les études conduites sur le sujet par les inspections générales, par le commissariat au plan, par la Cour des comptes, sont nombreuses et, pour certaines, déjà anciennes.
Pour autant, force est de constater que nos réalisations dans ce domaine sont faibles, et que les discours ont, trop rarement, été suivis d'effet. Au point que vous seriez fondés à me dire : pourquoi devrions-nous y croire aujourd'hui ?
Je vous répondrai que nous ne pouvons plus aujourd'hui différer la mise sur pied d'une gestion prévisionnelle des emplois dans les fonctions publiques. Nous savons en effet que d'ici à 2012, la moitié des agents publics actuellement en fonction aura quitté le service public. Laisser faire ces départs massifs sans anticiper, c'est courir le risque de voir l'Etat ne plus assurer certaines de ses missions, et donc manquer à son devoir. Et cela, nous ne pouvons pas, en tant que politiques, syndicalistes, directeurs d'administration centrale, le tolérer.
Nous aurons donc, ensemble, la mission d'observer l'emploi public pour anticiper son évolution. J'insiste sur le mot ensemble :
- parce qu'une telle mission nécessite une concertation étroite entre les représentants des administrations et les représentants des agents que sont les organisations syndicales,
- parce que j'ai voulu que cet observatoire soit l'observatoire de tout l'emploi public : l'unité de la fonction publique est pour moi un principe essentiel. En particulier, la gestion de chaque fonction publique n'a pas à être isolée et chacune d'entre-elles a beaucoup à apprendre des expériences et des techniques élaborées par les autres.
1. Votre première mission sera donc d'observer et de recueillir outils et informations
Soyons clairs : la connaissance par les ministères des emplois dont ils disposent effectivement relève aujourd'hui de l'impossible.
On pourrait s'y tromper : au moment du vote de la loi de finances, la présentation des documents budgétaires qui font l'objet d'une approbation par le Parlement est d'une précision très poussée. On connaît, à l'unité près, le nombre d'emplois que le Parlement autorise.
Et pourtant, qui, parmi les directeurs de personnel des ministères, pourrait s'aventurer à préciser, au jour le jour, les effectifs réels présents dans son administration ? Tous les chefs de service déconcentré disposent-ils d'un tableau de bord montrant, sur une base mensuelle, les effectifs réellement employés dans leur service ? Quel ministre de la fonction publique a pu, déjà, faire état d'une connaissance suffisante de l'emploi public dans le débat budgétaire, pour anticiper son évolution dans les lois de finances ?
Dans un rapport de décembre dernier consacré à la fonction publique de l'Etat, la Cour des comptes a montré que l'Etat ne savait pas compter ses agents. Pour diverses raisons : d'abord parce qu'un emploi autorisé par le Parlement est loin de correspondre toujours à une personne réellement employée, ce qui est logique dans la mesure où le travail à temps partiel est une réalité de la fonction publique. De la même façon, une photographie qui serait juste au 1er janvier serait fausse, par nature, dès le 2 janvier. Ensuite parce que les pratiques de recrutements en surnombre rend opaque la gestion de l'autorisation budgétaire. Enfin parce que les procédures qui permettraient aux gestionnaires de personnels de disposer de tableaux de bord fiables sur les recrutements et sur les départs d'agents, sur la gestion du flux d'agents en quelque sorte, n'existent que de façon très limitée.
Le premier des objectifs assignés à l'Observatoire consistera donc à réaliser des études statistiques et prospectives sur l'emploi dans les trois fonctions publiques. Cette fonction statistique est primordiale : connaître les effectifs au delà des documents budgétaires, c'est d'abord une exigence démocratique. Il ne s'agit pas simplement de rendre compte, comme le ferait une entreprise commerciale devant ses actionnaires, de la présentation d'un bilan social. Il s'agit d'alimenter le Parlement en informations pertinentes, claires, lisibles, pour lui permettre de ne pas autoriser de façon aveugle des créations ou des suppressions d'emploi qui n'auraient pas de conséquences sur l'exécution réelle.
