Déclaration de M. Jean-François Mattei, ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, sur le regard sur le handicap, la réforme de la loi de 1975 sur le handicap et les droits des personnes handicapées, Paris le 15 décembre 2003.

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Circonstance : Clôture de l'année européenne des personnes handicapées à l'Unesco le 15 décembre 2003

Texte intégral

Mesdames,
Messieurs,
Le message que je viens de lire témoigne de l'intérêt personnel que le Président de la République porte à la cause du handicap, dont il a fait l'un de ses grands chantiers.
Je ne voudrais pas quitter cette tribune sans vous dire à mon tour l'honneur et le plaisir d'être aujourd'hui à vos côtés pour célébrer la clôture de l'Année européenne des personnes handicapées.
Je devrais dire : à nouveau à vos côtés car nous étions déjà ensemble à Rennes, le 3 février, pour l'ouverture française de cette année européenne, sur le thème " Ensemble tout naturellement " .
Tout au long de cette année européenne, nous avons eu pour première ambition de faire en sorte que les personnes handicapées occupent le devant de la scène, qu'elles fassent entendre leur voix et qu'elles fassent valoir leurs intérêts.
J'ai la conviction que notre ambition n'a pas été déçue.
De multiples activités et de multiples évènements ont été organisés.
Une impulsion supplémentaire a été donnée par le Premier Ministre qui a voulu, sur proposition du Comité d'entente, que le handicap soit déclarée cette année " Grande Cause Nationale ".
La réforme de la loi de 1975, conduite par Marie-Thérèse Boisseau, a aussi contribué à mettre les personnes handicapées sur le devant de la scène. Une grande concertation a été engagée au niveau national. Elle a été relayée par une concertation locale, organisée par les Préfets dans chaque département, qui a permis de recueillir la parole du terrain, celle des personnes handicapées elles-mêmes, des associations locales, des citoyens.
La cause du handicap a gagné du terrain cette année.
Le regard sur le handicap change. Lentement, trop lentement certes, le monde du handicap apparaît pour ce qu'il est : un ensemble d'hommes et de femmes qui affrontent nos souffrances communes avec leur souffrance particulière et sont le plus souvent privées des joies que nous pouvons connaître dans notre vie personnelle ou professionnelle.
S'il faut parler de compensation, je dirais que la première des compensations que la société doit aux personnes handicapées c'est la compensation du surcroît de souffrance qu'engendre le regard de la peur, le détournement du regard ou, pire, l'indifférence.
Mesdames, Messieurs,
Avant de céder la parole à Madame Boisseau
je voudrais vous dire dans quel esprit a été conduite la réforme de la loi de 1975. Nous avons voulu tirer toutes les conséquences du principe de non discrimination, assurer à chaque personne handicapée les moyens de l'autonomie dont elle est capable, mobiliser la solidarité nationale pour l'intégration effective des personnes handicapées.
Les personnes handicapées doivent avoir les mêmes droits et les mêmes chances que tout citoyen.
Pour dire les choses de manière un peu solennelle - le lieu et le moment s'y prêtent - je dirai que l'enjeu était de faire de la devise républicaine une devise pour tous :
Liberté !
Le projet de loi pose le principe de l'accessibilité de tous à tout.
? De tous, c'est à dire quel que soit le handicap : physique, mental, sensoriel, psychique.
? A tout, c'est à dire bien sûr, à l'école, à l'emploi mais aussi plus simplement au cadre bâti, aux transports, sans lesquels il n'y pas de liberté de circulation. Dans ce domaine, la France est notoirement en retard sur beaucoup de pays européens.
La liberté, c'est aussi choisir son mode de vie. Non pas d'être enfermé en institution ni même dans l'alternative domicile / établissement, mais trouver la réponse adaptée là où on le souhaite, soit à domicile, soit en établissement. Le projet de loi le permet désormais. D'abord, en associant les personnes à la définition de leurs besoins de compensation . Ensuite, en leur donnant les moyens financiers d'accéder aux aides humaines nécessaires. Enfin, en poursuivant le programme de création de places en établissements.
Egalité !
Il s'agit de l'égalité des droits et des chances. Pour les personnes handicapées, cela signifie être en mesure de faire face aux charges spécifiques engendrées par le handicap.
Au cur du projet de loi, il y a l'organisation du droit à la compensation des conséquences du handicap. Qu'il s'agisse de compenser les charges liées aux besoins en aides humaines, en aides techniques, en aménagement du logement, ou encore de trouver les places nécessaires dans les établissements.
Fraternité !
C'est l'expression employée par le Premier Ministre, dans son discours du 6 novembre, pour donner son sens à la journée de travail supplémentaire. Le Premier Ministre en a appelé à l'engagement personnel et la solidarité de tous les Français. Il a demandé à chaque Français de "donner un peu de soi-même".
Je crois pouvoir dire que le Premier Ministre, a eu une formule juste et certainement fondatrice. Car l'enjeu de notre société devenue trop technique, trop bureaucratique, trop froide est bien d'aller au delà la solidarité purement comptable, faite de transferts sociaux anonymes, pour enclencher une solidarité citoyenne, cette solidarité du corps social vivant une communauté de destin, une communauté de valeurs, une fraternité.
Mesdames, Messieurs
Je vous remercie

(Source http://www.sante.gouv.fr, le 17 décembre 2003)