Point de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur les relations franco-luxembourgeoises et sur la mission de la troïka en Russie, Paris le 8 septembre 1998.

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Circonstance : Entretien de M. Védrine avec M. Jacques Poos, ministre luxembourgeois des affaires étrangères à Paris le 8 septembre 1998

Texte intégral

J'ai été très heureux de recevoir aujourd'hui M. Jacques Poos. Nous avions déjà passé le week-end ensemble pour le Gymnich à Salzbourg où il faisait un temps comparable à celui d'aujourd'hui à Paris. Nous avons parlé de tout, et de façon très efficace. Cela nous a permis en très peu de temps d'aborder tous les sujets parce que nous nous connaissons bien. Nous travaillons en confiance, dans un climat d'amitié et de coopération très concrète. Nous avons déjà eu l'occasion, à maintes reprises, d'examiner les différentes positions de nos pays qui sont très largement concordantes.
Nous avons poursuivi sur un certain nombre de points les discussions européennes qui se mènent dans d'autres enceintes. Nous avons poursuivi les réflexions menées à Salzbourg sur l'amélioration du mode de fonctionnement du Conseil pour traiter des questions européennes. C'est particulièrement important en ce moment où de grands dossiers nous attendent. Nous avons parlé des questions des institutions, de l'Agenda 2000, de l'élargissement. Sur tous ces sujets, nos points de vue sont très largement concordants. Nous avons fait le point de nos relations bilatérales qui sont excellentes malgré deux ou trois problèmes à régler ou à débloquer. Nous avons évoqué aussi quelques autres grands sujets d'actualité comme la Russie. C'était une rencontre essentiellement bilatérale et européenne et je me réjouis une fois encore d'avoir pu accueillir ici Jacques Poos.
Q - De quelle mission sera investie la troïka qui se rend en Russie ?
R - C'est simple, elle va se rendre compte sur place de la situation. Cette troïka va essayer de mieux comprendre, à travers les contacts qu'elle aura avec divers interlocuteurs, même si les prochains responsables gouvernementaux en Russie ne sont pas encore déterminés, quelles sont les grandes lignes de la politique, notamment économique que le gouvernement russe pourra mener. C'est un élément important pour notre analyse, pour celle des ministres des Affaires étrangères, des ministres des Finances, des chefs d'Etat et de gouvernements. Il va permettre de savoir comment et dans quelles conditions, l'Europe pourra poursuivre une aide utile aux vraies transformations que nous souhaitons en Russie, afin que l'Etat puisse jouer son rôle.
Q - L'Europe ou la France envisagent-elles à titre individuel une aide à la Russie ?
R - Le problème ne se pose pas comme cela. Il faut analyser la situation, savoir qui on a en face de nous. Il faut savoir ce qu'est prêt à faire ce nouveau gouvernement quand il sera constitué. C'est à partir de cela que nous aurons un dialogue sérieux avec lui, que ce soit le FMI, les Etats-Unis, l'Union européenne ou chaque pays en particulier.
Nous aurons un dialogue sérieux avec eux parce que nous voulons pouvoir contribuer à accompagner un mouvement de transformation véritable. Ce mouvement de transformation, ce n'est pas simplement des mesures économiques isolées d'un contexte, elles doivent toutes s'appuyer sur la restauration d'un Etat qui puisse remplir ses fonctions, y compris dans le contexte d'une économie de marché à créer. Voilà le sens de cette initiative à ce stade.
Q - Dimanche vous avez souhaité que la Russie se dirige vers une économie sociale de marché, qu'entendez-vous par là ?
R - Ce n'est ni Jacques Poos ni moi en particulier. Vous parlez du communiqué qui a été rendu public après la réunion informelle des quinze ministres des Affaires étrangères à Salzbourg. Nous avons employé cette expression car il nous a semblé adapté dans la situation économique, sociale, politique de la Russie, compte tenu de là d'où elle vient - c'était l'URSS il y a encore peu d'années. Ce concept typiquement européen d'économie sociale de marché était sans doute plus adapté au contexte russe et sans doute un meilleur objectif pour la Russie que certaines autres interprétations de l'économie. Voilà ce que l'on a voulu dire, mais c'est un objectif.
Maintenant, cela nous ramène à la question centrale qui est de savoir par quel cheminement et par quelles étapes les Russes peuvent se diriger dans cette direction et comment nous pouvons les aider utilement à le faire.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 12 octobre 2001)