On a trop souvent tendance, au sein des administrations comme dans le grand public, à juger de l'action d'un ministre au travers des emplois qu'il parvient à créer lorsque la conjoncture économique le permet ou des emplois qu'il arrive à préserver lorsque l'heure est à des suppressions. Mais qui s'intéresse à l'exécution ? Qui mesure l'application rigoureuse de l'autorisation ? Qui va savoir que l'emploi d'un agent administratif correspond, en fait, à 2 ou 3 effectifs réels ?
En présentant chaque année au Parlement un état statistique annuel des effectifs de la fonction publique de l'Etat, vous éclairerez les assemblées parlementaires dans les choix qu'elles sont amenées à effectuer lors de la discussion des lois de finances. Rendre compte de son administration est une exigence tirée directement de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, texte qui fait partie de notre Constitution. Pour un ministre, rendre compte de sa gestion doit être tout aussi important que défendre un budget : vous contribuerez à cette exigence.
Je souhaite notamment que vous formuliez des propositions pour la mise en place de systèmes d'information permettant d'harmoniser les données recueillies pour chacune des trois fonctions publiques. L'observatoire doit en effet permettre de faire circuler l'information sur les outils, les techniques, les procédures de recensement des effectifs. Certaines administrations ont développé des outils performants. Ils doivent être diffusés, l'observatoire doit servir d'interface et de lieu d'échanges entre les administrations gestionnaires. Il doit également, comme le prévoit le décret, valoriser et diffuser les travaux réalisés en matière d'emploi public pour nourrir des comparaisons internationales.
2. Votre deuxième mission sera d'anticiper et de mettre en place les outils d'une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences
Observer des évolutions et développer des outils statistiques performants et fiables, c'est un objectif déjà ambitieux. Mais ce ne doit pas être un objectif en soi.
Je le disais en introduction, plusieurs travaux récents et moins récents, et en dernière date les rapports CIEUTAT et VALLEMONT, ont démontré la nécessité :
- d'enrichir la pratique d'une gestion strictement statutaire de la fonction publique ;
- d'introduire des outils de gestion prévisionnelle et de gestion des ressources humaines dans les services publics pour, d'une part, résoudre l'équation démographique et l'explosion prévisible des départs à la retraite et, d'autre part, adapter les métiers, les profils et les carrières à l'évolution des champs d'action de l'administration et des besoins des usagers.
La gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) implique deux choses :
Elle implique d'abord de définir une stratégie à moyen-terme sur les missions de l'Etat, sur les politiques publiques mises en uvre et sur les métiers nécessaires pour accomplir ces politiques.
Anticiper ensemble, c'est-à-dire avec les agents comme avec les usagers, les besoins d'une collectivité, d'une administration, d'un service public témoigne non seulement d'une bonne gestion, mais est surtout un exercice essentiel de démocratie au sein des fonctions publiques. Il doit permettre à chaque structure de se livrer à un exercice d'auto-évaluation et de projection dans un futur proche. Il doit conduire chaque administration à s'interroger sur les besoins qu'elle sera amenée à remplir à moyen terme. Il doit permettre à chaque agent de participer à l'exercice d'anticipation de l'avenir de son service.
La gestion prévisionnelle implique aussi de mettre en place des outils de gestion des ressources humaines permettant d'adapter la ressource humaine aux objectifs définis.
Mettre en place ces outils, c'est organiser la gestion des carrières et des parcours pour remplir, en concertation avec les agents, les besoins prévisibles. C'est aussi permettre d'adapter les moyens aux besoins, par les recrutements rendus nécessaires par les départs à la retraite, mais aussi par une plus grande fluidité entre les fonctions publiques et à l'intérieur des administrations.
Les perspectives ouvertes par le dépôt, en juillet dernier, d'une proposition de loi réformant l'ordonnance du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances sont, dans notre réflexion, essentielles.
La proposition de Didier MIGAUD permet en effet d'envisager une gestion par programme de l'autorisation budgétaire, avec des crédits fongibles entre les catégories de dépenses. J'y suis favorable. Elle prévoit également la possibilité d'une gestion pluriannuelle des crédits, y compris pour les dépenses de personnel, permettant ainsi une généralisation de la contractualisation, sur les objectifs et les moyens, entre le ministère des finances et les ministères dépensiers et entre les administrations centrales et les services déconcentrés. Cette souplesse donnée à l'Etat dans la gestion de ses crédits aura comme contrepartie une information accrue du Parlement sur l'exécution de l'autorisation qu'il délivre chaque année au gouvernement. L'effort d'évaluation de l'exécution budgétaire sera renforcé au moment de l'examen de la loi de règlement.
Ainsi que je l'ai indiqué lors de la dernière réunion du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, je réunirai le 2 octobre prochain la commission de modernisation pour discuter de la perspective de cette réforme, dans le cadre de la préparation du comité interministériel pour la réforme de l'Etat du 12 octobre prochain.
Pour mettre en uvre les outils de modernisation de la gestion publique induits par la réforme de l'ordonnance, la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences est un préalable essentiel. Elle constitue un élément fondamental pour que la Parlement puisse, demain, entrer dans une logique pluriannuelle pour ce qui est des emplois. Sans elle, on ne pourrait pas bénéficier de la souplesse apportée par une fongibilité plus grande des crédits budgétaires.
Je sais que de nombreux services publics et de nombreuses collectivités territoriales se sont déjà placées dans de telles perspectives. La convention récente entre le centre national de la fonction publique territoriale et la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales met en perspective l'évolution démographique de plusieurs cadres d'emploi de la fonction publique territoriale : ses résultats seront publiés dans quelques semaines. Au sein du Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale, un groupe de travail conduit une évaluation prospective sur les cadres d'emplois des administrateurs territoriaux. Certaines collectivités, parmi les plus grandes, ont construit des référentiels de métiers. Les collectivités locales plus petites, elles, doivent pouvoir s'appuyer sur les centres de gestion. L'observatoire sera l'outil de mise en réseau de ces connaissances et de ces pratiques.
Au sein des trois fonctions publiques, l'Etat n'est pas nécessairement l'employeur le plus exemplaire. C'est la raison pour laquelle va se mettre en place, conformément au protocole d'accord de juillet 2000 sur la résorption de l'emploi précaire, un groupe de travail permanent sur la gestion prévisionnelle des emplois dans la fonction publique de l'Etat. Ce groupe réunira autour de la direction générale de l'administration et de la fonction publique, des gestionnaires de personnel des ministères et les représentants des organisations syndicales. Il aura pour objectif d'examiner, en lien avec les réflexions menées au sein de l'observatoire , les outils quantitatifs ayant trait à la connaissance, à la prévision et à la gestion à moyen-terme des effectifs et des différentes catégories d'agents. Il devra mettre en commun les techniques actuelles de gestion prévisionnelle pour définir des méthodes communes. Il travaillera en liaison avec le groupe technique de l'observatoire, dont le pilotage est assuré par le DGAFP et le directeur général de l'INSEE. Il s'appuiera sur les expériences de chacun et contribuera à faire progresser les ministères dans les engagements pris lors de l'élaboration, en 1998, des plans pluriannuels de modernisation. Il pourra, dans un second temps, mutualiser les expériences innovantes de gestion des ressources humaines : professionnalisation du recrutement, optimisation du contenu des formations initiales et de la formation continue, développement de la mobilité des agents. Je vous transmettrai dans quelques jours un projet de mandat pour ce groupe.
L'observatoire de l'emploi public fait aujourd'hui ses premiers pas.
Observer pour anticiper : la tâche est incontestablement lourde. Elle ne peut pas être un exercice interne aux administrations et ne doit se concevoir que par une large concertation impliquant les organisations syndicales.
L'implication des agents dans une gestion prospective de l'emploi public est un gage de transparence et de confiance réciproque. C'est dans ce climat de confiance que je vous invite à engager vos travaux.
(Source : http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 20 septembre 2000)
Pour autant, force est de constater que nos réalisations dans ce domaine sont faibles, et que les discours ont, trop rarement, été suivis d'effet. Au point que vous seriez fondés à me dire : pourquoi devrions-nous y croire aujourd'hui ?
Je vous répondrai que nous ne pouvons plus aujourd'hui différer la mise sur pied d'une gestion prévisionnelle des emplois dans les fonctions publiques. Nous savons en effet que d'ici à 2012, la moitié des agents publics actuellement en fonction aura quitté le service public. Laisser faire ces départs massifs sans anticiper, c'est courir le risque de voir l'Etat ne plus assurer certaines de ses missions, et donc manquer à son devoir. Et cela, nous ne pouvons pas, en tant que politiques, syndicalistes, directeurs d'administration centrale, le tolérer.
Nous aurons donc, ensemble, la mission d'observer l'emploi public pour anticiper son évolution. J'insiste sur le mot ensemble :
- parce qu'une telle mission nécessite une concertation étroite entre les représentants des administrations et les représentants des agents que sont les organisations syndicales,
- parce que j'ai voulu que cet observatoire soit l'observatoire de tout l'emploi public : l'unité de la fonction publique est pour moi un principe essentiel. En particulier, la gestion de chaque fonction publique n'a pas à être isolée et chacune d'entre-elles a beaucoup à apprendre des expériences et des techniques élaborées par les autres.
1. Votre première mission sera donc d'observer et de recueillir outils et informations
Soyons clairs : la connaissance par les ministères des emplois dont ils disposent effectivement relève aujourd'hui de l'impossible.
On pourrait s'y tromper : au moment du vote de la loi de finances, la présentation des documents budgétaires qui font l'objet d'une approbation par le Parlement est d'une précision très poussée. On connaît, à l'unité près, le nombre d'emplois que le Parlement autorise.
Et pourtant, qui, parmi les directeurs de personnel des ministères, pourrait s'aventurer à préciser, au jour le jour, les effectifs réels présents dans son administration ? Tous les chefs de service déconcentré disposent-ils d'un tableau de bord montrant, sur une base mensuelle, les effectifs réellement employés dans leur service ? Quel ministre de la fonction publique a pu, déjà, faire état d'une connaissance suffisante de l'emploi public dans le débat budgétaire, pour anticiper son évolution dans les lois de finances ?
Dans un rapport de décembre dernier consacré à la fonction publique de l'Etat, la Cour des comptes a montré que l'Etat ne savait pas compter ses agents. Pour diverses raisons : d'abord parce qu'un emploi autorisé par le Parlement est loin de correspondre toujours à une personne réellement employée, ce qui est logique dans la mesure où le travail à temps partiel est une réalité de la fonction publique. De la même façon, une photographie qui serait juste au 1er janvier serait fausse, par nature, dès le 2 janvier. Ensuite parce que les pratiques de recrutements en surnombre rend opaque la gestion de l'autorisation budgétaire. Enfin parce que les procédures qui permettraient aux gestionnaires de personnels de disposer de tableaux de bord fiables sur les recrutements et sur les départs d'agents, sur la gestion du flux d'agents en quelque sorte, n'existent que de façon très limitée.
Le premier des objectifs assignés à l'Observatoire consistera donc à réaliser des études statistiques et prospectives sur l'emploi dans les trois fonctions publiques. Cette fonction statistique est primordiale : connaître les effectifs au delà des documents budgétaires, c'est d'abord une exigence démocratique. Il ne s'agit pas simplement de rendre compte, comme le ferait une entreprise commerciale devant ses actionnaires, de la présentation d'un bilan social. Il s'agit d'alimenter le Parlement en informations pertinentes, claires, lisibles, pour lui permettre de ne pas autoriser de façon aveugle des créations ou des suppressions d'emploi qui n'auraient pas de conséquences sur l'exécution réelle.
On a trop souvent tendance, au sein des administrations comme dans le grand public, à juger de l'action d'un ministre au travers des emplois qu'il parvient à créer lorsque la conjoncture économique le permet ou des emplois qu'il arrive à préserver lorsque l'heure est à des suppressions. Mais qui s'intéresse à l'exécution ? Qui mesure l'application rigoureuse de l'autorisation ? Qui va savoir que l'emploi d'un agent administratif correspond, en fait, à 2 ou 3 effectifs réels ?
En présentant chaque année au Parlement un état statistique annuel des effectifs de la fonction publique de l'Etat, vous éclairerez les assemblées parlementaires dans les choix qu'elles sont amenées à effectuer lors de la discussion des lois de finances. Rendre compte de son administration est une exigence tirée directement de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, texte qui fait partie de notre Constitution. Pour un ministre, rendre compte de sa gestion doit être tout aussi important que défendre un budget : vous contribuerez à cette exigence.
Je souhaite notamment que vous formuliez des propositions pour la mise en place de systèmes d'information permettant d'harmoniser les données recueillies pour chacune des trois fonctions publiques. L'observatoire doit en effet permettre de faire circuler l'information sur les outils, les techniques, les procédures de recensement des effectifs. Certaines administrations ont développé des outils performants. Ils doivent être diffusés, l'observatoire doit servir d'interface et de lieu d'échanges entre les administrations gestionnaires. Il doit également, comme le prévoit le décret, valoriser et diffuser les travaux réalisés en matière d'emploi public pour nourrir des comparaisons internationales.
2. Votre deuxième mission sera d'anticiper et de mettre en place les outils d'une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences
Observer des évolutions et développer des outils statistiques performants et fiables, c'est un objectif déjà ambitieux. Mais ce ne doit pas être un objectif en soi.
Je le disais en introduction, plusieurs travaux récents et moins récents, et en dernière date les rapports CIEUTAT et VALLEMONT, ont démontré la nécessité :
- d'enrichir la pratique d'une gestion strictement statutaire de la fonction publique ;
- d'introduire des outils de gestion prévisionnelle et de gestion des ressources humaines dans les services publics pour, d'une part, résoudre l'équation démographique et l'explosion prévisible des départs à la retraite et, d'autre part, adapter les métiers, les profils et les carrières à l'évolution des champs d'action de l'administration et des besoins des usagers.
La gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) implique deux choses :
Elle implique d'abord de définir une stratégie à moyen-terme sur les missions de l'Etat, sur les politiques publiques mises en uvre et sur les métiers nécessaires pour accomplir ces politiques.
Anticiper ensemble, c'est-à-dire avec les agents comme avec les usagers, les besoins d'une collectivité, d'une administration, d'un service public témoigne non seulement d'une bonne gestion, mais est surtout un exercice essentiel de démocratie au sein des fonctions publiques. Il doit permettre à chaque structure de se livrer à un exercice d'auto-évaluation et de projection dans un futur proche. Il doit conduire chaque administration à s'interroger sur les besoins qu'elle sera amenée à remplir à moyen terme. Il doit permettre à chaque agent de participer à l'exercice d'anticipation de l'avenir de son service.
La gestion prévisionnelle implique aussi de mettre en place des outils de gestion des ressources humaines permettant d'adapter la ressource humaine aux objectifs définis.
Mettre en place ces outils, c'est organiser la gestion des carrières et des parcours pour remplir, en concertation avec les agents, les besoins prévisibles. C'est aussi permettre d'adapter les moyens aux besoins, par les recrutements rendus nécessaires par les départs à la retraite, mais aussi par une plus grande fluidité entre les fonctions publiques et à l'intérieur des administrations.
Les perspectives ouvertes par le dépôt, en juillet dernier, d'une proposition de loi réformant l'ordonnance du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances sont, dans notre réflexion, essentielles.
La proposition de Didier MIGAUD permet en effet d'envisager une gestion par programme de l'autorisation budgétaire, avec des crédits fongibles entre les catégories de dépenses. J'y suis favorable. Elle prévoit également la possibilité d'une gestion pluriannuelle des crédits, y compris pour les dépenses de personnel, permettant ainsi une généralisation de la contractualisation, sur les objectifs et les moyens, entre le ministère des finances et les ministères dépensiers et entre les administrations centrales et les services déconcentrés. Cette souplesse donnée à l'Etat dans la gestion de ses crédits aura comme contrepartie une information accrue du Parlement sur l'exécution de l'autorisation qu'il délivre chaque année au gouvernement. L'effort d'évaluation de l'exécution budgétaire sera renforcé au moment de l'examen de la loi de règlement.
Ainsi que je l'ai indiqué lors de la dernière réunion du conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, je réunirai le 2 octobre prochain la commission de modernisation pour discuter de la perspective de cette réforme, dans le cadre de la préparation du comité interministériel pour la réforme de l'Etat du 12 octobre prochain.
Pour mettre en uvre les outils de modernisation de la gestion publique induits par la réforme de l'ordonnance, la gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences est un préalable essentiel. Elle constitue un élément fondamental pour que la Parlement puisse, demain, entrer dans une logique pluriannuelle pour ce qui est des emplois. Sans elle, on ne pourrait pas bénéficier de la souplesse apportée par une fongibilité plus grande des crédits budgétaires.
Je sais que de nombreux services publics et de nombreuses collectivités territoriales se sont déjà placées dans de telles perspectives. La convention récente entre le centre national de la fonction publique territoriale et la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales met en perspective l'évolution démographique de plusieurs cadres d'emploi de la fonction publique territoriale : ses résultats seront publiés dans quelques semaines. Au sein du Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale, un groupe de travail conduit une évaluation prospective sur les cadres d'emplois des administrateurs territoriaux. Certaines collectivités, parmi les plus grandes, ont construit des référentiels de métiers. Les collectivités locales plus petites, elles, doivent pouvoir s'appuyer sur les centres de gestion. L'observatoire sera l'outil de mise en réseau de ces connaissances et de ces pratiques.
Au sein des trois fonctions publiques, l'Etat n'est pas nécessairement l'employeur le plus exemplaire. C'est la raison pour laquelle va se mettre en place, conformément au protocole d'accord de juillet 2000 sur la résorption de l'emploi précaire, un groupe de travail permanent sur la gestion prévisionnelle des emplois dans la fonction publique de l'Etat. Ce groupe réunira autour de la direction générale de l'administration et de la fonction publique, des gestionnaires de personnel des ministères et les représentants des organisations syndicales. Il aura pour objectif d'examiner, en lien avec les réflexions menées au sein de l'observatoire , les outils quantitatifs ayant trait à la connaissance, à la prévision et à la gestion à moyen-terme des effectifs et des différentes catégories d'agents. Il devra mettre en commun les techniques actuelles de gestion prévisionnelle pour définir des méthodes communes. Il travaillera en liaison avec le groupe technique de l'observatoire, dont le pilotage est assuré par le DGAFP et le directeur général de l'INSEE. Il s'appuiera sur les expériences de chacun et contribuera à faire progresser les ministères dans les engagements pris lors de l'élaboration, en 1998, des plans pluriannuels de modernisation. Il pourra, dans un second temps, mutualiser les expériences innovantes de gestion des ressources humaines : professionnalisation du recrutement, optimisation du contenu des formations initiales et de la formation continue, développement de la mobilité des agents. Je vous transmettrai dans quelques jours un projet de mandat pour ce groupe.
L'observatoire de l'emploi public fait aujourd'hui ses premiers pas.
Observer pour anticiper : la tâche est incontestablement lourde. Elle ne peut pas être un exercice interne aux administrations et ne doit se concevoir que par une large concertation impliquant les organisations syndicales.
L'implication des agents dans une gestion prospective de l'emploi public est un gage de transparence et de confiance réciproque. C'est dans ce climat de confiance que je vous invite à engager vos travaux.
(Source : http://www.fonction-publique.gouv.fr, le 20 septembre 2000)